Skip to main content

Full text of "Bulletin"

See other formats


This  is  a  digital  copy  of  a  book  that  was  preserved  for  générations  on  library  shelves  before  it  was  carefully  scanned  by  Google  as  part  of  a  project 
to  make  the  world's  books  discoverable  online. 

It  has  survived  long  enough  for  the  copyright  to  expire  and  the  book  to  enter  the  public  domain.  A  public  domain  book  is  one  that  was  never  subject 
to  copyright  or  whose  légal  copyright  term  has  expired.  Whether  a  book  is  in  the  public  domain  may  vary  country  to  country.  Public  domain  books 
are  our  gateways  to  the  past,  representing  a  wealth  of  history,  culture  and  knowledge  that 's  often  difficult  to  discover. 

Marks,  notations  and  other  marginalia  présent  in  the  original  volume  will  appear  in  this  file  -  a  reminder  of  this  book' s  long  journey  from  the 
publisher  to  a  library  and  finally  to  y  ou. 

Usage  guidelines 

Google  is  proud  to  partner  with  libraries  to  digitize  public  domain  materials  and  make  them  widely  accessible.  Public  domain  books  belong  to  the 
public  and  we  are  merely  their  custodians.  Nevertheless,  this  work  is  expensive,  so  in  order  to  keep  providing  this  resource,  we  hâve  taken  steps  to 
prevent  abuse  by  commercial  parties,  including  placing  technical  restrictions  on  automated  querying. 

We  also  ask  that  y  ou: 

+  Make  non-commercial  use  of  the  files  We  designed  Google  Book  Search  for  use  by  individuals,  and  we  request  that  you  use  thèse  files  for 
Personal,  non-commercial  purposes. 

+  Refrain  from  automated  querying  Do  not  send  automated  queries  of  any  sort  to  Google's  System:  If  you  are  conducting  research  on  machine 
translation,  optical  character  récognition  or  other  areas  where  access  to  a  large  amount  of  text  is  helpful,  please  contact  us.  We  encourage  the 
use  of  public  domain  materials  for  thèse  purposes  and  may  be  able  to  help. 

+  Maintain  attribution  The  Google  "watermark"  you  see  on  each  file  is  essential  for  informing  people  about  this  project  and  helping  them  find 
additional  materials  through  Google  Book  Search.  Please  do  not  remove  it. 

+  Keep  it  légal  Whatever  your  use,  remember  that  you  are  responsible  for  ensuring  that  what  you  are  doing  is  légal.  Do  not  assume  that  just 
because  we  believe  a  book  is  in  the  public  domain  for  users  in  the  United  States,  that  the  work  is  also  in  the  public  domain  for  users  in  other 
countries.  Whether  a  book  is  still  in  copyright  varies  from  country  to  country,  and  we  can't  offer  guidance  on  whether  any  spécifie  use  of 
any  spécifie  book  is  allowed.  Please  do  not  assume  that  a  book's  appearance  in  Google  Book  Search  means  it  can  be  used  in  any  manner 
any  where  in  the  world.  Copyright  infringement  liability  can  be  quite  severe. 

About  Google  Book  Search 

Google's  mission  is  to  organize  the  world's  information  and  to  make  it  universally  accessible  and  useful.  Google  Book  Search  helps  readers 
discover  the  world's  books  while  helping  authors  and  publishers  reach  new  audiences.  You  can  search  through  the  full  text  of  this  book  on  the  web 


at|http  :  //books  .  google  .  corn/ 


A  propos  de  ce  livre 

Ceci  est  une  copie  numérique  d'un  ouvrage  conservé  depuis  des  générations  dans  les  rayonnages  d'une  bibliothèque  avant  d'être  numérisé  avec 
précaution  par  Google  dans  le  cadre  d'un  projet  visant  à  permettre  aux  internautes  de  découvrir  l'ensemble  du  patrimoine  littéraire  mondial  en 
ligne. 

Ce  livre  étant  relativement  ancien,  il  n'est  plus  protégé  par  la  loi  sur  les  droits  d'auteur  et  appartient  à  présent  au  domaine  public.  L'expression 
"appartenir  au  domaine  public"  signifie  que  le  livre  en  question  n'a  jamais  été  soumis  aux  droits  d'auteur  ou  que  ses  droits  légaux  sont  arrivés  à 
expiration.  Les  conditions  requises  pour  qu'un  livre  tombe  dans  le  domaine  public  peuvent  varier  d'un  pays  à  l'autre.  Les  livres  libres  de  droit  sont 
autant  de  liens  avec  le  passé.  Ils  sont  les  témoins  de  la  richesse  de  notre  histoire,  de  notre  patrimoine  culturel  et  de  la  connaissance  humaine  et  sont 
trop  souvent  difficilement  accessibles  au  public. 

Les  notes  de  bas  de  page  et  autres  annotations  en  marge  du  texte  présentes  dans  le  volume  original  sont  reprises  dans  ce  fichier,  comme  un  souvenir 
du  long  chemin  parcouru  par  l'ouvrage  depuis  la  maison  d'édition  en  passant  par  la  bibliothèque  pour  finalement  se  retrouver  entre  vos  mains. 

Consignes  d'utilisation 

Google  est  fier  de  travailler  en  partenariat  avec  des  bibliothèques  à  la  numérisation  des  ouvrages  appartenant  au  domaine  public  et  de  les  rendre 
ainsi  accessibles  à  tous.  Ces  livres  sont  en  effet  la  propriété  de  tous  et  de  toutes  et  nous  sommes  tout  simplement  les  gardiens  de  ce  patrimoine. 
Il  s'agit  toutefois  d'un  projet  coûteux.  Par  conséquent  et  en  vue  de  poursuivre  la  diffusion  de  ces  ressources  inépuisables,  nous  avons  pris  les 
dispositions  nécessaires  afin  de  prévenir  les  éventuels  abus  auxquels  pourraient  se  livrer  des  sites  marchands  tiers,  notamment  en  instaurant  des 
contraintes  techniques  relatives  aux  requêtes  automatisées. 

Nous  vous  demandons  également  de: 

+  Ne  pas  utiliser  les  fichiers  à  des  fins  commerciales  Nous  avons  conçu  le  programme  Google  Recherche  de  Livres  à  l'usage  des  particuliers. 
Nous  vous  demandons  donc  d'utiliser  uniquement  ces  fichiers  à  des  fins  personnelles.  Ils  ne  sauraient  en  effet  être  employés  dans  un 
quelconque  but  commercial. 

+  Ne  pas  procéder  à  des  requêtes  automatisées  N'envoyez  aucune  requête  automatisée  quelle  qu'elle  soit  au  système  Google.  Si  vous  effectuez 
des  recherches  concernant  les  logiciels  de  traduction,  la  reconnaissance  optique  de  caractères  ou  tout  autre  domaine  nécessitant  de  disposer 
d'importantes  quantités  de  texte,  n'hésitez  pas  à  nous  contacter.  Nous  encourageons  pour  la  réalisation  de  ce  type  de  travaux  l'utilisation  des 
ouvrages  et  documents  appartenant  au  domaine  public  et  serions  heureux  de  vous  être  utile. 

+  Ne  pas  supprimer  r attribution  Le  filigrane  Google  contenu  dans  chaque  fichier  est  indispensable  pour  informer  les  internautes  de  notre  projet 
et  leur  permettre  d'accéder  à  davantage  de  documents  par  l'intermédiaire  du  Programme  Google  Recherche  de  Livres.  Ne  le  supprimez  en 
aucun  cas. 

+  Rester  dans  la  légalité  Quelle  que  soit  l'utilisation  que  vous  comptez  faire  des  fichiers,  n'oubliez  pas  qu'il  est  de  votre  responsabilité  de 
veiller  à  respecter  la  loi.  Si  un  ouvrage  appartient  au  domaine  public  américain,  n'en  déduisez  pas  pour  autant  qu'il  en  va  de  même  dans 
les  autres  pays.  La  durée  légale  des  droits  d'auteur  d'un  livre  varie  d'un  pays  à  l'autre.  Nous  ne  sommes  donc  pas  en  mesure  de  répertorier 
les  ouvrages  dont  l'utilisation  est  autorisée  et  ceux  dont  elle  ne  l'est  pas.  Ne  croyez  pas  que  le  simple  fait  d'afficher  un  livre  sur  Google 
Recherche  de  Livres  signifie  que  celui-ci  peut  être  utilisé  de  quelque  façon  que  ce  soit  dans  le  monde  entier.  La  condamnation  à  laquelle  vous 
vous  exposeriez  en  cas  de  violation  des  droits  d'auteur  peut  être  sévère. 

À  propos  du  service  Google  Recherche  de  Livres 

En  favorisant  la  recherche  et  l'accès  à  un  nombre  croissant  de  livres  disponibles  dans  de  nombreuses  langues,  dont  le  français,  Google  souhaite 
contribuer  à  promouvoir  la  diversité  culturelle  grâce  à  Google  Recherche  de  Livres.  En  effet,  le  Programme  Google  Recherche  de  Livres  permet 
aux  internautes  de  découvrir  le  patrimoine  littéraire  mondial,  tout  en  aidant  les  auteurs  et  les  éditeurs  à  élargir  leur  public.  Vous  pouvez  effectuer 


des  recherches  en  ligne  dans  le  texte  intégral  de  cet  ouvrage  à  l'adresse]  ht  tp  :  //books  .google  .  corn 


STACKS 


MAY3Qi97gî 


BULLETIN 


DE   LA 


SOCIETE  ARCHÉOLOGIQUE 

DE    SENS 


TOME  XXII 


ANNEE  1906 


SENS 
DL'CHEMIN,  IMPRIMEUR-ÉDITEUR 
1906 


BULLETIN 


DE  LA 


SOCIÉTIî;      ARCHÉOLOGIQUE 

DE  SENS 


k 


BULLETIN 


DE   LA 


y r 


SOCIETE  ARCHEOLOGIQUE 

DE    SENS 


TOxME  XXII 


ANNEE  1906 


SENS 
DUCHEMIN,  IMPRIMEUR-ÉDITEUR 
1906 


'-^  ^_  oou  2501 


75  53  S 

QUAUTV  eONTROt.  MAHK 


PROCÈS   VERBAUX  DES  SÉANCES 


TENUES 


Séance  du  9  janvier  1905 

Prjésidence  de  m.  Maurice  Prou 

Quarante-quatre  membres  sont  présents. 

Le  procès- verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  Maarice  Prou  prononce  Tallocution  suivante  : 
c  Messieurs, 

c  On  s'étonnerait  qu'ayant  à  désigner  un  président,  votre 
choix  se  soit  arrêté  sur  celui  d'entre  vous  qui  est  le  moins 
assidu  à  vos  séances,  si  l'on  ne  considérait  que,  par  là,  vous 
avez  voulu  rendre  hommage  à  la  mémoire  d'un  de  nos  fon- 
dateurs et,  vous  donnant  l'illusion  d'un  retour  vers  le  passé, 
inscrire  une  fois  de  plus  à  la  présidence  le  même  nom  qui 
y  figura  dès  la  troisième  année  de  l'existence  de  notre  So- 
ciété. 

fl  La  part  que  mon  grand-père  et  mon  père  ont  prise  à 
vos  travaux,  pendant  de  longues  années,  a  été  la  cause  pre- 
mière, sinon  la  seule,  de  l'honneur  que  vous  m'avez  conféré, 
vous  souvenant  que  le  premier,  ayant,  de  1844  à  1879,  con- 
sacré tous  ses  loisirs  à  l'œuvre  de  notre  Société,  en  a  été  à 
plusieurs  reprises  président,  et  que  toute  son  activité  scien- 
tifique s'est  portée  vers  l'étude  des  antiquités  sénonaises, 


EXTRAITS  i 

DES  ] 


PENDANT  L'ANNEE  1905  ^ 

i 


n'ayant  jamais  désiré  ni  reçu  d'autre  récompense  de  t| 

d'etrarls  que  Test i nie  et  la  reconiinîssancc  de  ses  confrèfl 
ce  qui  suffisait  :\  son  dé^mtércssementi  que  le  second,  I 
n'a  rien  écrit  pour  vos  BnHeiim,  n,  du  moins,  assisté  ré| 
litTement  à  vos  séances  de  1854  à  1897,  sauf  pendant  1 
quelques  années  qullsc  tint  éloigné  de  Sens^  et  qu'il  a  ma 
joué  un  rùle  actif,  soit  qu'il  prît  part  aux  discussions,  id 
signalât  des  monuriients  à  rntlention  de  votre  Société, 
vouH  prétjt  te  secours  de  soji  crayon^  ou  enfin  qu'il  sied 
au  bureau  comme  vice-archiviste  ou  pro-secrétaire.      1 

<  Si  je  n  hésite  pas,  avant  même  de  vous  adresser  mes| 
merciements,  ù  remplir  un  devoir  de  piété  filiale,  c'est  à 
je  me  sais  entouré  d'amis  aux  sentiments  intimes  de  qui 
suis  sûr  de  répondre  en  saluant  les  morts  avant  lesvivail 
c'est  aussi  qu  il  me  convient  d'abriter  ma  faiblesse  derrij 
la  mémoire  vénérée  et  l'autorité  de  mes  parents;  et  enl 
que  vous  montrer  que  je  ne  suis  pas  un  tlls  ingrat,  maisJ 
contraire,  soucieux  de  suivre  les  exemptes  de  dévoueme^ 
la  Société  que  je  prends  dans  ma  famille,  c'est  pour  voiu^ 
meilleure  garantie  «les  efforts  que  je  tenterai,  afin  de  ne  | 
resicr  inférieur  à  la  tûche  que  j'assume  par  votre  voloQ 

ff  Cesl  un  grand  honneur  que  vous  m  avez  fait  de  me  cl 
fler  la  garde  des  intérêts  de  notre  Compagnie.  Et  parce  (| 
transptanlé  à  Paris  je  suis  cepentfant  reste  Sénonais,  il  ml 
agréable  de  voir  que  mes  sentiments  ont  été  si  bien  marc^ 
dans  ma  conduite  que  mes  compatriotes  aient  pu  les  rcoi 
naître.  Si  de  cette  antique  ville  tout  m  est  clierje  ne  suis 
tache  ici  à  rien  plus  qu'à  cette  Société  archéologique,  { 
en  est,  a  mes  yeux,  le  cœur  et  le  centre.  J'ai  été  nourri^ 
milieu  de  vous,  et  c'est  de  plusieurs  d'entre  vous,  hél 
<lisparus,  que  j'ai  pris  mes  premières  leçons  de  critique  I 
torique  et  archéologique.  Quand  j'ai  commencé  d'étud 
f  histoire,  mon  seul  dessein  était  de  cherclicr  à  pénétre| 
h  faire  revivre  le  passé  de  notre  pays  sénonais.  Je  n*oii^ 
pas  que  la  Société  archéologique  de  Sens  a  bien  vouluj 
cueillir  dans  son  ihtilviin  mon  premier  essai.  K'esl-ccJ 


sl-ccj 


—  m  — 

vous  dire  quelle  reconnaissance  je  vous  ai,  mes  chers  con- 
frères, de  m'avoir  appelé  à  un  poste  pour  lequel  mon  âge 
ne  paraissait  pas  me  désigner.  Mes  remerciements,  si  sincè- 
res soient-ils,  ne  vont  pas  sans  un  sentiment  très  vif  d'in- 
quiétude. 

I  Certes,  si  le  rôle  du  président  se  bornait,  je  ne  dirais 
pas  à  diriger,  mais  à  écouter  vos  discussions  où  les  règles 
de  la  plus  exquise  courtoisie  sont  toujours  observées,  il  se- 
rait facile  à  remplir.  Ici  la  sonnette  n'a  aucune  raison  de  pa- 
raître sur  le  bureau  :  le  silence  que  vous  gardez  pendant  la 
lecture  des  mémoires  rend  ce  meuble  inutile,  au  contraire 
de  ce  qui  arrive  dans  certaine  société  savante  de  Paris  aux 
séances  de  laquelle  plusieurs  d'entre  vous  assistent  quel- 
quefois. Mais  le  président  a  d'autres  obligations  à  remplir. 
Vous  comptez  sur  lui  pour  vous  représenter  au  dehors,  pour 
négocier  les  affaires  où  vous  vous  trouvez  mêlés,  pour  dé- 
fendre les  intérêts  de  l'archéologie  et  de  l'histoire  qui  sont 
les  vôtres.  Et  c'est  de  ce  côté  que  je  crains  de  ne  pas  être 
toujours  à  même  d'agir  à  votre  satisfaction. 

I  Mes  craintes  sont  toutefois  diminuées,  puisque  je  suis 
sûr  d'ctrc  secondé  par  vous  tous,  et,  à  défaut  de  la  direction 
qu'aurait  pu  nie  donner  le  regretté  président  en  qui  s'est  in- 
carnée pendant  tant  d'années  rarchéologie  sénonaise,  j'ai 
nommé  Gustave  Julliot,  de  pouvoir  user  et  abuser  de  l'expé- 
rience de  vos  derniers  présidents,  MM.  Joseph  Perrin  et 
Maurice  Roy  qui,  ayant  singulièrement  contribué  h  mon 
élévation,  ont  contracté  bien  aimablement  l'obligation  de 
parer  à  mes  défaillances.  Vous  avez  eu  soin  aussi  de  mettre 
à  coté  de  moi  un  ami  de  qui  la  science  éprouvée,  l'activité 
inlassable  et  le  dévouement  entier  à  notre  Société,  renfor- 
cés par  son  afTection  à  mon  endroit,  suppléeront  à  mon  in- 
suflisance.  Les  autres  membres  du  bureau,  gardiens  des  tra- 
ditions, et  qui  voudront  bien  me  les  rai)pcler,  notre  secré- 
taire, notre  trésorier,  notre  archiviste,  le  pro-secrétaire  et 
le  vice-archiviste,  m'ont  promis  leur  concours,  que  je  savais 
mètre  acquis;  je  les  en  remercie  et  il  me  semble  que,  grâce 


—   IV   — 


à  eux  et  tout  compte  fait,  me  voici  moins  effrayé  des  res- 
ponsabilités qui  m'incomberont  et  plus  rassuré  sur  Tavenii 
de  notre  Société.  II  ne  sera  pas  difflcile,  avec  leur  aide,  de 
la  maintenir  au  rang  qu'elle  a  pris  dans  le  milieu  scicntifi 
que  français.  Car  noire  Société  est  Tune  des  plus  ancienne: 
et  des  plus  vivantes  parmi  ces  associations  qui  couvren 
comme  d'un  réseau  scicntiflque  le  sol  de  la  France,  de  façor 
à  ne  rien  laisser  échapper  des  vestiges  du  passé. 

«  Quand,  à  la  suite  de  ces  mémorables  luttes  politique! 
qui  marquèrent  la  fln  du  xviiic  siècle,  et  de  ces  glorieuse! 
conquêtes  militaires  qui,  pendant  les  premières  années  di 
siècle  suivant,  portèrent  dans  toute  l'Europe  le  renom  d( 
rhéroisme  français,  la  France,  après  un  si  prodigieux  eflbrt 
éprouva  le  besoin  de  se  replier  sur  elle-même  et  de  resser 
rer  les  liens  de  la  tradition  un  moment  relâchés,  elle  s< 
trouva  désemparée,  et  comme  un  ouvrier  sans  instrunien 
ou  avec  des  instruments  qu'il  ne  sait  plus  manier.  San! 
doute  quelques  esprits  calmes  avaient,  au  milieu  des  agita 
lions,  gardé  la  sérénité  scientiflque  et  poursuivi  obscure 
ment  et  isolément  leur  œuvre  d'historien  :  à  Sens,  Tarb| 
en  est  un  exemple.  Ces  érudits  étaient  disséminés  ;  ils  tnï 
vaillaient  chacun  en  son  particulier.  Les  congrégatioa 
avaient  disparu,  comme  les  corporations  ;  plus  de  bénéd 
tins  pour  coordonner  les  efforts  des  historiens  et  des  i 
chéologues.  Et  comme  il  n'y  a  pas  de  principe,  si  excelle 
soit-il,  qui,  poussé  à  son  extrême  et  exclusivement  app 
que,  ne  devienne  mauvais,  l'on  s'aperçut  bientôt  que  l'ind 
vidualisme  à  outrance  ne  pouvait  suffire  à  assurer  la 
d'une  société  et  qu'il  fallait  en  toute  chose  des  groupemcij 
intermédiaires  entre  l'individu  et  l'Etat.  Pour  ce  qui 
garde  nos  études,  l'enquête  même  qui  doit  précéder  la 
fection  de  l'histoire  locale  est  si  vaste,  elle  porte  sur  ( 
points  si  différents  et  exige  des  aptitudes  si  variées,  qu1| 
seul,  s'il  a  l'audace  de  l'entreprendre,  ne  saurait  la  mené 
bien;  sans  compter  que  son  esprit  fût-il  assez  puissant  p( 
regarder  le  passé  de  divers  points  de  vue,  il  resterait  h 


—   V  — 

joars  que  ses  ressources  matérielles  ne  suffiraient  pas  à  as- 
surer la  publication  des  matériaux  qu'il  aurait  amassés  et 
commentés.  Nos  prédécesseurs  Font  compris,  et  sous  le 
Tvgne  de  Louis-Philippe  la  mutualité  s'affirma,  pour  ce  qui 
nous  concerne,  par  la  création  de  ces  sociétés  qui  ont  pro- 
voqué la  renaissance  des  études  historiques  et  archéologi- 
ques et  n  ont  cessé  depuis  ce  temps-là  de  se  multiplier,  de 
saccroîlrc,  encouragées  et  favorisées  par  le  gouvernement 
qui.  dès  la  première  heure,  avait  constitué  à  Paris  un  Co- 
niité  des  travaux  historiques  pour  leur  servir  de  centre. 

«  Il  ne  se  pouvait  pas  que  la  ville  de  Sens  ne  fût  à  la  tête 
du  mouvement.  L.e  flambeau  de  l'histoire  y  avait  passé  de 
miiin  en  main,  toujours  brillant,  depuis  que  les  annalistes 
anonymes  de  Sainte-Colombe,  qui  l'avaient  allumé,  l'avaient 
:n:nsmis  à  ceux  de  Saint-Pierre-le-Vif,  Odoran,  Clarius, 
t  CHlTroy  de  Gourion;  puis  étaient  venus Taveau,  Reversey, 
fLrcleau,  Fcnel  et  Tarbé,  et  tant  d'autres  qui  forment  une 
chaiae  ininterrompue  depuis  le  haut  moyen  âge,  jusqu'au 
j')jrque  seize  hommes,  dont  la  culture  littéraire  ne  le  cédait 
ea  rien  à  leur  vif  amour  du  pays  natal,  se  réunirent  pour 
rechercher  et  sauvegarder  les  antiquités,  classer  et  dépouil- 
1(  r  les  archives,  en  publier  les  documents,  les  commenter 
ti  en  tirer  les  éléments  d'une  histoire  sénonaise. 

i  Si  telle  a  été  la  mission  que  notre  Société  s'était  donnée, 

u  \ziii  reconnaitre  qu'elle  l'a  continuellement  et  compléte- 

i.nt  accomplie  depuis  sa  fondation.  Il  n'y  a  pas  lieu  de 

raindre  qu'elle  y  manque  dans  l'avenir. 

I  II  est  impossible,  cependant,  que  nous  fermions  l'oreille 

^Iccho  d*une  opinion  qui  se  répand  depuis  quelques  an- 

:i?s  et  qui  est  venue  jusqu'à  nous.  On  entend  dire  que  les 

x^i'jtês  archéologiques  n'ont  plus  la  même  ardeur  qu'il  y 

<  xolement  vingt  ans,  que  le  recrutement  se  fait  plus  diffi- 

It,  les  travaux  plus  i-ares,  soit  que  les  exercices  du  corps 

'  ument  la  jeunesse    des  plaisirs  intellectuels,  soit  que 

:  /.blissement  des  études  classiques,  spécialement  l'aban- 

!iO  <ies  études  latines,  préparc  moins  les  esprits  à  des  re- 


1 


cherches  historiques,  soi!  encore  que  les  inleUigenecs, 
cnlrninces  à  regarder  en  avant  qy  en  arrière  et  se  préoc^j 
pant  lies  [irobléiues  socîaus^,  se  porlenl  vers  tes  scient 
économiques  et  politiques,  chacun  rêvaul,  nouveau  Plai 
de  construire  une  nouvelle  republique, 

f  Mais  en  premier  lieu^  les  sports  sont  le  privilège  dé 
Jeunesse^  et  il  arrive  un  ^ge  ou  la  nature  invite  chacuaJ 
mms  h  les  abandonner,  iVesl  alors  qu'on  cherche  à  occtii 
ses  loisirs  par  des  spéculations  in  tel  lec  tu  elles  ^  des  spécii 
lions  de  cnbiuet  ;  et  tout  natmcUcinent  on  se  tourne  vi 
1  archéologie  etriiistoirc,  parce  que  ^\  l'htsloire  exige,  a^ 
des  connaissances  préalables,  l'observation  d'une  méthoi 
elle  présente  sur  les  autres  sciences  cet  avantage  que  | 
objets  stîut  accessibles  à  tous,  répandus  partout  autour 
nous,  dans  le  sol,  dans  les  archives  publiques  et  prîvj 
dans  les  bibliothèques,  qu'elle  s-exprime  dans  la  langue. 
tous,  n'ayant  de  terminologie  spéciale  que  limitée,  qn'l 
nous  est  familière  dès  lenrance,  que  sa  méthode  a  un  carf 
tère  général  dont  les  règles  ressoi-tissent  h  la  logique  la  p| 
élémentaire,  je  dirais  presque  au  simple  bon  sens. 

I  Nous  ne  nierons  pas  que  sous  les  attaques  auxquelles  i 
est  en  hutte  depuis  quelques  années,  Tétude  de  la  langu&j 
line,  si  indispeusable  à  quiconque  veut  étudier  rbistoirei 
l'antiquité  et  du  moyen  ûge,  n'ait  suhi  un  recul.  Mais  on 
que  ce  recul  est  plus  apparent  que  réel»  cl  que  ceux  dVal 
nous  qui,  après  leur  sortie  du  collège,  ont  continué  ù  liroj 
auteurs  anciens,  ne  tenant  pas  compte  des  progrès  qi|| 
ont  accomplis,  imaginant  volontiers  qu'ils  avaient,  au  û 
ment  qu'ils  passèrent  leur  baccalauréat,  les  connaissant 
qu'ils  ont  acquises  depuis,  montrent  trop  peu  d'indulgej 
aux  jeunes  latinistes,  il  reste  qu'on  peut,  sans  une  cultl 
classitpic  bien  profonde,  étudier  les  seizième,  dix-septièt 
et  dix-huitiènie  siècles,  voire  le  siècle  dernier  dont  v<J 
savez,  par  les  belles  études  de  notre  ancien  présida 
M.  Joseph  Pcrrin,  que  les  premières  années,  par  la  gm 
deurdes  événements,  féconds  en  résultats  de  toutes  sor( 


^-  vu   — 


qai  lesool  tiiiin|uées,  ofîreDUuit  recherches  el  à  îa  critique 
on  chûmn  iïirgcment  ouvert;  il  reste  qu'on  peut  éludicr  les 
Yfiîliges  «ics  âges  prrhisloriqut's  el  tous  les  monumenlii  du 
mtiyeu  âge,  d  uu  mol  J  archéologie.  El  l'étude  de  l'areliéo- 
lûfif  n'est-ce  pas  robjet  originel  et  essentiel  de  votre  foa- 
II? 
H^bsi  rarehéoîogie  n  offre  plus  d'attraits7  Ici  noire  in- 
gujéliiile  II  aurait  pas  de  fondement.  Ce  ne  sont  pas  seule- 
meut  lr%  urchéolDgties  prupremcnL  dits  qui  s  intéressent  aux 
liem  tiioniinients.  car,  pour  en  assurer  la  conservation,  les 
mdéié%  comme  la  nôtre  trouvent  un  secours  puissant  et 
cJîlriice  auprès  du  publie,  du  grand  public,  comme  on  dit, 
qui  D  in^rrilt  un  peu  lard,  à  Tordre  de  ses  préoccupations 
h  sauvegarde  des  inonujnents  La  constitution  de  sociétés 
jUftttr  ta  protection  des  monuments  et  même  des  siles  pillo* 
tffques,  la  nnis^ance  des  syndicats  dlnitiatlve  régionaux  et 
demandes  qui*  chaque  jriur,  arilucnt  à  la  Direction  des 
lûx-Arts  pour  le  classemcnl  des  édifices  de  rantiquité  et 
mayeti  5ge,  cl  ces  promenades  archéologiques  se  niîjlli- 
^anh  telles  que  vous  en  avez  vous-mêmes  organisées,  et 
are  celte  aRluence  de  visiteurs  accourus,  de  tous  les 
^inis  du  pays  et  même  de  l'étranger,  pour  admirer  quel- 
cscetiliiines  de  tableaux  réunis  i\  lexposition  des  Primi 
fnmçais,  répondent  pour  nous  et  témoignent  de  latla- 
tanrnt  que  les  Français  ont  encore  à  leur  passé,  du  souci 
i»nl  d'en  conserver  les  glorieux  vestiges  et  tout  enseni- 
les  me  tire  eu  lumière,  comprenant  bien  que  la  puis- 
d  une  nalion  est  fat  te  de  toutes  les  forces  accumulées 
c^ars  clc^  siècles. 

f  On  potirmlt  donner  d'autres  preuves  que  ni  larehéologie 
rhîstojre  n  ont  fiiit  railiite.  Bt  il  y  q  beaucoup  de  irisons 
Cl  nicune  génération  ne  les  abandonnera  comme 

fj!  . utile  pour  continuer  sa  route,  plus  légt^re  :  til 

toyjifi^ur  qui  croirait  s'assurer  une  marche  pkis  rapide 
ittant  %LtQ  vin  tique. 
I  Si  dfinç  niius  nous  prenons  parfois  à  gémir  sur  l  état 


u 


V 
I 


xm 


acluel  des  sociétés  ardiéolo^qtics.  in  raison  en  est  qii*oii 
juge  mal  le  mUieo  dans  leqttel  on  se  trouve.  Si  nous  croyons 
av^oîr  dégénéré  de  nos  devanciers,  c  est  qu'à  dire  le  vrai, 
nous  ne  voyons  leur  ceuvre  que  dans  te  lointain,  sans  t'étu- 
dîer  par  le  menu,  et  surtout  sans  prendre^  pour  établir  un 
rapport  avec  notre  œuvre  propre,  des  ternies  de  co m pa rai- 
son précis.  La  perspective  du  passé  est  de  même  sorte  que 
celle  d'un  paysage.  I^eis  derniers  plans  se  pressent  les  uns 
contre  les  autres  ;  les  objets  éloignés  fortneut  des  masses  et 
semblent  se  toucher  alor^  qnen  réalité  de  larges  espaces  les 
séparent.  Pareillement  les  faits  nous  paraissent  doutant 
plus  étroitement  groupes  qulls  se  soûl  passés  à  des  épo- 
ques plus  anciennes;  lisse  présentent  à  nous  comme  en  un 
tas  que  nous  croyons  avoir  été  fait  d'un  seul  coup,  alors 
que  plusieurs  générations  ont  contribué  à  sa  fonnâtioti^ 
comme  ces  tombeaux  des  premiers  âges  sur  lesquels  chaque 
passant  jetait  une  pierre. 

i  Voyons  si  un  examen  plus  attentif  de  la  question  ne 
nous  obligera  pas  à  abandonner  notre  sentiment,  résuUit 
d'une  impression  vaguement  ressentie,  pour  y  substituer 
une  opinion  fondée  sur  la  connaissance  plus  exacte  des 
choses.  Comparons  Fétat  de  notre  Société  pendant  la  se- 
conde période  décennale  de  son  existence,  de  1851  à  1^>3, 
et  pendant  la  dernière  période  décennale,  de  1894  à  liX>3, 
d'autre  part.  Et  d'abord  le  nombre  des  membres.  En  1863, 
la  Société  comprenaîl  trente-six  membres  titulaires,  trente 
membres  honoraires  et  cent  vingt-neuf  correspondants,  a^H 
total  cent  quatre-vingt-quinze  membres;  en  1903,  cinquante^ 
deux  membres  titulaires,  un  membre  honoraire,  cinquîinte- 
un  membres  libres  et  vingt-neuf  corrcspon<iants,  au  total 
cent  trente- trois  membres  11  y  aurait  donc  en  diminution 
numérique.  Mais  ici  nous  saisissunsloiU  de  suite  limperfcc- 
lion  de  ta  statistique,  et  à  quelles  conclusions  inexactes  elle 
nous  mènerait  si  nous  ne  corrigions  la  brutalité  des  chiffres 
par  Icxamen  des  éléments  que  nous  avons  fa  ri  entrer  en 
compte.  Car  ce  qui  importe^  c'est  le  nombre  des  membres 


—   IX   — 


actifs.  Or,  notre  Compagnie,  en  1S63,  m  dépit  du  nombre 
considérable  de  ses  membres  honoraires  et  de  ses  corres- 
piindanls,  dont  la  plupart  n'avaient  aucune  part  à  ses  tra- 
\aux,  disposait  de  moins  de  forces  vives  qu'en  1903  avec  ses 
cinquante-deux  membres  titulaires  et  aussi  ses  cinquante  et 
un  membres  libres  qui  tous,  dune  façon  ou  d'une  autre, 
coopèrent  à  sa  vie  sociale.  La  liste  des  membres  titulaires 
na  cessé  de  s'accroître.  Elle  comprenait  cinquante-deux 
membres  l'an  dernier  :  soixante-deux  y  sont  inscrits  au- 
jourd'hui. 

Venons  aux  travaux.  Ce  serait  abuser  de  votre  patience 
qu'énumérer  devant  vous  toutes  les  questions  que  notre 
Société  a  examinées   et  discutées,  ou   toutes  les  fouilles 
qu  elle  a  pratiquées  pendant  les  deux  périodes  que  nous 
nous  sommes  proposé  de  comparer.  Il  suffit  de  mettre  en 
balance  les  publications  faites  par  vos  soins;  car  c'est  par 
la  surtout  que  se  manifeste  le  plus  utilement  notre  activité, 
et  ce  sont  les  résultats  les  plus  tangibles  que  nous  puissions 
obtenir;  sans  compter  que,  sur  ce  terrain,  les  chiffres  ont 
toute  leur  valeur,  puisqi\e  les  objets  additionnés  sont  de 
même  qualité.  Or,  de  1854  à  1863,  la  Société  archéologique 
de  Sens  a  publié  cinq  volumes  de  Bulletins  formant  un  total 
de  1497  pages;  tandis  que  de  1894  à  1902,  elle  a  publié  un 
même  nombre  de  Bulletins  comprenant  1 762  pages,  auxquels 
il  faut  ajouter  vingt-trois  planches  du  musée  gallo-romain, 
cl  le  magistral  livre  de  Gustave  Julliot  sur  les  inscriptions 
et  monuments  du  même  musée,  comme  aussi  les  mémoires 
du  même  auteur  consacrés  à  l'ancien  rétable  d'or  et  au 
c-  ffrel  d'ivoire  de  la  cathédrale,  et  la  Flore  du  Sénonais,  de 
M  Constant  Houlbert,  à  laquelle  ont  collaboré  plusieurs  au- 
tres de  nos  confrères.  En  outre,  trois  ouvrages  ont  paru 
v)us  vos  auspices,  savoir  :  les  deux  livres  de  M.  Joseph 
[•errin,  le  Cardinal  de  Loménie  de  Brienne  et  les  Sièges  de 
v/Lt.  et  l'Histoire  du  Chesnoy,  par  M.  Maurice  Roy. 

'  Vous  le  voyez.  Messieurs,  le  parallèle  que  nous  avons 
ciibli  ne  tournera  pas  à  notre  confusion.  La  Société  n'a 


\i 


f« 


i 


—   X   — 

cessé  de  marcher  résolument  dans  la  voie  que  lui  ont  mon- 
trée et  ouverte  ses  fondateurs.  Elle  s'y  est  avancée  d'un  pas 
de  plus  en  plus  ferme,  appuyée  sur  les  premiers  exemples 
des  pionniers,  conservant  la  même  ardeur  au  travail  et  le 
même  culte  éclairé  du  passé.  C'est  pourquoi  notre  Compa- 
gnie, aussi  forte  que  jamais,  peut  poursuivre  en  toute  tran- 
quillité le  cours  de  ses  travaux,  confiante  dans  un  avenir 
qu'il  ne  dépend  que  de  nous  de  faire  aussi  brillant  que  le 
passé.  1 

Après  cette  allocution,  fréquemment  interrompue  |>ar  les 
applaudissements  de  l'assemblée,  M.  le  président  dépose 
sur  le  bureau  les  publications  reçues  pendant  le  mois 
écoulé. 

Il  signale  la  liste  des  baillis  de  Sens,  de  Thierry  de  Cor- 
beil,  en  1202,  à  Jean  le  Métayer,  en  1327,  dressée  par  M.  Léo- 
pold  Delisle,  dans  le  tome  XXIV  du  Recueil  des  historiens 
des  Gaules  et  de  la  France. 

Il  signale,  en  outre,  dans  le  Traité  des  Monnaies  gauloises, 
de  M.  Adrien  Blanchet,  qui  vient  de  paraître,  le  chapitre 
(t.  H,  p.  358  à  363)  consacré  à  la  numismatique  des  Senoncs. 
M.  Blanchet  rejette  l'interprétation,  duc  à  Longérier,  de  la 
légende  atha  par  Agedincum,  qui  se  lit  sur  une  pièce  de 
bronze  dont  le  type  consiste  en  deux  animaux  affrontés. 
Aged  est  plutôt  le  commencement  d'un  nom  d  homme,  tel 
que  AgedilloSy  Agedomopalis,  Agedoviros  ouAgedinos.  Il  n'y 
a  aucune  raison  d'attribuer  cette  pièce  aux  Scnons;  aucun 
exemplaire  n'a  jamais  été  rencontré  dans  l'ancien  territoire 
de  ce  peuple.  Au  contraire,  elle  est  analogue,  pour  le  typc> 
à  des  monnaies  de  bronze  trouvées  d'ordinaire  dans  la  ré- 
gion parisienne.  Mais  les  trouvailles  permettent  d'attribuer 
aux  Sénonais  :  l*"  une  série  de  bronzes  coulés  dont  le  type 
est,  au  droit,  une  tête  échevelée,  et,  au  revers,  un  cheval  ; 
2«  des  bronzes  frappés  qui  présentent,  au  droit,  une  tête 
avec  cheveux  à  larges  mèches,  et,  au  revers,  un  oiseau 
accompagné  de  cercles,  de  pentagones  et  de  croix;  3»  des 


—    XI    — 

bronzes  du  même  type,  mais  avec  les  légendes  Sena  et 
Giamilos. 

Ces  attributions  de  M.  Blanchet  se  trouvent  confirmées 
par  une  trouvaille  de  monnaies  faite,  en  1897,  sur  rempla- 
cement de  la  maison  sise  à  Tangle  de  Tavenue  Vauban  et  de 
la  place  de  la  Gare.  La  portion  de  ce  petit  trésor  que  nous 
avmis  eue  entre  les  mains,  comprenait,  en  effet,  douze  piè- 
ces du  premier  type  (cf.  H.  de  la  Tour,  Catalogue  des  Mon- 
naics  gauloises  de  la  Bibliothèque  nationale,  no»  7412  à  7421, 
atlas,  pi.  XXX,  n®  7417);  quatorze  pièces  du  second  type 
n  w535  à  7545);  cinq  pièces,  d*un  type  analogue,  sur  les- 
quelles loiseau  parait  boire  dans  un  vase  ;  treize  monnaies 
de  bronze  aux  légendes  GIAMILOS,  au  droit,    et   SIINV 
>  =  SenuJ,  au  revers  (n»»  7554  et  suiv.);  dix  bronzes  Irappés, 
au  même  type  de  Foiseau  avec  la  légende  VLLVCCI  (nt»7493 
et  suiv);  auxquels  il  faut  ajouter  quelques  pièces  de  types 
différents    représentées  par    un    exemplaire   unique  :  un 
bronze  à  la  légende  PIXTILOS  (no*  7063  et  suiv.)  ;  deux  bron- 
zes, à  la  légende  AEOViCli  (n®»  7732  et  7737);   deux  mon- 
naies de  potin,  dont  Tune  au  type  du  sanglier  (n^^  9167  et 
suiv  ),  et  Tautre,  au  type  du  taureau  cornupète. 

Il  est  intéressant,  pour  la  détermination  de  Tépoque  à  la- 
quelle les  monnaies  gauloises  avaient  cours,  de  remarquer 
qu  elles  étaient  mêlées  à  des  monnaies  romaines  de  la  colo- 
nie de  Nîmes,  à  des  monnaies  d'Auguste,  frappées  à  Lyon 
et  à  Vienne,  de  Germanicus,  de  Tibère,  de  Caligula,  de 
Claude,  de  Néron  et  de  Domitien. 

Ces  monnaies  sont  conservées  dans  une  vitrine  de  la 
salle  Synodale.  (V.  l'Etude  de  M.  A.  Blanchet,  dans  le  t.  XXI 
(Ju  Bulletin,  deuxième  fascicule.) 

Avant  de  donner  la  parole  à  M.  F.  Chandenier,  M.  Prou, 
se  faisant  Tinterprète  de  l'assemblée,  adresse  ses  plus  sin- 
cères félicitations  à  M.  Ramain,  professeur  de  rhétorique 
au  lycée,  qui  vient  d'être  reçu  docteur  es  lettres,  avec  la 
mention  très  honorable. 
M.  F.  Chandenier  donne  lecture  d'une  note  sur  les  Ecoles 


—    XII    — 

cpiscopalcs  et  monastùities  de  rancienne  province  ecclésiasti- 
que de  Sens,  du  Vil*'  an  A7/«'  siècle. 

Le  '^1  juillet  19(W,  M.  William-H.  AspînwaI,  actuellemenl 
directeur  à  rKcole  irnpplicntion  au  Collège  national  de 
l'Etat  de  New -York,  a  soutenu,  devant  la  faculté  de  théolo- 
gie prolestante  de  Paris,  une  thèse  traitant  ce  sujet. 

Informé  de  sa  publication,  M.  F.  Chandenier  s*est  procuré 
ce  document,  dans  lequel  il  espéniit  rencontrer  1  équité 
qu*il  croyait  devoir  animer,  en  Amérique,  l'esprit  des  ad- 
versaires de  rKglise  catholique. 

M.  Aspinwal  n*a  pas  fait  pi*euve  de  ce  beau  sentiment. 
Forcé  de  reconnaître  qu":^  Tôpoque  de  l'invasion  des  b.ir- 
bares  et  pendant  lo  moyen  Age.  l  Eglise  catholique  a  lutté 
contre  la  tKirl)ano  des  envahisseurs,  qu'après  les  avoir 
domptés  pour  ainsi  dire,  elle  les  a  civilisés  et  leur  a  donné 
les  premières  notifus  des  Icllivs  et  des  arts  dont  elle  fut  la 
seule  ganlienne  il  le  fait  a\eo  mauvaise  gnice  Au  lieu  de 
terminer  par  lu  mot  de  rt*con naissance  pour  les  services 
rendus,  il  no  trvuixe  qu  utîc  concliiNion  injurieuse,  préten- 
dant que  '  l  KiiliNC  n  a  otVrt  qu  i:n  en>ol.;rîement  insuflisimt 
qui  ne  menjit  pas  .i  la  literie  vU-  Li  loi  et  i!e  la  pensée,  mais 
qui  te:T«î.i:t  j  v'%v»Nor\cr  iî»dv'thK::'o:Tt  lîcs  idtcs  fausses  et 
super>i:*'-<''.-^<'^    • 

Siin>  N  *,U':T.f:\*  p*.-.:n  Îv'::»  vi,"c  \  T^Î-no  v-K-e  ^îc  la  proxincc 
de  Vf:-^.  ».i'-'v:  !  ,rv-ho\vv;:w-  o».'-.vv '.':'.  !c\,\;,*.c  v!o  Paris 
par^::  '^c^  %.■.•'■  ;^:»  s  ^l  F  v' ^  r  *  :c"c".  ^j*.  j.::t  i.îu  reste 
pas  J  î.Ms  -o  J.vx**.k"  ■••v:*Vv  sU"  *  *■'-,'  s  w*  j  —  .:-'v:j:*v:.  j  n.ipjH?lé 
les  :?•■■'"»  ".%'.-CN  .!,,•  ••  •%  ^J^  .>".s  ,■^0■.:■«^■s  .:c:;l::s  saint 
Loi:'/  ."-^-r  '  ■"  ^" '"v  -i.'  ».'  "'.•<  *  •••  *  ^'-x  -v*  -'.f-e.  en  {-a^- 
san:.  ■*■.■■• — .!-;;    «    vi:  ••.   ^!..;.'"    ^■l  ■».;■.■.•.■■•  .!.--^  ni rr-j^ip^.  à 

pn."T    *.' ■'      ■•-'».■     "■-•'^  ,■■     v.      '.■   '•   '  ■   :     .'      ,'v'*::?*e  ticc- 


—  XJll    — 


M  Prou,  remcrclarit  M.  Chaiidenicr  de  son  întércssimtc 
lecture,  couftlate  qu'il  ne  s'est  pas  contenté  d  analyser  la 
tl]è>e  de  M.  Aspinw»ti  maïs  qull  a  fail  œnvre  personneUc 
fû  rnrmylant  sur  cette  Ihèsc  des  appréciations  e!  des  juge- 
inents  qui  sont  le  truii  de  ses  connaissances  historiques. 

M.  le  président  dit  qu'il  scrali  intéressant  pour  la  ville  de 
Seas  dassurer  la  conscrvalion  de  ce  qui  reste  actuelle  - 
luial  de  1  enceinte  romaine,  tout  au  moins  de  la  imtcnie  et 
de  U  portion  de  muraille  comprise  entre  lé  numéro  14  du 
tKMikvnnl  du  Quatorze -Juillet  et  la  rue  Amiral -RosseU 
pcul-ètre  nitme  de  la  tour  qui  se  trouve  sur  le  même  bou- 
levard, enlre  la  porte  Sainl-Hilairc  et  la  Grande-Huc.  Il 
pcn^c  que  In  Commission  des  monuments  historiques  ûc* 
cucilleruit  favorablctnenl  une  demande  de  classement,  et  îi 
cunsiulte  l'a&semblée  à  ce  sujet, 
La  pmposttian  est  adoptée  h  lunanimité. 
M.  J.  Pcrrin  communique  à  la  Société  la  reproduction ^  en 
pholotypie,  d'un  liaut-relief  eu  bronze  qui  commémore,  sur 
b  i»lace  du  chilteau  de  Stultgard,  la  prise  de  Sens  par  Tar- 
mtt  wurtcmbergeoisç,  le  11  février  1814.  Ce  document, 
coaipléLint  très  utilement  riUustration  de  son  ouvrage  sur 
kêSirffrs  tir  .SViï,irn  ^^/4,  M.  Perdu  en  donne  la  description 
en  faisant  les  réserves  qu  il  comporte.  (V.  Bulletin^  t.  XXI, 

,En    termi fiant,     XL    Perrin    remercie    chaleureusement 

^Heurtefco,  professeur  au  lycée»  qui  a  eu  reMrcme  obli- 
feaace  de  lui  procurer  la  reproduction  du  monument  jubi- 
laire de  Siuttgard 

La  Société  est  davls  qu1l  y  a  lieu  d'en  imprimer  une  ré- 
plique nu  iiiiUrfifïr 

M  Kiey  fait  une  communication  sur  une  médaille  ou  pla- 
quette circulaire  de  cuivre  rouge  trouvée  dans  le  faubourg 

fonnt  et  qu'il  considère  eoiïinie  un  emblème  maçon- 

SUlv 


t 


—    XIV 


Séance  du  6  février  1905 
Présidence  de  M.  Maurice  Prou 

Trente-six  membres  sont  présents. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopte. 

M.  le  président  dépose  sur  le  bureau  les  publications  re- 
çues pendant  le  mois  écoulé. 

M.  Tabbé  Corberon,  présent  à  la  séance,  demande  à  échan- 
ger le  titre  de  membre  libre  contre  celui  de  membre  titu- 
laire. Accordé  à  Tunanimité. 

M.  le  président  met  aux  voix  la  proposition  suivante  : 

c  La  Société  archéologique,  désireuse  de  reconnaître  les 
services  rendus  par  M.  Gustave  Julliot,  décide  d'offrir  à  sa 
famille  cinquante  exemplaires  des  trente  premières  plan- 
ches du  Musée  gallo-romain,  pour  compléter  les  exemplaires 
précédemment  attribués  à  M.  Gustave  Julliot.  » 

Cette  proposition  est  adoptée  à  l'unanimité  des  membres 
présents. 

M.  Sépot,  trésorier,  présente  son  compte  de  recettes  et 
dépenses  de  Tannée  1904,  établit  un  projet  de  budget  pour 
19fô  et  expose  la  situation  flnancière  de  la  Société. 

Ces  comptes  et  budget  sont  approuvés  et  des  remercie- 
ments sont  votés  à  M.  Sépot  pour  le  zèle  qu'il  apporte  dans 
la  gestion  des  flnances  de  la  Société. 

M.  le  président  donne  lecture  d'un  mémoire  de  M.  Jules 
Guifirey,  membre  de  l'Institut,  consacré  à  l'étude  de  quel- 
ques documents  inédits  relatifs  à  Jean  Cousin,  dont  1  un 
est  conservé  dans  l'étude  de  M^  Marquiand,  notaire,  secré- 
taire de  la  Société,  et  dont  les  autres  sont  tirés  des  archives 
nationales. 

Ce  mémoire  est  renvoyé  au  comité,  qui  examinera  s'il  doit 
être  publié.  iXoïr  le  Bulletin,  tome  XXI,  pp.  150  à  160J 

M.  l'abbé  Chartraire  donne  lecture  des  premiers  chapitres 
d'une  monographie  de  la  sépulture  du  Dauphin,  à  Sens.  A 
l'aide  des  documents  recueillis  aux  archives  nationales  ou 
départementales  et  dans  les  mémoires  contemporains,  il  ra- 


—  XV  — 

conte  la  mort  du  Prince  à  Fontainebleau,  les  préparatifs  de 
la  cérémonie  à  Sens,  où,  spontanément,  le  Dauphin  avait 
choisi  sa  sépulture,  et  la  pompe  funèbre  dans  la  Métro- 
pok.  (V.  le  Bulletin.) 

M.  le  président  donne  lecture  de  la  notice  que  M.  Adrien 
lihochel,  membre  de  la  Société  des  Antiquaires  de  France, 
n  rédigée  sur  la  trouvaille  des  monnaies  gauloises  faite  à 
Sens,  en  1897,  et  dont  il  a  été  question  dans  la  précédente 
séance.  M.  Blanchet,  après  avoir  établi  la  classiûcatlon  et 
donné  h  description  de  ces  monnaies,  a  présenté  un  cer- 
tain nombre  d'observations  d'un  intérêt  général  qui  se  dé- 
(luisent  de  Tétude  de  cette  trouvaille.  (V.  Bulletin,  tome  XXI, 
pp  235  à  249.) 

Séance  du  6  mars  1905 
Présidence  de  M.  l'abbé  Chartraire 


Trente -quatre  membres  sont  présents. 
Le  secrétaire  donne  lecture  du  procès-verbal  de  la  der- 
nière séance,  qui  est  adopté. 

M.  le  vice-président  a  le  regret  de  faire  part  à  l'assemblée 
liu  décès  de  M.  le  vicomte  de  Montjoie,  membre  de  la  So- 
c'iL'le. 

Il  lit  une  lettre  du  Comité  du  LXXV»  anniversaire  de  Fustel 
(!c  Coulanges. 

Il  communique  encore  une  lettre  émanant  du  comité 
formé,  à  Dijon,  pour  la  création  d'un  syndicat  d'initia- 
tive de  la  Bourgogne:  Un  projet  de  statuts  de  ce  syndicat, 
joint  à  la  lettre  du  comité  est  déposé  sur  le  bureau. 

Après  ces  diverses  communications,  M.  l'abbé  Chartraire 
î  rt^sente  les  publications  reçues  pendant  le  mois  écoulé. 

M  J.  Perrin  communique  à  la  Société  une  lampe  chré- 
Irime  antique  trouvée  à  Sens,  boulevard  de  Maupeou,  dans 
le  jardin  de  M.  Edmond  Feineux,  qui  la  conserve  dans  sa 
collection.  M.  Perrin  donne  lecture  d'une  note  qu'il  a  rédi- 


L 


i 


—   XVI   — 

géc  pour  expliquer  le  symbolisuic  de  cet  objet  cl  en  deaion- 
trer  1  itilcrêt  (V.  Biillvlm,  tome  XXI,  pp.  253  à  262.) 

M.  Tabbé  Charlruire  donne  la  su  île  de  sa  notice  sur  ta 
SvpitHure  du  Dauphin.  H  relrace  les  rcla Lions  de  la  Dau- 
pbine  avec  Sens,  pendant  son  vcumfcSeT  d'après  la  corrcs* 
pondance  de  cette  princesse,  puis  les  essais  d'cpitapbes, 
panni  lesîquels  le  texte  du  cardinal  de  Luynes  est  choisi, 
enfin,  les  difTérenIs  projets  proposés  pour  le  monument  fu- 
nèbre. La  correspondance  de  Diderot  fournit  à  ce  sujet  de 
curieux  dc-talls.  CoclilUf  chargé  offîcîeUement  d'étudier  un 
projet  de  mausolée,  a  demandé  des  idées  au  philosophe 
qui  se  piquait  de  goût  artistique  Diderot  imagina  cinq  coni- 
po^itinns  difTérenles,  d'un  goût  assurément  cou  lesta  ble,  et 
qui,  du  reste,  n'eurent  aucun  succès.  M.  Cha rirai re  pense 
que  Coehin  s  inspira,  pour  resquisse  définitive  que  Coustou 
reçut  mission  d'exécuter,  du  délicat  rrontispiee  dessiné 
par  lui-même  pour  T oraison  funèbre  du  Dauphin,  pronon- 
cée par  Etienne  de  Loménic  de  Brienne,  alors  archevêque 
de  Toulouse.  iy.BuUena,  t  KXl.) 

Puis  la  parole  est  donnée  à  Me  Kley,  pour  une  causene 
sur  la  préhistoire. 

Après  avoir  esquissé  à  grands  traits  ce  qu'est  et  ce  que 
doit  être  la  préhistoire,  M.  Kley,  indique  un  point  qui 
lui  paraît  acquis  :  une  ancienne  invasion  arienne  révélée 
par  la  présence  des  armes  de  jadeite  disséminées  sur  notre 
sol  et  surtout  aux  environs  de  Carnac. 

11  conclut  en  disant  que  les  préhistoriques  ont  plus  fait 
avec  leurs  armes  de  ^ilex  que  nous  avec  nos  armes  moder- 
nes, puisqu'ils  ont  presque  anéanti  lajaune  quaternaire  qui 
mensi\'alt  Tessor  de  rhumanité  naissante. 


Séance  du  .'f  avril  1905 
PiiiiSiDENCE  DE  M.  Maihicj;  Pnor 
Quarante-lrois  membres  sont  présents. 
Le  procès- verbal  de  ia  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 
M.  le  président  communique  ; 


—  XVII  — 

1  Une  circulaire  de  M.  le  ministre  de  l'Instruction  pu- 
blique el  des  Beaux-Arts,  relative  au  quarante-troisième 
c  uigrès  des  sociétés  savantes  devant  s'ouvrir  à  Alger,  le 
m  avril  1905. 

M  Prou  représentera  la  Société  à  ce  congrès,  auquel  as- 
si^lcra  également  M.  Vignot,  membre  libre; 

2'  Le  programme  du  congrès  archéologique  de  France, 
qui  se  tiendra  à  Beauvais; 

3'  Une  notice  de  la  Société  archéologique  d'Eure-et  Loir 
c(»ncernant  la  solennité  que  cette  société  se  propose  d'or- 
iiiniscr  pour  célébrer  son  cinquantenaire  en  1906. 

Puis  il  dépose  les  publications  reçues  pendant  le  mois 
tcoulé. 

M.  J.  Perrin  offre  à  la  Société  un  ouvrage  de  M.  H.  Ché- 
rol,  intitulé  :  les  Seize  Carmélites  de  Compiègne^  martyres 
mis  la  Révolution^  d'après  les  documents  originaux.  Il  se 
propose  d'en  rendre  compte  à  la  prochaine  séance. 

M  Duchemin  fait  don  à  la  Société  d'un  aérolithe  trouvé 
a  Cayeux-sur-Mer. 

M.  Lapôtre,  fermier  à  Pierre-Couverte,  offre  à  la  Société 
un  aérolithe  trouvé  dans  la  forêt  de  Lancy. 

M  Prou  informe  l'assemblée  que  M.E.Feineux  donne  à  la 
Société,  pour  son  médaillier,  vingt-trois  monnaies  gauloises, 
provenant  de  la  trouvaille  faite,  en  1897,  à  Sens,  sur  l'em- 
placement d'une  maison  sise  à  l'angle  de  l'avenue  Vauban 
it  de  la  place  de  la  Gare;  trouvaille  signalée  à  la  séance 
au  9  janvier  dernier. 

Enfin,  M.  l'abbé  Chartraire  offre,  pour  le  Musée,  une  tête 
rritique  d'enfant,  en  marbre,  trouvée,  en  1904,  dans  là  démo- 
liîion  d  un  mur  d'une  maison  de  la  Grande-Rue,  près  du 
Stminaire. 
Des  remerciements  sont  votés  à  tous  les  donateurs.. 
M  le  président  fait  connaître  que  M.  Alfred  Tonnellier, 
en  raison  de  son  état  de  santé,  demande  un  congé  de  trois 
m  is  A  runanimité  des  membres  présents,  ce  congé  est 
accordé. 

b 


XVÎT1 


1 


Kn   mison   des  vacances  de  Piiqiies,  rassemblée  d 
que  la  prochaine  réunion  se  licndra  le  lundi  8  mai 

M.  le  çhnnoiiic  Memnin  fkinnc  Içcliirc  d'une  t^iidc  doi 
Chi  railleur  sur  M^  TahleUva  de  brotize  de  Lupiriiuia,  etnij 
vees  au  musée  d'Agen. 

Il  rnppelic  lu  décciuvcrle  raile,  eu  1880,  au  Touron, 
trois  tabloUes  oirerles  pur  les  eik's  de  Sens,  Auxerrc  Qi\ 
léanSi  à  Lupicinus,  consulaire  de  la  gninde  Sénonie.      1 

Les  inseri plions  gravées  sur  ces  tablettes  lui  paraisa 
des  plus  imporliintes,  parce  que,  depuis  les  inscri|)ti 
anciennes  du  musée  sénonais,  dont  la  dernière  en  dati 
peut  èlre  poslérïeure  h  1  an  210,  on  ne  trouve  plus  d'art 
inscriptions  scnonaises  pendant  les  cinq  ou  six  siècles  ^ 
vants,  I 

Les  épigraphisles  qui  ont  publié  et  commenté  ces  insc| 
lions  s'accordent  à  recnnnailre  :  1^  qu'elles  sont  autbûj 
ques»  et  2^  qu  elles  remontent  à  la  seconde  moitié  du 
triéme  siècle. 

Mais  leur  explication  ou  biterprélalion  soulève  des  qi 
lions  auxquelles  d  n'est  pas  facile  de  répondre  avec  ci 
lude. 

H  est  évident  que  te  titre  de  consulaire  donné  h  Luà 
nus  ne  signlile,  ici,  nullement  un  ancien  consul,  mais  I 
lemcnl  un  gouverneur  d  une  province  de  première  cl a| 
parmi  celles  (|ui  coniposaienl  alors  la  préfecture  de  l,y| 

Quant  â  ridentiliealîon  de  Lnpicinus  avec  le  consul  Lfl 
cintis  de  l'an  3G7  iliypollicse  proposée  par  plusieurs  épig 
pbi^tesi,  M.  Juïliot  reconnaît  qu'elle  donnerait  le  moj 
d  ex|di(iucr  et  de  résoudre  plusieurs  diftieultès,  et  il  rép< 
lui-même  a  la  principale  otjjeclion  tirée  de  In  dilTérencc| 
prénoms  Flavius  et  CJaudius  de  Lui)icinus. 

La  différence  «tes  |irénonis  n  existerait  pas  pour  le  Lj 
çinus  nommé  jjènéraL  par  Julien,  en  Tan  359.  1 

Celle  hypothèse  offre  une  suite  historique  de  faits  i 
M,  Méntaiiï  résume  en  observant  que,  suivant  son  opinl 
Lu  p  ici  nus  aurai!  dû  élre  j^ouverneur  rie  la  Sénonie  ai 


—   XIX   — 


%  sa  nnmîtiûtton  de  itinître  de  k  ca\nlerie 
e  césar  Julie»,  en  l'an  359.  Il  ûiirnil  tte  ainsi 
giiincrïîciîr  de  Sens  entre  les  annces  X^i  cl  35*J. 

Tdî^csl  Ihypothèsc  à  laquelle  se  rallie  M.  Ménmin,  en  al- 
kodmiï  tjii  on  en  lrou\e  une  meilleure. 

M  Prot]  remercie  M.  le  chanoine  Mémain  de  son  intércs- 
.«nle  lecture  el  pré  sente  quelques  ob^ervationis  sur  les  ta- 
blctlcii  de  Lupirinus.  Il  ùiil  ressorti r^  notamment,  le  difll- 
rallé  qu  il  yn  à  ïdenliftcr  le  personnage  avec  Tiin  des  Lupi- 
dnas  menUocinés  par  Âramien  Marcellin. 

M  ioseph  l'errin  coniniunique  tin  ducument  surlncalhé- 
tfnle  lie  Sens,  trouvé  par  M,  H,  Chérot  aun  Archives  nalio- 
nafe»  G  9,  IGOk  C'est  une  lellre  au  roi  i>our  sollîciter  un 
ffcours  en  vue  de  la  réparation  de  la  Façade  de  la  calhé- 
4ra!e  :  *  .une  des  plus  anciennes  et  des  plus  célèbres  du 
rojuame  de  Votre  Majesté  ;  elle  est  aussi  une  des  moins  ri- 

Suit  rcsliniation  de  Soufllot,  rarcîiitccte  du  Panthéon.  Le 
drvU,  trcs  détaille,  s'élève  h  4tV7ïH)0  livres. 

M  llbérol  y  a  relevé  ce  paragraphe,  qui  ne  manque  pas 
é'actyahté  : 

»  Visilf  faite  de  la  lanterne  couronnanl  la  tourelle  de 
îliorlogi*.  iotlîquéc  a  rélcvation  par  la  lettre  A,  nousTavons 
trotrvèt  dana  le  plus  mauvais  état  el  en  péril  é minent  (sicf, 
II  nm vient  supprimer  ladite  lanterne  jusqu'à  ta  hauteur  de 
b  g^llcric supérieure. ainsi  que  le  nouveau  dessin  1  ludique; 
ce  que  nou%  estimons  pour  la  démolition  et  reconstruction, 
y  com|)riîi  la  balustrade,  la  somme  de  quatre  mille  huit  cens 
îitrc%,  4  8001.  * 

Cette  romtnuniciition  taite^  M.  Joseph  Fcrrln  donne  lec^ 
ture  irtrn  rapport  sur  la  Décoiwcrtc  de  Stjmlturf^  antuines 
à>nfm\h,  à  la  l*i  erre-Cou  verte,  commune  de  Courgenay 
^Toir  Buiklin,  toitie  XXI,  2*^  fascicule L 


—    XX    — 

Séance  du  8  mai  1905 

Présidence  de  M.  l'abbé  Charthaire 

Trenle-ncuf  mcmLres  sont  présents. 

M.  Heure,  membre  libre,  assiste  à  la  séance. 

Le  procès- verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  l'abbé  Chartraire  présente  les  excuses  de  M.  Maurice 
Prou  qui,  après  être  allé  à  Alger  prendre  part  au  quarante- 
troisième  congrès  des  Sociétés  savantes,  voyage  en  Tunisie. 

Il  entretient  la  Société  du  décès  de  M.  Alfred  Tonncllier, 
à  qui  il  adresse  en  ces  termes  un  dernier  adi<;u  : 
<  Messieurs, 

«  Dans  sa  dernière  séance,  notre  Société  s'était  empres- 
sée, sur  la  proposition  de  son  précident,  de  déférer  au  vœu 
exprimé  par  notre  collègue  M.  Alfred  Tonnellier. 

«  En  lui  accordant  un  congé  de  trois  mois,  nous  pensions 
que  le  mal  dont  il  souffrait  n'était  qu'une  indisposition  pas- 
sagère et  nous  comptions  bien  le  revoir,  après  cette  courte 
absence,  reprendre  sa  place  parmi  nous. 

«  Quelques  jours  plus  tard,  nous  avions  le  profond  regret 
d'apprendre  sa  mort  prématurée  et  de  raccompagner  au 
champ  du  repos.  MM.  Sépot  et  Perrin  ont  bien  voulu  re- 
présenter officiellement  la  Société  à  ses  obsèques  et  porter 
les  cordons  du  poêle.  J'ai  le  devoir  de  lui  adresser  ici  un 
dernier  adieu.  Je  le  ferai  d'autant  plus  volontiers  [que  je 
n'ai  jamais  oublié  le  bienveillant  accueil  que  M.  Tonnellier 
m'avait  fait  lors  de  mon  retour  à  Sens,  ni  les  encourage- 
ments qu'il  donnait  ù  mes  recherches  sur  l'histoire  locale. 

«  C'est  que  M.  Alfred  Tonnellier  était  un  fervent  des  glo- 
rieux souvenirs  et  de>  traditions  de  notre  cité. 

«  Entré  en  1867  dans  notre  Société,  dont  son  père  avait 
été  l'un  des  fondateurs,  il  était  devenu  notre  doyen.  Il  est 
regrettable  que,  dans  sa  longue  carrière  d'archéologue, 
M.  Tonnellier  n'ait  pas  songé  à  écrire,  pour  notre  BuUeiin, 
quelqu'un  de  ces  épisodes  de  notre  histoire  qu'il  contait  si 
bien.  Sa  plume  facile  aurait  sans  peine  tiré  d'intéressantes 


—  \x\  — 


Hmfes  des  doctimenls  recueillis  par  son  père  et  qu'il  coiî- 
»rr?aitnvce  un  soin  pieux. 

Muis  s  il  ne  prit  jamais  f^iiig  parmi  le*  Iceleurs  de  la  So- 
mHt\  du  moins  11  fut  Tiin  des  ânfliteiirH  les  plus  a  sidns.  Il 
Hait  aushi  1  un  de  ses  mi'nVbres  les  plus  fidèles  el  les  pins 
devxme%, 

I  Ile  \m  fréquentai  ion  de  nos  aîné:4,  il  avait  ganlé  le  bel 
flto,  ie  ciiUc  du  passé,  le  respect  des  tradititjns,  le  souci 
des  ifltéréis  de  notre  Assoeinîron  Nul  n'èlail  plus  ardenl  à 
flirt  observer  les  prescripHons  du  règlement,  comme  à  dé- 
fendre les  prérogatives  de  noire  Compagnie. 

I  A  iléfaul  de  mémuires,  que  nous  aurions  In  cerlaine- 
«rni  avec  îtitérêi,  i]  nous  laisse  le  souvenir  de  son  profond 
icbeinent  h  l'œuvre  entreprise  el  poursuivie  par  la  So- 
Cifle  ardiéo logique,  C*est  unexcmfïledont  nous  profiterons 
ri  potir  Irqne!  nous  garderons  à  sa  mémoire,  avec  nos  re- 
Is,  ime  vive  reconnaissance.  * 

L'assemblée  s'associe  par  ses  applaudissements  aux  paro- 
le* qircllc  vient  d  enlcndre. 
Nis  M.  l'alibé  Cliurlraire  dépose  sur  le  bureau  les  pubU- 
itons  re^ue^  depuis  la  dernière  réunion.  Tl  signale  celtes 
doiveol  plus  particnlièrenient  allircr  ratlentinn  de  la 
bdélé,  |Mirmt   Icsqu elles  une    élude  île    noire    cîjUègue 
Oi  Porer*  nrchivisle  de  l'Yonne,  inlUuléc  :  Docninrtth sur 
oitiiktrf  '  '.  ÙvpnHrnu*n!  de  lYoïiru'.  Prtfcês-uer- 

dr  Vadisr  an  iiènark'nicuktle  de  nUÙ  ù  ISŒ)^  pu- 

klir*  ïoas  les  auspices  du  conseil  généraK  Tome  VI,  conte- 
laut  le  résumé  des  séanecs  du  directoire  du  départcmcnlj 
Q  II  joUlel  17D3au  G  floréal  an  II,  Cel  ouvrage  contient  no- 
iiimt-nt  rhistorjque  tic  In  formation  du  déparlemcnt  de 
Le  seerêlaire  donne  lecture  des  principaux  passa- 
nts h  celle  l'urtîialion. 
A()rés  qucii,  M    le  vîce-président  soumet  à  rassemblée  un 
jet  irexcorsfoii  nrebéidnjfique  h  Muiet  H  ù   Ftintaînc- 
>l«iu.  dojil  la  tiale  sera  ultoiieu renient  fixée, 
n annonce  rnrure  un  pri»jet  de  visite  à  la  calhédralc  de 


l 


Hfl, 


s 


—  KXin  — 

e  président  dépose  sur  le  bureau  les  publicatiojig  rc- 
pendnnl  le  mois  écoule.  H  si^jnale  celles  qui  méritent 
T^t  Tottenlion  de  In  Société. 

^cione  lacture  d'une  lettre  de  M.  le  ehauoine  Blondcl, 
ift  du  (Ihapdre,  qui,  h  sou  j^rand  regret,  se  voit  obligé 
oïiiier  sa  démission  de  mend>rc  titulaire,  Tuge  et  les  in- 
îtés  ne  lui  permettant  plus  de  se  rcn<lre  aux  séances 
sucUcî»,  M.  Prou  expose  que,  deiniis  1877,  M.  le  eliânotnc 
«îcl  fait  pallie  de  lu  Société,  que  pendant  celte  périoilc 
pris  une  part  des  plus  actives  h  ses  travaux  par  la  pu- 
alian  de  nombreux  et  savants  mémoires  sur  des  qucs- 
historiques-  C'est  pourquoi  H  propose  à  rassemblée 

Kérerî^  M.  le  clianoïne  Blondel  le  titre  de  membre 
re.  La  proiïosition,  mise  aux  voix,  est  adoptée  à 
ftaimilé  des  membres  présents. 
'  h  président  comnmnique  encore. 
Une  lettre  du  ministère  de  l  Instruction  pulilique  et  des 
H-Ârtsjuî  accusant  réception  :  Pdes  cent  trois  paquets 
eiiant  les  exemplaires  du  IkilHfn  de  ht  Soctcté  an-héolo- 
^  rfe  SenSf  tome  XXI,  premier  rascicule  de  1904,  ainsi 
le  Cariitlalre  du  Chapitre  de  Sens  ;  2"  et  des  cinq  e%cm- 
ICI  des  mêmes  publications  destinés  â  In  bibliothèque 
Sociétés  savantes  et  aux  commissions  de  i)u[>îication 
omite  des  travaux  historiques  et  scienliiiques. 
Deux  lettres,  l'une  de  M.  le  préfet  de  l'Yonne,  et  l'autre 
r.  Folliot,  président  du  conseil  général  de  l'Yonne, 
isant  réception  du  tome  XXI  du  Biillelin  de  la  Société 
^otogiqne  de  Sens  et  du  Cartulaire  du  Chapitre  de  Sens. 
fin  M.  le  président,  au  nom  de  la  Société,  adresse  tous 
emerciements  à  M.  l'abbé  Chartraire  et  à  M.  Rousseau, 
>iit  bien  voulu  guider  un  certain  nombre  de  membres 
Société  dans  une  visite  très  intéressante  faite  à  la  ca- 
bale de  Sens. 

-xprinie  le  vœu  que  M.  le  docteur  Moreau,  directeur 
tiusées  de  Sens,  veuille  bien,  lui  aussi,  se  mettre  à  la 
»5ilion  de  la  Société  pour  des  visites  soit  au  musée  gallo- 


XX  II 


Sens  pour  le  djmanclie  21  mai,  à  1  heure  de  raprcs-midi, 
visite  pour  bqtieHe  il  se  mcl  à  b  dlsposîlîon  de  la  Société, 

M.  Heure  pose  In  ((ncsUoii  de  savoir  s'il  ne  serait  pas  op- 
porLun  de  proUlcr  des  Iravoux  qui  sont  exeeulcs  en  ce  mo- 
ment nu  campanile  de  in  enthêdndc  de  Sens,  pour  demnndeiH 
le  rélablissemeiit  de  ce  canipnnile  dans  sa  forme  primilive. 

Vn  échange  d'observations  a  lieu  à  ce  sujet  cuire  M.  Heure, 
M,  Tabbé  Charlraïrc  et  M.  Rousseau,  areliitecte  diocésain. 
M,  Rousseau  rappelle  quelle  est  la  règle  a  cl  u  elle  nient  suivie 
enmaliêre  tle  conservation  des  monuments  historiques  cl  il 
explique  eu  quoi  consisteront  les  réparations  qui  seront 
faites  au  campanile.  Il  ajoute  que»  d'ailleurs,  il  ne  faudrait 
pas  compter  obtenir  les  crédits  nécessaires  à  la  restitution 
souhaitée  par  M.  Heure. 

M.  Char  traire  continue  la  lecture  de  sa  monographie  de  1 
Sèpu 1 1 utr  du  Du i iph  in .  <  V o i  r  le  Bulle t in . / 

M.  Joseph  Perrin  fait  part  à  la  Société  de  la  découverte 
qui  vient  d'être  faite,  à  Saintet'.olomlic,  de  cinq  sarcopha* 
ges  en  pierre  oolithique  hlanehCf  paraissant  dater  de  l'épo- 
que mérovingienne;  un  seul  portait  des  traces  de  sculpture«J 
11  a  été  déposé  au  musée  de  la  ville. 

M.  Perrin  eu  donne  la  description. (V.  BnlHin,  t  XXI L) 

La  séance  se  termine  à  9  heures  el  demie  par  la  distribu- 
tion  de   la  table    du  Musée  gatlo -romain,  composée   par, 
M.  Maurice  Prou. 


Séance  du  5  Juin  ÎOort 

PRÉSIIJKNCE  DE  M.    MaLIUCE  PEOU 

Trente-huit  membres  sont  présents. 

Assiste  lï  la  séance  M.  Raymond  Cox,  directeur  du 
Musée  historique  des  tissus  de  ta  Clininbre  de  commerce  de 
Lyon,  a  qui  M.  Prou  adresse  quelques  paroles  de  bienve- 
aue.  îl  lui  exprime  tous  ses  regrets  de  n'avoir  pu  assister  à 
la  hrllhinte  conférence  cpi  il  a  faite,  le  dimanche  4  juin,  dans 
la  Salle  synodale,  sur  les  *Imus  amivns 


-"    XXIJI    — 


îî  le  prfsidcnt  dépose  sur  le  bureau  les  publicalîoii^  rc- 
çacs  peml^iU  Je  mois  écoulé.  JJ  signale  ccHcs  qui  niérilcjil 
daltirer  riiUenUon  de  ta  Soriélé. 

11  donne  Iccinre  cf  une  letlre  fïc  M.  le  chanoine  Blonde»], 
dmrii  ily  (Vhapilre,  qui,  à  sun  grand  regret,  se  voit  oblige 
de  donner  sa  détius&ioa  de  membre  tilulutre,  Vûgt  et  les  in- 
né tiiî  permellanl  plus  de  se  rendre  aux  séances 
.\cs.  M.  Pnm  expose  que,  depuis  \H11,  M.  le  chanoine 
iUifiidel  fait  partie  de  la  Société,  que  pendant  cette  période 
lli  pris  une  part  des  plus  actives  à  î»es  travaux  jiar  lu  pu- 
Mcaliijn  «ft"  iiondireux  et  savanLs  niénioires  sur  des  ques- 
tions historiques.  C'est  pourquoi  il  propose  k  rasscnibléc 
de  conférer  a  M  le  chanoine  Blonde!  le  titre  de  membre 
honoraire .  l^  proposition,  mise  aux  voix,  esl  adoptée  à 
luQânimiié  des  membres  présents, 
M.  le  (srésiiiient  communique  encore, 
h  Une  kltre  du  niinisiére  de  l'inslruction  publique  et  des 
BuiaiL*ÂrtsJui  accusant  récepliou  :  l^des  centirois  paquets 
ttitilfnant  lest  exemplaîreîs  du  Jinlk'iin  tic  h  Sovîétv  archèotO' 
^iquf  dr  Srtis,  lonic  XXI^  premier  lascicute  tle  1i>04^  ainsi 
que  le  Ca  tintai  té  dn  Clmpiirt  de  Sens  ,  2»  et  des  eint]  cxem- 
|ibires  des  mêmes  publications  destinés  h  la  bibliothèque 
fïcs  Sociétés  sn  vaut  es  el  aux  commissions  de  |}ubiicatian 
mile  des  Ira  vaux  hisUit  iques  et  scientifiques. 
I)eu3^  lettres,  l'une  de  M.  le  préfet  de  l'Yonne,  et  1  autre 
M  Fotliot»  présîdenl  du  conseil  général  de  V Yonne, 
ace  usant  réception  du  tome  XXÏ  du  Btiilefin  de  la  Soviéié 
ixheohffi^ue  ik  Se  m  et  du  (Airttdmre  dn  ChnpHre  de  Sens, 
Enliii  M.  le  président,  au  nom  de  la  Société,  adresse  tous 
nierciemcnls  h  M.  l'abbé  Cliarlraire  et  à  \L  Rousseau, 
ont  bien  voulu  jiuhlcr  un  certain  nombre  de  membres 
ik  b  Sciciélé  dans  une  vigile  très  intéiessante  faite  h  la  ca- 
lliéflfolc  de  Sens. 
Il  exprime  te  vœu  que  M  le  doc  leur  Mureau^  directeur 
lÉ&tuusiér»  de  Scns^  veuille  bien,  lui  ausst^  se  mettre  ù  la 
ftUposîtioci  de  lu  Société  pour  des  visiter  sott  au  musée  gallo- 


ïfi 


m 


—    XXIV    — 


romain,  soit  au  musée  de  peinture,  qui  mériteraient  d'ctre 
mieux  connus. 

M.  l'abbé  Chartraire  fait  une  communication  relative  à 
l'excursion  archéologique  projetée  pour  le  13  juin. 

M.  Maurice  Prou  intéresse  vivement  la  Société  par  le 
compte  rendu  du  congrès  des  Sociétés  savantes,  à  Alger, 
auquel  il  assistait  en  qualité  de  secrétaire-adjoint  du  Comité 
des  travaux  archéologiques,  et  par  le  récit  du  voynge  qu'il 
fil,  à  cette  occasion,  en  Algérie  et  en  Tunisie.  Il  fait  circuler 
dans  la  salle  de  nombreuses  reproductions  photographiques 
des  régions  qu'il  a  parcourues. 

M.  le  docteur  Moreau  a  examiné  les  ossements  contenus 
dans  les  deux  urnes  funéraires  trouvées  à  Pierre-Couverte 
et  qui  ont  fait  l'objet  d'une  intéressante  communication  de 
M.  Joseph  Perrin.  L'une  de  ces  urnes  renfermait  différents 
os  non  incinérés  provenant  d'un  enfant  à  terme  ou  presque 
à  terme.  La  Icte  de  celui  ci  n'a  certainement  pas  pu  passer 
par  l'orifice  du  vase  qui  n'avait  que  0«"085  de  diamètre.  On 
ne  peut  guère  supposer  qu'il  s'agit  d'une  sépulture  à  deux 
degrés  pour  laquelle  un  vase  beaucoup  moins  grand  aurait 
suffi,  et  l'on  doit  plutôt  admettre  que  l'on  a  pratiqué  dans  la 
panse  de  cette  jarre  une  ouverture  permettant  rintroduction 
du  corps  de  l'enfant. 

Les  ossements  contenus  dans  l'autre  urne  sont  beaucoup 
plus  petits  et  proviennent  d'un  fœtus  de  six  mois  environ, 
qui  a  pu  être  introduit  par  l'orifice  du  vase;  il  y  a  à  noter, 
en  outre,  la  présence  de  quelques  fleurs  et  celle  d'un  petit 
objet  métallique  de  forme  triangulaire,  paraissant  être  soit 
un  fragment  d'instrument  ou  de  jouet,  soit  un  ornement  ou 
une  amulette. 

Ces  sépultures  d'enfant  et  de  fœtus  montrent  une  particu- 
larité intéressante  des  mœurs  gallo-romaines,  et  l'on  trouve 
dans  le  musée  de  Sens  un  autre  exemple  analogue.  C'est 
l'urne  funéraire  d'un  tout  petit  enfant,  oflerte  par  M.  Ha- 
bert,  conservateur  du  Musée  céramique  et  archéologique  de 
Reims.  On  n'a  malheureusement  pas  de  renseignements  sur 


—  xvx  — 


tti  os.<emeiiLs  qu'elle  pouvait  i*eiifermert  ni  sur  les  trois  pe- 
Utrscu[»iiles  en  lerrc  bliîiiche  tjwi  y  sunl  ncluellenienh  mais 

Isïï'ùn  cortsi<lcre  ses  dimensions,  on  reconnaîl  quelle  n'n 
pu  mitentr  que  le  corps  iVufi  fcrtus  de  six  à  sept  moî?$  au 

[  fins. 
il  propos  de  la  lecture  de  M*  le  docteur  Moreau^  M.  l'abbé 

Italioisc  fail  observer  qu'il  existe,  sur  le  lerriloire  de  Vin- 

[leCune  du  pelle  dédit^e  à  Notre  Danie  de  Champrnnd  au* 
ir  tic  bqucUe  èlait  im  eî  me  II  ère  consacré  à  la  sépulture 

lllef  enfante  morts  sans  bn|)lénie. 


Siancf  dtt  S  juiUeî  um 

VlitSWESCU  DE  M     L  AUBI^   ClIAtITJlAlllË 


II 


Trrate-cinq  membres  sont  présents. 

Le  |irorc<i- verbal  de  la  drrnîére  séance  est  lu  et  adopté, 

Jt  Tabbé  Cîiartraire  présente  les  excuses  de  M.  Maurice 

oa,  pfésidetit,  retenu  ù  PbHs  par  les  examens  de  1  Ecole 
Uf  s  churles. 

Il  lit  Qce  lettre  île  M.  Il*  ch;in«iinc  BlundeK  qui  remercie  la 

cklé  de  lui  a%*otr  conféré  le  litre  tic  membre  houuraîrc, 

Htl  (impose  sur  k*  bureau  une  brochure  ofFcrlc  par  M.  Blc^n- 

tl,  Inlilulée  :  (origines  itpo^ioliqnai  tHin  ctrtain  nombre  dcn 

fliin  tte  France.  Etude  hisiorhine  el  crittqtWj  par  M,  le  cha- 
K>mr  Rkioilcl,  doyen  ilu  t'Jia pitre  de  Sens. 

Des  remercie  me  11  Isï  houI  votés  à  l'auteur. 

Vu\\)i.  le  président  Mi  part  du  décès  de  M*îf  Léon*Aubin 
|fifi(ftï,  camérier  secret  de  Sa  SainUdé  IMe  X^  docteur  en 
bpobgtc,  ancien  ;ïuniônier  îie  l'IbMel-Dîeu  de  Sens,  sincien 

lire  géuéniî  de  CTlianiliéry;  ancien  curé  de  SaiotLouis 
ic<  lie  Mnscïiii,  chanoine  honoraire  lîe  (Ihambéry 
h  V,  itj(»rl  i\  Jérusulcni  le  l!l  juin  11)05. 
I  flnnn>eUe  que  >U"^  Vivien  a  Tait  parliê  de  la  Société  et  a 


y  u 


I 


li'i 


—    XXVIII    — 

Il  communique  : 

1"  Le  programme  du  congrès  des  sociétés  savantes  qai  se 
tiendra  ù  la  Sorbonne  en  1906  ; 

2^  Une  circulaire  relative  à  la  mise  au  concours  d'un  ma- 
nuel d'histoire  de  la  Bourgogne; 

3'  Une  circulaire  sollicitant  la  Société  de  prendre  part  à 
la  souscription  ouverte  pour  placer,  sur  le  tombeau  de 
M.  le  comte  de  Marsy,  un  médaillon  de  bronze  reprodui- 
sant les  traits  sympathiques  de  l'ancien  directeur  de  la  So- 
ciété française  d'archéologie.  Le  bureau  examinera  celle 
demande  ; 

4^  Une  circulaire  du  comité  formé  pour  l'érection  d'un 
monument  à  Charles  Daubigny,  invitant  la  Société  à  contri- 
buer par  une  souscription  à  la  réalisation  de  ce  projet  ; 

5-^  Une  lettre  de  M.  Paul  Julliot,  en  date  du  30  juin  1905, 
qui,  en  son  nom  et  au  nom  de  sa  famille,  remercie  la  So- 
ciété de  la  remise  qui  lui  a  été  faite  des  exemplaires  et  des 
planches  du  Musée  lapidaire  qui  lui  manquaient,  exemplai- 
res que  la  Société  a  bien  voulu  faire  éditer  pour  compléter 
l'ouvrage  de  M.  Gustave  Julliot  ; 

G*'  Une  lettre  de  faire  part  du  décès  de  M.  Octave-Lor.is- 
Marie  Sachot,  ancien  élève  du  lycée  de  Sens,  chevalier  de  la 
Légion  d'honneur,  officier  de  l'Instruction  publique,  qui  a 
été  membre  correspondant  de  la  Société. 

M.  le  vice-président  a  encore  le  regret  de  faire  part  du 
décès  de  M.  Albert  dn  Feu,  qui  faisait  partie  de  la  Sociélé 
en  qualité  de  membre  libre  depuis  l'année  1893.  Au  nom  de 
la  Société,  il  adresse  ses  condoléances  à  la  famille  du  dé- 
funt. 

Après  avoir  déposé  sur  le  bureau  les  ouvrages  reçus  pen- 
dant le  mois  écoulé,  M.  le  vice-président  annonce  à  la  So- 
ciété que  le  monument  du  chanoine  Philippe  Hodoard  a  élc 
réinstallé  à  la  cathédrale.  11  indique  quel  était  son  ancien 
emplacement  et  fait  ressortir  qu'en  dehors  de  son  intérêt 
historique  le  monument  a  une  réelle  valeur  artistique.  Des 
remerciements  sont  dus,  pour  cette  restitution,  à  MM.  Bé- 


—    X3C1X    — 


mtrti  cl  Rousseau,  architectes,  en  particulier  à  ce  dernier, 
M  Joseph  Perrin  iicpase  sur  le  bure^a  un  ouvrage  ofîcrt 
à  la  Socit'lé  par  M   ïï.  CluroU  hUîtulc  :  Ihk'oiwerie  tfn  Ca- 
nmr  de  Hmirtiahur  à  Saint-Su Ipice,  en  IKfH.    (Exlrail   du 
Bat(f(m  (irs  anciens  èlévns  de  Sainl-SnfpiceJ  M.  Perrin  en 
c  une  courte  âixaly&c  et  fail  ressortir  liniportarice  de 
couverte* 
H  es!  prie  iJe  vouloir  bien  tratisnieUrc  à  M,  Chérolles  re- 
»Bercirni€fits  de  la  Socîél^!^. 

M  Tabbé  Chartrnire  coulinue  1^  lecture  de  sa  mouogra- 
|>Jtic  de  la  StpuHnrt'  du  Dauphin  ùSi'n.%.  Il  relaie  les  événe- 
ots  de  b  période  révohitionnairc  se  rappnrtanl  à  son 
fjel*  «Voir  le  liuUeîin.  ' 

M.  Louis  Kley  fail  une  lecture  intitulée  :  Menhirs  el  dot- 
rm  Après  être  entre"  dans  des  eonsldéniUons  géuënilcs 
fimeerfiaul  ces  monuments  préliiiilori([ues.  M.  Kley  en  vient 
[larler  d'une  pierre  qui  se  irouvnii  en  dernier  lieu  an  bas 
le  lj  colline  de  Saint-Marlin  du  Tertre,  el  qui,  suivant  lui, 
kolt  être  considérée  comiue  un  menhir, 
lli^ erses  observations  sont  prcseniées  par  plusieurs  menu 
yth  de  rassemblée  sur  les  conchisions  du  rapport  de 
Kley- 


Séance  du  9  octobre  tdOîî 
PnÉsmu^QE  DE  M.  Mauhiçe  Prou 

Qaantnie  membres  sont  prêsenU. 

¥ja  1  aliisc  n  c  c  il  u  sec  ré  la  ire  e  l  d  u  p  ro-  se  c  r  ê  ta  î  r  e  e  uî  p  é  c  h  é  s , 

.  TlioriA,   vice-archiviste,  remplit  les  ionclious  de  secrê- 


M  le  pré %i4 lent  dépose  sur  le  bureau  les  pu blica lions  re~ 
les  pendant  Ir  mois  écoulé  el  signnlc  celles  qui  mérite  ni 
attirer  pUix  par  lieu  hérement  1  al  lent  ion  de  la  Sotielé. 
Aprr^  la  lecture  du  iiroeés-verbal  de  la  dernière  séance, 
.  Joseph    Pcrria,  Buviguier  et  Morcau,  font  observer 


--    XXX 


qu'ils  ont  fait  des  réserves  au  sujet  du  rapport  lu,  le  7  août, 
par  M.  Kley,  et  qu'ils  ne  croient  pas  reconnaître  un  menhir 
dans  la  pierre  dont  il  a  parlé.  11  est  décidé  que  cette  obser- 
vation sera  consignée  au  procès-verbal. 

M.  le  président  communique  : 

1«  Une  lettre  de  dom  Besse,  bénédictin  de  Tabbaye  de  Li- 
gugé,  actuellement  à  Chevetogne,  par  Leignon,  province  de 
Namur,  demandant  l'échange  du  Bulletin  de  la  Société  ar- 
chéologique de  Sens  avec  la  Revue  Mabillon,  consacrée  à  la 
publication  des  archives  monastiques  et  paraissant  chaque 
trimestre. 

La  Société,  consultée,  décide  d'accueillir  cette  demande 
d'échange  ; 

2?  Une  lettre  de  la  Société  dunkerquoise  sollicitant  la  par- 
ticipation de  la  Société  à  la  Fédération  amicale  des  Sociétés 
savantes  de  province,  moyennant  une  souscription  de 
10  francs.  La  Société  ne  croit  pas  devoir  accueillir  cette  pro- 
position ; 

3  Une  lettre  de  M.  le  chanoine  Mémain,  demandant  un 
congé  de  quelques  mois,  motivé  par  l'afTaiblissemcnt  de  sa 
santé.  M.  le  président  exprime  le  regret  de  la  Société  d'être 
privée  de  la  présence,  aux  réunions,  de  M.  le  chanoine  Mé- 
main. Il  espère  que  sa  santé  s'améliorera  promptement  et 
il  propose  d'accorder  à  M.  le  chanoine  Mémain  un  congé  de 
six  mois.  Cette  proposition,  mise  aux  voix,  est  adoptée  à 
l'unanimité  des  membres  présents. 

M.  le  président  fait  connaître  que  le  conseil  municipal  de 
Sens  a  décidé  de  donner  le  nom  de  Gustave-JuUiot  à  la 
salle  où  sont  exposées  les  sculptures  romaines,  et,  à  ce  sujet, 
il  s'exprime  en  ces  termes  : 

a  Sur  la  proposition  de  la  commission  du  Musée  et  spé- 
cialement de  notre  collègue,  M.  le  docteur  Moreau,  le  con- 
seil municipal,  dans  sa  dernière  séance,  a  décidé  de  don- 
der  le  nom  de  Gustave-JuUiot  à  la  salle  du  musée  où  sont 
exposées  les  sculptures  romaines,  afln  de  perpétuer  la  méi 
moire  d'un  savant  sénonais  dans  le  lieu  même  qui  était  de^ 


—    XXXI    — 

venu  comme  son  cabinet  de  travail,  et  oti  il  a  élnborê  une 
irovn;  qui,  seule,  s^tininilt  à  aïvstircrson  nom  contre  l'oubli, 
tbtitîimage  que  la  \ilte  rend  ù  notre  regrette-  eollî-guc  re- 
jaillit sur  nuire  Sodélé,  donl  il  a  été  pendant  de  longues 
aiiinées  le  reprèscnlîint  le  plus  «nutorise,  ci  il  nous  est  per- 
mis de  eon^i«iérer  la  decUîon  du  corps  municipal  eomme 
oîie  rvetia naissance  deî*  eliorts  de  noire  Société  pour  le  dé- 
Trluppcmeni  du  Musée  gallo  romain,  créé  par  nos  Tonda- 
leurh  raéraes. 

•  ie  crois  être  rinterprète  de  vos  sentiments  en  exprî- 
uuint  ici  notre  gratitude  h  la  commission  du  Musée  et  ii  la 
nmnidpjiliitv  » 
rtieîkalve  d'applaudissements  accueille  ces  paroles, 
l'arbiit  ensuite  des  origines  de  la  Uibliotticque  munici- 
pale, M  le  président  analyse  un  dosfiier  de  documents  re- 
Uiiî%  aux  urigincs  de  la  BibtioUièque  de  Sens^  acluellenient 
eanservé  ou  dépnrlementdcs  manuscrUs  de  la  Bibliothèque 
nationale,  et  que  lui  a  signalé  M,  Henri  Omont,  membre  de 
Ibiîitilut,  conservateur  de  ce  déparlement. 

Le  plus  ancien  de  ces  documents  est  un  questionnaire 
noacié  à  une  circulaire  adressée  par  le  ministre  de  11  nié - 
'îeuTt  le  15  pluviôse  an  Vfl  t'i  février  ITlftl),  aux  administra- 
Hita*  dépflrtementnles.  Le  questionnaire  fut  rempli,  pour 
tYonne,  par  le  citoyen  Laîre,  bibliottiécaire  de  FEcolecen- 
Irtift  et  relcjurné  i\  Pans,  le  t*»"  germinal  an  Vil  t2l  nuirs 
%79&},  ljc%  nf-ponses  deLair«,  outre  qu  elles  contiennent  une 
ibiograpfiic  de  ce  célèbre  bibliophile,  nous  renseignent 
'^lat  tic%  anciennes  tilblioUiéques  du  dépnrlcmenl  et, 
iatement,  sur  les  anciennes  bibliothéfîues  publiques  du 
pilre  cl  du  collège  de  Sons,  sur  le  dépôt  de  livres  appelé 
put  IJllcfuire,  fiirtné  h  Sens,  cl  où  l'on  avait  réuni  les  livres 
\t\  r^tnblisficniciits  religieux  supprimés  et  des  coiulamnés, 
Tcirel  de  rép:irtir  ces  livres  cuire  tes  J>ibUolhèques  aux- 
[elles  on  pensait  qu'ils  devaient  être  utiles;  enfin,  sur 
elqucs  œuvres  dort  dont  plusieurs  sont  aujourd'hui  au 


\^' 


—    XXXII 


i 


Le  même  dossier  renferme  encore  une  lettre  de  Tadminis- 
tration  municipale  de  Sens,  du  5  germinal  an  VIII  (26  mars 
1800),  au  ministre  de  Tintérieur,  indiquant  les  sacrifices  que 
la  ville  a  déjà  consentis  pour  préparer  l'établissement  d'une 
bibliothèque,  et  requérant  l'aide  du  ministre  pour  la  ren- 
dre publique. 

Une  série  d'autres  lettres  dû  préfet  et  du  ministre,  des 
années  180 J,  1817  et  1820,  sont  relatives  à  la  même  question 
et  permettent  de  constater  qu'en  cette  dernière  année  la 
bibliothèque  de  Sens,  installée  au  collège,  n'avait  pas  en- 
core de  conservateur  et  n'était  pas  encore  ouverte  au  pu- 
blic. 

Après  cette  intéressante  communication,  M.  le  président 
porte  à  la  connaissance  de  la  Société  que  le  Syndicat  d'ini- 
tive  pour  attirer  les  étrangers  dans  le  Sénonais  sollicite  une 
nouvelle  subvention  qui  lui  permettrait  de  mener  à  bien  la 
lourde  tâche  qu'il  a  entreprise. 

M.  le  président  propose  d'accorder  au  Syndicat  une 
somme  de  vingt  francs,  en  exprimant  le  regret  que  les  res- 
sources de  la  Société  ne  lui  permettent  pas  un  concours 
plus  généreux. 

Cette  proposition  est  adoptée  par  la  majorité  des  mem- 
bres présents. 

Au  nom  de  la  Société,  M.  le  président  adresse  des  remer- 
ciements à  M.  Joseph  Perrin,  qui  a  fait  don  à  la  Société 
d'un  volume  des  Affiches  de  Sens,  année  1784,  et  d'un  volume 
des  œuvres  du  conventionnel  Châtelain. 

M.  l'abbé  Chartraire  continue  sa  très  intéressante  lecture 
sur  la  Sépulture  du  Dauphin.  Il  raconte  les  péripéties  de  la 
restauration  du  mausolée,  en  1814,  de  l'exhumation  des 
restes  du  Dauphin  et  de  la  Dauphine  et  de  leur  retour  du  ; 
cimetière  à  leur  sépulture  dans  la  cathédrale  et  retrace  les 
petits  conflits  survenus,  à  cette  occasion,  entre  rautorité 
civile  et  l'autorité  ecclésiastique.  ^Voir  le  Bulletin. J 

M.  Rousseau  fait  connaître  qu'avec  le  concours  deM.Lou- , 
zier,  architecte  des  Monuments  historiques,  il  a  fait  procé-  ' 


—  xxsm  — 

,„ila  restauration  du  bas-reUef  représentant  h.  Mn.lc- 

;I  Ïulée.  p.r  .,ud4..--.  à  Jean  C..s.n,  et  c,u. 

♦rmivP  dans  rédise  Saint-Maurice. 
TseprPerrin  fnit  remarquer  c.ue  cosl  la  Sociét.  ar- 
JolSe  qai  a  pris  l  initiative  .ic  d.mnndor  la  pr..crva- 
r  ;cemol..cnt  menacé  .m.e  rninc  proch.m. 


■rie  veLsséc.  appelée  a«..i  poterie  s-"-""^'; ''^'  ^^^_ 

aïo-romaine,  représentant  de.  hommes  de.  o"^;    "^    - 

,e.Bi  elc ,  trouvé  dans  les  terrassements  pratiquas  prcs 

fa  p-me.adr  du  Qnator.e-Jui.iet  et  déposé  sur  le  bu 

resu  par  notre  collègue,  M.  Morel,  qui  la  rccuedh. 


reau  par 


Séance  du  S  novembre  1905 

Pbésidenxe  de  m.  Maurice  Phol- 

Ouarante  membres  sont  présents. 

M   l'abbé  Bonneau,  curé-doyen  de  ChabUs,  membre  libre, 

^ïe  proclterbal  de  la  deraiére  séance  est  lu  cl  ndopjé 

i  Criée  Proo,  M- iabbé  Chartraire  et  ^-  ^^^^- 
neau  présentent,  en  qualité  de  membre  hbrc,  M.  t-lurUs 
CoDstantinChanviu,  propriétaire,  à  Chalil.s 

M  Maurice  Prou,  M.  l'abbé  Chartra.re  et  M.  Joseph 
Perrin  présentent,  en  qualité  de  membre  correspondant, 
le  R  P  dom  Besse,  bénédictin  de  1  abl^aye  de  Ugm;  d.- 
recteur  de  la   Hevue  Mahilloa,  à  Chevelogne,  par  Lci-non 

province  de  Naniur.  t„iii„t  -,  iilon 

M  le  président  fait  connaître  que  lafamdlc  Jull,  >t  a  bien 

ccJocaLnts  pourront  et™  utiles  !.  1»  bocc... 


1! 


llHh 


-I, 


1.  :^ 


—    XXXIV    -r- 


Un  examen  en  sera  fait  aussitôt  que  possible.  Des  remer- 
ciements sont  votés  s\  la  famille  Julliot. 

M.  le  président  dépose  sur  le  bureau  quatre  documents 
intéressants,  offerts  par  M.  Pagnier. 

Ce  sont  : 

1«  Des  lettres  royaux,  en  forme  de  charte,  encore  munies 
de  leur  sceau,  en  date  du  12  février  1665,  portant  maintenue 
de  noblesse  en  faveur  d*Edme-Hector  des  Ardans; 

2»  Un  brevet  d'armoiries  pour  Edme-Hector  des  Ardans, 
chevalier,  seigneur  de  Gumery,  mousquetaire  du  roi  en  la 
première  compagnie. 

3"  Des  lettres  royaux,  autrefois  scellées,  sur  double 
queue,  en  date  du  i  avril  1704,  portant  nomination  de  M«  An- 
toine Fauvelet  comme  conseiller  honoraire  au  bailliage  et 
siège  présidial  de  Sens  ; 

4*»  Un  brevet  de  cornette  de  la  quatrième  compagnie  du 
régiment  de  dragons  de  la  Suze,  pour  le  sieur  Poréhero,  en 
date  du  22  septembre  1742. 

Des  remerciements  sont  adressés  à  M.  Pagnier. 

M.  le  président  communique  une  lettre  de  la  Société  d'étu- 
des d'Avallon,  qui  demande  une  subvention  pour  Taider  à 
acquérir,  afln  d'en  assurer  la  couservation,  les  restes  du 
prieuré  de  Saint-Jean-les-  Bons-Hommes,  situé  à  trois  kilo- 
mètres d'Avallon,  près  de  Sauvigny-le-Bois. 

En  raison  de  l'intérêt  qui  s'attache  à  la  sauvegarde  de  ce 
monument,  l'assemblée,  consultée,  vote,  à  l'unanimité  des 
membres  présents,  une  subvention  de  50  francs. 

Enfin  M.  le  président  dépose  sur  le  bureau  les  publica- 
tions reçues  pendant  le  mois  écoulé. 

M.  le  commandant  Buvignier  communique  à  la  Société  un 
programme  imprimé  de  thèses  qui  ont  été  soutenues  sur  la 
LogiquCy  la  Métaphysique  et  la  Pneumatologie  (science  des 
esprits^  dans  la  grande  cour  du  collège  des  Jésuites  de  Sens 
(le  lycée  actuel),  le  13  août  1755,  à  2  heures  de  l'après-midi 
par  quatre  élèves  de  ce  collège  :  Claude-Edmond  Lancome, 
de  Brienon,  Edmond  Richard,  de  Montereau,  Etienne  Ro- 


—    XXXV    — 


tL  I  ïk  Vinîi*Novii*BelUcosa,  d  et  Antoine  Roi,  ilc  Sens. 
{a  libraire  tie  Paris  propose  Tachnl  de  ce  dociîmenl  nu 
pm  de  5  fmnes,  mais  malgré  rintérêt  qu'il  présente,  k  So- 
çirlé  déeide  de  ne  pas  dt^passcr  le  prix  de  2  francs, 

M  J-  Perrin  fait  un  rapporl  sur  les  ion  il  les  de  J'oppiduni 
fltïu  cimelière  gaulois  de  Chaumont  Haule-Marne^  Il  ana- 
lyîte  b  noiice  pai-ue  dans  les  Aimâtes  de  la  Sovivk-  d'hisknre 
ft  énrrhrtâkujie  de  Ciuiumonî,  année  190"»,  rascicule  20*s  et 
dans  laquelle  M,  Ca^antol,  président  de  celte  Société,  dans 
une  étude  fort  intéresï»antc  sur  les  nécropoles  de  la  uionla- 
gnc  de  Saint  Roeti,  près  Chaumont,  démontre  que  1  agglo- 
mération cha  union  ta  î*^c  est  plus  ancienne  qu'où  ne  pense  et 
qu'elle  occupait  le  plateau  deSainlHoeh»  connu  sous  le  nom 
êv  TirtW-Olt\  tiîen  avant  de  venir  se  grouper  au  tour  du  ciuV 
teau-fort  qui,  durant  le  moyen  jige,  lui  servit  de  défense. 

M,  J.  PeiTJii  conclut  en  faisant  ressortir  d'al>ord  quel  in* 
Irrêl  il  paorrait  y  a%*oir  pour  notre  Société  à  suivre  l  exem- 
fiie  de  rcîle  de  Chaurnont  en  faisant  des  recherches  qui 
pourraient  conduire  à  des  découvertes  ajiaiogues;  el  en  se- 
cond tleu«  quel  profit  il  y  aurait  pour  les  membres  de  la 
Société  à  lire  et  consulter  les  ouvrages  composant  sa  bi- 
MloUiéque. 

11.  Frou  sîguîite,  à  la  Bibliothèque  royale  de  Belgique*  un 
maDiisrnl  H  origine  sénonalse  C'est  un  pontifical  écrit  pour 
1111  arche vétiue  de  Sens,  au  xv*'  siècle.  11  porte  aujourd  hui, 
Il  Bibljothcque  de  Bruxelles,  le  numéro  9215.  Les  nom* 
limses  et  belles  miniatures  dont  il  est  orné  l'ont  rendu  de- 
ptn%  longtenips  célèbre.  Les  peintures,  dont  la  plupart  re- 
préicfltent  Tévèque  dans  rcxercice  de  ses  diverses  fonctions, 
répftrtiîîsefil  en  deux  groupes  :  dont  le  premier  est  rceuvre 
•rtjstc  orriéré,  et  dont  le  second  est  l'teuvrc  d'un  nr- 
Dovatetir, 
II.  l*rou  met  sous  les  yeux  de  la  Société  la  photographtc 
f  la  plu&  belle  des  peintures  de  ce  manuscrit^  une  eruei- 
,  que  Jklieliiels  a  attribuée  sans  hésitation,  mais  aussi 
suHisantes,  à  Roger  van  der  Weyden. 


—    XXXVI    — 

M.  Tabbc  Charlraire  fait  une  lecture  intitulée  :  Sens  en  18U 
et  18i6.  L'exhumation  des  restes  du  Dauphin j  les  visites  du 
comte  d'Artois  et  de  la  duchesse  d'Angoulême.  (Voir  le  Bul- 
letins 


Séance  du  4  décembre  1905 
Présidence  de  M.  l'abbé  Chartraire,  vice-président 

Quarante  membres  sont  présents. 

Le  procés-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  Tabbé  Chartraire  présente  les  excuses  de  M.  Maurice 
Prou  qui,  très  fatigué  et  retenu  à  Paris  par  ses  nombreuses 
occupations,  n*a  pu  venir  présider  la  séance  et  donne  lec- 
ture de  son  compte  rendu  sur  les  travaux  de  la  Société  pen- 
dant l'année  1905  : 

<  Messieurs, 

«  Le  compte  rendu  de  nos  travaux  que,  suivant  la  tradi- 
tion, le  président  doit  vous  faire  chaque  année,  lui  serait 
une  tâche  agréable,  puisqu'il  y  trouverait  l'occasion  de  con- 
stater la  vitalité  de  notre  Compagnie,  sll  ne  fallait  en  même 
temps,  et  tout  d'abord,  rappeler  le  souvenir  de  ceux  que  la 
mort  nous  a  enlevés,  devoir  toujours  pénible,  mais  que  la 
mauvaise  fortune  a  voulu  me  rendre  plus  pénible  encore 
en  m'imposant  d'inscrire  pieusement  dans  notre  nécrologc 
le  nom  d'un  collègue  à  qui  j'étais  lié  d'une  affection  pro- 
fonde et  respectueuse  depuis  ma  première  enfance,  qui, 
dans  les  derniers  jours  de  sa  vie,  me  donnait  encore  des 
témoignages  de  bienveillance,  vers  qui,  enfin,  ma  pensée  ne 
peut  se  reporter  sans  évoquer  du  même  coup  tant  d'êtres 
chers  et  disparus. 

c  Alfred  Tonnellier  était  entré  dans  la  Société  en  1867.  Bien 
qu'il  fût  le  plus  ancien  parmi  nous,  ni  son  âge  ni  sa  santé 
ne  faisaient  prévoir  qu'il  dût  nous  quitter  si  promptement. 
Notre  vice-président  a  rendu  à  sa  mémoire  un  hommage 
qu'on  ne  saurait  qualifier  de  dernier,  puisqu'il  est  impossi- 


—    XXXV7I    — 


hlc  que^  en  raison  rie  k  place  qu'il  a  tenue  ici,  son  nom  n'y 
lotf  encore  souvent  évoque  ei  toujours  honoré,  Qirsi  Al- 
fred Ton nel lier  n'a  Hen  éerit  pour  nos  buttelins,  nlor^  que 
h  connaissance  qn  il  avait  de  notre  pays  et  de  ses  tradi- 
Lioais  Jointe  a  une  grande  racîlité  de  style,  lui  eût  permis  de 
le  faire,  il  n'en  a  pas  moins  tenu  parmi  nous  un  rôle  inipor- 
taot  et  par  rassiduité  aux  séances  et  par  une  intervention 
linèquente  dans  les  discussions.  Une  intelligence  vive,  au- 
tant de  rîartc  dans  la  |)ensée  que  dans  la  parole,  une 
gnrnde  expérience  de  juriste,  et,  sous  une  apparence  prl- 
ttiesâuliére,  une  pensée  réfléchie  et  un  attachement  opiniâ- 
tre à  ses  coiivietions  faisaient  de  noire  collègue  un  de  vos 
r0nsetllers  les  meilleurs  et  les  plus  écoutés.  D'un  caractère 
âJtnatile^  qm  lui  avait  acquis  tant  de  sympathies,  il  appor- 
lail  dans  nos  réunions  un  [)eu  de  cet  esprit  et  de  celte  verve 
qu  il  dépensait  largement  d;ins  les  salons  ;  il  nous  en  réser- 
vait ce  qui  convient  à  une  Société  d'archéologues.  Mais 
nouft  ne  sommes  pas  ici  seulement  pour  tUsserler;  nous 
y  sntntDes  aossi  pour  maintenir  les  tradilions  locales.  Kl 
nul  plus,  ni  mieux  que  TonncUier,  ne  pouvait  prétendre  à 
le*  riinnaitre.  Avec  lui  disparaît  un  Sénonais  de  vieille  sou- 
cbe  et  qui,  plus  tard,  fera  figure  dans  les  annales  de  notre 
clîi  au  xi3t'  siècle. 

t  Ncxu*  avons  eu  aussi  le  regret  de  perdre  deux  membres 
lûurrx  :  M    Alliert  de  Feu  et  le  vicomte  René  de  Mimtjoie. 

•  ît  nous  faut  aussi  accorder  un  souvenir  h  Tun  de  nos 
aiicienx  ctirriîïipondants.  Octave  Sachot,  non  parce  quMl  fut 
Il  Itérât  eu  r  distingué  et  qu1l  est  honorable  pour  nous 
son  no  ni  ait  figuré  sur  nos  listes,  mais  plutôt  parce 
qotl  garda  Jusqu'à  la  tin  un  attachement  profond  à  ses  com- 
pn triât  es. 

1  Le*  pertes  d'une  société  ne  sauraient  se  compenser.  Car, 
(m$ofi9('tà  le  c6té  sentimental  ;  il  reste  quechnque  homme 
*  Sien  carnet r*rc  propre  cpii  fait  qu'un  autre  peut  prendre  sa 
place  sans  jnmais  I  occuper  complékmcnt.  Mais  la  force 
tilalc  tirs  s0ci<fté&  réside  dans  t'enchevclreraenl  des  gêné- 


—    XXXVIII    — 


rations,  qui  résulte  des  nouvelles  recrues.  Nous  devons 
avouer  que,  cette  année,  le  nombre  des  membres  n*a  pas 
augmenté.  Si  nous  avons  eu  le  plaisir  d'accueillir  parmi  les 
membres  litulaires  M.  Tabbé  Corberon  et  M.  Heure,  biblio- 
thécaire de  la  ville,  ils  ne  sont  pas  de  nouveaux  venus  ; 
comme  membres  libres,  ils  prenaient  part  à  nos  travaux. 
Le  goût  qu'ils  ont  pour  nos  études  et  les  preuves  qu'ils  en 
ont  données  par  leurs  écrits  nous  autorisent  à  attendre 
d'eux  une  collaboration  plus  active. 

«  La  santé  de  M.  le  chanoine  Blondel  lui  a  fait  craindre 
de  ne  pouvoir  plus  remplir  les  obligations  d'un  membre 
titulaire.  Ce  sont  là  craintes  chimériques.  L'ardeur  qu'il  a 
toujours  apportée  aux  recherches  historiques  ne  saurait 
s'éteindre.  Un  esprit  aussi  actif  ne  peut  se  détacher  d'étu- 
des auxquelles  il  a  consacré  tous  les  loisirs  que  lui  laissait 
l'exercice  de  son  ministère.  Les  liens  qui  nous  unissent  à 
lui  ne  se  relâcheront  pas.  En  lui  conférant  le  titre  de  mem- 
bre honoraire,  vous  avez  voulu  non  pas  tant  témoigner  de 
votre  reconnaissance  à  son  endroit  et  de  l'estime  que  vous 
avez  pour  ses  Irnvaux  et  sa  personne,  que  marquer  le  désir 
qu'il  continue  à  vous  communiquer  le  résultat  de  ses  inves- 
tigations, à  poser,  discuter  et  résoudre  devant  vous  les  pro- 
blèmes les  plus  difflciles  et  les  plus  controversés  de  l'his- 
toire de  l'Eglise  sénonaise.  L'honorariat  ne  sera  pas  pour 
lui  synonyme  de  retraite. 

«  Car,  il  importe,  Messieurs,  que  chacun  de  nous,  dans  la 
mesure  de  ses  forces,  contribue  au  travail  qui  est  l'objet  de 
notre  Société  :  rechercher,  conserver,  expliquer  les  monu- 
ments d'un  passé  glorieux 

«r  En  dépit  des  destructions  que  le  temps  et  les  hommes, 
plus  que  le  temps,  ont  faites,  la  ville  de  Sens  conser>x  en- 
core des  vestiges  de  l'antiquité  et  du  moyen  âge  qui  pro- 
clament le  rang  considérable  qu'elle  a  tenu  en  ces  temps-là 
parmi  les  villes  de  la  Gaule  et  de  la  France,  et  des  vestiges 
qui  ne  sont  pas  seulement  des  reliques,  mais  qui  ont  une 
valeur  artistique,  indépendante  et  de  l'antiquité  et  des  sou- 


—    XXXIX    — 

vriïïrs  qui  s*y  nitlnclient.  lelle  que  les  étrangers  sentent,  à 
JfîCOJîletnpkr,  une  émotion  dans  laquelle  i;'enlrent  pAs  les 
feotimcnts  d'une  piélé  fUfale, 

I  L  inlérét  que  nous  autres  prenons  h  la  ealliédrole,  aux 
églises  Saint  Suvinien  et  Saint- Je£in,  aux  hns^reliefs  romnins 
retirés  des  nturaïH^îS,  à  Ja  vieille  poterne  et  même  aux  ar- 
diiresquî  nous  livrent  la  pensée  et  les  actes  de  nos  ancé- 
tresi  pourrait  nvoir  sa  source  uniquement  ttans  ce  senti- 
ment qui  nous  attache  aux  choses  vues  dans  la  jeunesse  ou 
au  milieu  desquelles  nous  vivons,  et  qui  nous  rend  curieux 
de*  gestes  de  cqu\  qui  ont  foulé  le  même  sol. 

•  U  n'en  eU  rien  Le  témoignage  des  étranj^ers  prouve  que 
notre  admiration  ne  s'égare  point.  Quelques-uns  d*enlre 
vomuni  |>eut  être  lu  un  vuluuie  tlun  amùricain^  M,  W,  Mor* 
Ion  FuUerlnn,  paru  en  1DÛ5,  et  intitulé  :  Terrvu  françfihvsi. 
^n%  1rs  premières  pages^  Tâuteur  a  consigné  les  impres- 
jticms  que  la  visite  de  Srn**  lui  a  foiles  el  laissées  Sans  doute 
quelques-uns  de  ses  Jugements  sont  contestables.  Mais  il  a 
senti  tout  le  charme  du  paysage  calme  qu'on  découvre  du 
htaldu  ï  viey*\  pont  à  dos  d  iine;  ^  il  a  été  saisi  de  la  gran- 
deur de  la  cathédrale  qui  f  domine  triomphalement  la 
ifific;  >  jJ  a  été  ra%i  des  «  merveilles  i»  du  trésor;  il  s  est 
rrporlé  vers  les  souvenirs  qu'évoquent  dans  tout  esprit  cul- 
tiré  et  ces  monuments  et  d'autres  encore.  Et  enfin,  il  a  con* 
dit;  i  LliJstoîre  d^une  ville  comme  Sens  ennoblit  toute  une 
•  nitfofi.  « 

t  (*est  la  conscience  que  vnus  avex  de  cette  grandeur  qui 
vt>Qs  soutient  dans  les  recherches  que  vous  poursuivez. 

I  Aucune  période  de  l'histoire  ne  reste  en  dehors  du  ca* 
dredenos  études,  En  remontant  Jusqu*à  l'invasion  arylenne 
et  eu  vous  entretenant  des  menhirs  et  des  dolmens, 
M  Kiev  a  renouvelé  un  sujet  que  nos  prédécesseurs  avaient 
ikjù  Imite,  car  le  premier  volume  de  nos  Bnt!rifns  contient 
pae  étude  sur  les  monuments  qu  alors  on  appelait  celtiques 
u'oji  attribue  nujounihui  ù  la  race  d'homme  établie 
nos  régions  aotérieurement  à  ta  conque  Le  gauloise,  tl 


( 


—    XL    — 


^  -, 


k^ 


est  probable  que  le  silence  de  ces  blocs  de  pierre  éveillera 
longtemps  encore  Tiinagination  des  esprits  curieux  de  ré- 
soudre les  problèmes  difïiciles. 

•^c  M.  Joseph  Perrin  vous  a  fait  connaître  l'usage  antique 
d'enterrer  les  morts  dans  des  vases  de  terre.  Il  avait  visité, 
avec  M.  Sépot,  les  fouilles  que  M.  Lapôtre  pratique  avec 
habileté  et  succès  sur  le  territoire  de  Courgenay,  et  assiste 
h  la  découverte  de  vases  contenant  des  ossements  humains, 
que  le  docteur  Moreau,  chez  qui  Tanatomiste  se  double 
d'un  archéologue,  a  reconnus  pour  ceux  d'enfants  nou- 
veaux-nés. Cette  détermination  a  fourni  à  M.  l'abbé  Laboise 
l'occasion  de  signaler  l'existence,  à  Vlnneuf,  d'un  ancien 
cimetière  réservé  à  la  sépulUire  des  enfants  morts  sans 
baptême. 

«  C*est  encore  M.  Joseph  Perrin  qui  a  appelé  devant  vous 
le  plus  ancien  témoin  du  christianisme  à  Sens,  un  ustensile 
bien  vulgaire,  d'une  facture  grossière,  une  simple  lampe  de 
terre,  mais  inflniment  précieuse  puisqu'elle  est  ornée  du 
monogramme  du  Christ,  type  de  lampe  dont  la  Gaule  n'a 
fourni  que  très  peu  d'exemplaires.  M.  Perrin,  de  qui  vous 
entendez  toujours  avec  plaisir  la  parole  claire  et  élégante, 
en  a  dégagé  la  valeur.  Cette  communication  a  incité  M.  le 
chanoine  Mémain  à  rédiger  un  mémoire  sur  un  autre  mo- 
nument de  la  même  époque,  et  portant  le  même  mono- 
gramme, que  les  épigraphistes  ont  commenté  à  plusieurs 
reprises,  mais  dont  personne  n'avait  donné  une  explication 
aussi  complète  ni  aussi  approfondie  que  c(^lle  que  nous  a 
proposée  notre  collègue  :  nous  voulons  parler  des  tablettes 
de  bronze  offertes  au  consulaire  Lupicinus  par  les  cités  de 
Sens,  d'Auxerre  et  d'Orléans. 

«  M.  Félix  Chandenier,  vous  rendant  compte  d'un  livre 
de  M.  William  Aspinwal,  sur  les  écoles  épiscopales  et  mo- 
nastiques de  l'ancienne  province  ecclésiastique  de  Sens,  ne 
s'est  pas  borné  î^i  en  faire  l'analyse,  ni  même  à  le  critiquer; 
aux  recherches  de  l'auteur,  il  a  ajouté  des  observations  que 
lui  permettaient  de  faire  des  études  personnelles. 


—  xu  — 

f  M.  Buvignier  nous  a  fait  sortir  du  moyen  âge,  avec  une 
communication  sur  les  œuvres  poétiques  du  cardinal  du 
Perron.  Aux  remerciements  que  nous  adressons  à  notre 
collègue  pour  nous  avoir  fait  connaître  une  littérature  qui 
ne  nous  est  pas  familière,  nous  devons  en  ajouter  d'autres 
p<>ur  le  dévouement  avec  lequel  il  a  entrepris  une  œuvre, 
qui,  une  fois  achevée,  sera  très  utile  et  doublera  la  valeur 
de  nos  publications,  nous  voulons  dire  la  table  alphabéti- 
que et  analytique  de  nos  Bulletins.  Car  s'il  est  actuellement 
facile  de  retrouver  dans  nos  Bulletins  les  mémoires  qui  y 
sont  imprimés,  il  Test  beaucoup  moins  de  rechercher  les 
renseignements  si  nombreux  disséminés  dans  les  procès- 
verbaux. 

c  Enfîn,  M.  le  chanoine  Chartraire  nous  a  lu  un  mémoire 
très  documenté,  rempli  de  détails  nouveaux  et  précis  pré- 
sentés de  la  façon  la  plus  élégante,  sur  le  tombeau  du  Dau- 
phin. Dans  une  série  de  tableaux,  il  nous  a  montré  le  peu- 
ple accompagnant,  avec  les  marques  d'nn  deuil  sincère, 
Ihéritier  du  trône  jusqu'au  lieu  de  sa  sépulture,  les  littéra- 
teurs et  les  artistes  rivalisant  d'imagination  pour  élever  un 
monument  digne  de  la  mémoire  d'un  prince  royal,  ce  mo- 
nument à  peine  achevé  et  déjà  menacé,  préservé  cepen- 
dant de  la  destruction,  mais  soustrait  aux  regards,  puis  la 
génération  suivante  le  restaurant  en  même  temps  qu'elle 
reprenait  les  traditions  nationales  un  moment  abandon- 
nées :  image  en  raccourci  de  l'histoire  de  la  France  pendant 
un  demi-siècle. 

c  Deux  savants  étrangers  à  notre  Compagnie  l'ont  honorée 
de  leur  collaboration;  l'un,  membre  de  l'Institut;  l'autre 
membre  de  la  Société  des  antiquaires  de  France.  M.  Jules 
Guiffrey  nous  a  envoyé  des  documents  sur  Jean  Cousin,  aux- 
quels il  a  joint  un  commentaire.  M.  Adrien  Blanchet,  met- 
tant à  notre  service  une  compétence  numismatique  hors  de 
|)nir,  a  écrit  la  notice  d'une  trouvaille  de  monnaies  gauloises 
fiiile  à  Sens  en  1897.  Nous  leur  adressons  l'expression  d'une 
très  vive  gratitude. 


—    XLII    — 


c  Ainsi,  des  temps  préhistoriques  au  xix«  siècle,  nous  avons 
soivi  le  développement  de  notre  histoire  dans  les  monu- 
ments figurés  et  dans  les  documents  écrits. 

«  Toute  la  dépense  d*érudition  qui  s'est  faite  ici  n*a  pas  pro- 
fité exclusivement  aux  membres  de  la  Société.  Noos  avons 
voulu  en  assurer  le  bépéfice  à  quelques  antres.  Vous  avez 
invité  les  personnes  de  votre  parenté  à  assister  à  la  confé- 
rence qu*a  faite  tout  exprès  pour  la  Société  archéologique 
M.  Raymond  Cox,  directeur  du  Musée  historique  des  tissus 
delà  Chambre  de  commerce  de  Lyon,  et  aussi  à  la  visite  de 
la  cathédrale,  que  MM.  Chartraire  et  Rousseau  ont  dirigée 
avec  Tautorité  que  leur  donne  une  connaissance  complète 
du  plus  beau  des  monuments  sénonais;  et  encore  à  une 
promenade  archéologique  et  artistique  à  Moret  et  à  Fontai- 
nebleau, rendue  si  attrayante  et  intéressante  par  les  expli- 
cations que  vous  ont  données  M.  Lioret,  conseiller  général  de 
Seine-et-Marne,  et  M.  Deroy,  membre  de  la  Société  archéo- 
logique du  Gâtinais.  Ces  excursions,  que  mes  prédécesseurs 
ont  organisées  il  y  a  quelques  années,  ont  été  accueillies 
nvec  la  plus  grande  faveur.  Elles  ont,  croyons-nous,  beau- 
coup d'utilité.  Elles  nous  mettent  en  contact  direct  avec  les 
monuments,  et  nous  instruisent  en  quelques  instants  plus 
que  ne  le  feraient  des  livres  et  des  photographies.  Elles  sont 
de  nature  à  développer  le  goût  artistique  chez  ceux  qui  l'ont 
et  à  réveiller  chez  dautres  où  il  est  latent.  Elles  répondent 
à  la  méthode  de  pédagogie  contemporaine  qui,  pour  la  cul- 
ture de  Tesprit,  fait  appel  aux  leçons  de  choses.  Seuls  ceux 
de  nos  collègues  qui  assument  la  charge  d'organiser  ces  ex- 
cursions pourraient  trouver  que  le  charme  n'en  est  pas  sans 
mélange;  ils  n'y  songent  pas;  le  dévouement  aux  intérêts 
communs,  dont  ils  donnent  des  preuves  continuelles,  le 
plaisir  qu'ils  ont  à  vous  être  agréables,  la  conscience  de 
faire  œuvre  utile  sont  le  contrepoids  des  ennuis  que  peu- 
vent leur  causer  les  démarches  nécessaires  au  succès  de  ces 
petits  voyages.  Et  si  à  tout  cela  nous  ajoutons  de  notre  pari 
de  sincères  sentiments  de  reconnaissance,  nous  ne  doutons 


—  xuu  — 


tsque  noir^  vice  président  et  notre  tresarier  ne  nous  cn- 

aeut  encore,  l'été  prochain,  vers  quelque  ville  où  nos 

oâlsurcUénlogiqaes  et  artistiques  trouvent  satisfacUon. 

t  Nous  n'âvoiii>  pas  perdu  tl^  vue  l'un  des  objets  de  noire 

ijtuUon,  qui  est  d'assurer  ta   conservation  des  anciens 

Doitunients,   Nous  avons  sollicité  de  M.  le  sous-secrétaire 

aux  beauik-arts  le  ctassemenl  de  quelques  restes  re- 

aaMcs  de  Tenceinte  romaine.  Nous  pouvons  espérer 

b  poterne   des  Qiia Ire-Mares,  là  muraille  où  elle  est 

cét%  el  la  belle  salle  du  xit«  sltelc  qui  s'y  appuie  seront 

tisesou  nombre  des  monuments  hbtoHques.  Noussouhai- 

rions  aussi  qu'on  assurai  contre  In  destruction  la  seule 

rqui  présente  encore  sur  Tune  des  faces  un  appareil  ro- 

bien  conservé  el  dont  le  rez-de-chaussée  est  voùlé,  à 

JÏRtérieur,  il  une  coupole  du  moyen  iige,  nous  voulons  dire 

i  tour  sise  sur  le  boulevard  du  Quatorze  Juillet»  entre  les 

[»tis  w**  49  t5l  5L  Et,  puisque  lu  Commission  des  Monu* 

nts  iiinlonques  a  émis  un  vœu  lavorable  à  la  réalisation 

tce  projet,  nous  espérons  que  vous  vous  euiploiere^  tous 

kfatre  dispnmître  les  oppositions  qui  pourraient  se  produire. 

•  M  Joseph  Perrin  vous  a  signalé  la  découverte,  à  Sainte- 
Eïlptnbe,  de  einq  sarcophages  cie  Tépoque  barbare,    l^'un 

reuK.  qui  présente  une  ornementation  rudimeulnire,  a  été 
Reposé  au  musée. 

•  1^  Scjciete  a  le  droit  de  revendiquer  une  part  dans  l'œu- 
trcdc  restanmtiun  du  monument  coramémoratirdu  chanoine 
Pliilippe  irodoard,  (misque  c'est  par  les  soins  de  notre  col- 
êîjye,  M.  Léon  Hausseau,  archilectedcla  cathédrale,  et  avec 
laftprobnlion  de  M.  Bérnrd,  architecte  des  édinces  diocé- 

liûs.  qu'il  a  été  replacé  dans  la  cathédrale. 

•  Nos  coilectiuns  se  sont  enrichies.  M.  Edmond  Feineux 
Htm»  3»  otTerl  trois  monnaies  gauloïses  provenant  de  la  trou- 

:i  étudiée  M.  Adrien  HlancheL  M.  Lapùtre  et  notre 
M     i>u chemin  nous  ont  donné  des  aérolithes.  A 

ttiiibé  iUinrtrnlre  :iuu!«  devons  une  tête  romaine  de  mar- 

|ttm*  d  un  nmr. 


—    XLIV    — 


i  Et  imîtujiteje  |>ar]ê  de  nos  collections,  n'est  ce  pas  le 
CAS  d*fippeter  voire  attention  sur  In  nécessilè  ifcn  acliever 
le  eisfttement,  et  tout  d'atiori]  de  munir  d  étlqueUes  les  oti* 
JeU  de  no%  vitrines  qui  en  sont  encore  dépourvus.  La  pro 
venuncc  de  ctiacun  d'eux,  qui  est  te  renseignement  le  plus 
utile  pour  des  viMteurs  archéologues,  scm  facilement  dé- 
terminée quand  notre  arcliiviste-adjoint  aura  fini  de  relever 
donw  now  registres  les  mentions  d  acquisitions  ou  de  dons, 
trivaii  un  peu  fusUdrcux,  mais  que  M.  Thorin  a  bien  voulu 
de  la  nieilleuro  gr<lee  nous  promettre  d'entreprendre. 

i  La  hlt>lliiih(>quc  ne  ^'cst  pas  seulement  augmentée  des 
publicnllonH  qui  viennent  par  voie  d'écliange.  La  famille  dé^ 
(fUntave  JuUiot  u*e&ï  dessaisie  en  faveur  de  ta  Société  nr- 
chéi>logirjue  de**  notes  réunies  par  notre  regretté  président 
en  vue  tl(^  t  m  vaux  deuil  it  nvait  formé  le  projet.  Aux  notes 
ioni  joints  fies  fragments  <îe  mémoires,  dont  il  semble  que 
In  rédncllon  soH  assez  poussée  pour  qu'on  les  puisse  publier 
^i  litre  d'u'uvres  poî*t humes.  Qunnt  nux  copies  des  doeii- 
metitsp  elles  dispenseront  du  travail  ingrat  de  Iranst ription 
ceux  d'entre  nou*i  qui  se  proposeraient  d'étudier  les  sujets 
iiux quels  Vêtait  arrélé  Gustave  Julliol.  Ainsi  il  n'aura  pas 
travaillé  en  pure  perle;  il  continuera  en  quelque  sorte  à 
rtjïhdïort'r  h  nos  travaux,  et  nous  conlracterons  envers  sa 
tu  émoi  rc  île  nduvcilcs  ohligalions. 

fl   M.  Perrin  nous  a  offert  <\cnx  volumes  rares  :  iesAfftchrt 
de  Scm,  de  1781.  et  les  œuvres  de  Clullelain,  député  à 
(lonventiou  nnliouale. 

t  Tous  ces  accroisse  m  en  ts  de  la  bibliothèque  deviei 
dnvient  Inutiles  si  notre  bibliolliécaire  devait  cuntinuerl 
ctita!iser  les  livres  dans  un  |*etit  cabinet  qui  est  depuis  Inw 
tempK  trop  plein  Les  quai  liés  d  ordre  de  notre  i-élv  InbliO' 
Ihécaire,  M.  Iloy»  restent  sans  emploi;  maif  le  supplice quHI 
soulTre  h  être  désordonné  malgré  qu1l  en  ait,  louche  h  son 
lernic.  M  le  miurc,  comprenant  le  dommage  qui  résulte 
pour  nos  études  d  une  pareille  situation^  a  bien  voulu  nous 
donner  une  preuve  de  1  intérêt  qu  il  porte  à  noire  Compa- 


—    XLV    — 


r'^j  ;=: 


gnic  en  mettant  à  notre  disposition  la  salle  où  étaient  na- 
guère rangées  les  archives  municipales.  Nous  Ten  avons  re- 
mercié, mais  nous  tenons  à  lui  renouveler  devant  vous  l'ex- 
pression de  notre  gratitude. 

i  L'impression  des  Bulletins  a  été  poursuivie.  Le  second 
fascicule  du  tome  XXI  est  achevé;  il  vous  sera  remis  à  la 
prochaine  séance.  Du  grand  nombre  de  belles  planches  que 
vous  y  remarquerez,  vous  conclurez  non  pas  que  nos  res- 
sources se  sont  augmentées,  mais  que  Tauteur  du  Mémoire 
$ur  les  premiers  Imprimeurs  sénonais,  dont  ces  fac-similé  for- 
meot  rillustration,  vous  a  fait  sentir  les  effets  de  son  habi- 
tuelle libéralité.  C'est  une  preuve  nouvelle  de  son  attache- 
ment que  nous  donne  là  notre  cher  collègue  M.  Félix  Chan- 
denier.  Tous  ici  rivalisent  de  zèle  et  de  dévouement.  Car  je 
D  en  ai  pas  fini  avec  les  actes  de  générosité. 

«  M.  Maurice  Boy  veut  bien  offrir  à  chacun  de  ses  collè- 
gues le  second  fascicule  de  son  Histoire  du  Chesnoy.  Vous  en 
connaissez  l'objet,  puisque  notre  ancien  président  en  a  lu 
quelques  pages  en  séance.  Il  n'y  a  pas  de  fief  français  dont 
les  vicissitudes  aient  été  retracées  avec  plus  de  soin  et 
(1  ampleur  que  celui  du  Chesnoy.  Une  monograpie  ainsi 
comprise  contribue  beaucoup  à  la  connaissance  de  la  société 
française.  Elle  répond  à  la  conception  que  notre  temps  se 
fait  de  Thistoire  qui  ne  se  limite  plus  à  la  reconstitution  des 
grands  événements  politiques,  aux  guerres  et  à  la  biogra 
phie  des  hommes  célèbres,  mais  qui  prétend  retracer  la  vie 
journahère  de  tout  le  peuple  et  donner  les  divers  aspects  de 
la  vie  sociale  et  économique.  Suivre  un  domaine  du  type 
ordinaire  à  travers  les  siècles,  montrer  comment  il  s'est  con- 
stitué, d'abord,  puis  modifié  au  fur  et  à  mesure  que  se  mo- 
difiaient les  conditions  de  l'existence  et  le  milieu,  c'est  faire 
1  histoire  de  la  propriété.  Ainsi,  le  fascicule  que  M.  Roy  pu- 
blie aujourd'hui  nous  fait  assister  au  grand  mouvement  de 
restauration  foncière  qui  a  suivi  les  désastres  de  la  guerre 
de  Cent-Ans.  C'est  un  chapitre  nouveau  de  l'histoire  écono- 
mique que  personne  n'avait  écrit.  Si  quelques  érudits. avaient 


:\ 


M* 


'  i 


'T^g^ 


—   Kh\l  — 

été  frappés  du  nombre  de  bûUK  de  îa  f!n  cïu  xv^  siècle  et  du 
commencement  du  xvii'  siècle,  accumulés  dans  les  archives, 
aucun  d  eux  u  avait  donné  les  raisans  de  cette  abondance, 
ni  su  en  tirer  des  conclusions.  Les  pages  que  M.  Iloy  a  con- 
sacrées aux  nouveaux  acenscjncnls  consentis  par  le  sei* 
gneur  du  Chesnoy,  ;iux  défrichements  et  ù  la  mise  en  valeur 
des  terres  încultcs,  à  la  construction  de  masures,  dont  le 
groupement  a  formé  les  liameaux,  à  rétablissement  des^  co^ 
lonies  de  cultivateurs,  sont  des  pages  pleines  d  intérêt  et  de 
nouveauté  et  qui  portent  plus  loin  que  ne  Tindique  le  litre 
du  livre.  11  faudrait  encore  louer  la  méthode  qui  a  présidé 
à  la  recherche  des  documents  qu'une  extrême  dispersion 
rendait  difficile,  et  à  leur  mise  en  œuvre;  mais  la  oiodestie 
de  noire  savant  collègue  serait  blessée  de  plus  d'insistance. 
<  11  resterait  a  votre  président  à  faire  son  examen  de  con- 
science.  Il  aurait  pour  lui-même  plus  de  sévérité,  peut-être* 
que  vous  n'en  aurez,  11  sent,  en  efTct,  qu1l  n'a  pas  rempli 
entièrement  sa  tache.  Trop  souvent  il  a  manqué  au  rendcje- 
VOUS.  Il  en  a  scîili  une  véritable  peine;  aussi  bien,  vous  le 
devinez,  si  vous  saveii  le  plaisir  qu'il  éprouve  à  se  trouver 
au  milieu  de  vous.  Cependant  ce  qui  allège  ses  remords, 
c'est  que  les  intérêts  de  la  Société  n*ont  pas  soufTert  de  son 
absence.  Mais,  si  votre  Compagnie  a  continué  de  prospérer, 
elle  le  doit  aux  membres  du  bureau  sur  qui,  faute  de  prési- 
dent, est  retombé  tout  le  poids  de  nos  affaires.  Le  vice-pré- 
sident, le  secrétaire,  le  trésorier,  1  archiviste-bibliothécaire, 
savent  assez  quelle  est  ma  reconnaissance  à  leur  endroit 
pour  qu1l  ne  soit  pas  nécessaire  d'en  développer  longue* 
ment  rexprcssion;  et,  puisqu'à  la  sincérité  des  sentiments 
convient  la  simplicité  des  paroles,  qu'ils  me  permettent  de 
leur  dire  seulement  merci,  comme  je  le  dis  ît  vous  tous,  mes 
chers  collègues,  aux  uns  pour  Faide  qu'ils  m'ont  prêtée,  aux 
aulres  pour  rindulgencequ*ils  m'ont  accordée,  » 


La  lecture  de  ce  rapport  est  accueillie  par  de  chaleureui 
applaudissements. 


—    X(  VII    — 

t présentés,  en  qualité  de  membres  libres  : 
^M  l-^*oti  Libcrt,  proprié taire  au  ch^Ucnu  de  Paron,  par 
^lalkbé  Cbarlraire  et  par  MM.  Joseph  Perrin»  Sépol,  PoUn 

Ernest  Lastiien  receveur  des  ftrinnccs  en  retraite, 
lie  la  Soei^lé  historique  de  Ci»rbeil,  deuieurant  A 
par  M,  l  abbé  Qiarlraire,  MM.  J.  Perrin,  Sépot  et 


du  joura|)pelle  les  votes  sur  les  présentations  de 
^t!lïanxL»  et  dti  R  P.  doui  Desse^qiiî  tous  deux  sont  admis 
iifUalitede  membres  libres, 

es  lecture^  donnée  par  M*  Tabbê  Chartraire,  des  arlî- 

des  ilatuts  et  du  règlement  intérieur  qui  régissent  les 

lif>u%  des  membres  du  bureau  et  des  membres  du  comité 

^psbiicâtion,  il  est  procédé  à  ces  élections. 

[C«  premier  scrutin  est  ouvert  pour  la  uomi nation  du  vice- 

ïidcnt.  du  secrétaire»  de  rarcliivisle,  du   trésorier,  du 

i-Kcrélaire  et  du  vice-archiviste. 

élus  pour  une  nouvelle  période  de  deux  ans  : 
f^prrxidfnt  :  M.  Tabbé  CImr traire,  membre  sortant 
\  Secte  faire    M.  Marquîand,  — 

:i?  :  M.  Paul  Roy,  — 

,  :.  r  :  M.  Sépot»  — 

\pT%h*ecrétmre  :  M   Dapoigny,  — 

Vice-archiviste     M,  Thorin,  ^ 

l*n  second  scrutin  eiït  ouvert  pour  Télcction  des  membres 
i  comité  de  publication* 

MM  Joseph  Fcrrin,  Gérard  et  M.  Tabbé  Guillet  sont 
iialcnys  dans  leurs  fonctions  pour  une  nouvelle  période 
r  ÛeQ%  aus. 

I  Les  éIectton&  terminées,  la  parole  est  donnée  à  M.  PoUn 

'la  lecture  d'un  rapport  sur  les  sites  de  la  région  séno- 

aîsrqui  lui  pantment  dignes  d'être  signalés  àrattenlion  du 

lub,  afin  que  cette  société  prentie  des  mesures 

i.^urerla  préservation. 

t>l  intéressa  ni  rapport  est  vivement  applautlî. 


im 


■  > 


SOCliré    ARCHéOLOCIQiJB  DB  SENS. 


T.   XXM,  PL.  I,   p. 


u 


1Î11 


'^ 


\n 


LE   DAUPHIN 

Peinture  par  Frbdou 

(Tréior  de  Sent,) 


rVl 


LA  SÉPULTURE  DU  DAUPHIN 
ET  DE  LA  DAUPHINE 

DANS     LA     CATHI^DRALE     DE     SENS 


CIIAPITIIE  PREMIER 

COMMENT    SKNS    I  IT   CHOISI    POirR    LA    Sh^lH'LTl'Bi; 
J>Lf     DAl^rtîrN 

l.c  s;^ MIL  cil  21  décemliie  1703,  au  soir,  les  huit 
loches  de  la  tour  de  plnnil»  de  la  cathédrale  de 
ietis.  Taisant  vcho  aux  volées  des  liuutdonK,  soii- 
itaîeiit  le  «îas  de  1res  haut,  très  piiiissiuil  el  excel- 
enl  prince  Lonîs  île  Bouilmn,  l>aii])hin  tle  Frauce. 
Eti  même  temps  que  lonuonce  de  1  événement, 
lepiiî^  quelques  semaines  prévu,  niett^iit  en  deuil 
I  dié  lîtiêle  et  la  France  entière,  une  nouvelle  cil- 
lait^ la   plus  siirprenanlt%  la  plus  inespérée,   la 


pins  capable  d'exalter  Tamour-propre  locall  L'an- 
tique Métropole  retrouvait  enfin  quelque  chose  des 
gloires  d'un  passé  qu'on  pouvait  croire  à  tout  jamais 
perdu  :  la  Cathédrale  allait  posséder  la  sépulture 
du  Dauphin  I 

Qui  donc,  en  eflfet,  aui*ait  pu  rêver  un  tel  hon- 
neur? Depuis  des  siècles,  la  royale  abbaye  de  Saint- 
Denis  n'avait-elle  pas  le  privilège  exclusif  de  gar- 
der les  cendres  royales?  Depuis  la  progressive  di- 
minution de  son  bailliage,  jadis  si  puissant,  aujour- 
d  hùi  si  étroitement  resserré;  depuis  surtout 
l'érection  de  rarchevêché  de  Paris  qui  avait  arraché 
à  la  vieille  Métropole  la  moitié  des  fleurons  de  sa 
couronne,  la  ville  des  Primats  des  Gaules  et  de 
Germanie  n'assistail-elle  pas,  impuissante  et  déso- 
lée, à  une  décadence  que  rien,  semblait-il,  ne  de- 
vait arrêter? 

Dans  ces  dernières  années  pourtant,  grâce  aux 
brillantes  qualités,  non  moins  qu'à  l'illustre  nais- 
su  nce,  de  son  archevêque,  Mar  Paul  d'Albert  de 
Luynes,  premier  Aumônier  de  Madame  la  Dau- 
phine,  la  pourpre  romaine,  autrefois  presque  héré- 
ditaire chez  les  pontifes  sénonais  (1),  était  revenue, 
après  une  trop  longue  absence,  renouer  les  tradi- 
lUins  séculaires.  Mais  les  plus  fervents  eux-mêmes 
du  culte  de  ce  glorieux  passé  n'auraient  osé 
espérer  en  voir  le  retour. 

Et  cependant,  la  nouvelle  était  exacte.  Ainsi  que 


(I)  De  1523  n  1618,  %ix  cnrtlinaux,  Antoine  Duprnt,  lA>uis  de  Bourbon. 
Jpnn  Bertrand,  Louis  de  Lorraine,  Nicolas  de  Pellevé  et  Jacques  Duper- 
ron<  s'étaient  Huccédé  sur  le  siège  de  Sens. 


le  proclamait,  quelques  jours  plus  tard,  un  docu- 
ment officiel  :  «  La  Métropole  de  Sens,  depuis 
louglemps  privée  du  droit  qu'avaient  ses  archevê- 
ques, dans  les  premiers  siècles  de  la  Monarchie,  de 
sacrer  les  Rois  et  Reines  de  France  (l)et  de  faire  la 
célébration  de  leur  mariage  (2);  dépouillée,  pour 
ainsi  dire  de  sa  grandeur  par  Térection  du  Siège  suf- 
fragant  de  Paris  en  Archevêché  ;  cette  Ville  comme 
perdue  dans  son  antiquité,  Sens,  possède  aujour- 
d'hui les  précieux  restes  d'un  Prince  auguste,  dont 
la  vie  exemplaire  et  la  mort  héroïque  et  chré- 
tienne seront  éternellement  le  sujet  de  notre  ad- 


<1)  A  rorigine  de  la  monarchie,  le  MélropollUiin  de  la  province  sacrait 
le  Souverain.  Philippe  I*  fut,  le  premier,  sacre  â  Heims.  A>^nt  lui  et  après 
lui  plusieurs  rois  firent  appel  au  ministère  des  archevêques  de  Sens,  mé- 
tropolitains de  rne  de  France. 

Les  fils  de  Louis  le  Bègue,  I^uis  et  Carlomnn  sont  sacres  en  879  par 
l'Archevêque  Anségisc,  en  l'abbaye  de  Ferriéres. 

Eudes,  comte  de  Paris,  est  couronné  en  887,  par  Wauthier,  archevêque 
de  Sens. 

Le  mcoie  couronne  Robert,  en  922,  en  l'église  Saint-Rémi  de  Reims  ; 
pais,  en  923.  Raoul  de  Bourgogne  et  sa  femme  Emma,  à  Soissons. 
Guillaume. archevêque  de  Sens,  couronne  Louis IVà  Laon,  le  19 juin  936. 
Anastase  couronne  Robert  le  Pieux,  à  Orléans,  en  988. 
Uaimbert,  sacre  Louis  VI  le  Gros,  à  Orléans,  en  1108. 
Guy  de  Noyers,  couronne  le  29  mai  1180,  â  Saint-Denis,  Philippc^Auguste 
et  la  reine  Isabelle  de  Hainaut. 

(2)  Hu^es  de  Toucy,  sacre  et  couronne,  en  1154,  â  Orléans,  la  reine  Con- 
stance de  Castille,  deuxième  femme  de  Louis  VII.  En  IIGO,  le  mcmearclie- 
\<^qne,  couronne  à  Paris,  en  présence  de  huit  cardinaux,  Alix  de  Cham- 
pagne, troisième  femme  du  même  roi. 

Ijc  28  mai  1231,  l'archevêque  Gauthier  Cornut,  couronne,  dans  sa  mé- 
tropole, Maiguerite  de  Pro%'ence  dont  il  vient  de  bénir  le  mariage  avec  le 
roi  saial  Louis. 

Guilbumc  de  Melun,  couronne  Marie  de  Luxembourg,  femme  de  Charles 
lcBel.enl323,  àl\iris.    . 


miration,  de  nos  regrets  et  de  nos  larmes  (1).    » 

Depuis  six  semaines,  la  population  scnonaisc  con- 
naissait Tétat  alarmant  du  fils  du  Roi.  Le  31  octo- 
bre, le  cardinal  de  Luynes  avait  ordonné  d'ajouter 
aux  oraisons  de  la  messe  une  prière  spéciale  pour 
la  guérison  du  Dauphin. 

Le  14  novembre,  en  apprenant  que  le  prince  ve- 
nait de  recevoir  les  derniers  sacrements,  le  Chapi- 
tre avait  commencé  les  prières  des  Quaranle- 
Heures.  Le  diocèse  entier  faisait  de  même,  se  con- 
formant aux  désirs  de  son  archevêque  (2),  qui  ne 
quittait  plus  Fontainebleau. 

Le  9  décembre,  le  cardinal  avait  ordonné  une 
neuvaine  de  messes,  qui  se  célébrèrent  à  Tautel 
Saint-Louis  (3). 

Le  21  décembre,  convoqués  à  la  hâte  au  Chapitre, 
MM.  les  chanoines  de  Ma rsangy,  trésorier,  de  Mon- 
bourg,  archidiacre  de  Provins,  Tissot,  Thévard, 
Garsement  de  Fontaine,  de  la  Haize,  Herthelin, 
Dauvergne,  Lhermitte  de  Champbertrand,  le  Houis- 
tel,  Lebeau,  le  Pellerin,  Gigot  de  Boisbernier,  Hé- 


(1)  «  Ilclation  de  ce  (fiii  s'est  passé  à  Sens,  nu  sujet  de  rinhumation  i\c 
M»'  le  Dauphin,  p  plnquette  de  8  pages  in-4'.  Sens.  17ii6.  — Celle  relation  eut 
une  seconde (dilion  annoncée  dans  ÏAlnmnach  de  Sens,  pour  17G7  (p.  161), 
et  que  l'éditeur  déclare  plus  exacte  que  la  première. 

(2)  M.  le  Pellerin,  chanoine,  secrétaire  de  rarchevêché,  avait  adressé  au 
clergé,  le  14  novembre,  In  circulaire  suivante  :  •  M...,  Son  Eminence,  jus- 
tement alarnu-e  du  danger  dont  paroit  menacée  la  santé  précieuse  de 
Monseigneur  le  Dauphin,  a  jugé  i\  propos  d'ordonner  des  prières  de  Qua- 
rante-Heures  dans  toutes  les  paroisses  de  son  diocèse  :  vous  voudrez  bien 
les  commencer  aussitôt  la  réception  du  présent  avertissement.  »  ((^llect. 
des  Mamiements  et  CircttUiirea  du  card.  de  Luynea.) 

(3)  Registre  cnpitulaire.  (Archives  de  l'Yonne,  (i,  (-81  ) 


—  5  — 

diard,  Roy,  Roussel  et  Leblanc,  ont  entendu  avec 
la  plus  vive  émotion  le  doyen,  M/  dllesselin  de 
Hauleville,  leur  adresser  ces  paroles  : 

Messieurs, 

Le  ciel,  dont  les  desseins  sont  impénétrables,  a  été  sourd 
à  nos  vœux  et  â  nos  prières  pour  la  conservation  des  jours 
de  Mp"  le  Dauphin. 

Ce  religieux  Prince,  digne  h  jamais  des  regrets  de  la 
France  dont  il  aurait  un  jour  fait  le  bonheur,  digne  des  lar- 
mes de  la  Religion  qu'il  aimait  et  quïl  aurait  protégée  de 
tout  son  pouvoir,  après  avoir  soulTert  avec  la  patience  la 
plus  héroïque,  avec  la  résignation  la  plus  édiffîante,  les 
douleurs  d'une  longue  maladie,  ce  grand  Prince,  héritier 
présomptif  du  trône,  comme  le  plus  humble  des  sujets,  est 
devenu  la  victime  de  la  mort. 

Quelles  serolent,  dans  ce  moment,  Messieurs,  nos  tristes 
pensées,  si  toutes  les  vertus  de  Monseigneur  le  Dauphin  ne 
nous  éloient  un  gage,  pour  aînsy  dire  assuré,  de  son  bon- 
heur éternel. 

Après  ce  motif  principal  de  consolation  que  la  Religion 
nous  présente,  ses  dernières  volontés  nous  en  fournissent 
un  autre,  déjà  vous  le  scavez,  Messieurs,  aussy  glorieux 
pour  votre  Eglise  que  pour  Son  Eminence. 

  quelle  autre  cause,  en  effet,  pourrions- nous  attribuer  le 
choix  qu'a  lait,  par  son  testament,  Mb'r  le  Dauphin,  de 
1  Hglisc  métropolitaine  de  Sens,  pour  être  le  Heu  de  sa  sé- 
pulture, sinon  à  ses  sentiments  de  la  plus  haute  estime  pour 
son  illustre  pontife. 

Tel  est.  Messieurs,  Tévénement  que  M.  l'abbé  de  Bul- 
lioudtl)  m'a  fait  l'honneur  de  me  marquer  de  la  part  de 


ili  Jcao-CIautle  de  Bullioud,  originaire  de  Sens,  était  clinnoine  depuis 
173:>.  Alors  ofTiciul  et  archidiacre  d'Etampes,  il  accompagnait  le  cardinal 
dnnl  il  était  vicaire  général.  Il  devint  doyen  en  1771  à  la  mort  de  M.  d'Hes- 
wiin,  et  mourut  en  1777. 


—  G  — 

Ml!'  le  cardinnl,  par  la  IcUrc  dont  vous  allez  entendre  la  lec- 
ture : 

«  Tonlainebleau,  ce  20  décembre  17il5,  à  mid}'. 

«  Son  Eminencc  me  charge,  Monsieur,  de  vous  marquer 
que  Monseigneur  le  Dauphin,  qui  est  mort  ce  matin,  i\  huit 
heures,  ayant  demandé  d'être  enterré  danc  l'Eglise  métro- 
politaine de  Sens,  son  corps,  après  avoir  été  exposé  ici 
neuf  jours,  sera  transporté  ù  Sens,  pour  y  être  inhumé. 

fi  Vous  voudrez  bien  faire  part  h  Messieurs  du  Chapitre 
de  cette  triste  et  lugubre  cérémonie  et  les  prier  de  laisser  ù 
M.  le  marquis  de  Dreux,  grand  maître  des  cérémonies,  ou  à 
ceux  qui  seront  envoyés  de  sa  part,  le  chœur  et  la  nef  li- 
bres, alln  qu  ils  puissent  y  faire  tout  ce  qu'il  jugera  néces- 
saire en  celte  occasion  ;  il  vous  fera  instruire  de  ce  que  le 
Chapitre  doit  faire  de  son  costé. 

n  Monseigneur  le  cardinal  part  dans  le  moment,  pour  se 
trouver  h  Versailles  à  l'arrivée  de  Madame  la  Dauphine  ;  il 
vous  écrira  de  Versailles  ses  intentions  ultérieures. 

a  Comme  je  finissais  ma  lettre,  M.  de  Moransel  est  venu 
dire  i\  Monseigneur  le  cardinal  qu'il  était  chargé  d'aller  h 
Sens  faire  travailler  au  caveau  ;  il  conte  partir  aujourd'huy. 

«  Je  suis,  avec  le  plus  sincère  et  respectueux  dévoue- 
ment, Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  servi- 
teur. 

«  De  Blllioui).  » 

Après  avoir  prié  le  doyen  d'exprimer  au  cardinal 
de  Lii}  nés  leurs  condoléances  et  désigné  six  d'en- 
tre eux  pour  se  mettre  en  rapport  avec  les  envoyés 
du  Roi,  les  chanoines  s'étaient  séparés. 

Quelques  heures  plus  tard,  le  chant  des  complies 
terminé,  ils  se  réimissaienl  de  nouveau  à  la  salle 
capilulaire. 

M.  le  préchantre  (1)  a  dit  que  M.  de  Moranzel  est  arrivé. 


(\)  \a'  chanoine  Yves  Moriee. 


_  7  — 

que  Messieurs  de  la  commission  ont  conféré  avec  luy; 
qu  ensuite  il  a  été  mis  dans  le  chœur  des  ouvriers  qui  font 
la  fouille  nécessaire  pour  bâtir  un  caveau  destiné  à  y  mettre 
le  corps  de  deffunt  Monseigneur  le  Dauphin  ;  que  le  nombre 
des  ouvriers  qui  doivent  travailler  sans  interruption  aug- 
mentera indubitablement  pour  achever  les  ouvrages. 

Messieurs  ont  arresté  que,  pour  ne  rien  tarder  de  ce  qui 
reste  à  faire  de  la  part  du  Hoi,  ils  feront  leurs  offices  dans 
la  chapelle  de  Sainte -Colombe,  à  commencer  demain  à  ma- 
tines; que  la  coupe  sera  descendue;  que  le  T.  S.  Sacrement 
qui  y  est  y  renfermé  sera  mis  dans  celte  chapelle  ;  que  le 
pavillon  sera  descendu  et  mis  avec  la  lampe  dans  le  trésor. 
Kt  comme  il  pourra  arriver  que  par  la  fouille  qui  se  fait, 
il  s  y  trouvera  soit  des  caveaux,  soit  des  tombeaux,  corps 
ou  ossements  qu  il  faudra  ôter,  Messieurs  ont  prié  M.  Gar- 
semcnt  d'être  attentif  à  ce  que  les  cendres  des  defTunls  ne 
soient  pas  confondues  avec  la  terre  qui  se  tirera,  de  faire 
mettre  séparément  tout  ce  qui  se  trouvera,  pour  ensuite  être 
transporté,  avec  les  cérémonies  ordinaires,  dans  le  caveau 
où  repose  le  corps  de  M.  Languet,  archevêque  de  Sens,  et 
pour  faire  les  cérémonies  requises.  Messieurs  ont  député 
M.  le  Houistel. 

Le  lendemain  dimanche,  le  Chapitre  arrête  de 
nouvelles  dispositions.  Chaque  jour,  jusqu'aux  ob- 
sèques, une  messe  sera  célébrée  à  Taulel  de  la 
Sainte-Vierge  par  M.  le  chanoine  le  Pellerin,  secré- 
taire de  rarchevéché.  Cette  chapelle  est  tendue  de 
draperies  de  deuil.  Chaque  jour  aussi,  le  matin,  à 
midi  et  le  soir,  le  glas  sera  sonné  par  les  cloches 
des  deux  tours. 

On  a  souvent  cherché  à  expliquer  pourquoi  la  sé- 
pulture du  fils  de  Louis  XV  est  à  Sens,  alors  qu'une 
tradition  séciriaire  avait  réuni  jusqu'à  ce  jour  dans 


—  8  — 

la  nécropole  royale  de  Saint-Denis  les  cendres  de 
tous  les  Bombons. 

L'abbé  Proyart,  prèle  à  Louis  XV  celte  parole  : 
<i  Si  mon  fils  fût  mort  à  Versailles,  disait  un  jour  le 
Roi  à  TArchevéque  de  Paris,  il  se  serait  fait  porter 
cliez  vous  :  je  lui  ai  entendu  dire  qu'il  désirait  être 
enterré  dans  Téf^lise-mère  du  diocèse  (1).  t>  Quelle 
que  soit  Taulbenticité  de  ce  propos,  il  semble  que 
le  motif  indiqué  par  le  doyen  du  Chapitre  de  Sens 
est  bien  plus  vrai.  C  est  celui,  du  moins,  qui  fut 
alors  généralement  accrédité. 

Honoré  de  la  particulière  estime  de  la  reine 
Marie  Leczinska  et  admis  dans  son  intimité  (2), 
Paul  d'Albert  de  Luynes,  alors  évèque  de  Bayeux, 
avait  été  attaché  à  la  maison  de  la  Dauphine,  comme 
Premier  Aumônier,  dès  le  mariage  de  la  prin- 
cesse, en  1747.  Bientôt  séduits  par  le  noble  carac- 
tère, Tesprit  supérieur  et  la  haute  piété  du  prélat,  la 
Dauphine  et  le  Dauphin  hii  témoignaient  une  véri- 
table amitié.  Ces  deux  princes,  dont  les  vertus 
chrétiennes  et  la  délicatesse  de  conscience  contras- 
taient si  heureusement  avec  Tesprit  et  les  mœurs  de 
la  cour,  entretenaient  une  correspondance  suivie 
avec  leur  Premier  Aumônier,  devenu,  en  1753,  ar- 
chevêque de  Sens  par  Tintervention  de  la  Dau- 
phine. Les  mêmes  bienveillantes  sollicitations,  trois 
ans  après,  obtinrent  à  l'Archevêque  de  Sens  la 
pourpre  cardinalice,  comme  en  lêmoigne  une  lettre 


(1)  Vie  (In  Dauphin,  idilioii  de  IMlî).  p.  2U1. 

(2)  Mcmoire.'i  de  Mit.'ame  (Minpan,  p.  71,  l.lll. 


—  9  — 

de  Benoît  XIV  annonçant  à  Marie-Josèphe  de  Saxe 
cetle  promotion. 

Aussi  n'est-il  pas  étonnant  qu*à  la  nouvelle  de  la 
maladie  du  Dauphin,  le  Cardinal  se  soit  fait  un  de- 
voir d'accourir  au  chevet  de  l'auguste  malade  et 
d  apporter  à  la  Princesse  l'appui  et  le  réconfort  de 
son  ministère  et  aussi  de  son  affection. 

Le  Prince  s'était  vite  rendu  compte  de  la  gravité 
de  son  état.  Eminemment  chrétien,  il  ne  craignait 
pas  d'envisager  la  mort  et  il  s'y  préparait.  Rien  n'est 
touchant  et  édifiant  comme  le  journal  où  la  Dau- 
phine,  malgré  son  extrême  douleur,  a  noté  avec  un 
soin  pieux,  jour  par  jour,  heure  par  heure,  toutes 
les  phases  et  les  moindres  détails  de  la  longue  ago- 
nie de  son  époux.  Très  souvent  le  Dauphin  s'entre- 
tenait avec  le  cardinal  de  Luynes,  l'un  de  ses  plus 
intimes  confidents.  Le  Cardinal  aurait-il,  au  cours 
d'une  de  ces  graves  conversations,  suggéré  au  mou- 
rant la  pensée  de  désigner  la  Métropole  de  Sens 
pour  sa  sépulture?  Le  trait  suivant,  raconté  par 
Marie-Josèphe,  indique  plutôt  que  ce  projet  n'avait 
été  nullement  concerté. 

C'était  dans  la  nuit  qui  devait  être  la  dernière. 
Le  Dauphin  avait  pressé  le  cardinal  de  Luynes  de 
lui  donner  la  dernière  hénédiction  et  l'indulgence 
plénière  in  ariiculo  mortis,  «  En  certains  moments 
la  fièvre  lui  causait  des  absences,  mais  comme  la 
peine  qu'il  avait  alors  à  parler  Tobligcait  de  le  faire 
en  peu  de  mots  et  à  voix  basse,  il  est  probable  que 
ce  qu*on  cro\'ail  dénué  de  raison  ne  Tétait  pas  tou- 
jours. C'est  ainsi  que  le  cardinal  de  Luynes  attri- 


ii?3 


;l 


—  10  — 

buait  au  délire  ce  qu'il  lui  dit  pendant  la  nuit  : 
<K  Y  a-t-il  des  caves  de  sépulture  dans  le  chœur  de 
c  l'Eglise  de  Sens  ?  —  Monseigneur,  répondit  le  pré- 
<t  lat,  il  n'y  en  a  qu'une  sous  l'autel  pour  les  arclie- 
€  véques.  —  Il  faudrait  donc  en  faire  une,  dit  le 
Dauphin,  car  je  dois  faire  un  voyage  à  Sens  (1).  » 
Ces  paroles  ne  furent  comprises  qu'à  l'ouverture  du 
testament. 

Les  dernières  dispositions  du  Prince  avaient  été 
écrites  par  lui-même,  à  Fontainebleau,  le  14  no- 
vembre précédent,  sous  forme  d'une  lettre  au  Roi  : 

«  Voici,  mon  cher  père,  mes  derniers  désirs  et 
volontés  que,  si  Pieu  me  relire  de  ce  monde,  je  vous 
prie  d'ordonner  qu'ils  soyent  fidèlement  exécutés. 

a  Premièrement,  je  désire  et  demande  expres- 
sément que  mon  corps  et  mes  entrailles  soient  in- 
humés dans  TEglise  Métropolitaine  de  Saint - 
Etienne  de  Sens,  au  milieu  du  chœur,  à  quelques 
pas  de  l'aigle,  l'usage  contraire,  n'étant  pas  une  règle 
invariable,  et  que  mon  cœur  soit  porté  en  l'église 
de  l'abbaye  de  Saint-Denis  pour  reposer  parmi  tout 
ce  que  j'y  ai  de  cher  (2).  i> 

Les  sept  autres  articles  sont  relatifs  à  des  pensions 
et  faveurs  demandées  pour  la  Dauphine^  pour  sa 


(1)  Henri  dk  Lêimnois,  Vie  tin  Dauphin.  Paris,  in-12,  p.  Xm. 

(2)  D'après  plusioiirs  liistorirns,  le  Dauphin  aiiniit  exprimé  It*  «lésir  que 
son  iiihiiniation  se  Ht  sans  [mis  rt  mus  cèrcnionie.  (Voir  de  rKpInois, 
p.3r»7;  C.  Slryieiîski,  la  Mère  lies  trois  derniers  Honriums,  p.  XA.)  \jc  lexle  du 
teslauient.  on  le  voil,  n'indique  nullement  cette  intention,  et  les  détails  di>s 
cérémonies  que  nous  décrivons  plus  loin  prouvent  que,  si  elle  a  été  Torniu- 
lée.  il  n'y  a  pas  été  donné  suite. 


—  H  — 

belle-sœur  Christine  de  Saxe  et  les  personnes  atta- 
chées à  sa  maison. 

Le  Dauphin  termine  ainsi  :  a  Daignez  donc,  mon 
cher  père,  je  vous  en  supplie  vivement,  faire  exécu- 
ter tout  ce  qui  est  cy-dessus  et  croyez  que  vous 
n'avés  jamais  eu  de  sujet  plus  attaché  que  votre 
rds(l).  D 

C  est  donc  tout  spontanément  que  le  Dauphin 
avait  choisi  Sens  pour  sa  dernière  demeure.  Il  avait 
sans  doute  voulu,  par  cette  délicate  attention, 
donner  au  prélat  qu'il  aimait  ce  gage  suprême  de 
son  afTeclion,  désireux  de  confier  à  une  amitié  dont 
il  appréciait  la  fidélité  le  soin  de  garder  sa  dépouille 
mortelle  et  de  prier  pour  le  repos  de  son  âme. 


(1  •  Archives  naUon.,  G  1,  1044.  liasse  7.  Dans  une  lettre  à  Tabbé  Soldini 
<  Archives  de  l'évc  ché  de  Versailles*,  la  Dauphine  écrit,  au  sujet  de  ce  testa- 
ment :  m  ...11  récrivit  en  trois  quarts  d'iieurc  et  non  en  trois  heures.  » 


'r^   ^^^  /^ 


*îp^ 


W^'  '■■  ^^4^- 


W^myr- 


■^  t   I  f  ■  »  MJ:  1 


CHAPITRE  II 

LA    MOUT   DU    DArPHIN   ET   LES   OBSÈQUES 
A    FONTAINEBLEAU 

Le  vendredi  20  décembre,  à  6  heures  du  matin, 
le  Prince  avait  perdu  complètement  l'usage  de  la 
parole.  Le  cardinal  de  Luynes  récita  les  prières  des 
agonisants.  Il  eut  beaucoup  de  peine  à  les  achever  : 
les  assistants  ne  lui  répondaient  que  par  des  sanglots. 

Le  Dauphin  mourut,  après  vingt-deux  heures 
d'agonie,  à  8  heures  et  quart  du  matin.  La  Dauphinc 
avait  été  tenue  éloignée  du  chevet  du  mourant. 
L'Archevêque  de  Sens,  en  sa  qualité  de  premier  Au- 
mônier de  la  Princesse,  fut  chargé  de  lui  annoncer 
l'alTreuse  nouvelle.  Elle  était  alors  chez  Madame 
Adélaïde,  avec  ses  enfants,  a  Madame,  lui  dit  le  Car- 
dinal, bénissons  le  Seigneur,  nous  avons  un  saint 
de  plus  à  honorer  dans  le  ciel!  Non,  il  n'y  a  pas  de 
religieux  de  la  Trappe  qui  naimàt  la  mort  que  vient 


—  113  — 

de  faire  M.  le  Dauphin.  La  foi  peut  bien  nous  con- 

éôÀer  et  sa  résignation  héroïque  doit  être  le  modèle 

.'lie  la  nôtre  (1).  » 

vJLb  Mémoire  des  Deuils  portés  par  la  Cour  décrit 

ain&i  le  cérémonial  observé  à  Fontainebleau  (2)  : 

\  Le  vendredi   vingt  décembre  1765,  à  huit  heures  et  un 

^foartdu  matin,  mourut  ù  Fontainebleau  Mi«'>  Louis,  dauphin 

■:fc  France,  âge  de  30  ans  3  mois  et  16  jours  ^3). 

i'^T-Co  prince  fut  déshabiUé,  mis  dans  son  lil,  rechangé  de 

cbemise  cl  bonnet,  par  les  officiers  de  sa  Chambre  et  Garde - 

robe,  h  visage  découvert,  fut  vu  par  le  public  pendant  le 

reste  de  la  journée. 

Les  Mathurins,  desservants  de  la  chapelle  du  Hoy,  vin- 
rent en  clergé  y  dire  les  vigilles  et  offices  des  morts.  Le 
soir,  Tordre  fut  donné  par  M.  le  duc  de  Fronsac,  premier 
gentilhomme  de  la  Chambre  pour  le  lendemain  à  huit  heures 
du  malin. 

Le  samedi  21,  M^r  le  Dauphin  fut  enlevé  de  dessus  son  lit 
dans  l'ordre  qui  suit  : 

M.  le  premier  Gentilhomme  de  la  Chambre  soutcnoit  la 
tête,  les  officiers  de  la  Chambre  le  portèrent  dans  la  pièce 
des  nobles,  (hins  Tordre  dû  à  sa  naissance.  Déposé  dans  cette 
pièce,  M.  Andouilié,  i)rcmier  chirur<^icn  (hi  Hoy,  en  lit  Tou- 
verture  conjointement  avec  les  chirurgiens  oidinaircs(  I)  cl 

•  1.  Di:  I.  I"i'r\(iis,  «;/>.  cit..  p.  X>1. 

<2   Anhivfv  nat  ,  K  K  II  :>:'». 

(;>;  Voir  :iu\  Anm  \rs.  n  1.  l;i  note  sur  riippiirtcMiicnl  du  I);uij>liin  nu 
«  ImIc.mii  (\r  r:>iil.iin<-I)li'.'Ui. 

(I.  PHOCEA  \i:iUi.\L  de  Vinivvrt'.nc  du  (:i>rj>::  de  Monyriunn:r  le  Dauphin 
(Arihi\cs  nat..  Ol,  ICM.  lias>o  7). 

AujciunI  hui  ^iugl  cl  un  (Irocnibrc  ITt'ô.  Nous  soussi^ru's  avons,  par  onlro 
(lu  n«»i.  proccflt-  à  louviTluro  du  cr)i[>s  de  M-  le  Dauphin  et  avons  Irouvô 
Cl*  qui  suit  : 

1  .\  1  ()u\  rrtinc  «lu  bns  \  cnli'c.  nous  avons  t\Mnnr(|U('  v\\\  peu  de  s(''ir)sit('' 
san';iiinolt'nlf.  f/rpii)Ioon  dans  Ic-tal  d  aniai^rissiMncnl  ordinaire  dans  les 
longues  nialatlics.  L'<'slf)niac,  \vs  inl<'slins  j^rclcs  cl  les  i^ios  intestins  dans 
.'tl;it  naturel  :  le  nïéscntère  sain. 


-  14  — 

toute  la  faculté,  qui  ensuite  en  firent  le  procès- verbal,  le 
mirent  dans  un  linceul  de  tafTetas  ciré  et  parfumé,  la  tète 
enveloppée  d'une  coefTe  de  nuit.  Le  Prince  fut  rais  ensuite 
dans  un  cercueil  de  plomb  et  fut  rapporté  dans  le  même  cé- 
rémonial sous  le  dais  de  son  lit  avec  le  poêle  et  la  couronne  ; 
le  clergé  continua  ses  prières. 


2*  A  rexamen  du  foie,  la  couleur  et  le  volume  nous  ont  paru  cinns  rêtat 
naturel.  I^s  difTcrentes  sections  profondes  et  en  tous  sens  qu'on  n  fait  dans 
ce  viscère  ne  nous  ont  fait  appercevoir  aucune  trace  de  maladie.  La  vi'sl- 
cule  du  fiel  était  dans  l'état  naturel.  Le  pancréas,  la  ratte,  les  reins  et  In 
vessie,  dans  l'état  naturel. 

3*  A  l'ouverture  de  In  poitrine,  il  y  avait  primitivement,  du  côté  droit, 
environ  un  demi-selier  de  sérosité  sanguinolente  épandue.  La  partie  su- 
périeure du  lobe  droit  du  poumon  étoit  adhérente  au  médiastin  dans  un 
point.  I^  tiers  de  l'épaisseur  de  ce  lobe  étoit  skirreux,  et  on  a  trouvé  dans 
l'intérieur  plusieurs  points  de  suppuration;  le  reste  du  même  poumon 
droit  étoit,  à  l'extérieur,  dans  l'état  naturel  ;  il  avoit  ce|)cndant,  dans  l'in- 
térieur, plusieurs  points  skirreux  épars  ça  et  là  et  en  suppuration. 

Secondement,  dans  le  côté  gauche  de  la  poitrine,  nous  avons  trouvé  une 
chopine  de  sérosité  purulente  mêlée  de  quelques  flocons;  cette  liqueur 
épanchée  enfonçoit  le  diaphragme  du  côté  du  bas  ventre,  ce  que  nous 
avions  déjà  remarqué  en  ouvrant  cette  caimcité.  Tout  le  poumon  de  ce 
côté  étoit  adhérent  tant  à  la  plèvre  qu'au  médiastin  et  n'aiant  de  libre  que 
ses  bords  tninchants.  I^  couleur  blanche  et  semée  de  taches  purulentes, 
le  volume  ordinaire,  la  consistance  skirreuse  dans  toute  son  épaisseur.  Hn 
ouvrant  le  corps  du  poumon,  nous  avons  trouvé  un  creux  considérable 
rempli  d'environ  un  poisson  (mesure  équivalant  à  peu  près  au  huitième 
d'un  litre)  de  matières  sanieuscs.  Cette  poche  avoit  différentes  issues  qui 
pénétroient  dans  la  substance  du  poumon;  In  plus  considérable s'étendoit 
jusqu'aux  premières  ramifications  de  In  trachée  artère.  Le  reste  de  ce  pou- 
mon étoit  totalement  en  suppurntion. 

1^  cœur  étoit  dans  l'état  naturel,  mais  vuide  de  sang. 

A  l'ouverture  de  la  tôle,  on  n  trouvé  tout  dnns  l'état  naturel. 

En  foi  de  quoi  nous  avons  signés  ce  présent  proce/.-verbal,  à  Fontaine- 
bleau, ce  même  jour  et  an  que  dessus. 
Signé  : 
S^.NAC  Anooi'ill£ 

Lassone  lioiscoiLijkrn 

Labreuillr  IUvin 

Du  VAL 
LOUSTAI'NAL'X 

Le  duc  DE  FaoNSAC. 


—  15  — 

Le  dimanche  22,  les  chapelles  ardentes  furent  établies 
dans  la  chambre  du  prince  pour  y  dire  les  messes.  Les  en- 
trailles et  le  cœur  du  prince  furent  déposés  pour  être  portés 
ou  il  sera  dit  cy-après. 

Sur  le  cercueil  ainsi  que  sur  les  boctes  des  entrailles  et 
cœur,  fut  mis  à  chacune  une  inscription  du  lieu,  de  Tâgc  et 
du  quantième. 

La  chambre  du  Prince  disposée  en  chambre  ardente,  le 
corps  fut  mis  sous  un  dais  et  une  estrade.  Il  est  observé 
que,  pendant  qu'on  disposoit  la  chambre  du  Prince,  il  fut 
déposé  dans  la  Chambre  des  Nobles,  jusqu'au  lundi  23  que 
les  ouvriers  eurent  fini. 

Cedit  jour,  le  premier  Aumônier,  accompagné  du  clergé, 
premier  Gentil!iomme  de  la  Chambre,  Maître  de  la  Garde- 
Robe,  firent  le  transport  du  corps;  le  cœur  porté  par  le 
premier  Aumônier,  la  couronne  par  le  premier  Gentil- 
homme de  la  Chambre,  les  Ordres  par  le  Maître  de  la 
Garde-Robe. 

Le  Prince  exposé  et  toute  la  cérémonie  faite,  on  com- 
mença les  messes  et,  le  reste  du  jour,  furent  dites  les  priè- 
res et  offices  des  Morts.  L'ordre  fut  donné  le  soir  pour  le 
mardi  24.  Les  séances  furent  établies  aussitôt  quç  le  Prince 
fut  mis  dans  la  Chapelle  ardente  par  le  Maître  des  Cérémo- 
nies. 

Le  premier  Aumônier  à  droite  sur  un  pliant;  TAumônier 
de  quartier  à  côté  de  lui  ;  les  chapelains  et  clercs  des  cha- 
pelles ensuite.  La  première  banquette  occupée  par  les 
Ecnyers,  la  seconde  par  les  Ofilciers  de  la  Chambre,  Garde- 
Robe  et  autres  officiers  de  la  Chambre  et  de  la  Maison. 

A  gauche,  le  premier  Gentilhomme  de  la  Chambre,  sur  un 
pliant;  le  Maître  de  la  Garde-Robe,  Chefs  des  brigades  et 
exempts,  sur  des  tabourets,  occupoient  la  place  de  la  pre- 
mière forme.  Sur  la  banquette  derrière  étoient  le  premier 
Valet  de  chambre  et  Valets  de  chambre;  la  seconde  ban- 
quette (était  occupée]  par  le  premier  valet  de  Garde-Robe 
et  valets  de  Garde- Hobe. 


10  — 


A 


Le  service  a  été  fait  jour  et  nuit  par  les  dits  officiers  de 
la  Chambre  et  Garde-Robe,  également  par  le  clergé. 

Le  jeudi  26,  après  la  séance  de  l'office  du  matin,  le  pre- 
mier Aumônier  et  le  clergé,  chacun  un  cierge  ù  la  main,  le 
premier  Gentilhomme  de  la  Chambre,  Maître  de  la  Garde- 
Robe,  Maître  des  cérémonies  et  les  autres  officiers  présents, 
le  Cœur  enlevé  par  le  Grand  Maître  des  Cérémonies  de  des- 
sus la  crédence,  le  remit  ensuite  entre  les  mains  du  pre- 
mier Aumônier  Le  clergé,,  les  officiers  de  la  Chambre  et 
Garde-Robe,  le  Roy  d'armes  et  héraults  d'armes,  le  premier 
Gentilhomme  de  la  Chambre,  Maître  de  la  Garde-Robe,  Chef 
des  brigades  et  Exempts,  le  !*'••  Aumônier  tenant  le  cœur,  suivi 
des  aumôniers  et  clergé,  le  cortège  le  conduisit  jusqu'au  Ca- 
rosse  de  Mcrr  le  Dauphin,  où  M.  l'évêque  de  Sentis,  premier 
Aumônier  du  Roy,  et  M.  le  duc  de  Fleury,  l^''  Gentilhomme 
de  la  Chambre,  montèrent  dans  un  des  carosses  cy-dessus 
dits,  chargé  du  cœur  du  Prince,  accompagné  d'un  détache- 
ment des  gardes  du  Roy,  officiers  du  Corps,  écuyers,  pages 
et  plusieurs  gens  de  livrée;  se  mirent  en  marche  pour  se 
rendre  à  Villejuif,  où  M.  le  Prince  de  Condé  se  trouva, 
chargé  de  l'ordre  du  Roy,  pour  rendre  le  cœur  du  Prince  à 
S.  Denis  et  en  faire  la  cérémonie. 

Le  samcAJi  28,  il  y  eut  séance  à  9  heures  112  du  matin. 
Mk'  le  duc  d'Orléans  se  rendit  dans  la  chapelle  ardente  ;  tout 
le  clergé  pareillement.  Après  que  le  Grand  Aumônier  (1)  eut 
dit  quelques  prières,  le  clergé,  par  ordre  du  Grand  Maître 
des  Cérémonies,  marcha  en  avant;  ensuite  la  Chambre  et 
Garde-Robe;  après,  les  hérauts  d'armes.  Le  corps,  porté 
par  les  valets  de  Chambre,  suivoit  le  Grand  Aumônier,  le 
premier  Gentilhomme  de  la  Chambre,  le  Maître  de  la  Garde 
Robe  et  M»?»-  le  duc  d'Orléans. 

Le  corps  porté  par  les  dits  officiers  de  la  Chambre  jusqu'à 
la  salle  des  Gardes  et  remis  entre  leurs  mains,  lesquels  le 
portèrent  dans  le  char. 

L'on  se  mit  en  marche.  Huit  Carosses  de  deuil  précédoient 

(1)  M.  (le  la  Roclip-Aymon,  nrchcvôque  de  ncims. 


>CaeTI  ARCHEOLOCIQPI   Dfi  SIN5. 


T.  XXII,  PL.   Il,  p.    l6. 


LE    DAUPHIN   ET   SES   CINQ    FILS 

Médaillon  bronze  doré 


(Cabinet  du  Midaittet,) 


rê 


—  17  — 

le  char  (1).  Dans  le  !«"  étoit  le  Grand  Aumônier,  Taumônier 
de  quartier,  le  confesseur  et  le  curé  de  Fontainebleau. 
Dans  le  second,  Min-  le  duc  d'Orléans,  le  duc  de  Trènies, 


■  1;  Voici  rOiiDiiE  D£  Marche  pour  lu  transport  a  Sens,  arrêté  par  le 
(■raiid  Maître  des  cérémonies  : 
IX ux  gardes  du  corps  portant  des  flambeaux  pour  ouvrir  la  marche. 

—  Soixante  pauvres  avec  des  flambeaux  (entrent  dans  le  cortège  &  la 
porte  de  Sens). 

—  L*n  carrosse  de  M.  le  duc  de  Tresnies. 

—  Un  carrosse  de  M.  le  duc  de  Fronsac. 

—  Vn  carrosse  du  Grand  Aumônier. 

—  Le  carrosse  des  écuyers  de  M.  le  duc  d'Orléans. 

—  Cne  brigade  de  la  2*  compagnie  des  Mousquetaires. 

—  Une  brigade  de  la  1"  compagnie  des  Mousquetaires. 

—  Ije  guet  des  Chevaux-Légers. 

—  Deux  carrosses  du  Roi  a  six  places,  dans  lesquels  les  nicnins. 

—  Un  troisième  carrosse  à  six  places,  dans  le  fond  duquel  M.  le  duc 
d  4  irlêans  à  droite,  M.  le  duc  de  Fronsac  à  côté,  M.  le  duc  de  Tresmes  vis- 
a-vi%  de  M.  le  duc  d'Orléans  sur  le  devant,  M.  le  comle  de  Chauvclin  a 
ci'uè  de  lui.  M.  le  comte  de  Pons,  premier  gentilhomme  de  la  Chambre  de 
M.  le  doc  d'Orléans,  à  la  portière  du  côté  de  M.  le  duc  d'Orléans,  et  M.  le 
ricrimte  de  Noé,  son  gentilhomme,  à  l'autre  portière. 

—  Un  quatrième  carrosse  du  Roi  à  quatre  places,  dans  lequel  le  Grand 
Aumônier»  l'Aumônier  de  quartier  chez  M.  le  Dauphin,  le  Confesseur  (abbé 
iloUel)  et  le  Curé  de  la  paroisse  de  Fontainebleau. 

—  Huit  pages  de  Madame  la  Dauphine. 

—  Huit  pages  de  la  Reine. 

—  Vingt-quatre  pages  du  Roi.  Ceux  de  la  grande  écurie  à  droite;  ceux 
de  la  petite  à  gauche. 

—  Les  trompettes  des  Ecuries. 

—  Les  Héraults  et  Roi  d'Armes. 
~~  Les  officiers  des  cérémonies. 

—  Quatre  Chevaux-Légers. 

—  Le  Chariot  du  Corps. 

—  L'ccuyer  de  main  du  Roi  servant  auprès  de  M.  le  Dauphin,  h  côté  du 
rharioL 

—  Les  officiers  des  Compagnies  d'ordonnance,  près  la  petite  roue  du  car- 
rosse- 
Sur  les  ailes  : 

—  Vingt-quatre  valets  de  la  grande  écurie  à  droite,  et  un  d'eux  à  gauche. 

—  Des  Cent- Suisses  commandes  par  un  exempt  et  un  fourrier. 

Derrière  le  chariot  : 


—  18  — 

le  premier  Gentilhomme  de  la  Chambre  et  le  Maître  de  la 
Garde-Robe. 

Dans  les  autres  étoient  MM^^  les  Menins. 

Le  cortège  étoit  compose  de  60  gardes  du  Roy,  un  déta- 
chement de  50  maîtres  de  chaque  compagnie  des  Rouges, 
plusieurs  écuyers,  pages  et  gens  de  livrée. 


\'^ 


—  \jt  lieutenant  et  rcxempt  des  gardes  du  Corps  et  gardes,  au  nombre 
de  douze  et  un  brigadier. 

—  Le  Guet  des  Gendarmes. 

—  Le  carrosse  de  M.  le  duc  d'Orléans. 

—  Deux  carrosses  du  Roi  attelés  de  chevaux  sans  caparaçons. 

—  \jc  carrosse  du  Grand  Aumônier. 

—  1^  carrosse  de  M.  le  duc  de  Fronsac. 

—  1>»  carrosse  de  M.  le  marquis  de  Chauvelin. 

—  l>:s  carrosses  ou  autres  voitures  apportenant  aux  Menins. 

Des  flambeaux  sont  distribués  à  toutes  les  troupes,  Cent-Suisses,  Pages, 
valets  de  pied  et  palefreniers  qui  éclairent  les  carrosses  du  Roi. 

\ji%  autres  carrosses  sont  éclairés  par  ceux  à  qui  Ils  appartienncsnt,  à  qui 
on  distribue  aussi  des  flambeaux. 

On  n'arrête  i>olnt  sur  la  route  en  imssant  devant  les  églises. 

(Archives  nat.,  G 1,  1044.) 


CHAPITRE  III 

LA    POMPE   FUNÈBRE   A    SENS 

Pendant  que  se  déroulent,  à  Fontainebleau,  ces 
tristes  cérémonies.  Sens,  malgré  les  fêles  de  Noël, 
est  tout  aux  préparatifs. 

Le  cardinal  a  communiqué  au  Chapitre  deux  let- 
tres. L'une  est  du  comte  de  Saint-Florentin,  et  datée 
de  Fontainebleau,  le  21  décembre  : 

Monseigneur, 

Le  Roy  m'ordonne  d'informer  Vc  Eminence  que  feu  Mon- 
seigneur le  Dauphin,  a3'ant  désiré  d'cstre  inhumé  dans  vo- 
ire église  métropolitaine,  Sa  Majesté  a  donné  les  ordres 
pour  que  le  corps  de  ce  Prince  y  soit  transporté  samedi 
28  de  ce  mois.  M.  le  marquis  de  Dreux,  grand  Maître  des 
cérémonies,  informera  Votre  Eminence  de  l'heure  à  laquelle 
le  convoi  pourra  arriver  et  des  préparatifs  que  Votre 
Eminence  pourra  avoir  à  ordonner  dans  son  église.  Sa  Ma- 
jesté est  bien  persuadée  que  Votre  Eminence  ne  négligera 
rien  de  tout  ce  qui  est  convenable  pour  que  le  corps  de  ce 
Prince  soit  reçu  avec  tout  l'honneur  qui  luy  est  dû. 

J'ayllionneur  d'estre...  (1). 

il  Arch.  nal.,  Ol,  1044,  cl  archives  de  rVonne.  rcg.  cnpitulnire.  G  681, 
Nrancf  du  24  décembre  17C5. 


—  20  — 

La  seconde  est  du  Roi,  demandant  des  prières 
pour  Tânie  de  son  fils  : 

A  mon  cousin  le  cardinal  de  Lnynes,  archevêque  de  Sens,  pre- 
mier aumônier  de  ma  fille  la  Dauphine,  commandeur  de 
Vordre  du  Saint-Esprit  : 

Mon  cousin, 

Ln  mort  de  mon  fils  le  Dauphin  me  cause  une  douleur 
d'autant  plus  juste  qu'il  joignait  à  une  solide  piété  toutes  les 
qualités,  toutes  les  vertus  dignes  de  sa  naissance  ;  elles 
avaient  paru  en  lui  pendant  tout  le  cours  de  sa  vie,  et  elles 
lui  avaient  acquis  toute  ma  tendresse  et  toute  mon  estime. 
Elles  ont  encore  été  plus  particulièrement  reconnues  dans 
la  longue  maladie  à  laquelle  il  a  succombé  ;  ce  prince  a 
montré,  jusqu'à  ses  derniers  moments,  sa  soumission  aux 
décrets  de  la  Providence  et  sa  conflance  en  sa  bonté.  Celte 
perle,  qui  pénètre  mon  cœur  de  la  plus  vive  affliction  et  que 
tout  mon  peuple  partage,  ne  me  permet  pas  de  difTérer 
d'unir  mes  prières  aux  siennes  pour  demander  à  Dieu  le 
repos  de  l'âme  de  ce  cher  fils,  et  la  consolation  dont  j'ay 
besoin  dans  une  circonstance  aussi  douloureuse.  Aussy  je 
vous  écris  celte  lettre  pour  vous  dire  qu'aussitôt  que  vous 
l'aurez  reçue,  vous  fassiez  faire  des  prières  publiques  dans 
l'étendue  de  votre  diocèse,  et  que  vous  ayez  à  inviter  à 
celles  qui  seront  faites  dans  votre  église  les  Corps  qui  ont 
coutume  d'assister  à  ces  tristes  cérémonies;  et  m'assurnnt 
que  vous  me  donnerez  en  cette  occasion  des  marques  de 
voire  piété  ordinaire,  je  prie  Dieu  qu'il  vous  ait,  mon  cou- 
sin, en  sa  sainte  garde. 

Ecrit  à  Versailles,  le  24  décembre  176*), 

(Signé  :,,  Louis. 
Et  plus  bas  :  Pheijppeaux  (1). 

Sous  la  surveillance  des  délégués  du  Chapitre,  les 
ouvriers,  dirigés  par  M.  de  Moranzel,  inspecteur 


(1)  Arcli.  de  rVoniic,  G  G81. 


—  21  — 

des  bâtiments  du  Roi,  travaillent  à  la  construction, 
au  milieu  même  du  chœur,  d'un  caveau  voûte  en 
pierres  de  taille  (1).  En  enlevant  les  terres  qui  se 
Irouvent  à  l'endroit  désigné,  on  a  rencontré  les  sé- 
pultures de  deux  archevêques,  Gauthier  Cornut, 
mort  en  1241,  qui  avait  béni,  dans  la  cathédrale,  le 
mariage  de  saint  Louis,  et  Gilles  II  Cornut,  son  ne- 
veu, mort  en  1292.  Les  restes  des  deux  prélats  sont 
exhumés  et  transportés  dans  la  crypte  creusée  en 
avant  du  maître-autel  pour  la  sépulture  des  arche- 
vêques (2). 

D autres  ouvriers  décorent  la  cathédrale.  Des 
lenlures  noires  la  revêtent  jusqu'à  la  hauteur  des 
voûtes.  Une  litre  de  velours,  semée  d'écussons,  en- 
toure le  chœur,  fermé  par  une  immense  draperie. 
Sur  la  corniche  des  stalles  règne  un  cordon  de 
fleurs  de  lis  alternant  avec  des  cierges  (3). 


•Il  Ijcs  pierres  cmploj'ées  à  In  construction  du  cavcnu  avaient  été  four- 
nies par  les  religieux  de  Sninl-Picrrc-le-Vif. 

Le  contrôleur  de  Fontainebleau  ayant  refusé  le  mémoire  présenté  par 
:^^  reli^eux  pour  cet  objet,  et  s'élevanl  à  200  livres,  le  cardinal  de  Luynes 
(lut  intervenir.  Un  avis  daté  de  Versailles,  le  23  juin  17G6,  informe  le  prieur 
que  le  trésorier  des  Bâtiments  a  reçu  des  ordres  pour  le  paiement.  (Arch. 
njl ,  01.  19te.) 

i2)  Voir  Tahbk.  Antiquités  de  la  ville  de  Sens,  p   462. 

i3  Etat  DES  choses  ordoxn^.es  par  M.  le  PitEMiim  gentilhomme  de  la 

•  IUMBRE  POl'R  LE  TRANSPORT  DU  CORPS  A  SenS  : 

—  Tendre  la  grande  porte  de  l'église  de  trois  lés  de  drap  avec  deux  lés 
(il-  satin  chargés  de  petits  écussons  des  armes  de  M.  le  Dauphin  ; 

—  Mettre  un  grand  écu&son  des  mêmes  armes  au  milieu  ; 

~  Tendre  la  nef  de  trois  lés  de  drap,  sans  salin  ni  armoiries  ; 

—  Mettre  deux  tréteaux  et  une  table  à  rentrée  de  l'église; 

—  Tendre  du  haut  en  bas  la  face  de  la  grande  porte  du  chœur  du  côté 
iW  la  nef,  avec  deux  lés  de  satin  chargés  d'armoiries  de  grands  écussons 
(if\  mêmes  armes  entre  les  deux  lés; 


oo 


De  leur  côté,  les  fourriers  de  la  cour  désignent  les 
logements  retenus  pour  les  personnes  du  deuil. 

Sur  Tordre  du  marquis  de  Dreux,  grand  maître 
des  cérémonies,  lescrieurs-jurés  de  la  ville  tendent 
une   salle  de   rArchevéché  pour  recevoir  le   duc 


i 


—  Tendre  le  pourtour  du  chœur  de  deux  les  de  velours  chargés  tl'ar- 
inoirlcs; 

»  Couvrir  les  stalles,  les  bancs,  etc.  ; 

'  Couvrir  le  parterre  depuis  l'autel  jusqu'à  la  porte  d'entrée  du  choeur; 

—  Parer  le  grand  autel  d'ornements  aux  armes  de  M.  le  Dauphin  ; 

—  Trente-six  cierges  sur  le  grand  autel.  S'il  y  a  dans  le  chœur  d'autres 
uiitels,  les  garnir  de  cierges  la  quantité  sufTisunte  de  cierges  pour  éclairer 
h'  chœur. 

—  Dresser  au  milieu  du  chœur  une  estrade  de  cinq  degrés  peu  élevés 
ïiir  les  degrés  de  laquelle  : 

—  Soixante  chandeliers  garnis  de  cierges  avec  des  écussons  aux  armes 
di-  M.  le  Dauphin; 

—  Couvrir  l'estrade  de  drap  ; 

—  Klevcr  au-dessus  de  l'estrade  un  dais  de  velours  noir  croisé  de  moire 
d'argent  avec  les  armes  du  Prince  dans  les  coins  de  la  croix  ; 

—  Deux  petits  carreaux  de  velours  noir  A  crépines  d'argent  |K)ur  poM*r 
h  s  pièces  d'honneur  ; 

—  Mettre  dans  le  chœur  :  un  carreau  de  velours  noir  ; 

—  Quelques  carreaux  de  drap  noir; 
^—  Quelques  plians  et  tabourets  couverts  de  drap  noir; 

—  Un  nombre  sulTlsant  de  bancs  couverts  de  drap  pour  les  officiers  de 
In  maison  et  autres. 

—  Douze  pièces  de  tafetas  pour  les  omciers  de  la  chambre  qui  porteront 
le  corps  ; 

—  Douze  pièces  idem,  pour  les  gardes  qui  porteront  le  corps; 

—  Douze  bretelles  couvertes  de  velours  noir  garnies  de  crochets  jMJur 
]H)rter  le  corps  ; 

—  Douze  paires  de  gans  pour  les  gardes; 

—  Faire  faire  soixante  robes  de  drap  gris  pour  les  pauvres  du  convoi; 

—  Soixante  paires  de  souliers  pour  les  mêmes  pauvres; 

—  Ijo  nombre  de  (Innibenux  nrci'ssnlro  pour  co  qui  marchera  au  con- 
voi. Savoir,  pour  les  pnuvn*s.  1rs  garclrs,  les  suisses,  le  guet  des  genclar- 
nifs,  le  guet  des  ehevaux-lOgers,  une  brign<Ie  de  la  1"  compagnie  (1rs 
mousquetaires,  une  brigade  de  la  2r  compagnie,  les  pages  du  Itoi,  de  In 
Heine,  de  Madame  la  Dauphine;  ks  valets  de  pied  du  Roi,  de  la  Reine,  de 
Madame  la  Dauphine;  les  palerreniei s  éclairant  les  carosses,  les  garçons 


—  2i  — 

d  Orléans  et  déroulent  un  tapis,  du  palais  jusqu'à 
lïjiHse  (1). 

Les  pourvoyeurs  el  les  officiers  des  menus  font 
disposer  des  logements  et  préparer  des  cuisines 
pour  les  tables  des  différents  détachements  de  la 
maison  du  Roi,  dressées  dans  le  vaste  réfectoire  du 
couvent  des  Cordeliers  (2). 

Le  convoi,  parti  de  Fontainebleau  à  11  heures 
du  malin,  a  traversé  Moret,  Montereau,  Villeneuve- 
la-Guyard  et  Pont-sur- Yonne.  11  fait  halle  sur  la 
route,  à  6  heures  du  soir,  après  le  village  de  Saint- 
Denis,  vis-à-vis  l'abbaye  de  Sainte-Colombe.  Il  fait 
nuit  sombre.  MM.  de  Siougeat  et  de  Gabriac,  vi- 
caires généraux,  venus  à  la  rencontre  avec  un  gen- 
tilhomme du  cardinal,  se  présentent  à  la  portière 
du  carrosse  du  duc  d'Orléans  et  le  saluent.  Rangés 
sur  les  bords  de  la  roule,  les  religieux  de  l'abbaye, 
en  habits  de  cérémonie,  rendent  les  derniers  de- 


il'atlelage;  la  livrée  de  M.  le  duc  d'Orléans,  du  duc  de  Fronsac,  premier 
gcntillioiiune  de  la  chambre,  du  duc  de  Tresmes,  du  grand  Aumônier, 
des  menins  de  M.  le  Dauphin,  du  maître  de  la  garde-ro)>e. 

Pour  tet  officiers  des  cérémonies  : 

Un  manteau  à  la  royale  borde  de  huit  pouces  d'hermine,  avec  des  fleurs 
de  hs  brodées  en  or  ;  la  couronne  ;  le  poêle  de  la  couronne.  (Arch.  nal., 
01. 1044.) 

Vn  autre  Etat  des  fournitires  a  fairb.  donne  les  détails  suivants  : 

l'ne  couronne  fermée  de  Dauphin,  de  vermeil  doré,  pour  mettre  sur  le 
cercueil; 

Demander  le  poêle  de  la  couronne  au  garde-meuble  ; 

Quatre  grands  écussons  des  armes  de  M.  le  Dauphin,  en  broderie  d'or 
(I  d'argent,  et  les  attacher  sur  les  quatre  coins  du  i>ocle  de  la  couronne; 

Un  poêle  velours  noir  croisé  de  moire  d'argent.  (Arch.  nat.,  ibid.) 

^)  Archives  nat.,  01,  1(M4. 

(2)  Relation  imprimée  à  Sens,  en  17G6. 


—  24  — 

voirs  au  prince  (1).  Les  soixante  pauvres  venus  de 
la  ville  et  revêlus  de  leurs  robes  de  drap  gris,  pren- 
nent place  dans  le  cortège.  Toute  Tescorte,  pau- 
vres, soldats,  pages  et  valets  de  pied,  portent  des 
flambeaux.  On  se  remet  en  marche,  au  pas,  cette 
fois.  Arrivé  près  de  la  porte  Saint-Didier,  le  cor- 
tège contourne  les  murs  de  ville  jusqu'à  la  porte 
dTonne. 

La  porte  est  drapée  de  tentures  noires.  Deux  com- 
pagnies de  grenadiers  des  gardes  françaises  et  des 
gardes  suisses  forment  la  haie  le  long  de  la  Grande- 
Rue,  rendue  plus  étroite  encore  par  la  foule  qui  se 
presse  derrière  les  soldats. 

Le  char  parvient  enfin  sur  le  parvis  de  l'église 
métropolitaine. 

Ce  char,  écrit  le  prieur  de  Saint-Maximin,  est 
«  d'une  hauteur  et  d'une  largeur  immense,  se  ter- 
minant par  le  haut  en  forme  de  représentation  et 
couvert  d'un  drap  de  velours  noir,  les  armoiries  du 
Prince  relevées  en  bosse  d'or  et  d'argent  aux  qua- 
tre coins,  et  d'une  croix  d'étofTe  d'argent  au  mi- 
lieu. » 

Les  troupes  se  rangent  en  ordre  de  bataille  sur  la 
place  Saint-Etienne.  Devant  les  grandes  portes  se 
présente  le  cardinal  de  Luynes,  accompagné  de  Ni- 
colas de  Livry,  évéque  de  Callinique  et  abbé  de 
Sainte-Colombe-lez-Sens,  de  l'évcque   d'Auxcrre 


(1)  Dctnils  empruntas  n  In  Lrllre  d'un  curé  de  la  uille  de  Sens  (Mr  Four- 
neaux, prieur  de  Suinl-Mnximin)  d  un  de  aes  amis  au  sujet  du  contHii  et  in- 
huutation  de  M*'  le  Dauphin,  ilocuinent  imprimé  faisant  partie  de  la  lii- 
bliothèque  d'un  Séuonais,  tome  I.  (Bibliotlii^que  d'Auxcrre.) 


y-CIllT    AICHEOLOCia;E   DE   SENS. 


T.   XXII,   PL.    III.  p.  34. 


— 1 — n 


MORT   DU    DAUPHIN 
Gravure    de    Littrbt  d'après  le  dessin  de  Schenau 


—  25  — 

Jean-Baplisle  Champion  de  Cicé  et  du  nouvel  évê- 
que  de  Coulances,  Ange-François  de  Talaru  de 
Chalmazet  (1).  Autour  des  prélats,  le  Chapitre  et 
le  clergé  en  chapes,  portant  des  cierges. 

Rien  ne  saurait  donner  une  idée  plus  exacte  de 
la  pompe  funèbre  qui  se  déroule  alors  dans  la  Mé- 
Iropole  que  le  procès-verbal  officiel  inscrit  au  re- 
gistre des  sépultures  du  Chapitre  de  Sens  (2). 

Le  28  décembre  1765,  six  heures  du  soir,  Nous  Paul  d'Al- 
bert de  Luyaes,  par  la  miséricorde  divine  Cardinal  prestre 
de  la  Sainte  Eglise  Romaine,  du  titre  de  S.  Thomas  in  Pa- 
rione,  archevesque  vicomte  de  Sens,  Primat  des  Gaules  et 
de  Germanie,  commandeur  de  l'ordre  du  Saint-Esprit,  pre- 
mier aumônier  de  Madame  la  Dauphine,  ayant  été  informé 
par  la  lettre  de  >f .  le  Comte  de  Saint-Florentin,  ministre  et 
secrétaire  d'Etat,  écrite  de  Fontainebleau,  en  datte  du  21  de 
ce  mois,  que  feu  Monseigneur  le  Dauphin  ayant  désiré 
dèlre  inhumé  dans  notre  Eglise  Métropolitaine,  Sa  Majesté 
avoit  donné  ses  ordres  pour  que  le  corps  de  ce  prince  y 
fût  transporté  cejourd'hui  et  ayant  été  averty  par  M.  le  Mar- 
quis de  Dreux,  grand  maître  des  cérémonies,  que  le  Convoi 
ètoit  prest  d'arriver  à  la  porte  de  notre  Eglise,  Nous  nous 
sommes  transporté,  revêtu  de  nos  habits  Pontificaux,  ayant 
poar  assistants  les  archidiacres  de  Provins  et  d'Etampes,  le 
Prèchantrc  portant  le  bâton,  accompagné  de  deux  choris- 
tes, et  étant  précédé  de  notre  Chapitre  Métropolitain  et  de 
tout  le  clergé  de  notre  Eglise,  tous  revêtus  de  chappes  noi- 
res- 

Peu  de  temps  après  le  convoy  étant  arrivé,  le  coffre  où 
doit  renlermé  le  corps  de  Très  Haut,  Très  Puissant  et  Excel- 


îf  Ancien  vicaire  général  du  cardinal  de  Luynes,  chanoine  de  Sens  en 
)TA  <^  archidiacre  de  Provins  en  1757,  il  avait  clé  sacré  évoque  de  Cou- 
Jnccs.  le  10  oiars  17G5, 

2)  Archives  du  grcfie  du  tribunal  civil  de  Sens. 


-sc- 
ient prince  Louis,  Dauphin  de  France,  décédé  au  château 
de  Fontainebleau  le  vingt  de  ce  mois,  à  huit  heures  du  ma- 
tin, âgé  de  trente  six  ans,  trois  mois,  vingt  six  jours,  ayant 
été  tiré,  avec  la  boéte  de  plomb  dans  laquelle  étoit  renfer- 
mées ses  entrailles,  du  char  funèbre  qui  lavoit  apporté,  le 
tout  a  été  mis  sur  une  table  couverte  d'un  drapt  noir,  sur 
laquelle  étoit  une  nappe  blanche,  ensuite  le  poêle  a  été 
tendu  dessus,  le  tout  en  présence  de  Son  Altesse  Sérénissimc 
Min*  le  Duc  d'Orléans,  premier  prince  du  sang,  de  M.  le  Duc 
de  Tresrac,  pair  de  France,  nommé  par  le  Roy  pour  accom- 
pagner, de  M.  le  Duc  de  Fronsac,  pair  de  France,  premier 
gentilhomme  de  la  chambre  du  Roy  en  sur^ivance,  portant 
la  Couronne,  de  M.  le  marquis  de  Chauvelin,  maître  de  la 
garde  robbe  du  R03',  poriant  le  manteau  à  la  Royallc,  de 
Messieurs  les  menins,  de  M.  le  marquis  de  Dreux  et  autres 
officiers.  Alors,  M.  Tarchevêque  de  Reims,  commandeur  de 
Tordre  du  Saint-Esprit,  grand  aumônier  de  France,  étant  en 
chappe  et  mittre,  en  avant  de  la  table  sur  laquelle  le  corps 
du  feu  Prince  étoit  posé,  assisté  de  M.  de  Talaran,  aumô- 
nier de  quartier  du  Roy,  a  fait  une  harangue  à  laquelle  nous 
avons  répondu  ;  ensuite  il  nous  a  fait  la  remise  du  corps  de 
feu  Mk'r  le  Dauphin  et  s'est  retiré.  A  Tinstant,  on  a  commencé 
les  prières  en  tel  casaccoulumécs,  pendant  lesquelles  nous 
avons  jette  de  l'eau  bénitlc  sur  le  corps  que  nous  avons  en- 
censé et,  pendant  que  le  chœur  chantait  les  psaumes  et  ré- 
pons marqués  dans  le  rituel,  le  corps  du  feu  Prince  a  été 
porté  dans  le  chœur  de  notre  Eglise  par  les  garrles  du  corps 
de  Sa  Majesté,  les  quatre  coins  du  poêle  étant  tenus  par 
quatre  des  principaux  dignitaires  députés  pour  ce  par  notre 
(Chapitre  (1),  et  il  a  été  placé  sur  une  estrade  dessous  un 
daix  (2).  Alors  on  a  mis  sur  le  poésie  dont  le  coffre  étoit 


(1)  MM.  de  Morsangy,  trésorier;  d'HcssHin,  doyen;  Huernc,  cellerirr.  cl 
de  Gabrinc,  nrchidiucrc  de  GAtinais. 

(2)  A  l'arrivée,  M.  le  duc  d'Orléans  se  plaça  dan»  la  première  stalle  A 
droite:  ensuite  le  duc  de  Tresmcs  et  les  Menins.  Ia*s  gentilshommes  du 
duc  d'Orléans  dans  les  stalles  au  dessous  de  la  sienne;  le  duc  de  Fronsac, 
derrière  l'cslrude  à  droite  ;  et  M.  de  Saint-Sauveur,  chef  de  brigade,  à 


i 


—  27  — 

couvert,  le  iranleau  à  la  Royalle,  la  Couronne  et  le  Cordon 
et  Collier  des  ordres  du  Roy  et  de  la  Toison  d*Or  et,  après 
avoir  fini  les  prières  accoutumées,  on  a  récité  des  pseaumes 
et  nous  nous  sommes  retiré,  et  nous  avons  laissé  deux  cha- 
noines, deux  semiprébendés  et  deux  clercs  pour  psalmodier 
continuellement  auprès  du  corps  qui,  pendant  ce  temps,  a 
toujours  clé  gardé  par  les  gardes  du  corps  de  Sa  Majesté. 
Peu  de  temps  après,  on  a  chanté  les  Vigilles  (1). 

Et  le  vingt  neuf  du  même  mois  de  décembre  1765,  à  neuf 
heures  du  malin  (2),  Nous  Paul  d'Albert  de  Luynes,  par  la 
miséricorde  de  Dieu  Cardinal  prestre  de  la  Sainte  Eglise  Ro* 
maine,  du  litre  de  Saint-Thomas  in  Parione,  Archevêque  vi- 


gaache.  M.  de  Dreux,  Grand  Maître  des  ccrêmonics.  le  Maître  des  cérémo- 
nies et  TEienipt  des  Cérémonies  à  la  tête  de  l'estrade;  les  héraults  d'ar- 
mes dans  les  angles;  les  ofQciers  de  la  Chambre  et  de  la  Garde  Robe  de  feu 
M.  le  Dauphin  sur  des  banquettes,  à  droite  et  à  gauche  de  l'estrade.  Après 
If's  prières.  M.  le  duc  d'Orléans  et  tout  le  monde  se  retira.  Il  a  été  fourni 
•soixantc-dis-hult  manteaux  à  Sens,  tant  aux  officiers  pour  le  service  de 
M.  le  Dauphin,  qu'à  la  maison  de  M.  le  duc  d'Orléans,  aux  gens  de  M.  le 
duc  de  Fronsac,  à  ceux  de  M.  le  Grand  Aumônier,  h  ceux  de  M.  le  Cardi- 
nal de  Luynes  et  à  ceux  de  M.  le  duc  de  Tresmcs.  (Archives  nat..  01, 1044.) 
(1>  «  Les  personnes  qui  avaient  accompagné  le  convoi,  après  celte  céré- 
monie, passèrent  à  rArchevéché  où  M.  le  Cardinal  avait  fait  préparer  des 
appartemens  pour  recevoir  M.  le  duc  d'Orléans,  devant  lequel  il  fit  servir 
une  table  de  soixante  couverts,  à  laquelle  étaient  le  Grand  Aumônier  de 
France,  le  duc  de  Tresme,  le  duc  de  Fronsac,  le  marquis  de  Chauvelin,  les 
Menlns  de  M"  le  Dauphin,  les  commandans  de  diiférens  détachemens  de 
la  Maison  du  Roi  et  autres  personnes  distinguées.  »  (Relation,  imprimée  à 
Sens.) 

(2)  <  Le  lendemain  29,  M.  le  duc  d'Orléans  ayant  donné  l'ordre  de  l'office 
pour  8  HEURES  du  matin,  tout  étant  disposé,  M.  le  marquis  de  Dreux  alla 
ravertir  à  rArchevéché.  Il  vint  se  placer  conjme  la  veille.  M.  le  Cardinal 
de  Luynes  officia.  »  (Relation,  Archives  nat.,  01,1044.) 

f  Les  quatre  hérauts  d'armes  étaient  assis  aux  quatre  coins  du  catafalque  ; 
If  roi  d'armes  aux  pieds.  Ces  hérauts  portaient,  sur  une  robe  de  crêpe,  une 
cofle  d'armes  de  velours  violet,  en  forme  de  dalmatique,  semée  de  fleurs 
ét^d^oT.  Sur  la  poitrine  se  lisait,  brodé  en  lettres  d'or,  le  nom  de  la  pro- 
Tinre  qu'ils  représentaient.  I^  cotte  du  roi  d'armes  était  à  In  devise  :  Mont- 
ioit Saint-Denis.  Tous  tenaient  en  main  un  bâton  revêtu  de  velours  violet 
$vec  /leurs  de  H»  d'or. 


—  28  — 

comte  de  Sens,  primat  des  Gaules  H  de  Germîmie.  comman- 
deur de  Tordre  du  Saint-Esprit,  premier  aumùriicr  de  Ma* 
dûmc  la  Daupliine.  ayant  pour  assîslanb  les  trésorier  et 
doyen  de  notre  Métropole^  pour  diacres  rarcliitlîacrc  du 
Gâtiriais  et  dcu5i  autres  prêtres  de  notre  Eglise,  pour  sous-^ 
diacres  un  des  ptns  anciens  chanoines  et  deux  autres  prei 
très  de  notre  HgHse»  le  prccliantre  portant  !e  bâton,  accom*~ 
pagnt^  de  deux  choristes  chanoines,  avons  dit  et  cétébre 
pontificaUemcnt  la  mçssc,  dans  le  chœur  de  notre  Eglise, 
en  présence,  comme  dans  Taclc  du  jour  d'hycr,  de  Son  Al- 
tesse Sérénissime  M*^'"  le  duc  d  t>rléans,  de  M.  le  duc 
de  Trcsmcs,  pair  de  France,  nommé  par  le  tloy  pour  ac" 
compagner,  de  M.  le  Duc  de  Fronsac,  pair  de  France,  }tre- 
mîer  gentil  homme  de  la  Chamhre  du  Roy  en  sur%ivancc, 
portant  la  couronne,  de  M.  le  marquis  de  Chauvelin,  maître 
de  la  garde- robhc  du  lloy»  parlant  le  manteau  a  la  royal  le, 
de  messieurs  Ich  Menins,  de  M.  le  marquis  de  Dreux*  j^rand 
maitre  des  cérémonies,  et  d'autres  oriiders;  les  chanoines 
de  notre  Chapitre  étants  dans  leurs  stalles  cl  ceux  qui  t!u 
clergé  de  notre  Eglise  y  ont  droit.  Ensuite  nous  nous  sum* 
mes  avancé  vers  lestrnde  sur  laquelle  cloit  posé  le  corps 
de  Teu  Mt^r  le  Dauphin,  et  après  que  nous  avons  eu  fin  y  toutes 
les  prières  et  les  cérémonies  solennelles  acccuilumces  en 
pareil  cas,  le  corps  de  le n  Très  lîaut,  Très  Puissant  et  Ex- 
cellent Prince,  Louis,  Dauphin  de  France,  a  été  levé  de 
dessus  1  estrade  par  les  gardes  du  corps  de  Sa  Majesté  qui, 
après  d'autres  cérémonies  solennelles  {1}  aussy  uccoutu* 


(t)  Apri'^  r|tic  H  cetctx^ïi  eial  vlè  di\mhé  ttiin^  le  cjihj'uu,  ■  li^  rtïi  tl*nritt«9i 
dtl  am  lu'rniilstk'  st'npprtHcr  h  remplir  lcJ*ri:itïCll<jiiN  dçl<*Mr*ch»rgi-s,  l.'wn 
tVntx  desremUt  ilfirft  k'  t<tivpfiii;  tin  ûulw^  w^tn  Mir  h*  ilrgn*  ;  l«*  roi  &nr* 
nirn.  fiçiulnnl  ce  lïMupsi,  dU  i  t  M.  It-  marc|iiiï  de  tîlitiuvrlln.  mnilrc  dr  Ui 
Gartlc-fU>bb<Mlu  lioi.  cU' In  t^nrltlu  itoî.  ni^wrloï  le  iiiiMiIffiti  n  lu  Itnyiilr 
h  >lijnsflgniMir  \v  n(iii|thiii.  •  <te  iiirintcitiii  lui  fui  r^iiiît<  «ur  mu*  érliiirp^'  d*^ 
lutTHiiï  iititr.  H  11  le  tu  |>iiM*r  pur  lrs|iV'nHi4K*iur  le  ccrcaHL  tl  «Ut  t^iiMiUr  t 
•  ^1. 1er  iluo  tic  Kicinsai%  |>rcriilrrtk-rinilitiiiiHic  t\v  \n  (Ihitmhrc.  cir  lit  |>fir1  ilti 
Bot.  jjpihjrlc-iC  II  Moiii^i'EjïntHir  ïe  ]hiM.pliui  Iji OniLuiinr  lloynle,  •  qui  lui  fui 
imr^ilï^inriU  iviiU^e  ri  ilt'M.iiulue  diiftâ»  U*  i^awaM^  doul  IcaLr^e  fui  û  Hit* 


—  29  — 

mêcs  en  pareil  cas,  Tont  descendu,  avec  la  boètc  de  plomb 
dans  laquelle  éloicnl  les  entrailles,  dans  un  caveau  préparé 
ù  tel  effet  au  milieu  du  chœur  de  notre  Eglise  près  de  Taigle, 
et  ledit  caveau  a  été  ensuite  fermé  et  scellé. 

En  foi  de  quo}'  nous  avons  fait  rédiger  le  présent  acte  et 
lavons  signé  avec  les  dignités  et  chanoines  de  Notre  Eglise 
Métropolitaine. 

Paul,  Cardinal  -  Archevêque  Thévard. 

de  Sens.  Mahiet. 

De  Marsangy,  trésorier.  Le  Houistel. 

D'Hesseux,  doyen,  Mallet. 

HcERSE,  célerier.  Mauclerc. 

Caqi'ia  de  Monbourg,  arch.  D.  de  la  Haize. 

de  Provins.  Dauvergne. 
De Buluoud,  archid.  d^Etam-  Lestoré. 

pes.  Le  Beau. 

MONTALET  DE  ViLLEBREUIL.         GiGOT  DE  BOISBERNIER. 

Morice,  préchantre.  Le  Pellerin. 

Maillet  de  i^  Trémoye.  Hédiard. 

Gratien  Dugaudin.  Roy. 

Berthelin.  L.  le  Blanc. 

Garsebi^nt  de  Fontaine.  Rousset. 

LHKRMiTTEdeCHAMPBERTRAND  Le   Gris,  Secrétaire  du  Cha- 

TissoT,  pitre. 

Dès  le  lendemain  de  cette  grandiose  cérémonie, 
le  Chapitre  prenait  des  mesures  pour  organiser  la 


sLint  fermée  d'une  tombe.  Et  le  roi  d'armes  cria  à  deux  difTércntes  fois  : 
•  Très  Haut,  très  Puissant  et  Exceilenl  Prince.  Monseigneur  Louis  de  Bour- 
bon, Dauphin  de  France,  est  mort  !»  A  la  dernière  fois,  ii  ajouta  :  «  Priez 
Dieu  pour  ie  repos  de  son  àme.  t 

Ct'tte  funèbre  cérémonie  aclicvéc,  M.  ie  duc  s'approclia  et  rendit  à  ces 
prccieus  restes  les  derniers  devoirs  en  saluant  profondément  ie  lomlicau 
qui  les  renferme.  Ce  prince  lut  ensuite  conduit  par  les  Seigneurs  et  les 
Mcnins  dans  son  appartement,  où  il  re^ut  les  compliments  de  tous  les 
corps  ecclésiastiques  et  laïcs  de  la  ville  de  Sens.  *  (Helatiou,  imprimée  à 
Sens  en  17C6.  » 


—  30  — 

continuation  des  prières.  Les  registres  des  délibéra- 
tions (1)  fournissent  à  ce  sujet  d'intéressants  dé- 
tails. 

Lundi  30  décembre  1765.  —  M.  rarchidiacre  de  Provins  a 
dit  que  M.  Sirouette,  inspecteur  des  Menus-Plaisirs  du  Roy, 
lui  avait  remis  hier  la  couronne  et  le  manteau  à  la  Hoyalc 
de  Msr  le  Dauphin,  qu'il  a  sur  le  champ  déposés  au  tré- 
sor (2).  » 

Messieurs  ont  arrêté  qu'il  sera  dressé  dans  le  chœur,  sur 
sur  le  tombeau  de  Min-  le  Dauphin,  un  dais  tendu  de  noir, 
sous  lequel  il  y  aura  une  représentation  (3);  que  pendant 
six  semaines  il  se  dira  à  la  chapelle  de  Saint-Louis  une 
messe  de  Requiem  pour  le  repos  de  Tâme  de  ce  prince,  et 
un  De  profundis  ensuite;  que  cette  chapelle  sera  tendue  de 
noir;  que  l'encens  se  donnera  à  celte  représentation  ainsy 
que  reaUibénite  avant  la  messe  des  dimanches;  que  la  ré- 
tribution de  celte  messe  sera  de  quinze  sols,  payables  par  la 
petite  Trésorerie  ;  et  que,  pour  que  le  peuple  puisse  être 
averti,  la  cloche  destinée  pour  annoncer  les  sermons  sera 
sonnée  à  10  heures  et  demie. 

Mardi  31  décembre.  —  Messieurs  ont  arrêté  que  le  drap  de 
velours  noir  qui  se  met  sur  Taigle  lors  des  obits  solennels 
servira,  autant  qu'il  sera  possible,  à  former  le  daix  qu'ils 
ont  arrêté  être  fait,  par  délibération  du  30,  pour  être  mis  au- 
dessus  de  la  représentation  qui  se  fera  sur  le  tombeau  de 


(1)  Archives  de  T Yonne,  G  681. 

(2)  Se  souvenant  que  les  insignes  royaux  dé|>osés  sur  les  cercueils  des 
princes  êlaient.  après  les  ol>sèques  à  Saint-Denis,  recueillis  ]>nr  le  trésor  de 
l'abbaye,  le  Chapitre  avait  chargé  l'archidiacre  de  Provins  de  réclamer 
pour  le  trésor  le  manteau  et  la  couronne.  Il  devait  également  veiller  à  ce 
que  les  restes  du  luminaire  ne  fussent  pas  enlevés,  el  revendiquer  |>our  le 
trésor  la  chape  dont  était  revêtu  le  grand  aumônier  à  la  levée  du  corps 
Les  inventaires  du  trésor  ne  mentionnent  pas  cette  chape.  Ce  prélat  ne 
voulut  pas  sans  doute  se  dessaisir  d'un  ornement  qui  vraisemblablement 
lui  appartenait  personnellement. 

^3)  Ainsi  le  voulait  le  cérémonial  obser\é  à  Tabbaye  de  Saint-Denis. 


—  31  — 

M»'  le  Dauphin,  cl  ont  prié  M.  le  fabricier  de  faire  faire  tout 
ce  qull  croira  convenable,  tant  pour  le  daiz  que  pour  la 
dittc  représentation,  et  d'une  manière  aussi  décente  qu'ho- 
Dornble,  et  le  tout  très  proniptement. 

I^  doyen  du  Chapitre,  M.  d*Hesselin,  reçut  de 
larchevêque  de  Reims,  grand  aumônier  de  France, 
qu'il  était  allé  complimenter  au  nom  du  Chapi- 
tre (1),  la  lettre  suivante,  datée  de  Versailles  : 

Mon  premier  soin  en  arrivant  icy,  Monsieur,  est  de  rem- 
plir un  devoir  dont  les  tristes  circonstances  où  nous  nous 
sommes  trouvés  tous  ne  m'ont  pas  permis  de  m'acquitter  à 
Sens.  Je  devais,  et  je  voulais,  aller  chez  vous  vous  prier  de 
m'aidera  remercier  votre  Chapitre  de  l'honneur  qu'il  a  bien 
voulu  me  faire  :  je  le  sens  comme  je  le  dois,  et  je  m'esti- 
merais trop  heureux  de  pouvoir  lui  marquer  par  des  ser- 
vices tout  le  cas  que  je  fais  de  ce  qui  me  vient  de  la  part 
d'un  corps  aussi  illustre.  C'est  de  quoy  je  vous  prie  de  vou- 
loir bien  l'assurer.  Soyés  également  persuadé,  Monsieur, 
des  sentiments  pleins  d'estime  et  de  considération  avec  les- 
quels vous  honore  votre  très  humble  et  très  obéissant  ser- 
viteur. 

U Archevêque  de  Reims  (QJ. 

Le  14  janvier,  le  doyen  fait  part  à  ses  collègues 
du  désir  exprimé  par  le  cardinal,  au  nom  du  Roi, 
qu'un  service  solennel  soit  célébré  prochainement. 

Messieurs  ont  arrêté  que  ce  service  se  fera  solennelle- 
ment mardi  prochain,  vers  les  10  heures  du  matin,  avec  les 
Vigiles  la  veille  ;  que  le  bâton  précentorial  sera  porté  ;  que 
les  cloches  des  deux  tours  seront  .sonnées  ;  et  on  a  député 

il)  L4*s  diverses  harangues  adressées  par  le  doyen  au  cardinal  de  Luy- 
nes  nu  duc  d'Orléans  e(  à  M.  de  la  Roche  d'Aymon,  grand  aumônier,  à 
l'oceasion  des  obsèques  du  Dauphin,  sont  transcrites  au  registre  des  déU- 
bérations  capitulaircs  et  dans  le  manuscrit  119  de  la  bibliothèque  de  Sens. 

(2)  Biblioth.  de  Sens,  ms  119.  f-  50. 


—  32  — 

M.  le  doyen  pour  officier,  et  MM.  Gigot  et  le  Pellerin  pour 
convoquer  les  corps  laïcs.  Ont  de  plus  arrête  qu'il  y  aura 
un  diacre  et  soudiacre  et  quatre  induts. 

L*exemple  du  Chapilre  est  suivi,  non  seulement 
par  les  paroisses,  mais  par  les  corps  constitués.  La 
ville  fait  céléber  un  service,  le  28  janvier,  dans 
Téglise  des  Célestins.  Invité  par  le  maire,  le  Chapi- 
tre s'y  fait  représenter  par  quatre  de  ses  membres. 
Nouvelle  députation,  le  30  janvier,  dans  Téglise  des 
Cordeliers,  à  la  demande  des  juges-consuls. 

Mardi  11  féurier.  —  M.  le  doyen  a  dit  que  S.  E.  Mf  TAr- 
chevcque  lui  a  écrit  de  faire  part  à  Messieurs  que  le  jour 
pour  Toraison  funèbre  de  M^  le  Dauphin  était  fixé  au  sa- 
medi 22  de  ce  mois. 

Mercredi  12  féurier,  —  Sur  le  rapport  fait  par  M.  Tarchi- 
diacre  de  Provins  au  sujet  des  tentures  pour  Toraison  funè- 
bre de  M?'  le  Dauphin,  Messieurs,  en  approuvant  ce  qui  a 
été  par  lui  fait,  ont  arrêté  qu'il  prendra  chés  les  marchands 
tout  ce  qu*il  conviendra  en  draps  noirs  pour  tendre  le  san- 
ctuaire et  le  chœur  de  l'église,  s'en  rapportant  à  lui  pour  le 
prix. 

Le  17,  le  Chapitre  approuve  le  marché  conclu 
par  son  délégué  avec  les  jurés-crieurs  de  la  ville 
qui  s'engagent,  moyennant  six  cents  livres,  à  déco- 
rer l'église  pour  le  service.  Celle  ornementation 
doit  rappeler  celle  des  obsèques  :  tentures  montant 
jusqu'au  triforium  du  chœur;  tapis  recouvrant  le 
chœur  entier  ;  voiles  armoriés  derrière  l'autel  et  à 
l'entrée  du  chœur,  de  la  naissance  de  la  voûte  jus- 
qu'au jubé. 

Le  18,  le  Chapitre  décide  d'inviter  le  cardinal  à 
officier,  chargeant  le  doyen  de  le  suppléer  pour  ce 


I 


SOClÉTi   ARCHBOLOCIQPB  DB  SENS. 


T.  XXII,  Pt.   IV,   p.    33. 


POMPE   FUNÈBRE 
DE     LA     PREMIÈRE     DAUPHINE 

en  i']46,  à  JV.-D.  de  Parit 
Gravure  de  C.  N.  Cochin   fils. 


I 


—  33  — 

qu'il  ne  pourra  faire.  On  sonnera  les  cloches  des 
deux  tours.  Les  corps  laïcs  sont  convoqués. 

Une  note  en  marge  de  la  transcription  des  délibé- 
rations capitulaires(l)  nous  apprend  que  a  M.  Bour- 
let,  chanoine,  a  fait  cette  oraison  funèbre^  ([ue  son 
peu  de  voix  et  le  tumulte  ont  empêché  d'enten- 
dre (2).  1 

Le  26  février,  le  Chapitre  décida  de  continuer 
jusqu'au  bout  de  Tan  la  messe  de  Requiem  à  la  cha- 
pelle de  Saint-Louis,  et  de  laisser  en  permanence  la 
représentation  sur  le  tombeau.  Le  25  mars,  il  était 
informé  que  le  Roi  lui  avait  alloué  une  somme  de 
quatre  mille  livres  pour  l'indemniser  des  dépenses 
occasionnées  par  toutes  ces  cérémonies. 

Comme  à  Sens»  dans  le  royaume  tout  entier  se 
multipliaient,  avec  une  touchante  unanimité,  les 
démoilstrations  d'une  admiration  sincère  et  les 
témoignages  d'universels  regrets. 

Sans  doute,  on  peut  suspecter  la  sincérité  clos 
éloges  officiels  prononcés  dans  les  académies  et 
dans  toutes  les  grandes  églises  de  France.  Plus 
éloquentes  que  ces  discours  étudiés  el  ces  louanges 
de  commande,  les  larmes  spontanées  de   loul  un 


<1    Bihliolh.  fie  Sens,  ms.  HO. 

'2)  Siinon-«Ji'*rn:no  lîniirlol  de  Vaiixct  lies  riait  lils  (ruti  oHU-ur  de  la  mai- 
sf»n  «lu  lUii.  doriiiine  si'noiiais(r.  Ni'  à  Vorsaillfs,  en  \~'.V.\.  «lotie  nr  (l^'^(>l•- 
li'mne,  il  (li.'vjnt  chnnoiiu*  de  Sons  le  2î  octohrr  ITCil  «  t  n  icairr  minr.il  du 
larilinal  ilo  ï^uyiics.  11  ri'"sij;Ma  son  cauoiiicat  «mi  juin  17(ir>.  11  dcvinl,  m 
!•*<».  iiblu- (!«•  Sainl-Ainbroix.  nu  diocôs*'  de  lloiiif^fs.  l'.n  17.VJ.  il  »lail  l»i- 
t»'ur  du  comte  crArtois  cl  vicaire  grinr.d  dAutun.  L'ai)!»-  de  \au\rrllfs 
mourut  à  Paris.  le  IS  mars  1802,  après  s'être  oecupi-  t\r  jouiiiaUsnic  p»  ii- 
dant '.a  Ke\olution. 


—  34  — 

peuple  vengeaient  une  mémoire  trop  longtemps 
méconnue.  Tous  sans  distinction,  sans  réserve, 
rendaient  hommage  au  savoir,  au  caraclère,  à  la 
vertu,  à  Tesprit  clirélien  du  Dauphin.  Les  plus  scep- 
tiques ne  pouvaient  taire  leur  admiration  devant 
la  piété  vive  et  éclairée  du  prince  qui,  à  sa  der- 
nière heure,  remerciait  Dieu  d'être  encore,  malgré 
ses  souffrances,  en  pleine  connaissance  et  de  pou- 
voir  ainsi  mettre  à  profit,  pour  son  éternité,  jusqu'au 
dernier  instant  de  son  agonie.  Les  esprits  les  plus 
prévenus  eux-mêmes  ne  pouvaient  que  s'incliner 
avec  respect  devant  celte  noble  figure  de  prince 
chrétien.  Citons  seulement  Diderot,  annonçant  la 
mort  du  Dauphin  a  après  une  longue  et  cruelle 
maladie  dont  il  a  supporté  les  douleurs  avec  une 
patience  vraiment  héroïque,  1>  et  écrivant  :  «  C'est 
une  chose  bien  certaine  que  M.  le  Dauphin  avait 
beaucoup  lu,  beaucoup  réfléchi,  et  qu'il  y  avait 
peu  de  matières  importantes  sur  lesquelles  il  ne  fût 
pas  très  instruit.  » 
Et  Voltaire,  lui  décernant  ce  distique  : 

Connu  par  ses  vertus  plus  que  par  ses  travaux, 
n  sut  penser  en  sage,  et  mourut  en  héros. 

Témoin,  assurément  désintéressé,  des  manifesta- 
tions du  deuil  national,  l'Anglais  Walpole  traduit 
ainsi  l'impression  générale  :  a  C'est,  je  croîs,  la 
plus  grande  perte  que  la  France  ait  faite  depuis 
Henri  IV.  ï> 


CHAPITRE  IV 


LE     VEUVAGE     DE     MARIE- JOSEPHE 


PROJET  DE  MONUMENT  FUNEBRE 


La  Dauphine,  qu'une  étiquelte  impitoyable  avait 
éloignée  du  chevet  de  son  époux  agonisant,  avait 
dû  quitter  Fontainebleau,  le  jour  même  de  la  mort, 
pour  regagner  Versailles. 

Malgré  les  délicates  attentions  du  Roi,  malgré  les 
soins  afTectueux  dont  Tentouraient  les  sœurs  du 
Dauphin  et  sa  propre  sœur,  la  princesse  Christine, 


—  36  — 

elle  âtmettnil  iiMensible  à  tout  ce  qui  la  détournait 
de  Mm  onique  pensée. 

Moo  snae  ^àarz  la  onin  qui  Ta  frappée,  écrit-elle  à  son 
ff  ére^  Xanrier  de  Saxe  '  1  ,  elle  est  plongée  dans  la  plus  amère 
dooleor,  toot  la  décbirt;  elle  ne  pent  s'occnper  que  de  ce 
qu'elle  a  aimé,  qu  elle  aime  et  qu>lle  aimera,  tant  qu^clJc 
animera  mon  corps,  qn'eUe  espère  aimer  encore  plus  par- 
faitement après,  dans  le  sein  de  Dien  ;  elle  ne  trouve  d'adou- 
cissement qoe  de  parler  d*nn  objet  si  cher,  de  se  rappeler 
ses  Tertos^  sa  tendresse,  et  le  bonheur  dont  elle  a  joui  tant 
qu'elle  lui  a  été  unie;  elle  se  transporte  sans  cesse  dans  le 
lieu  qui  renferme  la  dépouille  de  Tobjet  de  son  amour.  Tous 
ses  désirs  se  portent  à  lui  être  réunie  ;  ce  caveau  parait  plus 
beau  que  Ions  les  palais  de  ITnivers;  mais  elle  est  soumise 
à  la  irolonté  de  Dieu,  elle  ne  demande  que  la  mort  (2). 

Et  dans  une  de  ses  lettres  à  son  confesseur,  Tabbé 
Soldini  (3)  : 

Je  vous  remercie,  écrit-elle,  des  cadres  que  vous  m'avez 

cnvo3'és Je  sçais  bien  qu'on  ne  peut  invoquer  que  les 

sainU  que  TEglise  a  canonisés,  mais  je  ne  crois  pas  faire 

(1)  Xaxier  de  Smxe  acheta,  en  1772,  le  Château  de  Chaumot,  près  de 
Villeneave^^or-Yonne.  l\  y  faisait  sa  résidence  ainsi  qu'à  Pont-«ur-Seinc. 

(2;  STBYIE3ISKI.  la  Mère  de»  troi%  dernier*  Bourbons,  p.  339. 

(3)  Jacques- Antoine  Soldini,  flls  d'un  secrétaire  du  cardinal  prince 
de  Rohan,  originaire  de  Florence,  naquit  à  Paris  en  1718.  Confesseur  et 
prédicateur  de  la  maison  du  Roi.  à  Versailles,  c'est-à-dire  aumônier  du 
nombreux  personnel  (deux  mille  personnes  environ)  du  palais,  c'est  lui 
qui  fut  appelé,  lors  de  l'attentat  de  Damiens,  en  1757,  pour  assister  le  Roi. 
11  devint  plus  tard  confesseur  delà  Dauphine  et  de  ses  enfants,  et  continua 
cc%  fonctions  nuprés  du  flls  de  Marie-Joséphe,  Louis  XVI.  Les  archives 
de  lévéché  de  Versaillc»  conservent  un  volumineux  dossier  des  corres- 
pondances reçues  par  l'abbé  Soldini.  On  y  compte  quatre-vingt-deux  let- 
tre» de  la  Dauphine.  et  plusieurs  du  cardinal  de  Luynes.  L'abbé  Soldini 
mourut  le  30  mars  1775.  (Voir  la  Sotice,  de  M.  le  chanoine  Gallet,  sur  Vabhé 
SoUHnt  et  m  correnpondance.  Mémoires  de  la  Soc.  des  sciences  de  Seine-et-Olse, 
t.  XXI,  pp.  100  à  133.) 


—  37  — 

an  mal  quand,  passant  devant  son  portrait,  je  le  prie  de  se 
souvenir  de  nioy  devant  Dieu;  je  luy  parle  à  ce  portrait 
comme  je  luy  parlois  de  son  vivant. 

11  faut  lire  les  lettres  nombreuses  dans  lesquelles 
Marie-Josèphe  exprime  si  vivement  les  douloureu- 
ses impressions  et  la  résignation  chrétienne  de  son 
âme,  pour  juger  quelle  était  celte  femme  admira- 
ble. On  y  trouve  une  élévation  de  sentiments,  une 
force  de  caractère,  une  délicatesse  de  conscience, 
un  esprit  de  foi  qui  ne  se  rencontrent  que  dans  les 
saints  et  qui  prouvent  combien  elle  était  digne  du 
prince  son  époux  (1). 

Mais  nous  devons  ici  nous  restrei  ndrc  aux  rapports 
de  la  Dauphinc  avec  Sens. 

A  la  nouvelle  que  le  Dauphin,  par  son  testa- 
ment, avait  choisi  la  métropole  de  Sens  pour  lieu 
de  sa  sépulture,  le  premier  soin  de  Marie-Josèphe 
avait  été  de  se  rcndre  auprès  du  Roi  et  de  solliciter 
par  avance  la  faveur  d'y  reposer,  elle  aussi,  un 
jour. 

On  avait  trouvé  cinquante  louis  d'or  dans  la  cas- 
setle  du  Dauphin.  La  princesse  les  remet  aussitôt  au 
cardinal  de  Luynes  pour  être  distribués  aux  pau- 
vres de  la  ville  de  Sens. 

Le  souvenir  de  notre  cité  la  hante  désormais 
comme  la  pensée  de  celui  qu'elle  a  perdu.  Elle  a 
fa  t  dessiner  un  plan  du  chœur  de  la  Métropole  avec 
remplacement  du  tombeau.  Elle  garde  dans  son 


•  1.  Voir  surtout  ta  Dauphine,  par  le  P.  Emile  Regnault. 


f  ^ 


—  38  — 

oiiiloire,  sous  ses  yeux,  cette  image  qui  lui  rappelle 
saus  cesse  ses  douleurs  (1). 

Au  cardinal  de  Luynes,  qui  désormais  vit  retiré 
dr  la  cour,  elle  écrit,  le  19  février  1766  : 

Que  je  vous  envie,  mon  Cardinal  !  Vous  êtes  à  présent 
dans  le  lieu  qui  possède  tout  ce  que  j'aime.  Hélas!  que  ne 
|)uis-je  y  aller  aussi  !  Mon  unique  consolation  seroit  de  pleu- 
rer sur  ce  tombeau,  jusqu'à  ce  que  j'y  sois  renfermée.  Mais 
ce  ifcst  pas  pourtant  là  le  plus  grand  de  mes  désirs  :  c'est 
que  mon  Ame  soit  avec  la  sienne.  Jai  encore  beaucoup  à 
tnïvailler  pour  cela;  j'espère  que  ses  prières  m'aideront  :  il 
êtoil  mon  guide  de  son  vivant,  il  sera  mon  protecteur  dans 
le  cîcl.  Mesdames  m'ont  menée  promener;  j'ai  demande  à 
aller  sur  le  chemin  de  Choisi,  et  j'étois  bien  aise  par  là  de 
m  npprocher,  au  moins  de  quelques  pas,  du  lieu  de  mon 
repos  et  de  ces  cendres  chéries  qui  m'y  attendent.  N'oubliez 
pns,  mon  Cardinal,  en  priant  pour  le  repos  de  cette  belle 


il  lAiUrc  de  Fontcnny,  du  20  août  17ù3.  Cfr  Stuyienski,  la  Mère  des  trois 
iifntirrs  Bourbons,  p.  377. 

Kti  1837.  le  cabinet  du  bibliophilo  sénonnis.  M.  Félix  Chnndenicr, 
^*vsi  rnrichi  d'un  recueil  de  Pièces  diverses,  toutes  consacrées  au  Dauphin. 
qui  nvait  appartenu  auparavant  A  la  bibliothèque  du  baron  Jérôme 
Plclioii.  En  léte  de  ce  recueil  est  un  superbe  plan  mesurant  0" 71  de  hnu- 
tetir  sur  0*52  do  largeur.  On  y  lit  cette  légende  :  Platt  général  de  VËiglixe 
Métiopolitaine  de  Sen!(,  levé  exactement  imr  Gayet,  architecte  de  Son  Emi- 
tinue  M.  le  Cardinal  de  Liiynes. 

t>  document  est  très  précieux  pour  l'histoire  de  notre  cathédrale  dont  il 
rt'tnicc  la  disposition  intérieure  en  17G6.  Car  bien  qu'il  ne  porte  aucune 
diilo,  un  détail  suriit  à  nous  lixer  sur  les  circonstai.ces  dans  lesquelles  ce 
phi  II  Tut  dressé.  Au  milieu  du  chœur,  des  traits  pointillés  indiquent  l'em- 
|ihiremcnt  du  cavenu  du  Dauphin,  cl  on  y  a  même  liRuré  la  silhouette  du 
irnueil  unique  ({ui  reposait  alors  dans  ce  caveau. 

N^ius  sommes  donc  en  présence  d'un  exemplaire  du  plan  que  Muric-Jo- 
sé|tlic avait  fait  placerdans  son  oratoire  de  Versailles.  11  est  même  i>erniis 
de  penser  quç  le  plan  du  Hecueil  Chandenler  peut  être  l'original  ayant 
Qppurtenu  A  la  Dauphlne,  si  ce  Hecueil  est  bien  celui  que  rorina  l'abbé 
SohUni,  ainsi  que  nous  le  dirons  plus  loin.  {P.  44  note.) 


—  39  — 

âme,  de  prier  aussi  pour  la  sanctification  de  la  mienne,  afin 
que,  n'ayant  été  qu'une  sur  la  terre,  elles  soient  à  jamais 
réunies  dans  le  sein  de  Dieu  (1). 

Quelques  semaines  après,  le  29  mars,  c'est  encore 
la  même  pensée  : 

Je  viens  de  recevoir  votre  lettre,  mon  Cardinal,  et  ne  puis 
assez  vous  remercier  de  vous  être  si  bien  acquitté  de  mes 
commissions  sur  le  tombeau  qui  renferme  tout  mon  bon- 
heur. Quand  viendra  donc  Theureux  jour  où  je  pourrois 
moi-même  y  exprimer  mes  douleurs  et  mes  désirs!  Hélas,  je 
n'ose  Tespérer,  je  crains  cette  pitié  cruelle  qui,  pour  nous 
épargner,  nous  empêche  de  goûter  la  seule  consolation  qui 
nous  reste  :  c'est  qu'on  ne  comprend  pas  que  la  vue  d'un 
tombeau  qui  renferme  Tobjel  le  plus  cher,  et  qui  doit  vous 
renfermer  vous-même,  puisse  consoler;  cependant  je  sens 
bien  que  je  n'en  trouverois  que  là  (2). 

Chacune  des  lettres  au  prélat  exprime  le  même 
ardent  désir  de  venir  à  Sens,  pleurer  et  prier  sur 
le  tombeau  du  Dauphin  : 

9  juillet.  —  Je  me  porte  fort  bien,  mais  mon  cœur  est  bien 
serré  ;  res  lieux-cy  me  rappellent  bien  des  choses  qui  ne 
sont  pas  faites  pour  le  dilater.  Je  trouverois  plus  de  conso- 
lation à  Sens.  Il  y  est,  et  je  penserois  que  j*y  serois  un  jour 
auprès  de  luy  ;  cela  me  feroit  plaisir...  (3). 

25  août'.  —  Je  viens  de  recevoir,  mon  Cardinal,  votre  lettre 
du  23  :  je  vous  remercie  d'avoir  prié  pour  moi  au  lieu  où  je 
serois  un  jour.  M.  le  Dauphin  est  venu  me  le  dire,  car  la 
même  nuit  j'ai  rêvée  que  je  le  voyois  et  qu'il  m'nssuroit  qu'il 
prioil  bien  pour  moy  (4). 

{{)  Attlographe  du  ehâtean  (V  Dampierre,  P.  Regnai'LT,  p.  268. 
(2)  P.  Regkault,  p.  264. 
(7)  P.  Regkaclt,  p.  266. 
t4  Ibid.,  p.  267. 


—  40  — 

5  septembre,  —  ...J'ai  élé  bien  touchée  de  ce  que  vous  me 
mandez  que  le  saint  évéquc  d'Amiens  (1)  a  dit,  après  avoir 
fait  sa  prière  sur  le  tombeau.  Oui,  je  vois  bien  qu'il  n'a  pas 
besoin  de  nos  prières...  (2). 

6  octobre.  —  Hélas,  mon  Cardinal!  il  y  a  un  an,  nous 
étions  à  Fontainebleau,  dans  Tespérance.  La  pauvre  M^c  la 
comtesse  de  Toulouze  a  passé  par  ici  hier  au  soir  (3);  cela 
m*a  fait  penser  au  28  décembre  de  Tannée  passée,  et  en  re- 
gardant ce  convoy,  je  me  transportois  toujours  sur  le  che- 
min de  Sens  (4). 

Un  détail  à  noter  aussi,  parce  qu'il  intéi*esse  la 
liturgie  et  la  bibliographie  sénonaises.  L*abbé 
Proyart  a  écrit,  dans  sa  Vie  du  Dauphin  :  c  Peu  sa- 
tisfait de  payer  lui-même  à  Dieu  le  tribut  de  prières 
que  lui  offrent  ses  ministres,  il  (le  Dauphin)  em- 
ploya les  niomens  de  son  loisir  à  procurer  aux  per- 
sonnes les  plus  occupées,  le  moyen  de  s*unir  aux 
prières  communes  de  TEglise.  11  distribua  lui-même 
en  leur  laveur,  un  office  qui,  sans  être  aussi  long 
que  celui  de  TEglise,  en  a  cependant  Tesprit  et  la 
forme.  Cet  ouvrage  fut  imprimé  à  Sens,  en  1763, 
par  les  soins  du  Cardinal  de  Luynes  (5).  «  Monsieur 


(1)  M*'  de  la  MoUc.  cvéquc  crAmiens.  En  se  rendant  à  la  Trappe  de  Sept- 
Fonts  où  il  allait  faire  sa  retraite,  le  prélat  avait  voulu  s'arrêter  à  Sens 
et  y  offrir  le  S.  Sacriflce  sur  le  tombeau  du  Dauphin. 

(2)  P.  Rbgnault.  p.  278. 

(3)  Morte  à  Paris  le  90  septembre,  son  corps  avait  été  transporté  et  inhumé 
à  Rambouillet. 

(4)  P.  Regnault,  p.  2K0. 

(5>  Officb  divin  abrégé,  pour  tous  les  teins  de  Vannée,  d  Vutage  des  per- 
sonnes pieuses  quidésirent  s'unir  aux  prières  généralesqui  se  font  dans  l'Eglise 
aux  différentes  heures  du  jour.  Imprimé  par  ordre  de  S.  E.  M*'  le  Cardinal  de 
Luynes,  arehevéque-vicomte  de  Senr,  etc.,  d  Sens,  chez  P.  Hardouin  Tarbé, 
imprimeur-libraire  de  Son  Eminence.  M  DCC  LXIU. 


«OOtTÏ    AlCH^LOCiqpS  DB  SEKS. 


T.   XXll,  PL.  V,  p.   40. 


LA   OAUPHINE 
Pastel    par    La   Tour 

{Muté*  du  Louvre.) 


t,. 


k 


—  41  — 

t  le  Dauphin,  m'écrit  ce  prélat,  exigea  de  moi  que 
«  je  le  fisse  imprimer  sous  mes  yeux,  et  paroftre 

<  en  mon  nom.  J'eus  beaucoup  de  peine  à  m'y 

<  prêter;  mais  Tordre  fut  absolu.  Il  n'y  a  de  moi 
c  que  le  mandement  qui  se  trouve  à  la  tête  de  Tou- 
€  vrage  (1).  > 

Cette  affirmation  se  trouve  nettement  confirmée 
dans  la  lettre  suivante  adressée,  le  11  mai  1763,  par 
la  Dauphine  à  l'évéque  d'Amiens,  M9r  de  la  Motte  : 
c  ...J'ai  remis  à  l'abbé  Soldini  un  livre  des  Offices 
que  M.  le  Dauphin  a  faits;  je  ne  doute  pas  qu'il  ne 
vous  lait  déjà  envoyé...  (2),  > 

En  retournant  à  l'abbé  Soldini  (3)  ses  rectifica- 
tions au  projet  de  biographie  du  Dauphin  qu'il 
lui  avait  soumis,  la  princesse  lui  déclare  :  c  Le  Roy 
n  a  sçu  que  l'Office  divin  étoit  de  luy  que  depuis  sa 
mort.  La  traduction  des  pscaumcs  n'est  pas  de  luy, 
elle  est  de  Ms»"  Languet,  archevêque  de  Sens  (4).  » 

A  peine  la  tombe  du  Dauphin  s'était-elle  refer- 
mée qu'on  se  préoccupa  des  mesures  à  prendre 
pour  y  rappeler  la  mémoire  du  défunt.  Il  convenait 
tout  au  moins  d'y  placer  une  inscription.  En  sa 
triple  qualité  d  ami,  d'académicien  (5)  et  de  gardien 
du  tombeau,  l'archevêque  de  Sens  avait  le  premier 


(1)Editiondel826.p.  177. 

•2;  P.  Regxaclt.  p.  2CG. 

(3)  Archives  de  l'évcché  de  Versailles.  (Dossier  Soldini.) 

(t)  Jean-Joseph  LAnguet  de  Gcrgy,  prédécesseur  du  cardinal  de  Luynes, 
mort  en  1733. 

(3)  HeçQ  à  l'Académie  françAisc  en  1743^  il  cn(ra  h  rAçadcmie  des  scien- 
ces en  1755, 


-  42  - 

exprimé  le  désir  d'en  rédiger  le  texte.  De  son  côté, 
Tabbé  Soldinî,  confesseur  de  la  Dauphine,  avait 
soumis  à  la  princesse  une  épitaphe  de  sa  composi- 
tion. Elle  lui  répond  : 

Je  trouve  répitiiphe  à  men'cille  et  vous  m*avez  fait  grand 
plaisir  de  me  renvoyer.  Si  le  cardinal  de  Luynes  n'avait  pas 
demandé  dès  les  premiers  jours  d*en  être  charge,  j'aurois 
prié  qu'on  mit  la  vôtre  sur  le  tombeau  (1). 

La  Dauphine,  qui  écrivait  avec  aisance  en  la- 
tin (2),  donna  pleine  approbation  à  l'œuvre  du  bon 

(1)  Archives  de  l'évéché  ds  Versailles.  (Dossier  SoldinI,  A  lix.)  La  mort 
du  Dauphin,  comme  du  reste  tous  les  événements  notables,  fut  pour  tout 
ce  qui  se  piquait  de  littérature,  un  sujet  à  amplifications  oratoires  ou  poé- 
tiques. Le  Recueil  de  M.  F.  Chandcnier  conUent  une  cinquantaine  de  piè- 
ces, manuscrites  ou  imprimées,  décrivant  le  deuil  de  la  France.  Recteurs 
de  collèges,  prédicateurs  en  renom  et  élèves  de  rhétorique  s*y  évertuent, 
dans  des  stances,  des  odes,  des  élégies,  des  épitaphes  ou  de  simples  dis- 
cours en  prose,  à  célébrer,  en  un  style  quelquefois  heureux,  les  louanges 
du  prince  défunt. 

A  ces  morceaux  littéraires,  où  l'histoire  ne  trouve  rien  à  gUmer,  sont 
Joints  heureusement  plusieurs  dessins.  Outre  le  plan  de  la  Métropole  de 
Sens,  déjà  signalé,  on  y  trouve  un  Joli  dessin  h  la  mine,  fait  également 
l>ar  l'arciiiiecte  Gnyet.  et  représentant  le  maltre-autel  de  Servandoni.  en- 
core surmonté  du  rétoblff  qui  avait  encadré  la  fameuse  table  d'or  disparue 
en  1760.  D'autres  dessins  et  gravures  représentent  la  pompe  funèbre  des 
ser\'iccs  célébrés  pour  le  Dauph'.n  h  la  cathédrale  d'Avignon,  à  Noire- 
Dame  de  Paris,  ou  collège  de  Cahors. 

(2)  On  cite  à  ce  propos  une  Jolie  anecdote.  Lors  de  la  promotion  de 
M.  de  Luynes  au  cardinalat,  en  1756,  le  Pape  avait  eu  la  délicate  attention 
d'informer  la  Dauphine,  pnr  une  lettre  rédigCe  en  latin,  de  la  dignité  con- 
férée ù  son  premier  aumônier.  <  Le  bon  cvêquese  mit  en  peine  un  Jour  de 
lui  en  expliquer  le  sens  avec  un  lak>orieux  mot  à  mot,  sons  que  rien  trahit 
en  elle  in  parfaite  connaissance  qu'elle  avait  de  cette  langue.  Le  Dauphin, 
témoin  de  la  piquante  aventure,  eut  le  l>on  goût  de  respecter  cette  réser- 
ve de  sn  noble  compagne  et  de  laisser  à  l'obligeant  prélat  le  mérite  racilc 
du  service  qu'il  croyait  rendre.  »  (P.  Regnailt.  p.  100.)  —  M.  G.  StryienskI 
a  publié  dan»  :  La  Mère  (/es  trois  derniers  Botirbor.».  (p.  337).  une  lettre  en 
lalin,  fort  élégant,  tcrile  n  son  frère  Xavier  par  Mrric-îosèphc,  âgée  de 
neuf  ans, 


—  43  — 

Cardinal.    En    voici  le   texte   avec  la   traduction 
publiée  à  Sens,  en  1768  : 

D.  0.  M. 

HIC  JACET  OpUmus  Princeps  LUDOVICUS  DELPHINUS, 

iEtatc  florenle  cl  Solio  jam  luaturû 

Intcr  vota  preccsque  populorum 

Pro  salutc  prctiosissimi  capitis,  heu  !  frustra  supplicantium, 

Morte  ÎDvidâ  raptus. 

LUGEAT  GALLIA  Virura  Principcm 

Omnibus  naturse  donis  ornatum, 

In  onini  regise  sortis  scicntiâ  vcrsatuni 

Patrise  amantissimum, 

Filium  Patris  sui  Augusli  observantissimum, 

Conjugem  fidelem, 

Patrcm  libcros  suos  praeccplis  &  cxcmplis  assidue 

informantcm. 

LUGEAT  RELIGIO  Viruni  Principcm 

Nominc  éc  opcribus  Christianum, 

Illibato  morum  splcndorc  a  tcncris  conspicuum, 

Somma  crga  Deum  pietate  commendabilem, 

Lcgis  divinse  studiosissimum. 

Fidc  sccurus,  Spc  (Irmus,  Charitatc  ardcns, 

Magno  spiritu  vidit  ultima, 

El  Icrrcna  dcspiciens,  ad  œlerna  toto  animo  sur.pirans, 

Cœlcsti  con  *olalionc  exuberans, 

Incrcdibile  sui  dcsiderîum  relinquens, 

Obiit  Die  XX^  Decembris,  An^  />«  MDCCLXV. 

jEtatis  XXX  VI , 

a-glt  très  excellent  Prince  Louis  Dauphin 

Ayanl  acquis,  dans  ki  fleur  de  son  âge,  toute  In  mnlurilé  nécessaire 

pour  régner. 

Malgré  Us  vœux  ardents  que  toute  in  France  rnisoit  à  Dieu, 

pendant  sn  maladie, 

Pour  la  consepation  d'une  tête  si  chère, 

La  mort  jalouse  c!e  uotrc  bonheur  nous  l'a  enlevé. 

Que  la  France  pleure  un  Prince, 


—  44  — 

Orné  de  tous  les  dons  de  la  nature. 

Versé  dnn^  toutes  les  sciences  qui  sont  du  ressort  des  Rots. 

Aimant  avec  passion  ia  Patrie  et  le  peuple  qu'il  dcvoit  un  Jour  gouverner, 

Le  nia  le  plus  respectueux  envers  son  auguste  père. 

Un  Epoux  fidèle, 

U  n  père  qui  se  faisoit  un  devoir  de  former  lui-même  set  augustes  enfants 

&  la  vertu  |Mir  ses  préceptes  et  par  ses  exemples  ! 

Que  la  Religion  pleure  un  Prince, 

Qui,  non  content  déporter  le  nom  de  chrétien,  le  rcndolt  encore  vénérable 

par  la  sainteté  de  ses  œuvres, 

Qui  depuis  sa  plus  tendre  Jeunesse  avoit  toujours  eu  les  mœurs 

les  plus  pures. 

Recommandable  par  sa  profonde  religion  envers  Dieu 

Et  par  robsrr\-atlon  la  plus  exacte  et  la  plus  fldelle  de  sa  sainte  1^1  ! 

Rempli  de  la  fol  la  plus  vive,  de  l'espérance  la  plus  ferme,  de  la  charité 

la  plus  ardente, 

11  a  vu  approcher  sa  fln  avec  un  héroïsme  vraiment  chrétien. 

Et  méprisant  souverainement  toutes  les  choses  de  la  terre,  soupirant 

de  toute  son  âme  après  les  biens  étemels. 

Rempli  des  consolations  célestes, 

11  est  mort  laissant  des  regrets  Inexprimables, 

Le  20  Décembre,  Tan  de  N.  S.  1765,  figé  de  96  ans  3  mois  et  demi. 

Celle  Iradiiclion  esl  probablcmenl  Tœuvre  du  car- 
dinal. L*abbé  Soldini  lui  a  demandé  le  lexle  de  son 
ûpilaphe.  Le  cardinal  lui  répond,  de  Sens,  le 
:îO  aoûl  1766  : 

Je  joins  icy,  mon  cher  abbé,  la  relation  que  vous  me 
demandés;  pour  TEpitaphe  je  vous  Tenverray  par  le  pre- 
mier ordinaire,  il  est  bien  jusle  de  compléter  votre  re- 
cueil (1).  Celte  toux  de  Madame  la  Dauphine  qui  continue 

{ I)  Nous  avons  parlé  plus  haut  (pp.  38  et  42^  du  Recueil  de  M.  F.  Chan- 
dt-nier.  L'épitaphe  composée  par  le  cardinal  de  Luynes  y  est  reproduite 
Ml  milieu  de  plusieurs  autres.  Celle  de  Tabbé  Soldini  est  peut-être  du 
nombre.  Hien  toutefois  ne  la  désigne,  pas  plus  que  le  propriétaire  du  Re- 
fttfil.  11  est  cependant  permis  de  penser  que  la  personne  qui  Ta  formé 
avilit  un  culte  spcVial  pour  le  Prince,  et  que,  de  plus,  elle  était  bien  p\a- 
t^vv  pour  réunir  tous  ces  documents  et  surtout  se  procurer  les  plans  do 
Sens.  L'nbbc  Soldini  réunissant  parfaitement  ces  condIUons,  nous  pensons 
que  le  Recueil  dont  parle  le  cardinal  pourrait  bien  être  celui  de  M.  Chan- 
dcnior, 


—  45  — 

toajoars  me  loarmente  à  un  point  que  je  ne  puis  exprimer. 
0  mon  cher  abbé,  que  cette  Princesse  est  précieuse  à  con- 
server! Prions  sans  cesse  Dieu  de  toute  notre  âme  pour 
qull  daigne  nous  accorder  cette  grâce  ;  que  cette  Princesse 
serait  à  plaindre  sans  les  sentiments  de  Religion  que  Dieu  a 
gravés  profondément  dans  son  ame.  Dieu  lui  a  fait  boire  le 
calice  jusqu'à  la  lie.  Quand  je  pense  à  i'énormité  de  son 
malheur,  je  m*enveloppe  dans  la  noirceur  de  la  doulenr 
avec  elle  et  je  ne  puis  vous  dire  '  combien  cela  nuit  à  ma 
santé.  Donnez  moy  de  tems  en  tems  de  vos  nouvelles,  mon 
cher  abbé,  et  comptés  sur  toute  mon  estime  et  mon  amitié 
pour  vous  (1). 

Et  quelques  semaines  plus  tard,  il  réclame  le 
texte  qu'il  a  commtiniqué  : 

A  Paris,  ce  mercredy. 

Je  vous  prie,  mon  cher  abbé,  de  me  renvoyer  la  copie  au 
net  de  Tépitaphe  de  feu  M^  le  Dauphin,  que  je  vous  ay  re- 
mise, j*en  ay  besoin  pour  faire  faire  le  modèle  en  grand  par 
le  sculpteur.  Je  proQte  avec  plaisir  de  cette  occasion  pour 
TOUS  assurer,  mon  cher  abbé,  de  mon  estime  et  de  mon  ami- 
tié pour  vous  (2). 

De  nombreuses  années  devaient  s'écouler  avant 
que  Tépitaphe  figurât  sur  la  sépulture  du  Prince. 
Son  exécution,  du  reste,  paraissait  moins  urgente, 
le  Roi  ayant  décidé  Téreclion  d'un  monument  di- 
gne de  son  fils.  Profondément  impressionné  de  la 
perte  du  Dauphin,  il  jugeait  bon,  pour  l'honorer , 
de  rompre  avec  la  tradition  qui,  depuis  Henri  IV, 
n  élevait  plus  de  mausolées  aux  princes  du  sang,  ni 
mêmes  aux  souverains.  Simples  monuments  d'ap- 
plique, ornés  seulement  de  modestes  médaillons  et 

H)  Archires  de  Tévéché  de  VersaiUes. 
(3)  iUdem, 


—  46  — 

d'inscriptions,  les  cénotaphes  des  Bourbons  qui  se 
voient  encore  dans  les  cryptes  de  Saint-Denis  con- 
trastent éti^ngement  avec  les  somptueux  tombeaux 
des  Valois. 

La  résolution  de  Louis  XV  fut  prompte.  Sur  ses 
ordres,  le  marquis  de  Marigny,  surintendant  des 
Beaux-Arts,  avait  demandé  des  projets  à  Cochin, 
secrétaire  de  l'Académie  des  Beaux-Arts.  Ce  com- 
positeur, pourtant  d'une  étonnante  fécondité,  jugea 
bon  de  chercher  des  inspirations  auprès  de  Dide- 
rot, «  le  puits  d'idées  le  plus  achalandé  de  ce 
pays-ci,  »  disaient  ses  admirateurs  (1). 

Dans  une  lettre  à  M»c  Volland,  du  3  février  1766, 
Diderot  exprime  la  joie  mêlée  de  surprise  que  lui 
cause  cette  marque  de  confiance  (2)  : 

Je  vous  donne  à  deviner  en  cent  ce  qui  m'occupe  main- 
tenant. Les  artistes  m'ont  chargé  du  projet  du  tombeau  que 
le  Roi  a  ordonné  pour  le  Dauphin.  Moi!  Moi'  Silence  là- 
dessus.  Il  ne  faut  point  gâter  un  service  par  une  indiscré- 
tion. J'en  suis  à  ma  troisième  tentative.  Vous  me  direz  celle 
qui  vous  plait  le  plus  ;  il  faut  savoir  d'abord  que  le  monu- 
ment doit  être  placé  au  milieu  de  la  cathédrale  de  Sens,  et 
qu'il  doit  avoir  un  rapport  visible  à  la  réunion  des  deux 
époux  (3). 

A  ces  trois  projets,  il  en  ajoutait,  quinze  jours 
après,  deux  autres.  Les  voici  tels  que  lui-même  les 
a  décrits  (4). 

(1)  Correspondance  de  Grlmm,  13  avril  1766. 

(2)  Œuvres  de  Diderot,  ediUon  Assézat  et  Tourncux,  t.  XIX,  p.  210. 

(3)  c  Le  Roi,  voulant  entrer  dans  les  vues  de  Madame  la  Dauphlne,  on 
demande  que  la  composition  et  l'idée  du  monument  annoncent  la  réu- 
nion des  futurs  é|)oux.  »  Ibid.,  t.  Xlll,  p.  72. 

(4)  Ibid.,  t.  Xlll,  p.  72-75. 


—  47  — 

PREMIER  PROJET 

Jélèvc  une  couche  funèbre.  Au  chevet  de  cette  couche, 
je  place  deux  oreillers.  L*un  reste  vide  ;  sur  Tautrc  repose  la 
tête  du  Prince.  Il  dort,  mais  de  ce  sommeil  doux  et  tran- 
quille que  la  Religion  a  promis  à  Thomme  juste.  Le  reste  de 
la  figure  est  enveloppé  d*un  linceul.  Un  de  ses  bras  est  mol- 
lement étendu  ;  Tautre,  ramené  par- dessus  le  corps,  viendra 
se  placer  sur  une  de  ses  cuisses,  et  la  presser  un  peu,  de 
manière  que  toute  la  figure  montre  un  époux  qui  s'est  retiré 
le  premier,  et  qui  ménage  une  place  à  son  épouse.  Les  an- 
ciens se  seraient  contentés  de  cette  seule  ligure,  sur  la- 
quelle ils  se  seraient  épuisés  ;  mais  nous  voulons  être  ri- 
ches, parce  que  nous  avons  encore  plus  d'or  que  de  goût,  et 
que  nous  Ignorons  que  la  richesse  est  Tennemie  mortelle  du 
sublime. 

  la  tête  de  ce  lit  funéraire,  j'assieds  donc  la  Religion.  Elle 
montre  le  ciel  du  doigt,  et  dit  à  l'épouse  qui  est  à  côté 
d'elle,  debout,  un  genou  posé  sur  le  bord  de  la  couche,  et 
dans  Taction  d'une  femme  qui  veut  aller  prendre  place  à 
côté  de  son  époux  :  c  Vous  irez  quand  il  plaira  à  Celui  qui 
est  là-haut.  » 

Je  place  au  pied  du  lit  la  Tendresse  conjugale.  Elle  a  le 
visage  collé  sur  le  linceul  ;  ses  deux  bras  étendus  au  delà 
de  sa  tête  sont  posés  sur  les  deux  jambes  du  Prince.  La 
cooronne  de  fleurs  qui  lui  ceint  le  front  est  brisée  par  der- 
rière, et  l'on  voit  à  ses  pieds  les  deux  flambeaux  de  l'hymen, 
dont  l'un  brûle  encore,  et  l'autre  est  éteint. 

SECOND   PROJET 

Âa  pied  de  la  couche  funèbre,  je  place  un  ange  qui  an- 
nonce la  venue  du  grand  jour. 

Les  deux  époux  se  sont  réveillés.  L'époux,  un  de  ses  bras 
jeté  autour  des  épaules  de  l'épouse,  la  regarde  avec  sur- 
prise et  tendresse  ;  il  la  retrouve,  et  c'est  pour  ne  la  quitter 
jamais.  Au  chevet  de  la  couche,  du  côté  de  l'épouse,  on 
voit  la  Tendresse  conjugale  qui  rallume  ses  flambeaux  en 
secouant  l'un  sur  l'autre.  Du  côté  de  l'époux,  c'est  la  Reli- 


y 

r 


-  -     >  — . 

-—   ^^ 

:r3ir- . 

^ 

— = — 

- 

.IZL 

.m--      ^ 

><î 

-Lr    _ 

-lii    . 

-ai  -  xr 

-^î> 

---^  *-rT  . 

::î      or   -i^ 

_—?■ 

'  'l.*T 

.3    rnj.Tu- 

•                 _; 

,^. 

-^:r>â 

iU« 

T 

a 

lontrc 

a 

- — ► 

^'-li    IXLL    i 

it~ 

I.  T  tï:.  311030.  Tarre  ^^^e  c  est  un 


.XOCKS^  D>  SSKS. 


n,  w..  VI,  p.  48- 


LE   MAUSOLÉE 


—  49  — 

tableau  du  plus  grand  palhétique,  et  non  le  leur,  parce 
qu'ils  n'ont  pas  le  goût  qu'il  faut  pour  le  préférer. 

Au  haut  du  mausolée,  je  suppose  un  tombeau  creux  ou 
cénotaphe,  d  où  Ton  n'aperçoit  guère  d'en  bas  que  le  som- 
met de  la  tête  d'une  grande  figure  couverte  d'un  linceul, 
avec  un  grand  bras  tout  nu,  qui  s'échappe  de  dessous  le 
linceul,  et  qui  pend  en  dehors  du  cénotaphe.  L'épouse  a 
déjà  franchi  les  premiers  degrés  qui  conduisent  au  haut  du 
cénotaphe,  et  elle  est  prête  à  saisir  ce  bras.  La  Religion  l'ar- 
rête, en  lui  montrant  le  ciel  du  doigt.  Un  dlWses  enfants 
s'est  saisi  d'ua  des  pans  de  sa  robe  et  pousse  des  cris. 

L'épouse,  la  tête  tournée  vers  le  ciel,  éplorée,  ne  sait  si 
elle  ira  à  son  époux  qui  lui  tend  les  bras,  ou  si  elle  obéira  à 
la  Religion  qui  lui  parle,  et  cédera  aux  cris  de  son  fils  qui 
la  retient  (1). 

Fort  heureusement,  le  goût  de  Diderot  ne  fut  pas 
apprécié.  Sa  correspondante  elle-même,  celle  à  la- 
quelle il  faisait  la  première  confidence  de  ces  allé- 
gories païennes  et  compliquées,  ne  partage  pas  son 
enthousiasme.  Dans  une  lettre,  du  20  février,  il 
tente  de  la  gagner.  (Œuvres,  t.  XIX,  p.  223  et  suiv  ] 

On  ne  se  représente  pas  bien  ce  lit,  si  funèbre 
soit-il,  avec  ses  deux  oreillers,  au  milieu  du  chœur 
de  la  cathédrale.  C'est  cependant  la  conception 
préférée  du  philosophe  : 

Les  anciens,  qui  savaient  que  la  richesse  est  l'ennemie 
dn  sublime,  s'en  seraient  tenu  aux  deux  oreillers  et  à  la 
seule  figure  de  Tépoux  qui  se  range  ;  car  cette  figure  est 
vraiment  sublime. 


fl<  Cochin  s'est  inspiré  du  premier  et  du  cinquième  de  ces  projets  pour 
ta  composition  reproduite  page  53.  On  y  voit  la  Dauphine  venant  rejoin- 
dre, malgré  ses  enfants  et  La  Tendresse  conjugale,  le  Dauphin  et  le  jeune 
duc  de  Bourgogne,  sur  leur  couche  funèbre. 

4 


—  50  — 

Son  troisième  projet  est  évidemment  inspiré  par 
le  fameux  tombeau  du  maréchal  de  Saxe  par  Pi- 
galle.  M"*  Volland  lui  en  a  fait  l'observation.  Il  ré- 
plique : 

Le  rapport  du  troisième  avec  celui  de  Pigalle  est  bien 
léger;  d'ailleurs,  cette  Maladie,  qui  pousse  la  pierre  de  son 
épaule,  est  terrible.  Cet  époux,  qui  ne  la  voit  ni  ne  Técoufc, 
marque  un  bien  parfait  mépris  de  la  vie;  et  ces  enfants, 
présentés  à  réponse  par  la  Sagesse,  sont  tout  à  fait  tou- 
chants. 

Cochin,  de  son  côté,  se  dérobe  : 

Au  reste,  continue  Diderot,  Cochin  m'écrit  de  ces  trois 
projets,  que  je  lui  ai  envoyé  trois  enfants  bien  forts,  bien 
beaux,  bien  vigoureux,  mais  bien  difficiles  à  emmaillottcr. 
Il  ajoute  que  ce  ne  sera  pas  lui  qui  choisira,  mais  la  cour, 
où  il  y  a  beaucoup  de  flatteurs  et  peu  de  gens  de  goût.  Il 
craint  que  le  mauvais  goût,  aidé  de  la  flatterie,  ne  demande 
que  ces  flgures  soient  ressemblantes;  ce  qui  rendrait  le  mo- 
nument plat  et  maussade.  Je  réponds  que  des  ressemblan- 
ces 'égères,  dont  la  poésie  disposerait  à  son  gré,  en  don- 
nant à  la  scène  un  caractère  naturel  et  vrai,  ne  la  rendrait 
que  plus  belle  et  plus  pathétique  ;  que  les  physionomies 
changent  bien  en  dix  ans,  et  que,  quand  elles  resteraient  ce 
qu'elles  sont  à  présent,  plus  les  flgures  seront  grandes,  no- 
bles et  belles,  plus  la  flatterie  les  retrouvera  ressemblantes. 

Pour  éviter  cet  écueil  des  ressemblances,  Cochin  a  de- 
mandé qu'en  conservant  toujours  la  condition  donnée  de 
la  réunion  future  des  deux  époux,  je  lui  en  imaginasse  un 
quatrième  où  il  n'y  eût  que  des  flgures  symboliques. 

C'est  pour  se  conformer  à  ces  nouvelles  instruc- 
tions que  Diderot  écliafauda  les  deux  derniers  pro- 
jets décrits  plus  haut.  Ils  eurent  le  même  sort  que 
leurs  aines. 


—  51  — 

Cochin,  au  lieu  d'emprunter  à  aulrui,  finit  par 
puiser  dans  son  propre  fond.  Il  avait  dessiné  pour 
réditlon  derOraiso/i  funèbre  du  Dauphin,  pronon- 
cée  dans  l église  de  Paris,  le  P^  mars  1766,  par  mes- 
sire  Charles  de  Loménie  de  Brienne,  archevêque  de 
Toulouse,  le  futur  archevêque  de  Sens,  un  frontis- 
pice gravé  par  C.  Baquoy  (1).  On  y  voit  le  Dauphin, 
sur  son  lit  de  mort.  Il  est  consolé  par  la  Religion 
qui  d'une  main  lui  présente  la  croix  et  de  Tautre 
montre  le  ciel  entr'ouvert  où  elle  prend,  pour  la 
lui  offrir,  une  couronne  d'étoiles.  A  son  chevet, 
rimmortalité  inscrit  sur  son  livre  les  vertus  du  mou- 
rant et  lui  dépose  sur  la  tête  son  diadème,  pendant 
que  la  Mort  le  recouvre  violemment  d'un  linceul. 

Ce  dessin  renferme  évidemment  Tidée  maîtresse, 
les  éléments  essentiels  du  monument  que  nous 
avons  aujourd'hui  sous  les  yeux.  La  Religion,  rim- 
mortalité et  la  Mort  représentée  par  la  figure  du 
Temps,  —  moins  repoussante,  quoique  de  signifi- 
cation identique,  —  seront  complétées  par  un  qua- 
trième personnage  dont  le  rôle  du  reste  est  assez 
imprécis,  puis  par  les  deux  génies,  dont  la  pré- 
sence n'a  guère  d'autre  raison  que  de  meubler  les 
vides  et  de  rompre  la  monotonie  des  quatre  grandes 
figures. 

Cest  donc  uniquement  sur  les  données  de  Co- 
chin que  Guillaume  Coustou,  l'un  des  plus  grands 
sculpteurs  du  xvui*  siècle,  fut  appelé  à  composer  le 
monument  du  Dauphin.  Le  plan  en  était  assuré- 

(1)  Reproduit  p.  12  en  léte  du  Chapitre  U  de  notre  étude. 


—  52  — 

ment  arrêté  (1),  au  moins  dans  ses  lignes  essentiel- 
les, à  la  fin  de  Tannée,  puisque,  le  24  novembre 
1766,  le  marquis  de  Marigny  écrivait  à  rarlistej 

J*ay  trouve,  monsieur,  que  la  soumission  que  vous  avez 
faille  pour  Iclombeau  de  Monseigneur  le  Dauphin  remplit 
ce  qui  est  proposé  par  le  mémoire  estimatif  qui  m'avoit 
déjà  été  remis  et  sur  lequel  le  Roy  s'est  déterminé  à  approu- 
ver le  monument.  Je  vous  autorise  à  son  exécution.  La 
somme  de  150  000  livres  à  laquelle  se  monte  votre  devis 
vous  sera  ordonnée  au  fur  et  à  mesure  qu'il  me  sera  rendu 
compte  de  l'avancement  de  cet  ouvrage,  et  je  ne  doute 
pas  que  votre  respect  pour  le  Prince,  à  la  mémoire  duquel 
il  est  consacré,  ne  vous  engage  à  apporter  tous  vos  soins  à 
sa  perfection.  (Archives  nat.^  O^  1905.) 

(1)  Dans  un  mémoire  lu  nu  Congrès  archéologique  de  France,  tenu  à 
Auxerre.  en  1850,  M.  Quantin  écril  :  «  J*ai  vu  récemment  à  Paris  le  projet 
primitif /(/u  mausolée),  en  la  possession  d'un  amateur  anglais,  M.  Moorc.  » 
(Congrès,  XVII  Session,  p.  23G.) 

Nos  recherches  pour  retrouver  ce  précieux  document  sont  restée» 
Infructueuses.  I^  collection  de  M.  Francis  Moorc  fut  vendue  à  Ix>ndres,  le 
28  avril  185G.  Le  catalogue  de  cette  vente  ne  mentionne  pas  le  dessin 
signalé  par  M.  Quantin.  Il  n'existe  ni  au  British  Muséum  ni  au  musée  de 
South  Kensington. 


SOCliTé  ARCHéOLOOlQPE  DB  SENS. 


T.  xxn,  PL.  VH,  p.  53. 


LA.  DAUPHINE 

Peinture   par    Freoou 
D'après  le  portrait  de  la  préfecture  d'Agen  attribué  à  Nattier. 

(Tréior  de  Sent.) 


CHAPITRE  V 


MORT  ET  FUNERAILLES  DE  LA  DAUPHINE 


Déjà,  personne  n'en  pouvait  douter,  le  symbo- 
lisme d'une  réunion  future,  réclamé  par  la  Dau- 
phine  pour  le  mausolée  de  son  époux,  allait  à  bref 
délai  devenir  une  réalité. 

La  toux,  dont  s'alarmait  justement  le  Cardinal, 
persistait.  L'intervention  d'un  des  plus  fameux  mé- 
decins de  Paris,  Tronchin,  accréditait  les  mauvaises 
nouvelles  venues  de  Versailles. 

La  cour,  à  l'automne  de  1766,  n'avait  pas  fait  son 
séjour  habituel  à  Fontainebleau.  Le  Roi  voulait 
épargner  à  la  sensibilité  de  Marie-Josèphe  les  cruels 
souvcnii-s  qu'auraient  fatalement  évoqués  ces  lieux. 
L  hiver,  particulièrement  rigoureux  cette  année-là, 
aggrava  très  rapidement  la  situation  de  la  princesse. 
Comme  à  la  mort  si  inopinée  du  Dauphin,  la  ru- 


—  04  — 

nieiir  publique  prêta  à  cette  maladie,  que  rien  ne 
pouvait  faire  prévoir,  des  causes  mystérieuses.  On 
parlait  d'empoisonnement.  L*autopsie  la  révélé  :  la 
Daupliine  succomba  au  même  mal  qui  avait  em- 
porté son  époux.  Elle  fut,  très  probablement,  la 
victime  de  son  dévouement,  c:  On  ne  soupçonnait 
pas,  au  xvni*  siècle,  dit  un  de  ses  biographes,  les 
dangers  de  la  contagion  ;  par  piété  on  conservait 
les  draps  imbibés  des  sueurs  de  Tagonie  et  on  en 
distribuait  des  fragments  en  guise  de  reliques  (1).  » 

Le  cardinal  de  Luynes,  aussitôt  informé  du  dan- 
ger, était  revenu  à  Versailles  pour  assister  Tauguste 
malade.  Le  4  mars,  elle  reçoit  les  cendres  de  ses 
mains  et  fait  la  communion.  Le  8  mars,  premier 
dimanche  de  Carême,  sur  sa  demande,  on  lui  donne 
les  derniers  sacrements.  Le  Roi  et  les  princes  ac- 
compagnent, de  la  chapelle  à  la  chambre  de  la  Dau- 
phine,  le  saint  Sacrement  porté,  sous  un  dais,  par 
le  cardinal  de  Luynes. 

Le  prélat  a  noté,  dans  un  récit  conservé  aux  ar- 
chives de  Dresde,  le  récit  des  derniers  jours  de 
Marie-Josèphe  (2).  Elle  fit  ses  adieux  à  ses  enfanls, 
aux  membres  de  la  famille  royale  et  se  prépara  à  la 
mort  dans  les  sentiments  d'une  vive  piété.  La  der- 
nière nuit  avait  été  des  plus  douloureuses.  Elle  de- 
manda, le  matin,  qu'on  lui  dît  la  messe.  L'après- 
midi,  pendant  une  visite  du  Roi  et  des  sœurs  du 
Dauphin,  elle  se  sentit  défaillir.  Dans  la  soirée, 
l'abbé  Soldini,  s'apercevant  qu'elle  entrait  en  ago- 

(IjSTIIYIBNSKI.  op.  cit.,  p.  361. 

(2)  Voir  Sthyienski.  p.  390. 


; 


—  55  — 

nie,  lui  dit  :  c  Réjouissez-vous,  Madame,  vous  allez, 
en  échangé  d'une  vie  passée  dans  la  tristesse  et  les 
larmes,  commencer  un  règne  éternellement  heu- 
reux. >  La  malade  réclama  aussitôt  elle-même  les 
prières  des  agonisants;  et,  quand  les  oraisons  furent 
terminées,  on  l'entendit  demander  au  cardinal 
de  Luyncs  qu'il  voulût  bien  lui  suggérer  encore  des 
affections  pieuses  et  des  actes  de  conformité  au  bon 
plaisir  de  Dieu.  Elle  tenait  un  crucifix  et  le  baisait 
avec  ferveur.  C'est  dans  ces  sentiments,  et  en  con- 
servant toute  sa  lucidité  jusqu'au  dernier  instant, 
qu'elle  rendit  son  âme  à  Dieu,  vers  8  heures  du 
soir,  le  vendredi  13  mars. 

On  suivit,  en  cette  circonstance,  le  même  cérémo- 
nial qu'à  la  mort  du  Dauphin  : 

Le  13  ^1),  vers  les  8  heures  du  soir,  cette  princesse  mou- 
rut, en  exprimant  le  désir  que  son  corps  fût  inhumé  à  Sens, 
que  son  cœur  fût  porté  à  Saint-Denis  et  que  Ton  observât 
pour  elle  le  même  cérémonial  que  pour  M.  le  Dauphin  : 

1^  nuit  du  13  au  14,  le  corps  fut  transporté  de  l'apparte- 
ment dans  lequel  elle  était  morte  dans  celui  qu'il  devait  oc- 
cuper et,  le  14  au  matin,  il  a  été  exposé  sur  un  lit,  à  visage 
découvert,  et  vu  par  le  peuple. 

—  Le  15,  le  corps  a  été  embaumé  et  déposé  dans  un  cer- 
cueil ainsi  que  les  entrailles.  Le  cœur  fut  mis  dans  une 
boîte. 

—  Le  18,  à  6  heures  du  soir,  M^e  la  comtesse  de  la  Mar- 
che (2),  que  le  Roi  avait  nommée  pour  accompagner  le  cœur  à 
Saint-Denis,  se  rendit  à  l'appartement  de  Madame  la  Dau- 


lî)  Arcbixn  nationales.  Cl  1044. 

(?/Forlunéc  Mnrie  d'Esle,  avait  *pous^  en  1759,  Ix)uis-François- Joseph 
de  Bourbon,  comte  de  la  Marche,  fils  du  prince  de  Conti. 


—  56  — 

phine  poi\(  le  départ.  Le  cœur  fut  porté  par  le  cardinal 
de  Luynes. 

—  Le  21)  départ  du  coq)s  pour  Sens,  lieu  de  l'inhuma- 
lion. 

^  Dépôt  à  Fontainebleau,  la  nuit  du  21  au  22. 

L'autopsie  fui  faite  le  15,  à  10  heures  du  matin  (1). 
Auparavant,  pour  se  couvrir  contre  les  bruits  mal- 
veillants mis  en  circulation,  les  médecins  qui  avaient 
assisté  la  Princesse  avaient  rédigé  cette  déclaration  : 

15  mars.  —  Avant  de  procéder  à  Touverlure  du  corps, 
nous  soussignez  déclarons  : 

1»  Que  sans  pouvoir  déterminer  précisément  le  genre 
d'affection,  la  poitrine  de  Madame  la  Dauphine  nous  a  toujours 
parue  affectée  ; 

2»  Que  la  toux.  Jusqu'aux  quatre  derniers  jours,  quoique 
grasse,  s'étant  maintenue  sans  expectoration,  Tcxamen  des 


(1)  On  y  note:  c  L'dpiploon  retir(^«  épaissi;  une  ndhèrence  contre  nnlurr, 
faisant  bride...,  la  surface  de  tous  les  intestins  grêles  parsemée  d'un  grand 
nombre  de  points  blancs  et  d'une  sorte  de  gelée  lymphatique... 

c  ...Les  glandes  du  mésentère  de  plus  de  moitié  de  grosseur  que  dans 
Tétat  ordinaire,  d'une  couleur  jaunAtre  qui  n'est  pas  ordinaire. 

«  Le  poumon  droit  flétri,  très  rapetissé,  fort  inégal  à  sa  surfiice,  ces  iné- 
gaUtés  dures  et  paraissant  formées  de  concrétions  tuberculeuses;  le  pou- 
mon gauche  gorgé  et  adhérent  à  la  surface  interne  de  la  plèvre.  A  l'inté- 
rieur du  poumon,  lobes  supérieurs  gorgés  d'une  matière  purulente;  le  lobo 
supérieur  du  poumon  gauche  dur,  comme  skirreux,  plein  de  pus.  t 

Le  procès-verbal  porte,  après  la  sigimture  de  la  duchesse  de  Brancas, 
dame  d'honneur  de  la  Dauphine,  celles  des  médecins  et  chirurgiens  : 
L\ssoNE  Senac 

BouiLiiAC  A.  Petit 

PinnAC  BOISCOILLAUD 

LABnEriLLB  IX>L'STAUNAU 

BOURDEUN  TnONCHIN 

AuDmAC  Lassaigne 

Anoouill6  Hévin 

PORTAL 

(Archives  nat.,  Ol  1044.) 


—  57  — 

crachats  n*a  pu  nous  servir  à  caractériser  le  genre  d^afTec- 
lion; 

>  Que  depuis,  ces  quatre  derniers  jours,  les  crachats  qui 
ont  été  expectorés  n'ont  eu  de  commun  avec  les  crachats 
ordinaires  purulents  que  leur  gravité  spéciflque; 

4"  Que  le  jour  même  de  la  mort,  Madame  la  Dauphine  a 
rendu  pour  la  première  fois,  par  la  bouche,  une  humeur  sa- 
nieuse  assez  abondante,  distincte  des  crachats,  mais  qui 
0  était  pas  purulente  ; 

>  Qu'il  n'y  a  jamais  eu  ni  douleur  de  poitrine,  ni  diffi- 
culté de  respirer,  ni  oppression,  ni  rougeur  aux  joues,  ni 
haleine  forte,  ni  diflîculté  de  se  coucher  à  droite  ou  à  gau- 
che, ni  sueur  nocturne,  ni  enflure  aux  extrémités  infé- 
rieures ; 

6«  Que  depuis  plus  d'un  mois,  tous  les  viscères  du  bas- 
ventre  ont  paru  être  en  bon  état.  L'estomach  ayant  bien  fait 
les  fonctions,  les  selles  ayant  toujours  été  naturelles. 
Labreuille.  Tronchin  (1). 

Les  registres  des  délibérations  du  Chapitre  (2) 
retracent,  jour  par  jour,  Timpression  produite  par 
lannonce  de  la  mort  de  la  Dauphine  et  les  prépa- 
tifs  des  funérailles. 

Sam-di?  mars  1761.—  M.  le  doyen  a  dit  que  S.Em.  M^Me 
Cardinal  de  Luynes  lui  a  fait  part  de  l'état  dangereux  de 
Madame  la  Dauphine.  Messieurs  ont  arrêté  qu'il  sera  dit 
aux  messes  la  collecte  Pro  infîrmis. 

Jeudi  12  mars  —  M.  le  doyen  a  dit  que  Son  Em. 
Mf''  larchevêque  de  Sens  lui  a  écrit  de  Versailles  le  9  de  ce 
mois,  qu'il  avait  administré  Madame  la  Dauphine  ;  qu'il  le 
prioit  de  prévenir  Messieurs  pour  qu'ils  fassent  dans  leur 
Eglise  les  prières  des  Quarantc-Heures.  Messieurs  ont  ar- 
rêté qu'à  commencer  aujourd'hui  il  y  aura  des  prières  de 

(1  Archives  Xal.  O1.-1044. 

(2  Archives  de  rVonne,  G  C81. 


—  58  — 

Quarantc-Heures  pendant  trois  jours  dans  leur  Eglise  ;  que 
la  messe  du  chœur  se  dira  snb  ritu  solenmi,  précédée  du 
Veni  Creator  ;  qu*à  Tissue  de  la  messe,  il  y  aura  Exposition 
du  St  Sacrement  ;  que  le  Salut  se  fera  après  Complies  ;  que 
les  deux  jours  suivans,  le  S(  Sacrement  sera  exposé  avant 
Matines,  et  le  Salut,  après  Complies.  Et  pour  officier  aujour- 
d'hui à  la  Messe  et  donner  ]a  bénédiction  aux  Saints,  Mes- 
sieurs ont  député  M.  le  doyen. 

Mardi  il  mars.  —  M.  le  doyen  a  dit  que  Madame  Marie- 
Josèphe,  princesse  de  Saxe,  est  décédée  à  Versailles,  ven- 
dredi dernier,  munie  de  tous  les  Sacrements  et  avec  une 
résignation  aussi  édifiante  qu'exemplaire  aux  Décrets  di- 
vins. Qu'elle  a  désiré  être  inhumée  dans  l'Eglise  de  Sens, 
où  son  corps  doit  être  incessamment  transporté  pour  être 
mis  dans  le  caveau  où  repose  le  corps  de  Mrr  le  Dauphin, 
son  auguste  époux. 

Messieurs,  pénétrés  de  douleur  de  la  perte  de  Madame  la 
Dauphine,  aussi  vertueuse  dans  toutes  ses  actions  que  bien- 
faisante envers  les  pauvres,  ont  arrêté  : 

—  Que  la  chapelle  de  la  Vierge  sera  tendue  de  noir  ; 

—  Qu'il  y  sera  dit  une  messe  basse  de  Requiem  par  M.  le 
Pellerin,  pour  le  repos  de  son  âme,  à  commencer  demain, 
à  onze  heures  et  demie  ; 

—  Que  cette  messe  se  dira  tous  les  jours,  à  pareille  heure, 
jusqu'à  ce  que  le  corps  soit  inhumé; 

—  Que  les  cloches  des  deux  tours  seront  sonnées,  à  com- 
mencer aujourd'hui,  à  midi,  et  tous  les  jours,  à  six  heures 
du  matin,  à  midi  et  à  sept  heures  du  soir,  jusqu'à  l'arrivée 
du  corps  ; 

—  Que  pour  laisser  toute  liberté  dans  le  chœur  de  leur 
Eglise  aux  ouvriers  qui  seront  envoyés  et  employés  de  la 
part  du  Hoy,  ils  feront,  à  commencer  aujourd  hui,  à  Com- 
plies, leurs  offices  dans  In  chapelle  de  Sainte-Colombe;  ce 
qui  se  continuera  jusqu'à  ce  qu'ils  en  ayent  autrement  ar- 
rêté ; 

—  Que  la  Coupe  sera  descendue  et  mise  dans  ladite  cha- 


—  59  — 

pcUe;  que  le  pavillon  sera  aussi  descendu  et  mis  au  trésor. 
Mercredi  IS  mars.  —  M.  le  doyen  dit  que  S.  Em.  MfTAr- 
chcvêque  lui  a  écrit  le  décès  de  Madame  la  Dauphine  ;  qu'il 
n'a  reçu  la  lettre  qu'aujourd*huy.  Lecture  faite  de  ladite  let- 
tre, écrite  de  Versailles  le  15  de  ce  mois,  Messieurs  ont  ar- 
rêté qu'on  observera  tout  ce  qui  a  été  fait  pour  feu  Mfr  le 
Dauphin  et  que  ladite  lettre  sera  transcrite  sur  le  registre. 

«  A  Versailles,  le  15  mars  1767. 

I  Nous  avons  eu  le  malheur  de  perdre  Madame  la  Dau- 
phine, mon  cher  abbé,  le  13  de  ce  mois,  à  sept  heures  trois 
qoarts  du  soir.  Je  n*ay  point  quitté  cette  Princesse  pendant 
tonte  son  agonie,  et  je  luy  fermai  les  yeux  comme  je  l'avais 
fait  à  son  auguste  époux.  Vous  pouvez  vous  imaginer  quelle 
a  été  ma  douleur.  Mercredy,  je  porte  le  cœur  de  cette  Prin- 
cesse à  Saint-Denis.  Samedy,  le  convoy  partira  pour  Sens; 
il  arrivera  le  mesme  jour  à  Fontainebleau,  où  il  sera  déposé 
pendant  la  nuit;  le  lendemain  dimanche,  il  arrivera  à  Sens, 
et  le  landi  nous  dirons  la  grande  messe  et  ferons  les  oflices 
comme  nous  avons  fait  pour  feu  M^i*  le  Dauphin.  Cette 
Princesse  la  demandé  au  Roy  par  son  testament  et  désiré 
mcrae  qu'il  y  eût  pour  son  enterrement  moins  de  cérémo- 
nies que  pour  Mirle  Dauphin;  mais  le  Roi  a  décidé  qu'on 
suivera  la  même  étiquette.  Faites  part,  je  vous  prie,  de  tout 
cecy  à  Messieurs  de  mon  Chapitre  et  à  la  ville.  Vous  con- 
naissez, mon  cher  abbé,  tous  mes  sentiments  pour  vous, 
c  Le  Cardinal  de  Luynes.  » 

I  C'est  Madame  la  comtesse  de  la  Marche  qui  accompa- 
gnera le  corps  ;  elle  logera  chez  moy.  » 

Vendredi  20  mars.  —  Messieurs  ont  arrêté  qu'au  moyen 
des  préparatifs,  qui  se  font  dans  leur  église  de  la  part  du 
Roy,  pour  la  réception,  qui  doit  se  faire  dimanche  soir,  du 
corps  de  feue  Madame  Marie  Josèphe,  Princesse  de  Saxe  et 
Dauphine,  et  pour  l'inhumation  qui  s'en  fera  le  lendemain 
dans  leur  église,  les  Vêpres  se  diront  dimanche,  à  deux  heu- 
res, et  les  Matines  de  suite. 

Us  ont  prié  M.  le  fabricier  de  donner  dçs  ordres  précis 


—  GO  — 

au  sonneur  pour  que,  dimanche,  il  soit  sonné  une  des  clo- 
ches de  la  tour  de  plomb,  lorsque,  de  cette  tour  ou  d'ail- 
leurs, le  convoi  sera  apperçu  entrant  à  Saint-Denis  ;  que 
cette  cloche  sera  sonnée  pendant  toute  la  marche  jusqu'à 
l'arrivée  à  Sainte-Colombe-la-Grande,  pour  servir  d'avertis- 
sement et  que  Messieurs  puissent  s'assembler  à  propos; 
qu'ensuite,  et  sans  interruption,  les  cloches  des  deux  tours 
soyent  bien  sonnées  en  volée,  et,  à  cet  eflct,  d'employer 
nombre  suRlsant  de  personnes  pour  sonner  longtemps  lors 
du  convoi  et  de  l'inhumation. 

Messieurs  ont  sursis  à  députer  ceux  qui  porteront  le 
poésie,  attendu  que  Messieurs  les  chanoines  plus  anciens 
prétendent  avoir  le  droit  exclusif  de  le  porter,  comme  ils 
ont  toujours  fait  aux  convois  de  MM.  les  cardinaux  et  ar- 
chevêques de  Sens,  de  MM.  les  dignitaires,  personnats  et 
chanoines  de  leur  Eglise. 

Messieurs  ont  député,  à  cause  de  l'indisposition  de  M.  le 
préchantre,  M.  Thévard  pour  porter  le  bâton  de  préchantre  ; 
ont  aussi  député  M.  Maucler  et  M.  Maillet  de  la  Trémoye 
pour  choristes,  tant  pour  le  tems  et  les  cérémonies  au  mo- 
ment et  depuis  la  réception  du  corps  de  Madame  la  Dau- 
phine,  que  pour  le  lendemain,  à  la  messe  et  à  l'inhuma- 
tion. 

Ont  aussi  arrêté  que,  au  moment  que  la  seule  cloche  son- 
nera comme  il  est  dit  ci-dessus,  tous  Messieurs  et  les  semi- 
prébendes  et  le  bas  chœur  s'assembleront  dans  le  trésor 
pour  y  prendre  une  chape  noire,  et  ensemble  se  rendre, 
précédés  des  deux  croix,  à  l'Archevêché,  d'où  l'on  sortira 
processionnellement,  suivis  de  S.  Eminence  Mp*  l'Archevê- 
que; qu'on  entrera  de  même  parla  porte  de  M.  le  Préchan- 
tre dans  le  chœur,  d'où  l'on  sortira  pareillement  pour  aller 
dans  la  nef,  jusqu'à  la  table  qui  y  sera  mise,  pour  recevoir 
le  corps  de  Madame  la  Dauphine.  Qu'on  suivra  et  chantera 
ce  qui  est  prescrit  par  le  rituel  et  le  mortuaire.  Que,  lors- 
que le  corps  sera  déposé  dans  le  chœur,  on  dira  les  prières 
ordinaires;  qu'ensuite,  il  y  aura  un  intervalle,  pendant  le- 


4 


^"i^J"  n^<^ 


u 

z 

X 

a 

< 
Û 

u 
û 


e 


o 

eu 


-s 


a 
3 
< 
Û 

3 
Û 

O 


< 

a 
a 

Û 


3 

X 

I» 


e 
o 


i 


^^ 


—  61  — 

quel  les  semiprébendés  et  les  chantres  psalmodieront,  pour 
donner  le  tems  à  Messieurs  d'aller  présenter  leurs  respects 
à  Madame  la  comtesse  de  la  Marche,  qui  doit  accompagner 
le  convoi  et  assister  à  Tinhumation,  pour  aller  aussi  saluer 
M.  lévêque  de  Verdun  ;  qu'après  ces  deux  visites,  on  ren- 
trera dans  le  chœur  pour  y  chanter  les  Vigiles  ;  que  pen- 
dant tout  le  tems  que  le  corps  restera  déposé,  il  y  aura, 
excepté  pendant  les  offices,  deux  chanoines,  deux  semipré- 
bendés, deux  cépets  ou  chantres,  suivant  Tordre  de  la  table 
qui  sera  faite  par  le  controUeur  du  chœur,  lesquels  reste- 
ront et  psalmodieront  pendant  une  heure. 

Que,  lundi,  jour  de  Tinhumation,  la  messe  coupetée  se 
dira  dans  la  chapelle  de  la  Vierge;  que  toutes  les  messes  se 
diront  dans  le  chœur,  afin  qu'il  n'y  ait  aucun  intervalle  jus- 
qu'à la  grand  messe;  que  Prime  se  dira  à  six  heures,  et  la 
messe  du  chœur  de  suite,  dans  la  chapelle  de  Sainte-Co- 
lombe, et  qu'un  chacun  se  rendra  dans  le  Trésor  pour,  tous 
ensemble,  entrer  dans  le  chœur,  à  l'heure  qui  sera  indi- 
quée pour  la  messe  et  l'inhumation. 

Samedi  21  mars,  —  Messieurs,  pas  déférence  pour  S.  E. 
Mr  le  Cardinal  Archevêque,  qui  leur  a  témoigné  qu'elle  dé- 
siroit  qu'il  y  eût  quelques  dignités  pour  porter  le  poésie  aux 
obsèques  de  Madame  la  Dauphine,  ont,  sans  se  départir  du 
droit  réclamé  par  MM.  les  anciens  chanoines  le  jour  d'hier, 
et  sans  tirer  à  conséquence  par  la  suite,  député,  pour  porter 
ledit  poésie,  M.  le  doyen,  M.  l'archidiacre  d'Etampes, 
MM.  Tissol  et  Maucler. 

Dimanche  22  mars.  —  M.  le  doyen  a  dit  que  plusieurs 
de  MM.  de  la  Compagnie  et  des  chanoines  honoraires  sont 
officiers  de  feue  Madame  la  Dauphine  (1),  qu'ils  désirent 

il)  Le  Chapitre  de  Sens,  ne  comptait  pas  moins  de  cinq  de  ses  membres 
parmi  les  officiers  de  la  maison  de  la  Dauphine  : 

—  Joseph-François-FéUx  de  Loiiser  de  Brion  de  Siougeat.  vicaire  géné- 
ral de  Sens,  abbé  de  Manlieu  et  d'Honnecourt,  aumônier  de  quartier.  M.  de 
Siougeat  avait  été  chanoine  de  Sens  de  1759  à  1761.  Le  Cliapitrc  en  rece- 
vant sa  démission  l'avait  nommé  chanoine  honoraire. 

—  Paul  de  Murât  de  Baings.  vicaire  général  de  Sens,  abbé  de  Mauriac, 


—  62  — 

lors  des  obsèques  assister  en  qualité  d'officiers,  ce  qu'ils 
ne  peuvent  faire  sans  Tagréement,  qu'ils  Tont  prié  de 
demander  pour  eux  à  la  Compagnie  qui  le  leur  a  accorde 
par  respect  pour  la  mémoire  de  cette  auguste  Princesse, 
sans  pouvoir  par  mesdits  sieurs  Officiers  et  tous  autres 
s*en  prévaloir  par  la  suite. 

M.  le  doyen  a  rapporté  qu'il  a  vu  avec  MM.  de  la  commis- 
sion (M.  Lestoré  joint)  M.  de  la  Ferté,  des  Menus,  au  sujet 
du  manteau  à  la  royale  de  feu  M(rr  le  Dauphin;  qull  n'est 
pas  possible,  pour  plusieurs  raisons,  de  le  refuser  à  titre  de 
prêt;  qu'en  ce  qui  est  de  la  couronne,  il  en  sera  fourni  une 
par  la  cour. 

Messieurs  ont  arrêté  que  le  manteau  sera  tiré  du  Trésor 
pour  être  mis  es  mains  de  MM.  les  Officiers  des  Menus  de 
chez  le  Roy;  qu'après  l'inhumation  de  Madame  la  Dauphinc, 
il  sera  retiré  pour  être  remis  dans  le  Trésor  avec  la  nou- 
velle couronne. 

M.  le  doyen  a  encore  dit  que  S.  Em.  Mirr  l'Archevêque  lui 


autttônier  de  quartier^  chanoine  de  Sens  depuis  1754,  attache  h  la  personne 
du  cardinal. 

—  Antoinc-Marie-Mallet,  chapelain  de  quartier,  secrétaire  ordinaire  du 
cardinal  de  Luynes,  chanoine  de  Sens  depuis  1763,  devint  abbé  de  Cha- 
livoy. 

—  Claude- Alexis  Jorre  de  Saint-Jorre,  clerc  de  chapelle  ordinaire,  cha- 
noine de  Sens  depuis  1758.  L'ablié  de  Saint-Jorre  ambiUonnait  une  pince 
plus  élevée  dans  la  maison  de  la  Dauphine,  nuiis  la  mort  de  la  Princesse 
ne  lui  permit  pas  de  l'obtenir.  Voici  h  ce  sHjet  la  lettre  adressée  par  Ma- 
rifrJoséphe  A  Tabbé  Soldini  : 

«  Vous  pouvez  assurer  l'abbé  de  S'  Jorre  que  je  ne  suis  point  du  tout 
fâchée  contre  luy.  I^  seule  chose  que  j*ni  h  redire,  c'est  que  dans  la  de- 
mande qu'il  a  fait  au  cardinal  de  Luynes  d'une  place  de  chapelain  de 
quartier,  il  ne  luy  ait  pas  expose  le  motif  qui  la  luy  fnisoit  désirer  et  que 
le  cardinal  auroit  approuvé,  au  lieu  que  celui  qu'il  a  donné  l'a  fâché. 

<  J*ai  reçu  depuis  une  lettre  du  cardinal  qui  est  si  content  de  la  dernière 
que  Tabbé  de  S.  Jorre  luy  a  t'crit,  qu'il  me  propose  de  luy  donner  la  pre- 
mière place  de  chapelain  de  quarUer  qui  viendra  à  vaquer  après  ccUe- 
cy...  »  (Archives  de  révêché  de  Versailles,  dossier  Soldini,  n*  37.) 

—  Marc-Antoine  Sallot  du  Peyroux,  clerc  de  chapelle  de  quarUer,  chanoine 
de  Sens  de  176S  à  1775  et  secrétaire  du  cardinal  de  Lnsmes. 


-  63  — 

a  remis  une  lettre  qui  lui  a  été  écrite  par  M.  le  comte  de 
Saint-Florentin  sur  le  décès  de  Madame  la  Dauphine. 

Le  convoi  avait  quitté  Versailles  le  21,  au  matin, 
pour  arriver  à  Fontainebleau  le  soir.  Le  cercueil  de 
la  Dauphine  fut  déposé  au  palais  pour  la  nuit.  Le 
lendemain  dimanche,  vers  midi,  le  cortège  funèbre 
se  mettait  en  route  pour  Sens. 

Sa  composition  était  identique  à  celle  des  obsè- 
ques du  Dauphin.  En  tête,  deux  gardes  du  corps 
précédés  de  plusieurs  brigades  de  la  maréchaussée; 
puis,  après  les  nombreuses  voitures  composant  le 
deuil,  escortées  par  les  mousquetaires  et  chevaux- 
légers,  les  carrosses  du  Roi. 

Dans  le  premier,  le  marquis  de  Bérenger,  cheva- 
lier de  la  Dauphine,  et  le  marquis  de  Nesle,  pre- 
mier écuyer ; 

Dans  le  second,  la  duchesse  de  Lauraguais,  dame 
d'atours,  la  duchesse  de  Caumont,  la  comtesse 
du  Roure  et  la  marquise  de  Pons,  dames  de  la  Dau- 
phine ; 

Dans  le  troisième,  la  marquise  de  Talaru,  les 
comtesse  du  Châtelet-Laumont  et  de  Beaumont  et 
la  princesse  de  Guistel,  é/^alement  dames  de  la  Dau- 
phine ; 

Dans  le  quatrième,  la  comtesse  de  la  Marche, 
princesse  du  sang,  avec  la  duchesse  de  Brancas, 
dame  d'honneur  de  la  Dauphine,  la  comtesse 
de  Tessé,  la  duchesse  de  Sully,  dames  de  la  Dau- 
phine, et  la  comtesse  de  Sabran  ; 

Dans  le  cinquième,  enfin,  Mgr  Aimery  de  Nico- 
lay,  évéque  de  Verdun,  Tabbé  de  Siougeat,  vicaire 


—  64  — 

général  de  Sens,  aumônier  de  la  Dauphine,  Tabbé 
Soldini,  son  confesseur,  et  M,  Allard,  prêtre  de  la 
Mission,  curé  de  Notre-Dame  de  Versailles. 

Suivaient  :  les  pages  de  la  Dauphine,  de  la  Reine 
et  du  Roi,  le  roi  d'armes  et  ses  quatre  hérauts  sous 
les  ordres  du  marquis  de  Dreux  et  de  M.  de  Nan- 
touillet,  maîtres  des  cérémonies,  précédant  immé- 
diatement le  char  funèbre,  entouré  de  valets  de 
pieds  et  de  Cent-Suisses  (1). 

Lorsque,  à  la  nuit,  cet  imposant  convoi  se  pré- 
senta devant  la  porte  d'Yonne,  drapée  de  tentures 
de  deuil,  soixante  pauvres  femmes  (2),  vêtues  de 
serge  grise,  portant  des  flambeaux,  s'y  joignirent 


(1)  La  lettre  suivante  adressée  A  MM.  les  officiers  mnnicipauz  de  Sens, 
indique  la  composition  des  troupes  envoyées  à  Sens  pour  la  cérémonie  : 

«  A  Paris,  le  16  mars  1767. 

«  Je  crois  devoir  vous  donner  avis,  Messieurs,  que  le  convoy  de  Madame 
la  Dauphinc  arrivera  à  Sens  le  22  de  ce  mois,  et  qu*il  doit  loger  en  cette 
ville  un  détachement  des  gardes  du  corps  qui  arrivera  le  21  ;  un  autre  dé- 
tachement desdits  gardes  avec  le  convoy,  le  Jour  du  convoy;  un  détache- 
ment de  quorante  cent-sulsscs  commandés  par  deux  officiers,  le  21  ;  un 
détachement  de  chacune  des  compagnies  des  gendarmes  et  chevaux-lcgcrs, 
de  cinquante  maîtres  chacun,  deux  offlciers  et  deux  trompettes,  qui  arri- 
vera le  22;  une  compagnie  des  gardes-françaises,  composée  d*un  capitaine, 
un  lieutenant,  deux  sous-lieutenans,  deux  enseignes,  six  sergens,  quatre 
tambours,  cent  fusilliers,  ainsy  qu'une  compagnie  des  gardes  suisses, 
composée  d'un  capitoine,  deux  sous-lleutenans,  trois  sergens  et  quotre- 
vingts  hommes,  tant  tambours,  caporouxque  soldats  et  un  porte-drapeau, 
lesquelles  compagnies  doivent  arriver  à  Sens  le  21.  Vous  voudK's  bien 
pourvoir  à  leur  logement. 

c  Je  suis,  avec  beaucoup  de  considération,  Messieurs,  votre  très  humble 

et  très  obéissant  serviteur. 

«  De  Mauhepas.  » 
(Archives  communales  de  Sens,  AA  1.) 

(2)  Une  somme  de  1 200  livres  fut  distribuée  h  cette  occasion  par  ordre  du 
Roi  aux  pauvres  de  la  ville  et  fouxbourgs  de  Sens.  Cette  somme  fut  ré- 
partie entre  les  paroisses  et  les  prisonniers.  (Archives  de  TY.,  dépôt  de 
Sens.  G  135,  n*  98.) 


SOCIÉTÉ  AlCHÉOLOCiaUB  DE  SEMS. 


T.  XXII,  PL.  ne,  p.  65. 


MORT   DE   LA  DAUPHINE 
Dessin  et  gravure  de  Littrbt 


—  65  — 

guidant  sa  marche  à  travers  les  rues  étroites  de  la 
cité. 

La  cérémonie  des  funérailles  reproduisit  exacte- 
ment celles  du  Dauphin.  En  voici  le  procès-verhal 
consigné  dans  le  Registre  des  sépultures  du  Chapi- 
tre (1)  : 

Cejoard'huy  22  mars  1767,  à  7  heures  du  soir,  Nous,  Paul 
d'Albert  de  Luynes,  par  la  miséricorde  de  Dieu,  cardinal 
prêtre  de  la  Sainte  Eglise  Romaine  du  titre  de  Saint-Thomas 
in  PaNone,  Archevêque  Vicomte  de  Sens,  Primat  des  Gaules 
et  de  Germanie,  Commandeur  de  TOrdre  du  Saint-Esprit,  pre- 
mier Aumônier  de  feue  Madame  la  Dauphine,  ayant  été  in- 
formé par  la  lettre  de  M.  le  Comte  de  S.  Florentin,  écrite  de 
Marly,  en  datte  du  18  de  ce  mois,  que  feue  Madame  la  Dau- 
phine, ayant  désiré  d'être  inhumée  à  Sens,  dans  le  mesme 
tombeau  qui  a  été  fait,  dans  le  chœur  de  notre  Eglise,  pour 
feu  Merle  Dauphin,  Sa  Majesté  avoit  donné  ses  ordres  pour 
que  le  corps  de  cette  princesse  y  fût  transporté  cejourd'huy  ; 
et  ayant  été  averty  par  M.  le  marquis  de  Dreux,  grand  Maî- 
tre deç  cérémonies,  que  le  convoy  étoit  prêt  d'arriver  à  la 
porte  de  notre  église,  nous  nous  y  sommes  transporté,  re- 
vêtu de  nos  habits  pontificaux,  ayant  pour  assistants  Mes- 
sieurs de  Marsangy,  trésorier,  et  Caquia  de  Maubourg,  cha- 
noine archidiacre  de  Provins,  M.  Thévard,  chanoine,  député 
par  notre  Chapitre,  portant  le  bâton,  attendu  Tindisposition 
de  M.  Morice,  préchantre,  MM.  Mauclerc  et  Maillet  de  la  Tré- 
moye,  chanoines,  faisant  choristes,  aussi  députés,  et  étant 
précédé  de  notre  Chapitre  Métropolitain  et  de  tout  le  clergé 
de  notre  Eglise,  tous  revêtus  de  chapes  noires.  Peu  de  temps 
après,  le  convoi  étant  arrivé,  la  boeste  et  le  coffre  où  étoient 
renfermés  les  entrailles  et  le  corps  de  Très  Haute,  Très 

(])  Archives  du  Tribunal  civil  de  Sens.  —  Une  relation  fut  imprimée 
à  Sens,  sons  Je  titre  :  Pompe  funèbre  de  Vinhumation  de  madame  la  Dau' 
phinty  faite  à  Sens,  BibUoth.  Nat  L.  38  b.  1000. 

5 


—  66  — 

Puissante  et  Excellente  princesse  Madame  Maric-Josèphe 
de  Saxe,  veuve  de  Très  Haut,  Très  Puissant  et  Excellent 
Prince  Monseigneur  Louis,  Dauphin  de  France,  décédée  à 
Versailles,  le  13  de  ce  mois,  à  7  heures  3/4  du  soir,  âgée  de 
35  ans,  4  mois,  9  jours,  ont  été  tirés  du  char  funèbre  qui  les 
avoit  apportés,  ont  été  portés  par  les  gardes  du  corps  de 
Sa  Majesté,  deux  chapelains  et  deux  clercs  de  la  chapelle  de 
cette  Princesse  tenant  les  cordons  du  poésie,  au  défaut  d'au- 
môniers de  quartier  en  nombre  suffisant,  dans  la  nef  de 
notre  Eglise,  sur  une  table  garnie  d'un  drap  noir,  couvert 
d'une  toille  blanche.  Ensuite  le  poésie  a  été  étendu  dessus,  le 
tout  en  présence  de  Son  Altesse  Sérénissime  Madame  la  com- 
tesse de  la  Marche,  princesse  du  Sang,  nommée  par  le  Roy 
pour  conduire  le  corps  ;  de  M.  le  comte  de  Déranger,  son 
chevalier  d'honneur,  portant  la  couronne;  de  M.  le  comte 
de  Mailly,  marquis  de  Nesle,  son  premier  écuyer,  portant 
le  manteau  à  la  royalle;  de  M.  le  marquis  de  Muy,  son  pre- 
mier maître  d'hôtel,  portant  le  bâton;  de  Mn«  la  duchess^c 
de  Brancas,  sa  dame  d'honneur;  de  M»®  la  duchesse  de  Lau- 
raguais,  sa  dame  d'atours;  de  ses  dames  de  compagnie,  des 
officiers  et  autres  personnes  composans  la  maison  j^e  feue 
Madame  la  Dauphine,  de  MM.  les  Menins  de  feu  Min-  le  Dau- 
phin, de  M.  le  marquis  de  Dreux  et  d'autres  officiers.  Alors 
M.  de  Nicolay,  évcque  de  Verdun,  premier  aumosnier  en 
survivance  de  Madame  la  Dauphine,  étant  en  chappe  noire 
et  mittre,  en  avant  de  la  table  sur  laquelle  la  boeste  et  le  coffre 
renfermant  les  entrailles  et  le  corps  de  cette  Princesse 
étoient  posés,  a  fait  une  harangue  à  laquelle  nous  avons  ré- 
pondu; ensuite  il  nous  a  fait  la  remise  de  l'une  et  l'autre,  et 
ayant  donné  après  nous  l'eau  bénite  et  l'encens,  il  s'est  re- 
tiré. A  l'instant,  on  a  commencé  les  prières  accoutumées  en 
pareil  cas,  pendant  lesquelles  nous  avons  jette  de  l'eau  bé  • 
nite  sur  le  corps  que  nous  avons  encensé.  Et,  pendant  que 
le  chœur  chantoit  les  psaumes  et  répons  marqués  dans  le 
Rituel,  le  corps  de  Madame  la  Dauphine  et  la  boeste  où  es- 
toicnt  les  entrailles  ont  été  portés  dans  la  chœur  par  les 


—  07  — 

gardes  du  corps  de  Sa  Majesté,  les  quatre  coins  du  poésie 
étant  tenus  par  M.  Tabbé  d'Hcsselin  d'Hauteville,  chanoine 
doyen,  M.  de  BuUioud,  chanoine  archidiacre  d'Etampes, 
MM.  Tissot  et  Mauclerc,  chanoines,  tous  quatre  à  ce  députés 
par  notre  Chapitre.  Et  le  corps  et  les  entrailles  ont  été  pla- 
cés sur  une  estrade  sous  une  représentation  ;  alors  on  a  mis 
sur  le  poésie  le  manteau  à  la  royalle  et  la  couronne.  Les 
prières  étant  finies,  et  pendant  qu*on  récitoit  les  psaumes, 
nous  nous  sommes  retiré  et  avons  laissé  deux  chanoines, 
deax  semiprébendés  et  deux  clercs  pour  psalmodier  conti- 
naellement  auprès  du  corps  qui,  pendant  ce  temps,  a  tou- 
jours été  gardé  par  les  Gardes  du  corps  de  Sa  Majesté  ;  peu 
de  temps  après^  on  a  chanté  les  Vigiles. 

Et  le  23  mars  1767,  à  10  heures  du  matin,  Nous  Cardinal 
Archevêque  susnommé,  ayant  pour  assistans  MM.  le  tréso- 
rier et  le  doyen  de  notre  Métropole,  pour  diacres  Tarchidia- 
cre  d'Estampes  et  deux  autres  prêtres  de  notre  Eglise,  pour 
sous-diacres  M.  Lhermitte  de  Champbertrand,  chanoine,  et 
deux  autres  prêtres  aussy  de  notre  Eglise,  M.  Thévard  por- 
tant le  bâton  de  préchantre,  MM.  Mauclerc  et  Maillet  de  la 
Trémoye,  chanoines  choristes,  tous  trois  à  ce  députés  par 
notre  Chapitre,  avons  dit  et  célébré  pontificalement  la 
messe  dans  le  chœur  de  notre  Eglise,  en  présence  de  Son 
Altesse  Sérénissime  Madame  la  comtesse  de  la  Marche  et 
autres  dénommés  en  l'acte  du  jour  d'hyer;  les  chanoines  et 
les  bénéficiers  de  notre  Eglise  dans  les  stalles. 

Ensuite,  nous  nous  sommes  avancé  vers  Testrade  sur  la- 
quelle étoient  posés  le  corps  et  les  entrailles  de  feue  Très 
Haute,  Très  Puissante  et  Excellente  Princesse  Madame 
Mt  rie-Josèphe  de  Saxe,  veuve  de  Très  Haut,  Très  Puissant  et 
Excellent  Prince  Monseigneur  Louis,  Dauphin  de  France, 
et  qui  avoient  toujours  été  gardés  par  les  Gardes  du  corps 
de  Sa  Majesté,  pendant  lequel  temps  on  n'a  cessé  de  psal- 
modier. 

Après  que  nous  avons  eu  récité  toutes  les  prières  et  fait 
les  cérémonies  accoutumées,  le  coffre  qui  renfermoit  le 


—  68  — 

corps  de  cette  princesse  et  la  boeste  dans  laquelle  estoient 
ses  entrailles  ont  été  levés  de  dessus  Testrade  et  descendus 
par  les  Gardes  du  corps  de  Sa  Majesté  dans  le  caveau  qui 
eit  au  milieu  du  chœur  de  notre  église  et  où  repose  le  corps 
de  feu  Monseigneur  Louis,  Dauphin  de  France,  son  époux. 

Ensuite,  ayant  jeté  de  Teau  bénite  sur  le  corps,  donné 
i'encens  et  récité  les  prières  marquées  dans  le  Rituel,  et  les 
cérémonies  dues  à  son  rang  et  concernant  sa  maison  ayant 
été  remplies,  le  caveau  a  été  fermé  et  scellé. 

En  foy  de  quoy  avons  tait  et  rédigé  le  présent  acte  que 
nous  avons  signé  avec  notre  Chapitre. 

Paul,  Cardinal  Archevêque  de  Sens. 
d'Hesselin,  doyen  de  la  Haize 

HuERNE,  célerier  Dauvekgne 

de  Monbourg,  a.  de  Provins    Gigot  de  Boisbernier 
DE  BuLUOUD,  a.  d'Eiampes       le  Pellerin 
Mauclerc  Hédiard 

TissoT  le  Houistel,  syndic 

Maillet  de  la  Trémoye  Thévard 

Champbertrand  L.  Goret 

Menu  de  la  Fontaine  de  Condé 

Pelée  des  Tanneries  Roy 

RoussET  L.  LE  Blanc 

Guichard  Berthelin 

LE  Beau  le  Gris,  secrétaire. 

ViLLEROY 

Six  semaines  plus  tard  eut  lieu  un  service  solen- 
nel. Les  registres  capitulaires  nous  en  donnent  le 
programme  (1)  : 

Mardi  5  may  i7€7. —  M.  le  Doyen  a  dit  que,  conformément 
aux  intentions  de  Messieurs,  S.  E">  M?'  TArchevêque  dési- 
roit  qu'il  fût  fait  dans  leur  église  un  service  solennel  pour 
le  repos  de  feue  M»  la  Dauphine  et  qu'il  convenoit  fixer  le 
jour. 

(DArchivesdeTY.  GC81. 


f  —  69  — 

Messieurs  ont  arrêté  qu'ils  feront  ce  service  solennel  lé 
mercredi  13  de  ce  mois,  à  10  heures  du  matin;  que  les  vigi- 

[  les  se  diront  la  veille,  que  le  bâton  précentorial  sera  porté; 
que  les  cloches  des  deux  tours  seront  sonnées.  Et  pour  faire 
préparer  et  poser  dans  leur  église  tout  ce  qu'il  convient 

/        dans  cette  circonstance,  MM.  Gigot  et  de  Condé  ont  été  dé- 

^         pûtes. 

Vendredi  8  may.  —  Messieurs  ont  arrêté  que  le  chœur  de 
leur  église  et  le  sanctuaire  seront,  en  leur  nom  et  à  leurs 
frais,  tendus  de  noir  pour  les  Vigiles  qui  se  diront  mardi 
prochain,  et  pour  le  service  solennel  qu'il  feront  le  lende- 
main pour  le  repos  de  l'âme  de  feu  M»  la  Dauphinc,  au  désir 

^  de  la  délibération  du  5  de  ce  mois,  et  ont  député  MM.  Gigot 

^  et  de  Condé  pour  inviter  les  corps. 

Mardi  12  may.  —  Messieurs  ont  arrêté,  à  cause  du  service 
solennel  qu'ils  feront  demain,  dans  leur  église,  de  dire  au- 
jourd'hui vêpres  à  3  heures  et  Matines  de  suite.  Les  Vigiles 
à  six  heures,  et  demain  la  messe  canoniale  à  sept  heures. 
MM.  de  la  Haize  et  Mallet  députés  pour  choristes,  et  M.  Man- 
der pour  porter  le  bâton  à  la  messe;  M.  Thévard,  pour  sup- 
pléer à  ce  que  Son  Eminence  ne  pourra  faire  (1). 

Vendredi  15  may.  —  M.  Gigot  a  dit  que  les  jurés  crieurs  (2) 
sont  venus  dans  le  chœur,  assistés  de  deux  notaires,  qui  lui 
ont  demandé  pourquoy  et  de  quel  ordre  on  tendoit  en  noir 
dans  le  chœur;  qu'il  leur  a  répondu  que  c'ctoit  pour  le  ser- 
vice solennel  que  Messieurs  avoient  arrêté  de  faire,  le  13  de 


(1)  c  Le  cardinal  de  Luynes  y  offîcfa  pontiflcalcinent  et  tous  les  corps 
sêcuUers  et  réguliers  y  assistèrent;  Toraison  funèbre  fut  prononcée  par 
M.  Caquia  de  Monbourg,  vicaire  général,  arcliidiacre  de  Provins,  théolo- 
gal et  chanoine  de  Sens.  >  fAlmanach  de  Sens  de  il68.) 

«  Le  16  du  même  mois,  les  officiers  municipaux  flreut  célébrer  un  service 
solennel  pour  le  même  objet,  dans  Tégllse  des  Célestins.  le  cardinal  de  Luy- 
nes y  officia  pontificalcment,  et  tous  les  corps  séculiers  et  réguliers  y  fu- 
reul  invités.  •  i Ibidem-} 

(l\  Les  jurés  crieurs,  ayant  obtenu  un  privilège  roynl,  avaient  la  prcten- 
h'on  de  s'attribuer  le  mono|x>lc  des  décorations  funèbres.  Celte  nflairo  n'eut 
pas  de  suites.  (Archives  de  l'Y.,  Dépôt  de  Sens,  G  128.) 


—  70  — 

ce  mois,  pour  le  repos  de  Fâme  de  M^  la  Dauphine,  que  les 
ouvriers  ne  travailloient  que  sous  ses  ordres  et  ceux  de 
M.  de  Condé,  députés  par  le  Chapitre,  aux  frais  et  aux  dé- 
pens duquel  le  tout  se  faisoit  ;  quUls  avoient  signé  l'acte  qui 
en  fait  mention.  Sur  quoy  Messieurs  ont  approuvé  la  con- 
duite de  MM.  Gigot  et  de  Condé,  et  la  signature  qulls  ont  dit 
avoir  donné  sur  leurs  réponses. 

L'épitaphe  soumise  par  le  cardinal  de  Luynes  à 
Tapprobation  du  Roi  et  de  la  Dauphine,  n*avait  pas 
encore,  malgré  Tempressement  de  l'auteur,  été 
livrée  au  graveur. 

Le  bon  prélat,  aussitôt  après  les  obsèques  de  la 
Princesse,  avait  ajouté  au  texte  primitif,  cet  éloge  : 

ORBATA  CONJUX 

MARIA  JOSEPHA,  e  regiâ  Saxonum  stirpc,  DËLPHINA 

Cujus  immedicabilis  dolor 

Voluit  se  vitâ  defunctam  eodem  condi  tumulo, 

Ut  cinis  cineri  junctus 

Mutui  amoris  posteritati  perenne  monumentum  sit. 

Sicut  amore  ita  virtutibus  par, 

•   Mœroris  accrbitatc  consumpta 

Omnibus  flebilis, 

ObiUDieMensis  Mardi XIII  An.  D.  MDCCLXY II, Glatis  XXXV 

Et  flde  conjugali  ctiam  post  mortem  scrvatâ 

Cum  planctu  magno  deposita  est,  Die  ejusdem  Mensis  XXII L 

REQUIESCANT  IN  PAGE 

Offerebat  Jnbente  et  anniiente  Rege  Addictissinms  Servus 

PAVLUS  D'ALBERT  DE  LUYNES 

S.  R.  E.  CardinaliSy  archiepiscopus  Senonensis. 

Maric-Joséphc  de  Saxe,  Douphinc  de  France, 

Dont  In  douleur  est  sans  remède  depuis  la  mort  de  son  <^poux 

A  voulu  Hre  enterrée  après  sa  mort  dans  le  môme  tombeau; 

Afln  que  la  réunion  de  leurs  cendres  restât  à  la  postérité 

comme  un  monument  éternel  de  leur  amour  mutuel. 

Egale  A  son  époux  en  vertu  comme  en  tendresse, 


—  71  — 

Succombant  enfin  à  l'amertume  de  sa  douleur. 

Elle  est  morte,  digne  de  tous  nos  regrets, 

Le  13  mars.  Tan  de  Notre-Seigneur  1767,  Agée  de  33  ans. 

Et,  ayant  voulu  garder  la  foi  conjugale  même  après  sa  mort, 

Die  a  été  déposée,  le  23  dudit  mois  de  la  même  année,  dans  ce  tombeau 

que  nous  avons  arrosé  de  nos  larmes. 

Requiescant  in  pace. 

Paul  d'Albert  de  Luynes,  Cardinal,  Archevêque  de  Sens, 

S  er%'iteur  très  attaché  h  Monseigneur  le  Dauphin  et  à  Madame  la  Dauphlnc, 

A  offert  cet  hommage  de  son  respect  à  leur  mémoire. 

Par  les  ordres  et  sous  le  bon  plaisir  de  Sa  Miy^^^  (!)• 


(I)  Traduction  publiée  à  Sens,  avec  le  texte  latin,  en  17C8.  —  L'Année  Ut- 
lérairt  a  reproduit  les  épitaphes  du  Dauphin  et  de  la  Dauphine  et  en  a 
donné  une  traduction  en  vers,  par  l'abbé  de  Ponçol,  t.  VII,  pp.  212-216. 


CHAPITRE  VI 


LE  MArSOLÉE 


M 


Plus  d'un  an  se  pa^c  avant  que  la  Direction' 
des  lldtiments  du  Roi  semble  se  préoccuper  de  la^ 
sépulture  des  Princes,  H 

Le  Oiapiln*,  désesj>éraïit  des  lenteui^  ad  ni  î  ni  s- 
tratîvcs,  prend  alors  1  tnilialix-e.  Le  10 juin  1768,  il 
décide  de  <  Taire  niettre  une  tombe  et  une  inscrip- 
tion de  marluT  smle  caveau  du  Dauphin,  en  atten- 
dant le  MausokH?  (l).  1  De  son  coté*  rArchevcquc 
réclame  a  la  Direction  des  Bâtiments  une  table  de 
marbre  noir  pour  cette  des! i notion.  Celte  fois,  le 
suriulendanl,  nian|uis  de  Marignv,  répond  au  pré- 
lat que  satisraction  va  lui   élix^  donnée  (2).   Le 


m  AtthHn  ii«t.  Ot   ism,  |k.  m  -  l^ttn-  da  t  JiiEII«i   tTËR»  eitôe 


—  73  — 

26  septembre,  il  fait  écrire  à  M.  Lestoré,  chanoine 
de  Sens  (1). 

Taurois  déjà  cempii  les  désirs  de  M.  le  Cardinal  de  Luy- 
nés  si  les  magasins  du  Roy  pouvoient  fournir,  dans  les  pro- 
portions indiquées,  le  marbre  noir  pour  porter  Tépitaphc 
provisionnelle  de  Mfr  le  Dauphin  ;  et  c'est  ce  dont  j*ai  lieu 
de  douter  puisque,  suivant  le  compte  qui  m'a  été  rendu,  il 
n'existe  dans  les  magasins  qu'une  seule  tranche  de  ce  mar- 
bre, et  dont  on  croit  l'épaisseur  insuffisante  (2). 

Enfin,  sur  le  rapport  qui  lui  est  présenté  ainsi 
libellé  : 

M.  le  Cardinal  de  Luynes,  touché  du  désir  d'ériger  à  la 
mémoire  de  Monseigneur  le  Dauphin  dans  l'église  de  Sens 
une  sorte  de  monument  que  la  décence  exige,  en  attendant 
que  celui  que  V.  M.  a  ordonné  soit  en  état,  supplie  très 
hamblement  V.  M.  d'accorder  une  tranche  de  marbre  blanc 
sur  laquelle  on  puisse  graver  l'épitaphe  qu'il  a  composée 
et  qu'on  encadrera  de  marbre  noir. 

Le  Roi  signe  de  sa  main  un  permis  de  délivrer, 
le  6  novembre  1768.  Le  12  décembre,  on  faisait 
transporter  à  Sens  vingt-trois  pieds  quatre  pouces 
trois  lignes  quatre  points  de  marbre  (3). 

VAlmanach  de  Sens  pour  1770,  publié  par  consé- 
quent vers  la  fin  de  1769,  pouvait  annoncer  cette 
nouvelle  :  «  Comme  le  magnifique  Mausolée  qui 
doit  être  placé  dans  le  chœur  de  l'Eglise  Métropo- 
litaine de  cette  ville,  sur  le  tombeau  de  feu  M^*"  le 

4l)  Eustachc  Lestoré,  aumônier  du  duc  d'OrIcans,  résidait  à  Paris,  où 
il  était  charge  des  affaires  du  Cliapitre  ;  il  était  également,  à  cette  époque, 
secrétaire  de  i'Archevcclié  et  vicaire  général. 

«D  Arclii%-es  mit.,  ibid,  p.  131.  Cité,  ibid. 

[2}  Archives  nat.,  ibid.  pp.  131  et  150. 


—  74  — 

Dauphin  et  de  Maclame  la  Daiiphine,  nVst  pas  en- 
core prùi  (sicj  dtlrc  fini,  S.  E.  M"*'  le  cardinal  de 
Luynes,  notre  archevêque,  dés  ira  ni  que  Fend  roi  t 
où  reposent  les  dépouilles  mortelles  de  ces  augus- 
tes Epoux  fût  distingué,  par  quelque  marque  exlë- 
rieure,  des  antres  sépultures  cjui  se  trouvent  dans 
ce  respectable  sanctuaire,  y  a  fait  poser  une  tombe 
de  marbre  blanc,  soutenue  par  six  consoles  d'un 
pied  de  hauteur. 

a  L*écusson  des  armes  de  feu  MîK  le  Dauphin  et 
de  Madame  la  Dauphine  est  gravé  sur  cette  tombe 
au-dessus  des  épi  ta  p  h  es  qui  nous  rappellent,  avec 
autant  de  vérité  que  de  précision,  des  vertus  qui 
seront  longtemps  Tobjet  de  notre  admiration  et  de 
nos  regrets,  û 

Si  lointaine  encore  qu  apparût  rérection  du 
«  magnifique  mausolée,  ^  on  en  pouvait  déjà  parler, 
en  17G9,  avec  assurance  et  admiration* 

Le  monument  commandé  par  le  Roi,  inspiré  par 
Marie-Joséphe,  esquissé  par  Coehin,  heureusement 
affranchi  des  absurdes  rêveries  de  Diderot,  avait 
enfin  pris  sa  forme  définitive,  grâce  au  talent  sou- 
ple et  déhcat  du  grand  artiste  Guillaume  Coustou. 

Le  modèle  en  phUre  était  achevé  pour  le  Salon 
de  17(39.  Le  catalogue  annonce  qu'on  peut  le  visi- 
ter, chaque  après-midi,  dans  Talelier  dn  sculpteur, 
place  Nouvelle-du-Louvrc, 

Il  en  fait  la  description  suivante  : 


Ct?  loiTibcnii,  dcsUnc  ù  réunir  deux  époux  qu'une  égale 
tendresse  avait  unis  pendant  leur  vie,  présente  un  piédes- 
tal enrré,  sur  lequel  sont  pincées  deux  urnes  liées  ensemble 


d 


dane   guirlande    de   la  fleur  qu'on   nomme   immortelle. 

Du  côté  qui  fait  face  à  l'autel,  Tlmmortalité,  debout,  est 
occupée  à  former  un  faisceau  ou  trophée  des  attributs  sym-» 
boliques  des  vertus  morales  de  feu  Mer  le  Dauphin  :  la  ba- 
lance de  la  Justice  ;  le  sceptre,  surmonté  de  l'œil  de  la  Vi* 
gilancc;  le  miroir,  entouré  d'un  serpent,  de  la  Prudence  ;  le 
lys  de  la  Pureté,  etc.  Â  ses  pieds  est  le  génie  des  sciences 
et  des  arts,  dont  le  Prince  faisait  ses  amusements.  A  côté, 
la  Religion,  aassi  debout,  et  caractérisée  par  la  croix  qu'elle 
tient,  pose  sur  les  urnes  une  couronne  d'étoiles,  symbole 
des  récompenses  célestes  destinées  aux  vertus  chrétiennes, 
dont  ces  augustes  époux  ont  été  le  plus  parfait  modèle. 

Du  côté  qui  fait  face  à  la  nef,  le  Temps,  caractérisé  par 
ses  attributs,  étend  le  voile  funéraire  déjà  posé  sur  l'urne 
de  Mr  le  Dauphin,  mort  le  premier,  jusque  sur  celle  qui 
est  supposée  renfermer  les  cendres  de  Madame  la  Dau- 
phine.  A  côté,  l'Amour  conjugal,  son  flambeau  éteint,  re- 
garde avec  douleur  un  enfant  qui  brise  les  chaînons  d'une 
cbaioe  entourée  de  fleurs,  symbole  de  l'Hymen. 

Les  faces  latérales,  ornées  des  cartels  des  armes  du  Prince 
et  de  la  Princesse,  sont  consacrées  aux  inscriptions  qui 
doivent  conserver  à  la  postérité  la  mémoire  de  leurs  ver- 
tas.  > 

Avant  même  rexposition  du  modèle,  des  mesu- 
res étaient  prises  pour  hâter  rexécution  en  marbre 
de  cet  important  monument. 

I^  24  février  1769,  Cochin  avait  écrit  au  mar- 
quis de  Marigny  : 

Monsieur, 
L  ouvrage  du  tombeau  de  feu  Mcrr  le  Dauphin,  par 
M'Ccnstou,  dont  vous  avés  vu  et  approuvé  le  modèle,  est 
au  point  d'en  commencer  l'exécution  en  marbre.  Après 
m'étre  informé  des  marbres  qui  peuvent  servir  à  cet  objet, 
i'ay  vu  qu'il  n'y  a  que  deux  blocs  qui  soyent  susceptibles 
d'y  être  employés. 


—  76  — 

L'un  est  un  bloc  depuis  très  longtemps  délivré  à  M.  Pi- 
galle  pour  exécuter  un  grouppe  de  TEducation  de  TAmour, 
dont  il  a  fait  anciennement  un  petit  modèle.  Les  divers 
travauxdont  il  aété  chargé  depuis,  ont  suspendu  Fexécution 
de  ce  morceau,  qui  d'ailleurs  n'a  point  d'utilité  particulière 
pour  le  service  du  Roy,  et  auquel  M.  Pigalle  renonce.  En 
supposant  même  qu'après  avoir  achevé  le  tombeau  du  Ma- 
réchal de  Saxe,  il  se  sentit  encore  assér  de  force  pour  entre- 
prendre un  morceau  de  longue  haleine  (ce  qu'il  ne  présume 
pas),  le  grand  modèle  n'étant  pas  encore  commencé  et  ne 
pouvant  l'être  de  longtemps,  on  auroit  tout  le  temps  néces- 
saire pour  lui  faire  revenir  un  autre  bloc. 

Une  fera  donc  aucune  difficulté  de  remettre  ce  bloc  en- 
tre les  mains  de  M.  Coustou,  au  premier  ordre  qu'il  en  re- 
cevra. Ce  bloc  est  beau  et  peut  servir  à  l'exécution  de  deux 
des  principales  ligures  du  tombeau  et  de  deux  enfans. 

Le  second  bloc  nécessaire  est  celui  qui  est  déposé  sur  le 
quay  du  Louvre,  bloc  défectueux  par  un  fll  qui  le  traverse, 
ce  qui  met  dans  l'impossibilité  de  l'employer  dans  les  me- 
sures qu'il  comporte.  M.  Coustou  y  trouvera  de  quoy  faire 
les  deux  figures  du  Temps  et  de  l'Himen,  et  remettra  au 
magasin  ce  qui  en  restera  et  qui  sera  au  delà  du  tiers  de  ce 
bloc. 

S'il  vous  plait,  monsieur,  donner  les  ordres  nécessaires 
pour  que  ces  deux  blocs  lui  soyent  délivrés,  et  particuliè- 
rement celui  qui  est  dans  l'atelier  de  M^  Pigalle  au  Louvre, 
parce  que  les  modèles  des  deux  flgures  qui  peuvent  y  être 
taillées  sont  prêts,  M.  Coustou  ne  perdra  point  de  temps  à 
mettre  en  œuvre  cet  ouvrage  important  (1). 

Le  13  mars,  le  Directeur  des  Bâtiments  informe 

(1)  Archives  nat.,  01 1905.  A  cette  lettre  est  annexée  la  note  suivante  : 
«  Il  y  a  environ  18  à  20  ans  que  le  s'  Frércl,  volturier  par  eau,  a  livré  sur  le 
port  S.  Nicolas,  à  Paris,  un  bloc  de  marbre  blanc  statuer,  du  poids  d'environ 
90  milliers  pezant.  Ce  bloc  étolt  destiné  pour  faire  (par  le  s'  Slod  sculp- 
teur) une  figure  et  trophée  pour  la  Pa.r  de  l'année  1747.  Mais  le  dit  bloc 
s'est  trouvé  remplit  de  flUes  et  ord  d*état  de  servir  à  sa  destination.  » 


—  77  — 

Coustou  que  les  deux  blocs  désignés  par  Cochin,  lui 
sont  attribués  pour  son  monument  (1).  Le  même 
jour,  il  notifie  cette  décision  à  Pigalle  (2). 

Toutefois  le  travail  du  sculpteur  s'accomplit  avec 
lenteur. 

A  la  fin  de  1776  seulement,  on  peut  en  annoncer 
au  roi  Louis  XVI  Taché vement  très  prochain.  Aus- 
sitôt le  Roi  ordonne  à  M.  d'Angiviller,  successeur 
du  marquis  de  Marigny,  de  prendre  des  mesures 
pour  l'érection  du  monument  à  Sens. 

C'est  alors  qu'une  grosse  difficulté,  jusque-là  im- 
prévue, se  présente.  Le  caveau,  construit  à  la  hâte 
pour  l'inhumation  du  Dauphin,  offrait-il  une  base 
suffisamment  solide  pour  supporter  un  mausolée 
(l'un  poids  considérable?  Faute  de  renseignemeuts 
précis,  il  était  difficile  de  répondre  à  cette  question. 
M.  d'Angiviller  envoie  à  Sens  Germain  Souffiot, 
le  célèbre  architecte  (3),  contrôleur  des  Bâtiments 
du  Roi,  et  le  sculpteur  Coustou,  avec  mission  d'exa- 
miner la  construction  du  caveau  et  de  lui  indiquer 
les  travaux  nécessaires. 

Les  documents  qui  suivent  nous  permettent 
de  les  suivre  dans  cette  visite  : 

Souffiot  au  comte  (TAngiviller 

Monsieur, 
Je  suis  convenu  avec  M.  Coustou  de  partir  pour  Fontai- 
nebleau dans  huit  jours.  Nous  nous  arrêterons  pour  pren- 

a*  ArdiiTet  nat,  Ol  2006,  r.  193.  —  Lettre  pubUée  par  MM.  Quesvers  et 
SMn,op.  cf/.,  t.  I,  p.  423. 

(2i  Archives  nat.,  Ol  1905. 

(3)  Originaire  de  Coulanges-la-Vineuse,  c'est  lui  qui  a  élevé,  à  Paris,  l'é- 
glise de  Sainte-Geneviève,  appelée  depuis  le  Panthéon. 


dre  vos  orilres  à  ré|fard  de  rexamen  que  nous  nvons  h 
faire  tlu  cnvcûii  au  dessus  duquel  0  doit  poser,  I  année  pro- 
chai  ne,  le  tombeau  de  M^  le  Dauphin  et  de  Madame  la 
Dnuphme.  Je  pense.  Monsieur^  que  s'il  est  nccessaire  que 
nous  y  descemlious.  il  y  a  des  précautions  à  prendre  pour  la 
permission  d'en  faire  rouverlure.  J  ai  l'honneur  de  vous  en 
prévenir,  ntnsi  que  de  la  nécessité  d'avoir  avec  nous  Ten- 
trepreneur  qui  a  fait  le  caveau,  aJïn  qu1l  s'arrange  pour  se 
rvndre  à  Sens  en  même  temps  que  nous  (M. 


I 


Le  s  novembre»  le  Chapitre  de  Sens  recevait  com 
inutiicaliott  de  la  lellre  suivante,  remise  par  Soufflot 
au  nom  du  Directeur  des  Râtintents  ;  ^ 

Fontainebleau,  7  novembre  1776, 
J'ai  rhonneur  de  vous  informer.  Messieurs,  qu  en  exécu- 
tîoû  des  volontés  du  feu  Roy  et  de  Taveu  de  Sa  Majesté  ré- 
gnante, je  députe  à  Sens  M.  St-JutHot,  conlroUeur  général  des 
BAtjnienls  de  Sa  Majesté,  et  M.  Coustou*  sculpleur  de  TAcn- 
dénije,  pour  préparer  dans  voire  Eglise  les  travaux  relalifs 
à  la  îKisc  du  monument  consacré  h  la  mémoire  de  M.  le  Dau- 
phin, et  quia  été  exécuté  par  M.  Coustou.  Cet  ouvrage^  pres- 
que entièrement  terminé,  pourra  être  mis  en  place  au  prin- 
lems  tïroehain;  mais,  comme  la  masse  est  d  un  poids  consi- 
dérable, il  s'agit  de  reconnoître  si  le  caveau  peut  la  supi>ortcr 
et  d'y  i^outer,  si  besoin  est,  toute  la  solidité  convenable. 
Tel  est  robjet  de  la  commission  de  M"  Soufllot  et  Coustou, 
et  je  me  promets,  Messieurs,  des  sentimenls  que  Tobjet  in- 
-spire  sans  doute  à  voire  eoniiuignie^  que  vous  procureres 
au%  deux  artistes  dont  il  s'agit  tout  l'accès  et  facilités  qui 
pourront  dépendre  de  vous. 
J'ai  rhonneur  d  être»  etc. 

D'AK6iviu.£ft  (2) 


i^)  Afvlilvc4  de  rv.  Ovpét  àe  Sf  ni,  G  13^  n*  lOlK 


—  79  — 

Le  lendemain,  SoufHot  fait  à  son  directeur  ce 
récil  de  ses  démarches  : 

Soiifflol  au  comte  d'Angiviller 

Sens,  9  novembre  1776. 

Nous  arrivâmes  ici,  hier  à  midi  environ;  nous  eûmes 
Ihonneur  de  voir,  après  un  premier  examen  de  Féglise, 
M.  le  Cardinal  et  de  lui  présenter  votre  lettre.  Il  avait  reçu 
celle  de  M.  Âmelot,  et  Son  Eminence  venoit  de  lui  répondre 
qu  elle  croyoit  une  lettre  de  cachet  nécessaire  pour  l'ouver- 
tare  du  caveau.  Elle  me  parut  disposée  à  attendre  sa  ré- 
ponse, sans  cependant  trop  insister  sur  la  nécessité  abso- 
lue, parce  que  votre  lettre  me  paroissoit  décider  la  ques- 
tion d'après  une  conversation  avec  M.  Âmelot,  postérieure 
à  Totre  lettre.  Je  remis  ensuite  celle  que  vous  m'aviez  don- 
née pour  le  Chapitre  et  les  choses  se  passèrent  à  peu  près 
comme  chez  Son  Eminence.  Cependant  il  fut  décidé  que  je 
pouvois  mettre  aujourd'hui  des  ouvriers  dans  le  chœur  pour 
fouiller  contre  les  murs  du  caveau,  en  reconnaître  la  con- 
struction et  la  nature  du  sol  que  l'on  m'assure  être  de  terres 
rapportées. 

On  travaille  à  cette  fouille;  mais,  comme  il  faut  cesser 
pendant  les  ofQces  et  que  c'est  demain  dimanche,  cela  me 
reUendroit  ici  deux  jours  à  rien  faire;  je  vais,  Monsieur, 
proGter  de  cette  circonstance  pour  aller  voir  ma  famille 
que  je  n'ai  pas  vue  depuis  grand  nombre  d'années  et  qui 
D  est  distante  que  d'environ  cinq  heures  de  chemin.  J'en  re- 
viendrai après  demain  qui  est  jour  de  fête  ici,  et  j'espère 
que  les  choses  seront  au  point  de  pouvoir  arriver  à  Fontai- 
nebleau mardi  pour  vous  rendre  compte  de  tout  (1). 

Peut-être  Soufllot  ne  flt-il  qu'un  rapport  verbal. 
Aucun  document  ne  relate  les  conclusions  de  sa  vi- 
site à  Sens.  Mais  évidemment  les  deux  envoyés  con- 

(I)  Archives  nat.  Ol  1339.  —  (Communiquée  par  M.  FëlU  Chanclcnicr.) 


—  80  — 

statèrent  rinsuffisance  du  caveau  funéraire.  De  là 
la  nécessité  de  le  reconstruire  ou  bien  d'élever  le 
mausolée  sur  un  emplacement  autre  que  celui  de 
la  sépulture.  Ce  second  parti  fut  envisagé.  Il  offrait 
le  double  avantage  d'épargner  une  construction 
nouvelle  et  surtout  d'éviter  une  exhumation.  La 
lettre  suivante  nous  l'apprend.  Des  démarches  fu- 
rent faites,  même  après  que  fut  décidée  la  recon- 
struction du  caveau,  pour  obtenir  que  le  mausolée 
ne  fût  point  placé  sur  la  sépulture,  c'est-à-dire  au 
point  central  du  chœur,  mais  en  avant  et  près  de 
l'entrée. 

Lettre  attribuée  à  M.  Vahhé  le  Beau,  chanoine^ 
parent  de  M.  Moreau  de  Vortnes  [ÎJ 

Voicy,  Monsieur  et  cher  confrère,  un  nouveau  plan  de 
notre  chœur,  tout  y  est  bien  désigné,  et  certainement  M.  le 
comte  d'Angiviller  et  M.  SoufQot  auront  égard  à  nos  répré- 
sentations. Lorsque  vous  leur  aurés  démontré  que  le  mau- 
solée sera  mieux  aperçu  étant  à  la  place  où  nous  désirons 
qu'il  soit,  que  dans  la  partie  supérieure  de  notre  chœur,  où 
il  nous  gênera  beaucoup  pour  nos  cérémonies,  pour  le 
chant,  et  pour  le  catafalque  de  Mr^le  Dauphin  —  (on  le  met  à 
S.  Denys  dans  le  sanctuaire,  parce  que  le  caveau  est  sous  le 
sanctuaire  :  il  faut  que  le  catafalque  soit  sur  les  corps  mêmes, 
cela  est  indispensable).  —M.  Coustou  ne  doit  point  craindre 
que  l'aigle  masque  le  monument,  nous  n*en  avons  point  de- 
puis longtemps,  et  ne  pensons  point  à  en  faire  Tacquisitlon  ; 
si  le  mausolée  est  posé  où  nous  le  désirons,  ce  sera  une 

(1)  Cette  suscription  est  d'une  écriture  moderne.  Bien  que  cette  lettre, 
conservée  aux  archives  de  la  Fabrique,  ne  soit  ni  datée  ni  signée,  il  n*cst 
pas  téméraire  de  la  dater  du  milieu  de  l'année  1777.  De  plus,  récriture  est 
certainement  du  chanoine  Jean-François  Lebeau  (1754-1785),  chambrier  du 
Chapitre.  Le  destinataire  était  vraisemblablement  le  chanoine  de  Lestoré, 
agent  du  Chapitre  à  Paris. 


soaàji  ARCHéoLOcicui  di  sens. 


T.  xxu,  rt.  X,  p.  8i. 


LE   MAUSOLÉE 

L'Immortalité,    la   J{iligion   it  te   Oénii   des   Arts 


—  81  — 

raison  de  plus  pour  n'en  jamais  avoir.  Nos  chantres  ne 
chantent  point  à  Taigle,  mais  à  leurs  places,  et  c'est  pour 
cela  qu'il  est  important  de  descendre  le  mausolée  jusqu'à 
1  endroit  désigné,  ou  à  peu  prés,  afïln  que  nos  chantres  se 
Yoyent  et  s'entendent.  Il  est  vray  qu'à  la  messe  seulement  on 
met  un  petit  pulpitrc  portatif  au  haut  du  chœur;  un  de  nos 
enfants  le  place  au  moment  où  la  messe  commence,  et  l'en- 
lève aussy  tôt  après  la  communion.  C'est  encore  une  de  nos 
raisons  pour  désirer  que  le  mausolée  soit  un  peu  plus  éloi- 
{^né  du  sanctuaire.  Il  y  a  quelque  fois  quinze  personnes  et 
plus  qui  se  rassemblent  à  ce  petit  pulpitre  pour  chanter  la 
messe,  et  il  arriveroit  souvent  qu'il  n'y  auroit  pas  asscs  d'es- 
pace pour  les  placer  entre  le  mausolée  et  le  pupitre.  Il  est 
vray  aussy  qu'on  pourrait  le  mettre  tout  à  fait  au  pied  des 
marches  du  sanctuaire;  mais  il  n'y  auroit  plus  de  passage  au 
bas  des  marches,  et  ce  passage  est  absolument  nécessaire 
pour  les  cérémonies  de  l'autel  et  du  chœur.  Nous  avions 
omise  cette  observation  qui  cependant  est  très  essentielle. 
Au  reste,  comme  j'ay  eu  l'honneur  de  vous  le  marquer,  le 
Chapitre  n'a  plus  là  dessus  de  volonté;  il  a  pris  la  liberté  de 
mettre  sous  les  yeux  du  ministre  en  cette  partie  ses  obser- 
vations et  ses  réflexions,  tant  sur  l'angustie  du  caveau,  à 
cause  de  la  difïiculté  d'y  placer  les  corps  de  nos  princes, 
que  sur  la  place  du  mausolée,  à  cause  de  nos  cérémonies  et 
de  nos  chantres.  Si  vous  voulés  encore  faire  quelques  dé- 
marches, vous  nous  obligerés  inflniment;  mais  assurés- 
vous  bien  auparavant  que  vos  démarches  ne  blesseront  ny 
M  d'Angivîller  ni  M.  Soufflot.  11  est  question  d'un  monu- 
ment éternel  ;  nous  nous  serions  reproché  de  n'avoir  pas  ex- 
posé des  inconvénients  qui  peut  estre  saulteront  aux  yeux 
de  tout  le  monde  lorsqu'il  sera  placé,  et  que  nous  aperce- 
vons d'avance  mieux  que  personne.  Nous  n'avons  certaine- 
ment aucunes  vues  particulières,  c'est  le  bien  même  de  la 
chose  qui  nous  a  fait  parler;  s'il  n'y  a  plus  de  retour,  nous 
nous  taisons,  et  c'est  au  Roy  que  nous  nous  soumettons,  en 
respectant  les  ordres  de  son  ministre. 


—  82  — 

Le  relard  du  caveau  a  aussy  relardé  le  sieur  Yilleroy  (1) 
pour  la  maçonnerie  sur  laquelle  M.  Taboureux  doil  poser 
sa  charpente;  il  n'y  a  encore  rien  de  fait,  cependant  il 
compte  s'en  occuper  aussy  tôt  après  la  construction  du  ca- 
veau. M.  Taboureux  (2)  pourra  toujours  disposer  sa  char- 
pente, et  je  luy  marqueray  dans  le  millieu  du  mois  d'aoust 
où  nous  en  serons. 

Nos  carreaux  sont  arrivés  et  placés  en  sûreté,  je  n'ay 
point  encore  payé  la  lettre  de  voiture  et  les  autres  frais;  je 
vous  en  envoyeray  Tétat  vendredy  ou  dimanche  au  plus 
tard. 

J'ay  reçu  une  lettre  de  M.  Corbel  (3)  dont  je  suis  très  con- 
tent, il  me  devoit  depuis  longtemps  cette  réponse,  je  vais 
en  conséquence  faire  préparer  notre  chapelle  pour  recevoir 
son  autel 

Après  de  longues  hésitations,  le  Ministre  de  la 
Maison  du  Roi,  Anielot,  désireux  d'éviter  tout  retard 
et  d'exécuter  les  ordres  formels  du  Roi,  décide  Tcx- 
humation  et  la  reconstruction  de  la  sépulture  du 
Dauphin. 

Le  19  mai  1777,  il  écrit  au  cardinal  de  Luynes  : 

Monseigneur, 
L'intention  du  Roy  étant  de  faire  ériger  un  Mausolée  à  la 
mémoire  de  M.  le  Dauphin  et  de  feu  Madame  la  Dauphine, 
dont  les  cendres  reposent  dans  Téglise  de  Sens,  Sa  Majesté 
a  chargé  M.  le  comte  d'Angiviller  de  l'exécution  de  ses  or- 
dres. Kn  conséquence,  il  a  envoyé  deux  artistes  sur  les  lieux 
pour  examiner  le  local.  11  résulte  de  leur  examen  que  le  ca- 
veau qui  a  été  construit  pour  y  enfermer  les  tombes  est  trop 

(1)  Pierre  Hay,  dil  Vlllcroy,  enirepreneur  de  bAtimcnts  à  Sens. 

(2)  ï^  Clmpilre  avail  fait  marché,  le  23  janvier  1777,  avec  le  sieur  Tabou- 
I  rux,  mojtre  charpenller  Â  Paris,  pour  les  réparations  du  comble  et  du  clo- 
I  her.  (Archives  de  TY.,  G  712.) 

(3)  (x)rbel.  qui  s'intitulait  «  sculpteur  marbrier  à  Paris,  ta  tra%'aillé  à  In 
réfection  générale  du  dallage  de  la  cathédrale. 


—  83  — 

faible,  qu'il  ne  peut  supporter  le  Mausolée  et  qu'on  se  trouve 
forcé  de  le  faire  démolir;  au  moyen  de  quoy  il  est  d'une  né- 
cessité indispensable  d'en  retirer  les  tombes  et  de  les  placer 
en  dépôt  jusqu'à  la  construction  du  caveau. 

Jaurois  fort  désiré  pouvoir  me  concerter  avec  Votre  Emi- 
nence  sur  cette  affaire  importante,  mais  mes  occupations  ne 
me  l'ayant  pas  permis,  je  la  suplie  de  me  marquer  son  avis 
sar  le  local  qu'elle  croira  le  plus  convenable  pour  le  dépôt 
qui  cependant,  ne  peut  se  faire  que  dans  une  chapelle  par- 
ticulière ou  dans  le  caveau  destiné  à  la  sépulture  des  Ar- 
chevêques du  diocèse.  Votre  Eminence  est  plus  à  portée 
que  personne  de  décider  le  parti  le  plus  convenable  à  pren- 
dre et  je  ne  mettray  cette  affaire  sous  les  yeux  du  Roy  qu'après 
avoir  reçu  son  avis,  non  seulement  sur  cet  objet,  mais  sur 
les  cérémonies  qu'il  conviendra  d'observer  pour  l'ouverture 
du  caveau,  l'extraction  des  tombes  et  leur  replacement,  qui 
doivent  être  constatés  d'une  manière  juridique. 

J'ay  l'honneur  d'être  avec  respect,  etc.  (1). 

Dès  lors  s'établit  une  correspondance  grâce  à  la- 
quelle nous  pouvons  suivre  le  détail  des  événe- 
ments. 

Ameloiy  secrétaire  d'Etal,  au  Cardinal  de  Luynes 

Versailles,  le  29  mai  1877. 
Monseigneur, 

J'ai  rendu  compte  au  Roy  des  observations  contenues 
dans  votre  lettre.  J'ai  en  conséquence  l'honneur  d'adresser 
à  Votre  Eminence  celle  que  Sa  Majesté  luy  écrit  ainsy  que 
celle  du  Chapitre,  tant  pour  l'ouverture  du  caveau  que  pour 
l'exstraction  des  cercueils  et  leur  dépôt  dans  une  chapelle  à 
votre  choix.  L'intention  de  Sa  Majesté  (n'étant)  point  qu'il  y 
ait  chapelle  ardente,  mais  seulement  un  luminaire  bonnette 
et  décent,  je  supplie  Votre  Eminence  de  vouloir  bien  le  ré- 
gler et  m'en  faire  part  afin  que  je  puisse  le  faire  fournir  par 

(!)  Archives  de  T Yonne.  Dépôt  de  Sens,  G  135,  n'  106. 


—  81  — 

les  l/r/ifu  que  cette  dépense  regarde.  J  ignore  quel  peut  être 
le  cérémonial  à  observer  pour  l'onverture  du  caveau  et  tout 
ce  qui  doit  suivre  cette  cérémonie.  J*ay  écrit  à  M,  le  mar- 
quis de  Dreux  '  1  ;.  Je  doute  cependant  qu*il  puisse  me  don- 
ner des  renseignements,  les  exemples  de  cette  nature  étant 
fort  rares.  J'auray  soin  de  faire  part  de  son  avis  à  Votre 
Eminence,  mais  j'ay  cru  devoir  toujours  luy  faire  passer  les 
lettres  du  Roy  afin  de  ne  point  retarder  son  voyage  et  de  la 
mettre  à  même  de  donner  tous  les  ordres  préliminaires. 
J'ai  llionneur,  etc.  Amelot  (2). 

Le  3  juin,  le  cardinal  de  Luynes  vient  lui-même 
solennellement,  revêtu  du  rochet  et  de  la  mosette, 
précédé  de  sa  croix,  donner  communication  au 
Chapitre  de  la  lettre  du  Roi  : 

Mon  Cousin, 
J'ai  ordonné,  au  mois  d'octobre  dernier,  au  sieur  comte 
d'Angiviller,  directeur  et  ordonnateur  de  mes  bâtiments, 
de  faire  élever  à  la  mémoire  de  feu  M.  le  Dauphin  et  de  feue 
M<^  la  Dauphine,  mes  très  honorés  père  et  mère,  dont  les 
cendres  reposent  dans  l'Eglise  de  Sens,  un  mausolée  digne 

(1)  I^  note  suivante  résume  les  différents  renseignements  Tournis  au  Mi- 
nistre de  la  Maison  du  Hoi  |>our  cette  circonstance  : 

€  M.  le  duc  de  Dreux  a  été  consulté  sur  le  cérémonial  à  obscr\'er  pour 
l'exhumation  des  corps  du  Duc  et  de  la  Duchesse. 

«  —  Il  répond  qu'il  n'y  a  point  d  exemples  de  cette  cérémonie,  mais  qu'il 
pense  qu'on  ne  peut  procéder  à  cette  cérémonie  qu'avec  un  ordre  du  Roi 
au  Chapitre  :  l'ordre  a  été  envoyé. 

«  —  Il  doit  y  avoir  un  ecclésiastique  jour  et  nuit  en  prières  dans  la  cha- 
pfîllc  ;  imint  d'ordres  donnés. 

•  —  Item,  une  sentinelle  des  gardes  du  corps  à  la  porte  de  la  chapelle  : 
IHtint  d'ordres  donnés. 

«  —  Il  faut  lairc  un  service  pour  l'extraction  des  corps  :  cela  a  été  fait. 
ï  —  U  faudra  en  faire  un  second  lorsqu'on  replacera  le  corps  sous  le 
nuHttt^^l^f*  :  cela  se  fera. 

•  *-  Il  doit  y  avoir  un  luminaire  réglé  pour  tout  le  temps  du  dépôt  :  1/  y 
pn  it  un*  »  (Archives  nat.,  Ol  1044. > 

va  AreldvcK  de  TV.  Sens,  G  135.  n»  107. 


—  go- 
de princes  si  chers  à  mon  cœur,  qui  puisse  transmettre  à  la 
postérité  et  mes  regrets  et  le  profond  respect  que  j'ay  pour 
leur  mémoire  et  leurs  vertus.  Je  vois  par  le  compte  qu'il 
vient  de  me  rendre  que  le  caveau  dans  lequel  leur  cercueil 
est  renfermé  n'a  point  été  construit  avec  assez  de  solidité 
pour  supporter  ce  monument  que  ma  piété  leur  destine; 
c  est  pourquoi  il  est  indispensable  de  le  démolir  pour  le  re- 
construire. Et  je  vous  fais  cette  lettre  pour  vous  dire 
qu'avant  qu'on  commence  ces  travaux,  mon  intention 
est  que  les  cercueils  qui  renferment  ces  dépôts  précieux  en 
soient  retirés  et  placés  dans  Tune  des  chapelles  de  ladite 
Eglise  de  Sens  dont  je  vous  laisse  le  choix  et  dont  l'entrée 
ne  sera  permise  qu'aux  ecclésiastiques,  pour  y  estre  gardés 
avec  tout  le  respect  et  la  décence  qui  leur  est  due  jusqu'à  ce 
que  le  monument  soit  achevé.  Mon  intention  est  aussi  que 
ladite  chapelle  soit  éclairée  d'un  nombre  de  cierges  suffi- 
sant, pendant  tout  le  temps  du  dépôt.  Je  m'en  rapporte  sur 
cet  objet  important,  ainsy  que  pour  le  cérémonial  et  la 
pompe  a  observer  pour  l'extraction  des  cercueils,  à  votre 
prudence  et  au  respect  que  je  vous  connais  pour  le  dépôt 
confié  à  votre  Eglise.  J'écris  au  Chapitre  de  Sens  pour  luy 
donner  mes  ordres  en  conséquence  et  j'attends  leur  exécu- 
tion de  votre  zélé  pour  moy.  Et  la  présente  n'étant  à  autre 
Gn,  sur  ce,  je  prie  Dieu  qu'il  vous  ait,  mon  Cousin,  en  sa 
sainte  et  digne  garde. 

Ecrit  à  Versailles,  le  vingt-huit  raay  mil  sept  cent  soixante- 
dix-sept. 

LOUIS. 
(Signé  :)  âmelot  (1). 

Le  Chapitre  avait  reçu  une  lettre  identique. 
Aussitôt,  d'un  commun  accord,  on  décide  de  pro- 
céder à  rouverlure  du  caveau  le  samedi  suivant. 
Voici  le  procès-verbal  détaillé  de  cette  cérémonie 
l  Registre  copitiilaire,  archives  de  TYonne,  G  681)  : 

(b  .ViThives  de  TY.  Sens,  0.  135  ir  103. 


Samedi  7  Jabi  1777,  —  Ce  jourd'huy,  sept  juin  mil  se 
!toixante-dÎK-sepL  Nous  Fiiuld  Alberl  de  Luynes,  cî 
|irctrc  de  la  sainte  Eglise  romaine^  archevêque  vicoiulc  de 
Sens,  commandeur  de  1  ordre  du  SâinUEsprit,  etc. 

En  vcrlu  des  ordres  du  Moy  ù  Nous  adressés  par  la  lettre 
de  Sa  Majesté  dattée  de  VersaOIes,  levingt-huit  mai  dernier, 
signée  Louis,  et  plus  bas,  Ânieloi,  par  laquelle  Sa  Majestû 
nous  a  fait  connaître  que  voulant  faire  élever  un  mausDlce 
à  ta  mémoire  de  feu  Monseigneur  le  Dauphin  et  de  feue 
Madame  la  Dauidiine,  ses  augustes  père  et  mère,  et  pour 
cet  elTct  faire  reconstruire  avec  plus  de  solidité  le  caveau  où 
reposent  leurs  corps,  son  intention  est  que  les  cercueils  qiA|J 
renferment  ces  restes  précieux  en  soient  retirés  et  placés^ 
dans  lune  des  chapelles  de  notre  cglise,  dont  elle  nous 
laisse  le  choix. 

Plein  de  respect  pour  les  ordres  de  Sa  Majesté  »  et  de  vè 
nération  pour  la  mémoire  de  ses  augustes  père  et  mère, 
empressés  de  remplir  les  intentions  du  lloy. 

Nous  nous  sommes  transporté^  h  7  heures  du  matin,  dam 
notre  Eglise  Mélroi)olilaine,  accompagné  de  messire  Louis- 
Bernard  de  Marsangy,  abbé  commenda taire  de  Ste-Margucritc 
et  trésorier  de  notre  HgliscMetropolitaine.de  Messire  Jean- 
Claude  de  BuUkmd,  doyen  de  notre  Chapitre  et  notre  vi- 
caire liènénd,  de  Messire  Pierre  Jacques  Deconîlè,  préchait^| 
Ire^  et  Messire  Louis-CIauile  Lhcrmitte  de  Champbertrandp^ 
célérïer  de  notre  Eglise  et  noire  vicaire  général,  de  Messire 
Francois-Bobert  Gradot,  archidiacre  de  Mehm  en  notre 
Eglise,  de  Messire  Mathieu-François  Caqnia  de  Monhourg, 
archidiacre  de  Provins  en  notre  Eglise,  ahbé  de  Saint- 
Crespinen-Chnye  et  noire  vicaire  général,  de  Messieurs 
Christophe  l)elahai^e  et  Jenn-Jacqucs  Danvergne,  commis- 
saires par  Nous  nommés  et  choisis  pour  être  présents  à 
l'ouvcrlurc  du  caveau  construit  &mi%  le  nyîlien  du  chtvur  de 
notre  église,  dans  lequel  reposent  les  corps  tic  Très  Haut, 
Très  Puissant  el  Très  Excellent  Prince  Louis,  Dautdiin,  el 
de  Très  Haute,  Très  Puissante  et  Excellente  Princesse  Ma- 
dame ManeJtiséphe  de  Saxe,  Duypliiiie  de  France. 


s 

i 


—  87  — 

Arrivés  dans  le  chœur,  nous  avons  trouvé  notre  Chapi- 
tre assemblé  en  habit  de  chœur  pour  nous  recevoir  et  assis- 
ter à  la  cérémonie  de  Touverture  dudit  caveau. 

Sur-le-champ,  nous  avons  fait  lever  la  tombe  qui  ferme 
l'entrée  dudit  caveau  dans  lequel  nous  sommes  des- 
cendus avec  les  susdits  commissaires  par  nous  choisis, 
où  nous  avons  trouvé  deux  cercueils  placés  Tun  à  droite, 
Tautre  à  gauche  de  l'entrée  dudit  caveau,  tous  deux  cou- 
verts d*uu  velours  noir  sur  lequel  était  appliqué  une  croix 
de  moére  d'argent  et  portés  sur  des  chenets  de  fer,  et  sous 
chacun  desdits  cercueils  avons  trouvé  une  boéte  carrée,  pa- 
reillement couverte  de  velours  noir. 

Sur  le  cercueil  qui  est  à  gauche  en  entrant,  avons 
trouvé  une  plaque  de  cuivre  sur  laquelle  nous  avons  lu  et 
fait  lire  par  les  commissaires  susdits  Tinscription  suivante  : 

ICY  EST  LE  CORPS  DE  TRÈS  HAUT,  TRÈS  PUISSANT  ET  EXCELLENT 
PRINCE  LOUIS,  DAUPHIN,  DÉCÉDÉ  AU  CHATEAU  DE  FONTAINE- 
BLEAU, LE  20  DÉCEMBRE  1765,  ÂGÉ  DE  36  ANS  3  MOIS  ET 
6  JOURS. 

Et  sur  la  boéte  quarrée  placée  sous  ledit  cercueil,  avons 
lu  et  fait  lire  Tinscription  suivante  :  entrailles  de  très 

HAUT,  très  PUISSANT  ET  EXCELLENT  PRINCE  LOUIS,  DAUPHIN, 
DÉCÉDÉ  AU  CHATEAU  DE  FONTAINEBLEAU  LE  20  DÉCEMBRE  1765, 
AGE  DE  36  ANS  3  MOIS  ET  6  JOURS. 

Sur  le  cercueil  à  droite,  avons  trouvé  une  plaque  d'ar- 
gent, sur  laquelle  avons  lu  et  de  même  tait  lire  par  les  sus- 
dits commissaires  l'inscription  suivante  :  icy  est  le  corps 

DE  TRÈS  HAUTE,  TRÈS  PUISSANTE  ET  EXCELLENTE  PRINCESSE 
MADAME  MARIE'JOSÈPHE,  PRINCESSE  DE  SAXE,  DAUPHINE  DE 
FRANCE,  DÉCÉDÉE  AU  CHATEAU  DE  VERSAILLES  LE  13  MARS  1767, 
ÂGÉE  DE  35  ANS  4  MOIS  ET  9  JOURS. 

Et  sur  la  boéte  quarrée  placée  sous  ledit  cercueil  avons 
pareillement  trouvé  une  plaque  de  cuivre  sur  laquelle  avons 
lu  et  fait  lire  Tinscription  suivante  :  icy  sont  les  entrail- 
les DE  très  haute,  très  PUISSANTE  ET  EXCELLENTE  PRIN- 
CESSE MADAME  MARIE-JO<«ÈPHE,  PRINCESSE  DE  SAXE,  DAUPHINE 


—  88  — 

U£  FRANCE,   DÉCÉDÉE  AU  CHATEAU  DE  VERSAILLES  LE   13  MARS 
1767,  ÂGÉE  DE  35  ANS  4  MOIS  ET  9  JOURS. 

Ensuite  nous  avons  fait  procéder  à  l'extraction  desdits 
cercueils  et  boètes,  lesquels  ayant  été  tirés  du  caveau,  nous 
les  avons  fait  placer  sur  une  estrade  et  sous  un  dais  élevé 
à  cet  effet  dans  le  chœur  de  notre  église  et  nous  avons  célé- 
bré pontincalement  une  grande  messe  de  Requiem  sous  le 
rit  le  plus  solennel. 

La  messe  finie,  nous  avons  fait  transporter  lesdits  cer- 
cueils et  lesdites  boétes  à  la  chapelle  de  Sainte-Colombe  de 
notre  dite  Eglise,  située  derrière  le  chœur,  laquelle  avait  été 
par  nous  choisie  comme  la  plus  convenable  pour  servir  de 
dépost. 

Nous  avons  eu  soin  de  faire  tendre  celte  chapelle  de  noir 
dans  tout  son  pourtour,  depuis  la  naissance  de  la  voûte  jus- 
qu'au bas  et  de  faire  appliquer  sur  la  tenture  deux  litres  de 
velours  noir  parsemés  des  armoiries  de  feu  Monseigneur  le 
Dauphin  et  de  feue  Madame  la  Dauphine. 

Au  milieu  de  ladite  chapelle,  nous  avons  fait  élever  une 
estrade  et  un  dais  sous  lequel  nous  avons  fait  placer  les 
deux  cercueils  et  les  deux  boétes,  que  nous  avons  fait  re- 
couvrir d'un  poêle  de  velours  noir  aux  armoiries  de  feu 
Monseigneur  le  Dauphin  et  de  feue  Madame  la  Dauphine. 

Sur  le  haut  dudit  poêle,  on  a  placé  les  honneurs;  les  gra- 
dins de  ladite  estrade  ont  été  garnis  de  chandeliers  portant 
chacun  un  cierge  proportionné,  et  avons  ordonné  que  les- 
dits cierges  seraient  entretenus  et  renouvelés  pour  brûler 
tout  le  temps  que  durera  ledit  dépost,  et  ce  conformément 
aux  intentions  de  Sa  Majesté. 

Nous  avons  fixé  le  nombre  des  cierges  à  douze,  parce  que 
pareil  nombre  est  prescrit  pour  les  anniversaires  fondés 
dans  notre  Eglise  par  lettres- patentes  du  feu  Hoy  pour  le 
repos  des  Ames  de  feu  Monseigneur  le  Dauphin  et  de  feue 
Madame  la  Dauphine. 

Les  transports  et  dépôts  ont  été  faits  avec  les  cérémonies 
et  prières  accoutumées  dans  notre  Eglise;  le  clergé  sécu- 


—  89  — 

lier  et  régulier  y  a  assisté  ainsi  que  les  corps  laïcs  que 
nous  avons  eu  soin  d'inviter. 

L'escadron  du  régiment  de  la  Reine-î)ragons,  qui  est  en 
quartier  dans  cette  ville,  était  sous  les  armes,  les  officiers  à 
leur  tétc,  pour  maintenir  le  bon  ordre  et  rendre  les  hon- 
neurs dus  à  la  mémoire  de  ces  augustes  Princes. 

Des  dragons  choisis  ont  porté  les  deux  cercueils  et  les 
deux  boètes  ;  les  huit  premiers  dignitaires  ou  chanoines  de 
notre  église  portaient  les  cordons  des  deux  poêles. 

Après  avoir  rempli  tout  ce  que  le  devoir,  le  respect,  la 
piété  et  la  religion  exigeaient  de  nous  dans  cette  circon- 
stance, nous  nous  sommes  retirés  en  ordonnant  que  ren- 
trée de  ladite  chapelle  ne  sera  permise  qu'aux  ecclésiasti- 
ques, selon  rintention  du  Roy;  avons  ordonné  de  plus  qu'on 
y  célébrera  tous  les  jours  des  messes  de  Requiem,  et  notre 
Cliapitre  a  arrêté  d'y  aller  tous  les  jours,  processîonnelle- 
ment,  après  Complies,  pour  y  réciter  le  De  profundis  et  les 
autres  prières  pour  le  repos  des  âmes  de  ces  augustes 
Princes. 

Et  de  tout  ce  que  dessus  avons  fait  dresser  procês-ver- 
bal,  etc.. 

Le  Cardinal  avait  informé  aussitôt  le  Roi. 

Le  12  juin,  Amelot  lui  écrit  que  le  Roi  a  exprimé 
sa  satisfaction  du  procès-verbal  dont  il  lui  a  rendu 
compte.  Les  frais  seront  remboursés  dès  que  Tétat 
en  aura  été  fourni  (1).  Pour  le  luminaire,  il  prie 
de  faire  connaître  ce  qui  a  été  réglé  ;  le  Premier 


<t)  UneleUrc  adressée  par  Amelot,  de  Versailles,  le  25  juin,  au  cardinal 
alors  à  Rourl>onne-Ies-Bains,  donne  avis  qu'une  ordonnance  de  2400*t  lui 
ni  expédiée  pour  remboursement  des  frais  de  la  cérémonie  du  7  juin,  et 
que  M.  de  Fronsac,  premier  gentilhomme  de  la  chambre,  a  donné  des  or- 
dres pour  le  luminaire.  (Archives  de  l'Yonne,  Sens,  G  135,  n*  109.) 

Une  nouvelle  IcUrc  du  12  juillet  donne  avis  que  cette  ordonnance  a  été 
remise  au  contrôleur  général  des  finances,  pour  recevoir  la  signature  du 
Roi,  Son  Emincnce  devra  la  faire  demander  à  M.  Necker.  {Ibid.  n'  110.) 


—  90  — 

Gentilhomme  de  la  Chambre  continuera  à  le  faire 
fournir  sur  le  même  pied,  l Archives  de  i Yonne, 
Sens,  G  132,  n"  1 J8.) 

Le  même  jour,  Soufllol  écrit  de  Paris  au  Car- 
dinal : 

Monseigneur,  j'ai  reçu  la  lettre  que  Votre  Eminence  m'a 
fait  Fhonneur  de  m'écrire,  par  laquelle  elle  a  la  bonté  de 
m'apprendre  que  Ton  peut  à  présent  travailler  au  nouveau 
caveau  qui  doit  supporter  le  tombeau  de  Monseigneur  le 
Dauphin.  Je  connaissois  la  construction  de  Tancien,  et  par 
mon  examen  et  par  Tentreprcneur  même  qui  Tavoit  con- 
struit très  à  la  hâte.  J'étois  très  sûr,  Monseigneur,  qu'il  n'au- 
roit  pas  pu  supporter  le  poids  du  tombeau.  En  informant 
M.  le  comte  d'Angiviller  de  l'état  des  choses,  je  vais  le 
prier  de  donner  ses  ordres  pour  que  Ton  commence  à  tra- 
vailler; mais  si  Votre  Eminence  désiroit  absolument  des 
changements,  je  la  supplierois  de  vouloir  bien  les  lui 
demander,  car,  malgré  mon  empressement  pour  tout  ce 
qui  peut  lui  être  agréable,  je  ne  pourois  pas  les  faire  sans 
ordre. 

Je  suis,  avec  un  profond  respect, 

De  Votre  Eminence, 
Le  très  humble  et  très  obéissant  serviteur, 
SOUFFLOT  (1). 

Pendant  tout  le  temps  que  les  cercueils  des 
Princes  restèrent  exposés  sur  le  catafalque  de  la 
chapelle  de  Sainte -Colomhe,  deux  factionnaires 
firent  une  garde  dlionncur  pendant  la  journée,  à 
la  porte  de  cette  chapelle,  n'y  laissant  pénétrer  que 
les  personnes  désignées  par  la  lettre  du  Hoi  (2). 

(1)  L'original  de  celle  lellre  fail  parlie  des  colleclions  de  .M.  Félix  Chau- 
de nier. 

(2)  Affiches  de  Sens,  année  1777,  p.  62. 


—  91  — 

Tous  les  jours,  après  complies,  le  clergé  allait 
processionnellement  à  ladite  chapelle  en  chantant 
le  Libéra  ;  avant  de  dire  les  versets  et  la  collecte, 
le  chanoine  en  semaine  faisait  l'aspersion  et  l'en- 
censément  devant  la  porte  (1). 

C'est  là  que,  le  17  juillet,  le  comte  de  Provence, 
frère  de  Louis  XVI,  le  futur  restaurateur  de  la  mo- 
narchie en  France,  vint  faire  un  pieux  pèlerinage 
auprès  des  cercueils  de  son  père  et  de  sa  mère. 

Monsieur  achevait  alors  un  long  voyage  politi- 
que qui  avait  eu  un  certain  retentissement.  Parti 
de  Versailles,  le  10  juin,  avec  une  suite  nombreuse, 
il  avait  visité  Bordeaux,  Toulouse,  Marseille,  Tou- 
lon et  rentrait  par  les  vallées  du  Rhône  et  de 
ITonne.  Il  avait  été  salué,  le  16,  à  son  passage  à 
Auxerre,  et  avait  couché  au  château  des  évêques 
d'Auxerre,  à  Régennes,  près  d'Appoigny.  Il  quitta 
le  château  le  17  au  matin  et  rencontra  entre  Auxerre 
et  Joîgny  le  régiment  des  dragons  de  la  Reine,  qui 
avait  fait  le  service  de  garde  la  nuit  précédente. 

«  Ce  prince  voulut  bien  s'arrêter.  Le  régiment, 
par  ses  ordres,  exécuta  devant  lui  différentes  ma- 
nœuvres. A  son  arrivée  à  Sens,  il  trouva  un  déta- 
chement du  même  régiment,  commandé  par  le 
comte  de  Seuil,  qui  fit  le  service  auprès  du  Prince 
et  eut  l'honneur  d'être  admis  à  sa  table  (2).  » 

A  l'entrée  de  la  ville,  le  Prince  est  complimenté 
par  MM.  de  Champhertrand  et  Gigot  de  Boisbernier, 

(t   Notes  anonymes  d'un  contemporain  publiées  dans  V Annuaire  de 
r  Yonne,  ISS»,  p.SS. 
(2,  Gazette  de  France  du  25  Juillet.  1777. 


—  92  — 

au  nom  du  Chapitre.  I^  municipalité  entourée  de 
la  milice  bourgeoise,  avec  drapeaux  et  musique, 
lui  présente  les  clefs  de  la  ville,  à  la  porte  Com- 
mune. Le  cortège  traverse  la  ville  au  milieu  d'une 
foule  considérable. 

Le  Prince  descend  de  carrosse  au  son  des  cloches, 
devant  le  parvis  de  la  Métropole.  Il  y  est  salué,  en 
labsence  du  cardinal,  alors  aux  eaux  de  Bour- 
bonne,  par  le  duc  de  Luyues,  son  neveu,  et  reçu 
par  Messieurs  du  Chapitre,  en  robes  rouges  et  en 
chappes.  L'archidiacre  de  Sens  lui  présente  à  vé- 
nérer la  relique  de  la  vraie  Croix  ;  le  trésorier  offre 
leau  bénite  ;  le  doyen,  M.  de  Hullioud,  fait  le  com- 
pliment. 

Après  une  courte  prière  dans  le  chœur,  Monsieur 
se  rend  à  la  chapelle  de  Sainte-Colombe,  auprès  des 
restes  de  ses  parents.  Ensuite,  il  assiste  à  la  messe 
basse  célélirée  par  M.  de  Biencour,  occupant  le 
fauteuil  et  le  prie-Dieu,  recouverts  de  velours  cra- 
moisi à  galons  d'or,  préparés  au  milieu  du  chœur. 
A  la  fin  de  la  messe,  le  célébrant  vient  lui  présenter 
le  corporal  à  baiser. 

Puis,  escorté  de  six  chanoines,  le  Prince  retourne 
faire  ses  prières  dans  la  chapelle  de  Sainte-Colombe. 
Enfin,  il  est  reçu  dans  la  salle  capitulaire  où  les 
chanoines  le  prient  de  vouloir  bien  donner  à  leur 
Eglise,  en  souvenir  de  sa  visite,  «  sou  portrait  et 
celui  de  sa  très  digne  épouse  (1).  »  De  lu,  Monsieur  se 

(1)  I^s  portraits  du  C^nilo  cl  do  la  Comtcf^so  de  Provence,  donnés  pnr 
le  Prince  au  Chapttro  do  Sens,  soni  conservés  au  Trésor  de  la  Métropole, 
(N*'  300  cl  301  du  calaloguo.) 


-  93  — 

rend  à  T Archevêché,  y  reçoit  les  corps  civils  et, 
après  avoir  dîné,  il  sort  de  la  ville  par  la  porte  de 
Saint-Antoine,  traverse  l'Esplanade,  au  bruit  de 
1  artillerie,  au  milieu  d'une  double  haie  de  bour- 
geois sous  les  armes,  et  prend  la  route  de  Fontaine- 
bleau (1). 

Pendant  ce  temps  des  complications  survenues  à 
la  dernière  heure  avaient  failli  empêcher  Texposi- 
lion  au  Salon  de  l'œuvre  de  Couslou  et  ajourner 
son  érection  à  Sens.  Seules  l'active  vigilance  du 
Directeur  général  des  Bâtiments  et  sa  volonté  bien 
arrêtée  d'en  finir  purent  les  conjurer. 

L'artiste  avait  dû  confier  à  un  spécialiste  Texécu- 
lion  des  cartouches  et  des  guirlandes  en  bronze 
destinés  au  mausolée.  Quelques  semaines  avant 
louverture  du  Salon,  fixée  au  25  août,  le  bronzier 
déclare  ne  pouvoir  achever  son  travail  avant  deux 
mois.  Il  faut  renoncer  à  exposer  le  monument  in- 
complet. C'est  ce  que  nous  apprend  la  lettre  sui- 
vante (2)  : 

Monsieur  Coustou  s'étoit  flaUé  jusqu'à  ce  moment  que  les 
bronzes  du  Mauzolée  de  feu  Monseigneur  le  Dauphin  se- 
roienl  montés  et  dorés  pour  l'ouverture  du  Salon,  et  que 
ce  monumeot  pourroit  à  cette  époque  être  vu  tel  qu'il  sera 
dans  la  cathédrale  de  Sens.  Mais  le  cizeleur,  qui  n'aura  fini 


1)  Tous  ces  détails  sout  empruntés  aux  Affiches  de  Sens  de  l'époque,  et 
au  registre  des  délibérations  capitulaircs. 

'2)  Arch.  nat.  Ol  1905.  —  Cette  lettre,  sans  date  ni  signature,  est  prolia- 
blement  deCochin.  Elle  est  adressée  au  peintre  Pierre  (Jean-Baptistc-Marie) 
alors  recteur  de  rAcadémie  royale,  et,  à  ce  titre,  chargé  de  l'organisation 
dtt  Salon.  En  marge,  on  lit  la  date,  12  août  1777,  qui  est  celle  de  la  ré- 
ponse, la  lettre  étant  évidemment  antérieure  à  la  mort  de  Coustou. 


—  9i  — 

de  monter  les  bronzes  qac  dans  one  qainzainc  de  jours, 
demande  deux  mois  entiers  poar  les  dorer.  En  conséquence, 
Mr  Coastoa,  qoi  désire  que  cet  ouvrage  ne  soit  exposé  au 
public  que  lorsqu^I  sera  entièrement  fini,  prie  M**  Pierre 
de  faire  retrancher  du  livret  du  Salon  la  note  qui  annonçoit 
que  Ton  pourroit,  pendant  le  temps  qu'il  durera,  voir  le 
Mauzolée  à  lattellier. 
Il  le  prie  d'en  prévenir  Monsieur  le  Directeur  général. 

Bien  plus,  depuis  quelque  temps,  Tétat  de  santé 
de  Guillaume  Coustou  inspirait  les  plus  vives  alar- 
mes. Craignant  de  le  voir  mourir  avant  Touverturc 
du  Salon,  le  roi  Louis  XVI,  désireux  d'honorer,  en 
mémoire  de  son  père  et  de  sa  mère,  Tartiste  qui  ve- 
nait de  sculpter  leur  tombeau,  résolut  de  ne  pas 
attendre  l'Exposition  du  Louvre,  â  la  séance  de 
l'Académie,  du  26  avril,  Pierre,  en  qualité  de  di- 
recteur, annonçait  à  ses  collègues  que  le  Roi  se 
proposait  de  nommer  Coustou,  chevalier  de  l'or- 
dre de  Saint-Michel  (1). 

L'intendant  général  des  Beaux-Arts  d'Angivîllcr 
profita  de  la  visite  de  l'empereur  Joseph  II,  frère 
de  la  Reine,  à  Soufflot,  en  présence  de  Coustou, 
pour  conférer  à  l'éminent  statuaii^,  au  nom  du 
Roi,  cette  haute  distinction (2).  L'artiste  fut  en  môme 

(1)  Les  Coustou,  pnr  lady  Dilkb.  {Gazette  des  Beaux-Arts,  mars  1901, 
p.  213.) 

(2)  Dans  son  compte  rendu  détaillé  du  séjour  de  l'empereur  à  Paris. 
Mcrcy  note,  le  3  mai.  une  visite  à  la  manufacture  des  Gobclins,  et.  plus 
loin,  le  22  mai,  dans  l'énumération  des  présents  distribués  pcr  le  Prince, 
il  cite  «  une  liaguc  de  diamant  entourée  •  donnée  «à  l'inspecteur  des  deux 
manufactures  (des  (iobelins  et  de  la  Savonnerie),  nommé  Soufflot.  »  C'est 
donc  probablement  le  3  mai  que  d'AngIviller  remit  à  Coustou  le  brevet  du 
Roi.  {Marie' Antoinette,  correspondance  de  Marie-Thérèse  et  Mercy^d Argen- 
teau,  par  d'AnNETii  et  Gepproy,  t.  III,  pp.  60  et  71.) 


—  95  — 

temps  autorisé  à  porter  les  insignes  de  Tordre  «  avant 
sa  réception.  »  Il  ne  devait  pas  jouir  longtemps  de 
celte  faveur.  A  la  séance  de  TAcadémie  de  peinture  du 
26  juillet,  le  secrétaire  notifiait  «  la  mort  de  M.  Guil- 
laume Coustou,  chevalier  de  TOrdre  du  Roy,  scul- 
pteur, recteur  et  trésorier  de  cette  Académie,  garde 
de  la  salle  des  Antiques,  décédé  en  cette  ville,  le 
13  de  ce  mois,  i» 

En  annonçant  la  mort  du  grand  artiste,  le  Jour- 
nal de  Paris  (1)  lui  consacre  cet  éloge,  signé  de 
«  Renou,  peintre  du  Roi  et  secrétaire  de  son  Aca- 
démie de  peinture  et  de  sculpture  :  d 

L'Académie  Royale  de  Peinture  et  de  Sculpture  vient  de 
perdre,  dans  M.  Coustou,  Ton  de  ses  plus  grands  scul- 
pteurs. 

...Il  fut  chargé  du  tombeau  de  Monseigneur  le  Dauphin  et 
de  Madame  la  Dauphine.  C'est  dans  ce  morceau,  le  dernier, 
le  plus  beau  et  le  plus  considérable  qui  soit  sorti  de  sa  main, 
et  qui  sera  dans  peu  monté  et  exposé  au  Public,  tel  qu'il 
sera  placé  dans  la  cathédrale  de  Sens,  que  M.  Coustou  s'est 
montré  le  digne  fils  et  l'émule  de  son  père.  J'ose  annoncer 
que  la  Nation  jettera  quelques  fleurs  sur  le  tombeau  de  l'Ar- 
tiste, en  admirant  celui  qu'il  vient  de  finir  pour  le  père  et 
la  mère  de  notre  Auguste  Monarque. 

A  peine  M.  Coustou  a-t-il  eu  mis  la  dernière  main  à  ce  su- 
perbe monument  (2),  à  peine  en  a-t-il  reçu  la  récompense 


(1)  Abrégé  da  Journal  de  Paris,  t.  II,  p.  1065-6. 

(2)  Ainsi  que  le  remarque  lady  Dilke  fop.  cit..  Gazette  des  B.-ÀrtaJ,  ces  af~ 
fiimaUons  très  nettes  des  contemporains  annulent  entièrement  la  suppo- 
sition faite  par  M.  Tarbé  {Vie  et  Œuvres  dePigalle,  p.  152),  d'après  laquelle 
Pif;alle  aurait  achevé  le  mausolée  de  Sens,  comme  il  avait  fait  quand  Bou- 
chardon  mourut  laissant  ébauchée  sa  statue  équestre  de  I^ouis  XV. 

Que  Coustou  ait  eu  recours  à  l'aide  d'un  ou  plusieurs  de  ses  élèves  pour 
]>xécalion  d'une  œuvre  aussi  compliquée,  la  chose  est  vraisemblable.  Mais 


—  90  — 

honorable  par  le  cordon  de  Saint-Michel,  qui  lui  a  été  donné, 
au  nom  du  Roi,  par  M.  d'Ângiviller,  en  présence  de  M.  le 
comte  de  Falkenstcin  (1),  qu'il  a  terminé  sa  carrière,  dans 
la  soixante-unième  année  de  son  âge.  » 

Malgré  toutes  ces  traverses,  le  mausolée  figura  au 
Salon  (2).  Une  lettre  de  d'Angiviller,  du  12  août, 
nous  apprend  qu'il  y  fut  exposé,  bien  que  les  tro- 
phées de  bronze  n'eussent  pas  encore  reçu  leur  do- 
rure. Dans  cette  lettre,  le  Directeur  général  exprime 
à  nouveau  sa  volonté  de  voir  le  tombeau  en  place 
avant  la  fin  de  Tannée  :  a  II  n'y  a  qu'à  se  hâter  pour 
les  ouvriers,  écrit-il,  et  y  en  mettre  plusieurs  (3).  » 

Voici  le  Mémoire  officiel  soumis  au  Directeur  gé- 
néral des  Bâtiments  à  l'achèvement  du  monument  : 

Mémoire  du  Mausolée  de  feu  Monseigneur  le  Dauphin  et 
de  Madame  la  Dauphine,  exécuté  pour  le  service  du  Roy 
sous  les  ordres  de  Monsieur  le  marquis  de  Marigny  et  ceux 
de  Monsieur  le  comte  d*Angiviller,  directeur  et  ordonnateur 
général  des  BuUments  de  S.  M.;  ledit  ouvrage  commencé  en 


nous  n'avons  pu  trouver  aucune  preuve  de  rnflirmation  de  quelques  his- 
toriens dont  M.  de  Monlaiglon  s'est  fait  l'éclio  :  c  L'œuvre  n'est  pas  toute 
entière  de  la  main  de  (Houston  ;  on  a  dit  que  l'une  des  deux  flgures  d'hom- 
mes, au  moins  celle  du  Temps,  est  entièrement  exécutée  par  l'habllo  scul- 
pteur Pierre  Julien,  élève  de  Coustou  et  le  collaborateur  de  ses  travaux, 
avant  comme  après  son  voyage  de  ]\ome,  où  il  a  été  de  1768  à  1772.  »  /Anti- 
qnttés  et  Curiosités  de  la  ville  lit  Sens,  p.  74,  dans  la  Gazette  des  lieaux^Art*, 
1880.) 

(1)  L'empereur  Joseph  IL 

(2)  En  annonçant  cette  exposition,  le  Journal  de  Paris  informait  ses  lec- 
teurs qu'elle  occupait,  cette  année,  outre  le  salon  du  Louvre,  la  cour  et  le 
jardin  de  l'Infante  et  se  répandait  même  plus  loin.  «  On  voit  dans  l'atelier 
de  feu  M.  Coustou,  nouvelle  place  du  Louvre,  le  mausolée  de  feu  M»'  le  Dau- 
phin et  M*  Itt  Dauphine...  » 

(3)  GvippnRY,  ExiHKitions  du  XVUt  siècle,  cité  par  lady  DUke,  op,  cit., 
p.  214. 


iOdiji  AftCMéOLOCiqpB  DB   SINS. 


T.   XXn,  PL.  XI,  p.  96. 


LE    MAUSOLÉE 
Le  Tempi,  l'Amour  conjugal  et  te  Génie  de  t'Jiymen 


—  97  — 

1766  et  fini  en  1777  et  devant  être  posé  dans  le  chœur  de  la 
cathédrale  de  Sens,  par  Guillaume  Coustou.  Sçavoir  un  so- 
cle de  marbre  blanc  veiné,  entouré  d  une  bande  de  marbre 
verd  de  mer,  d*un  pied  de  largeur,  ledit  socle  portant  vingt 
et  un  pouces  de  haut.  Sur  ce  socle  s'élève  un  piédestal 
qiiarré  de  cinq  pieds  de  haut  sur  deux  pieds  neuf  pouces  de 
large,  revêtu  de  marbre  verd,  avec  deux  tables  d'inscrip- 
tions de  marbre  blanc  gravées  en  lettres  dorées,*  ledit  pié- 
destal orné  sur  toutes  ses  moulures  de  bronzes  dorés  et  de 
guirlandes  aussi  de  bronze  doré  autour  des  inscriptions; 
au-dessous  desquelles  sont  les  cartels  des  armes  du  Prince 
et  de  la  Princesse,  aussi  de  bronze  doré,  accompagnés  de 
branches  de  cyprès.  Sur  ce  piédestal  sont  posées  deux  urnes 
de  granit  verd,  ornées  aussi  de  bronzes  dorés,  et  liées  en- 
semble par  une  guirlande  de  la  fleur  nommée  immortelle. 
Sur  le  socle  du  côté  qui  fait  face  à  l'autel,  s'élève  un  groupe 
composé  de  deux  figures  de  marbre  blanc,  et  d'un  enfant  qui 
est  à  leurs  pieds.  Ces  deux  figures  représentent  V Immortalité 
occupée  à  faire  un  faisceau  des  attributs  symboliques  des  ver- 
tus de  Monseigneur  le  Dauphin,  et  la  Religion  posant  une  cou- 
ronne d'étoiles  sur  les  urnes.  Aux  pieds  de  ces  deux  figures 
est  le  Génie  des  sciences  et  des  arts,  appuyé  sur  un  globe 
teirestre  qu'il  mesure  (1).  Sur  le  côté  du  socle  qui  fait  face 
à  la  nef,  est  un  autre  groupe  aussi  de  deux  figures  de  mar- 
bre blanc  et  d'un  enfant.  Ces  deux  figures  représentent. 
Tune  le  Tems  armé  de  sa  faulx,  foulant  aux  pieds  des  monu- 
ments qu*il  a  détruits  et  tenant  un  voile  funéraire  qu'il  pose 
sur  les  urnes,  l'autre  V Amour  conjugal  tenant  un  flambeau 
éteint,  et  regardant  avec  douleur  un  enfant  qui  vient  de 
briser  une  chaîne  entourée  de  fleurs,  symbole  de  l'hymen. 


(1)  Théodore  Tarbé,  dans  une  note  manuscrite  que  nous  possédons,  re- 
marque que  sur  le  globe  terrestre  c  on  n  tracé  les  routes  qu'ont  suivies  les 
savants  vo^'ageurs  du  xviir  siècle,  afin  de  perpétuer  l'époque  de  leurs  dé- 
couvertes. Cest  dans  la  même  vue,  ajoute-t-il.  qu'on  indique  une  partie 
du  plan  de  Téglise  Saiote-Geneviéve  (le  Panthéon)  comme  le  monument  le 
plus  remarquable  de  cette  époque,  t 

7 


—  98  — 

Tous  lesquels  ouvrages,  suivant  le  marché  proposé  à  M.  le 
marquis  de  Marigiiy  et  par  lui  approuvé  et  accepte  suivant 
sa  lettre  du  23  novembre  1766,  montent,  non  compris  la 
fourniture  des  marbres,  la  façon  des  caisses  et  le  transport 
à  Sens,  expressément  réservés  par  le  marché  pour  être  à  la 
charge  de  S.  M.,  à  la  somme  de  150000  livres.  Plus  il  a  été 
fourny  par  le  sieur  Coustou,  pour  les  urnes,'un  bloc  de  gra- 
nit verd  par  lui  payé  au  nommé  Argou,  marbrier  à  Greno- 
ble, la  somme  de  900  livres.  Plus  deux  tables  d*inscriptions 
de  marbre  blanc,  fournies  par  M.  Bocciardi,  de  deux  pieds 
huit  pouces  cubes  à  40  livres.  Total  :  151006  livres  13  sous 
4  deniers. 

Je  soussigné,  premier  peintre  du  Roy,  certifie  à  Monsieur 
le  Comte  d'Angiviller,  directeur  et  ordonnateur  général  des 
Bâtiments,  que  les  ouvrages  mentionnés  au  présent  Mémoire 
ont  été  faits,  approuvés  et  livrés.  A  Paris,  le  10  août  1778. 
(Signé  :)  Pierre.  (Archives  nation.,  01  1931.) 

Dès  les  premiers  jours  de  septembre,  la  recon- 
struction du  caveau,  à  Sens,  était  achevée.  Le  9  eut 
lieu  Tinhumation  avec  un  cérémonial  identique  à 
celui  de  Texhumation.  L'Archevêque,  après  un  ser- 
vice célébré  par  le  Chapitre,  en  présence  de  tous 
les  corps  ecclésiastiques  et  laïcs,  se  rendit,  revêtu 
des  habits  pontiflcaux,  à  la  chapelle  de  Sainte-Co- 
lombe. Après  les  prières  de  la  levée  du  corps,  les 
cercueils  furent  transportés  au  chœur  par  un  dé- 
tachement des  Dragons  de  la  Reine  et  descendus 
dans  le  nouveau  caveau.  La  cérémonie  achevée,  le 
Cardinal  de  Luynes  prononça  un  discours  sur  la 
fragilité  des  grandeurs  humaines  et  les  vertus  émi- 
nentes  des  princes  défunts  (1). 

(1.1  Affiche»  de  Sent. 


—  99  — 

Le  21  septembre,  d'Aiigiviller  écrivait  de  Versail- 
les au  Cardinal  : 

Monseigneur, 
J'ai  reçu  la  lettre  dont  Votre  Eminence  ni*a  honoré  pour 
mlnformer  de  h\  remise  qu'elle  a  pris  la  peine  de  faire  opé- 
rer, le  9  de  ce  mois,  des  corps  de  M.  le  Dauphin  et  de  Madame 
la  Dauphine  dans  le  caveau  destiné  pour  les  recevoir.  Il  ne 
me  reste  désormais  qu'à  m'occuper  des  moyens  les  plus 
prompts  de  rétablir  Messieurs  du  Chapitre  dans  l'usage  libre 
de  leur  chœur.  Je  fais  surveiller  chaque  jour  les  ouvriers 
qui  préparent  le  carelage  accordé  par  le  Roi.  Le  Mausolée 
exposé  depuis  prés  d'un  mois  à  la  curiosilc  publique,  va  être 
désassemblé  pour  être  transporté  et  rendu  le  plus  tôt  possi- 
ble à  Sens  :  en  un  mot,  Votre  Eminence  et  Messieurs  du 
Chapitre  peuvent  compter  que  je  ne  laisserai  négliger  aucun 
des  soins  qui  peuvent  émaner  de  mon  département  pour 
hâter  la  conclusion  de  tous  les  arrangements  relatifs  au  mo- 
nument qu'il  s'agit  d'ériger. 

Je  suis  avec  respect... 

D'Angiviller  (1). 

Cette  lettre  nous  l'apprend,  on  profita  de  la  pose 
du  monument  au  milieu  du  chœur  pour  en  renou- 
veler tout  le  dallage  aux  frais  du  Roi.  Un  docu- 

(1)  Archives  de  rVonne,  dépôt  de  Sens,  G  135,  n*  112.  Une  lettre  d*AmeIot 
au  Cardinal  {ibid.,  n*  113)  expose  que  le  Cardinal  a  réclame  6000  livres 
restant  dues  pour  les  dépenses  relatives  au  dépôt  des  corps,  se  rcpar- 
tissant  en  4-101  livres  pour  les  objets  devant  être  acquittés  par  les  Menus  et 
1399  li%'res  pour  les  autres  frais.  Le  Ministre  prie  l'Archevêque  de  lui  faire 
connaître  si  les  2400  livres  ordonnées  le  24  juin  précédent  (pour l'extraction 
des  corps)  doivent  être  imputées  comme  acompte  sur  ces  6000  livres  ou  si 
elles  concernent  des  dépenses  diflerenles. 

Une  nouvelle  lettre  du  Ministre,  du  8  octobre  (ibid.,  n*  114),  informe  le 
prélat  qu'il  va  remettre  à  M.  Nec^er  une  ordonnance  de  1 590  livres  pour  le 
rrstant  des  dépenses.  Son  Eminence  voudra  bien  la  faire  retirer  comme 
elle  a  fiiit  pour  les  2400  livres  déjà  acquittées.  Quant  aux  4401  n,  elles  sont 
ordonnancées  au  nom  du  trésorier  des  Menus,  qui  en  fera  le  recouvre- 
ment 


—  100  - 

ment  des  Archives  nationales  (1),  intitulé  :  «  Mémoire 
des  ouvrages  faits  à  la  cathédrale  de  Sens,  suivant 
les  ordres  de  M.  le  comte  d'Angiviller,  sous  la  con- 
duite de  M.  Soufflot,  architecte  du  Roi,  et  de  M.  de 
Bourge,  inspecteur  du  château  de  Fontainebleau, 
par  Dropsy,  sculpteur  marbrier  du  Roi,  note  que 
les  inscriptions  gravées  sur  ce  dallage  de  marbre 
furent  exécutées  en  1777.  Chaque  lettre,  d'un  pouce 
et  demi  de  proportion,  était  payée  à  raison  de  4  sols 
Tune  et  la  dépense  totale  s*éleva  à  8946  livres  3  sous 
8  deniers  (2).  i> 

<  On  ne  commença  à  poser  le  mausolée  que  le  15 
novembre;  cet  ouvrage  ne  fut  entièrement  fini  que  le  25 
décembre  1777.  Ensuite  on  carrela  le  sanctuaire  (3),  le 
chœur,  les  marches  du  sanctuaire  et  celles  du  chœur,  en 
marbre,  aux  frais  du  Roy.  Le  clergé  de  TEglise  de  Sens 
chanta  Tofllce  dans  la  nef,  depuis  le  10  septembre  1777 
jusqu'au  22  novembre  de  ladite  année  et,  à  cause  du  froid, 
on  alla  chanter  l'office  dans  le  bas-côté  du  chœur,  qui  est 
du  côté  de  la  salle  du  Chapitre,  jusqu'au  samedi  inclusive- 
ment de  la  Passion.  Ln  chapelle  de  Sainte -Colombe  tenait 
lieu  de  sanctuaire  et  aucun  des  membres  du  clergé  n'y 
allait  prendre  séance;  le  sous-diacre  venoit  chanter  TEpitre 
au  bas  des  degrés  de  ladite  chapelle,  et  le  diacre,  l'Evangile. 
On  mit  des  tapis  vis-à-vis  des  grilles  du  sanctuaire  du  côté 
du  tombeau  de  MM.  du  Perron  (4).  » 

(1)  01, 1903. 

(2)  QuEsvEHS  ET  Stein.  ïtiscripUons  de  l'ancien  diocèse,  1. 1.,  p.  331. 

(3)  C'csl  une  erreur,  le  dnllage  du  sanctuaire  ftit  fait  en  1744,  après  l'érec- 
lion  du  maltre-autcl  de  Servandonl  et  lors  de  la  construction  de  la  crypte 
des  nrchevdque.3.  (Voir  Quantin.  Notice  hist.  sur  la  construction  de  la  cathé- 
drale de  Sens,  p.  47.) 

(4)  Fragments  d'un  monuscrit  anonyme,  mais  certainement  l'œuvre  d'un 
ecclésiastique  de  Sons  de  la  lin  du  xvin*  siècle,  publiés  par  M.  le  chanoine 
Gttlly,  Annuaire  de  l'Yonne,  1888,  p.  55. 


—  101  — 

Comme  toute  œuvre  de  valeur,  le  monument  de 
Coustou  fut  Tobjet  d'éloges  enthousiastes  et  de  cri- 
tiques passionnées.  Pour  l'apprécier  sainement,  il 
importe  avant  tout  de  faire  abstraction  du  symbo- 
lisme païen  qui  choque  nos  idées  actuelles,  mais 
qui  était  une  loi  absolue  du  goût  du  xvni^  siè- 
cle. Sur  ce  point,  du  reste,  si  l'on  se  souvient  des 
conceptions  de  Diderot,  on  conviendra  que  l'artiste 
a  apporté  dans  sa  composition  autant  de  réserve 
que  le  permettaient  les  exigences  de  ses  contempo- 
rains. 

Parmi  les  critiques  qui  lui  furent  adressées,  l'une 
des  plus  retentissantes  fut  celle  de  Bernardin 
de  Saint-Pierre.  «  La  première  chose  que  je  cher- 
chai à  y  reconnaître  fut  la  ressemblance  du  Dauphin 
et  de  la  Dauphine...,  il  n'y  en  avait  pas  seulement 
les  médaillons.  On  y  voit  le  Temps  avec  sa  faux, 
THymen  avec  des  urnes  et  toutes  les  idées  rebattues 
de  rallégoriequi  est  souvent,  pour  le  dire  en  passant, 
le  génie  de  ceux  qui  n'en  ont  pas.  » 

De  ce  jugement  sévère,  il  suffit  de  rapprocher  ce 
qu'écrivait  Cochin  à  Diderot  :  «  Il  craint  que  le 
mauvais  goût,  aidé  de  la  flatterie,  ne  demande  que 
ces  figures  soient  ressemblantes,  ce  qui  rendrait  le 
monument  plat  et  maussade  (1),  "»  pour  sentir  com- 
bien, pour  Coustou  lui-même,  il  était  difficile  de 
«r  contenter  tout  le  monde,  i) 

Citons  seulement  quelques-uns  des  jugements, 
parmi  les  plus  autorisés,  portés  sur  celte  œuvre. 

(1)  Œiwres  de  Diderot,  t.  XIX.  p.  223. 


—  102  - 

Cest  d*abord  celui  d'un  contemporain  et  d*un 
émule  de  Coustou.  Dans  une  pièce  manuscrite,  inti- 
tulée :  Réflexions  sur  le  monument  de  feu  Monseigneur 
le  Dauphin,  exécuté  par  M,  Coustou  (1),  le  sculpteur 
Etienne  Gois,  professeur  de  TÂcadémie  de  peinture 
et  sculpture,  déclare,  en  parlant  des  œuvres  de  son 
collègue  : 

«  On  y  trouve  toujours  la  correction  et  souvent  la 
fermeté  et  la  grâce,  heureusement  liées  ensemble; 
mais  c'est  surtout  dans  sa  belle  composition  du  Mau- 
solée de  Monseigneur  le  Dauphin  qu'il  a  déployé 
toutes  les  ressources  de  son  génie  et  de  son  talent. 
Ce  monument,  fait  pour  honorer  le  siècle  qui  l'a 
produit,  offre  les  beautés  de  Tantique  (2)  et  semble 
de  plus  respirer  un  sentiment  que  l'on  ne  trouve 
peut-être  pas  toujours,  même  dans  les  chefs-d'œuvre 
des  anciens.  ^ 

Un  siècle  plus  tard,  un  de  nos  critiques  d'art  les 
plus  écoutés,  M.  de  Montaiglon,  traduisait  ainsi  son 
impression  :  a  Le  tout  est  de  l'exécution  la  plus  dé- 
licate et  d'une  fraîcheur  de  conservation  très  remar- 
quable; mais  l'effet  est  un  peu  confus  et  d'un  as- 
pect mollasse  et  afTadi,  surtout  dans  les  plis  des  vê- 
tements. Etant  donné  le  goût  qui,  sans  rien  de 
mâle  ni  de  funéraire,  est  plutôt  féminisé,  rien  de 
plus  doux,  de  plus  blond,  de  plus  jeune,  déplus  en 

(!)  Ribliothéquc  nationale.  Cabinet  des  Estampes,  tome  40  de  la  collec- 
tion Dcloynos. 

(2)  «  Coustou,  i;ardc  de  lu  «  Salle  des  Antiques  du  Hoi,  »  semble  avoir  été 
inspiré  ici  (dans  sa  statue  de  Vlfifitien)  por  quelque  réminiscence  de  rAnti> 
nous,  purifiée  par  un  très  délicat  instinct  dans  l'expression  d'une  tristesse 
qui  est  empreinte  ici  d'une  exquise  sérénité.  »  {ÏMtly  Dilki:,  op.cit.,  p.  2U.) 


—  103  — 

fleur,  de  plus  caressé,  que  Texécution  brillante  et 
polie  de  toutes  ces  chairs  parfumées,  et  les  têtes 
des  deux  femmes  sont  en  particulier  tout  à  fait  fines 
et  charmantes  (1).  i> 

En  résumé,  quelles  que  soient  les  critiques  de 
détail,  le  tombeau  du  Dauphin  est  bien  le  chef- 
d'œuvre  d'un  des  meilleurs  statuaires  français,  et 
non  sans  fierté,  nous  transcrivons  ici  cette  affirma- 
tion du  biographe  de  Coustou  :  «  La  cathédrale  de 
Sens  lui  doit  de  posséder  l'un  des  plus  beaux  mo- 
numents funéraires  qui  soient  (2).  -ù 

1.1)  Antiquités  et  Curiosités  de  Sens,  p.  74. 
(2)  Lady  Dilke.  op.  cit.,  p.  207. 


CHAPITRE  Vil 


LES    ANNIVERSAIRES 


Ce  n'était  pas  assez  pour  Louis  XV,  très  impres- 
sionné par  le  mort  de  son  fils,  de  lui  ériger  un  mo- 
nument; il  avait  à  cœur  de  lui  assurer  à  perpé- 
tuité les  prières  de  l'Eglise.  Son  intention  était  de 
faire,  à  Sens,  pour  le  DaupUin,  les  mêmes  fonda- 
tions qu'il  avait  établies  à  Saint-Denis  pour  ses  filles 
Anne -Henriette  et  la  duchesse  de  Parme  Louise- 
Elisabeth  (1).  Ainsi  le  déclarent  ses  lettres-patentes 


(1)  Os  princesses  jumelles  étnienl  les  ninées  <les  cnfnnts  de  I^uis  XV. 
Nées  le  2C  noûl  1727,  elles  moururent,  la  première,  en  1752;  la  deuxième, 
qui  avait  épousé,  en  1730,  Philippe  de  Bourbon,  duc  de  Parme,  le  6  dé- 
cembre 175t?. 


—  105  — 

du  25  juillet  1766  à  l'évêque  d'Orléans,  Louis  Sex- 
tius  de  Jarente,  et  à  Jean-Nicolas  de  Boullongne, 
intendant  des  finances,  ses  fondés  de  pouvoirs. 

En  conséquence,  le  12  juin  1767,  Tévéque  d'Or- 
léans, chargé  de  la  feuille  des  bénéfices  et  de  la  di- 
rection génémle  des  Economats,  et  Jean-Nicolas 
de  Boullongne,  chevalier,  baron  de  Marigny-le- 
Cbâtel,  seigneur  de  Montereau-fault-Yonne  et  au- 
tres lieux,  conseiller  d'Etat  et  intendant  des  finan- 
ces, au  nom  du  Roi,  et  MM.  François -Eustache 
Lesloré,  prêtre -chanoine  de  TEglise  primatiale  et 
métropolitaine  de  Sens,  aumônier  ordinaire  de 
S.  A.  R.  le  duc  d'Orléans,  demeurant  à  Paris,  rue 
Saint-Dominique,  et  Marc-Antoine  Sallot  Dupey- 
roux,  prêtre-chanoine  de  la  même  Eglise,  demeu- 
rant également  à  Paris,  même  rue,  en  l'hôtel  du 
cardinal  de  Luynes,  au  nom  du  Chapitre  de  Sens 
et  de  fassentiment  du  Cardinal-Archevêque,  pas- 
saient, devant  M"  le  Pot  d'Auteuil  et  Goullet,  no- 
taires au  Châtelet,  un  contrat  aux  termes  duquel  un 
service  solennel,  à  l'intention  et  pour  le  repos  de 
Vàme  de  Mu»"  Louis,  Dauphin  de  France,  était 
fondé  dans  l'Eglise  de  Sens,  pour  le  19  décembre 
de  chaque  année,  à  perpétuité  (1). 

Ce  contrat  stipule  que,  la  veille,  le  Chapitre 
chantera  solennellement  vêpres  et  matines  des 
Morts  ;  que  la  messe  sera  célébrée  par  l'archevêque 
ou,  en  son  absence,  par  le  doyen  ou  le  délégué  du 
Chapitre,  avec  trois  diacres  et  Irois  sous-diacres,  le 
préchantre,  assisté  de  deux  choristes,  deux  acoly- 

1)  Archives  de  l'Yonne,  dépôt  de  Sens,  G  135,  n*  88. 


—  106  — 

tes  et  âeux  thuriféraires;  que,  après  la  messe,  l'ab- 
soute aura  lieu  à  la  représentation  dressée  au  mi- 
lieu du  chœur.  I^  luminaire  comportera  douze 
cierges  à  l'autel,  autant  à  la  représentation,  un  à  la 
lampe,  deux  pour  les  acolytes  et  quatre  pour  les 
flambeaux  de  l'élévation.  Toutes  les  cloches  seront 
sonnées  la  veille,  à  midi  et  le  soir;  le  jour  du  ser- 
vice à  6  heures  du  matin,  indépendamment  des  vo- 
lées pour  Tannoncc  de  chacun  des  offices,  ainsi 
que  pendant  la  Prose  et  le  Libéra  (1).  Pour  subve- 
nir aux  frais  de  ces  offices,  le  Roi  fait  don  au  Cha- 
pitre d'une  rente  perpétuelle  de  mille  livres. 
Moyennant  quoi,  le  Chapitre  sera  tenu  de  fournir 
tout  ce  qui  sera  nécessaire,  comme  d'entretenir  et 
renouveler  au  besoin  de  ses  deniers  les  ornements 
fournis  par  la  Couronne  pour  la  première  fois,  no- 
tamment le  poêle  noir,  avec  le  dais  aux  armes  de 
M9r  le  Dauphin  (2). 

(1)  Le  Cérémonial  de  l'Eglise  de  Sens,  publié  en  1789  pur  le  cardinal 
DE  Li'TNBS.  consacre  un  chnpiire  spi^cin)  (p.  603-696)  aux  cërêmoilles  obser- 
vées aux  anniversoires  du  Dauphin  et  delà  Dnuphine. 

(2)  Un  inventaire  fait  en  1776  décrit  ainsi  les  ornements  qui  servaient 
aux  anniversaires  du  Douphin  et  de  la  Dauphine  : 

Item  quatre  pentes  de  velours  noir  liordées  d*un  galon  d'argent  et  do 
franges  aussi  d'argent  de  la  hauteur  de  3  |)ouces,  enrichies  des  écussons 
brodés  en  or  oux  armes  de  feu  M.  le  Dauphin,  servant  au  dais  que  l'on  met 
à  la  représentation  le  jour  de  son  obit; 

Item  quatre  autres  pentes  aussi  de  velours  noir,  bordées  d'un  Xnrgc  ga- 
lon d'argent  et  d'une  frange  haute  de  cinq  pouces  aussi  d'nrgenl.  enri- 
chies des  écussons  brodés  en  or  aux  armes  de  feue  Madame  la  Dauphine, 
servontA  sonoliit; 

Item  un  ciel  de  dais  de  velours  noir  tout  uni,  monté  sur  châssis; 

Item  un  devant  d'autel  de  velours  noir,  croix  et  montonts  de  moire  d'ar- 
gent, garni  d'un  galon  d'argent  avec  les  écussons  aux  armes  de  Monsei- 
gneur le  Pnuphin,  semblables  à  ceux  du  dais; 

l'n  réiuble  d'autel  de  velours  noir  dont  les  montants  et  In  croix  sont  de 


—  107  - 

Après  la  mort  de  la  Dauphine,  le  Roi,  par  lellres- 
patentes  du  25  janvier  1768,  ordonna  la  fondation 
d'un  service  semblable  à  celui  du  Dauphin,  qui  se- 
rait célébré,  chaque  année,  le  13  mars.  Le  contrat 
en  fut  passé,  dans  des  conditions  identiques  et  par 
les  mêmes  délégués  du  Roi  et  du  Chapitre,  le 
5  mai  1768,  devant  M~  le  Pot  d'Auteuil  et  Goulet, 
notaires  à  Paris  (1). 

Le  Chapitre  n'avait  pas  attendu  le  contrat  de  fon- 
dation pour  célébrer  les  anniversaires.  Le  19  dé- 
cembre 1766,  il  avait  fait  un  service  pour  le  Dau- 


moire  d'argent  ;  ledit  retable  enrichi  de  quatre  écussons  magnifiquement 
brodés  en  or  aux  armes  de  feu  M*'  le  Daupliin  ; 

llem  neuf  chapes  de  velours  noir,  orfroy  et  chaperon  de  moire  d'ar- 
gent; à  chacune  un  petit  écusson  brodé  en  or  aux  armes  comme  dessus, 
dont  une  doublée  de  taffetas.  Galon  d'argent. 

Item  une  chasuble  aussi  de  velours  noir,  avec  ses  elole,  manipule,  voile 
et  bourse,  pareille  aux  chapes  cy-dessus.  enrichie  de  deux  petits  écussons 
brodés  comme  dessus. 

Item  six  tuniques  pareilles  aux  ornemens  cy-dessus,  avec  leurs  collets, 
dont  deux  seulement  ont  leurs  étolc  et  manipule. 

(1)  Archives  de  l'Yonne,  dépôt  de  2'ens.  G  135,  n*  93.  La  Jouissance  de  la 
rente,  pour  la  fondation  du  Dauphin,  devait  partir  du  1"  Juillet  1766.  Une 
erreur  aj-ant  été  commise  par  Tadministralion  des  finances,  qui  avait  payé 
l'année  1766  entière,  le  chambrier  du  Chapitre  dut  rendre  500  livres  aux 
intendants  des  finances. 

1^  même  erreur  se  reproduisit  pour  la  fondation  de  l'anniversaire  de  la 
Dauphlne.  1^  chanoine  chambrier.  Jean-François  Lebeau.  a  écrit,  à  ce 
sujet,  en  mai^e  de  son  Journal  de  Receptes  :  «  M.  Lestoré  devoit  rendre  pa- 
reille M>mme  sur  celuy  de  M"*  la  Dauphine.  Le  Roy  a  consenti  que  ces 
:i«  livres  fussent  employées  à  faire  peindre  le  prince  et  la  princesse  pour 
les  placer  dans  notre  Chapitre.  » 

Xai  retrouvé,  en  effet,  une  quittance  de  la  somme  de  493  livres  4  sols  6  de- 
niers, donnée,  le  lô  avril  1768.  à  M.  Lestoré,  fondé  de  procuration  du  Cha- 
pitre, par  M.  Savaicte  de  Magnanville,  garde  du  trésor,  pour  restitution  de 
leieédent  des  fonds  faits  pour  la  fondation. 

tn  billet,  joint  à  cette  quittance,  est  ainsi  libellé  :  «  Je  reconnois  avoir 
reçu  de  Monsieur  Tabbé  I^estoré  la  somme  de  cinq  cents  livres  pour  les 


—  108  — 

phin.  Dès  lors,  chaque  année,  les  cén'monies  funè- 
bres seront  accomplies  fidèlement. 

Notons-en  seulement,  d*après  les  registres  capi- 
tulaires,  la  date  et  les  particularités  : 

1767.  —  20  décembre,  anniversaire  du  Dauphin. 
Le  cardinal  officie.  Oraison  funèbre  par  le  Père  Eli- 
zée,  carme  (1). 

1768.  —  Samedi  12  mars,  premier  anniversaire 
de  la  Dauphine.  Les  corps  laies  sont  invités. 

Lundi  19  décembre,  service  pour  le  Dauphin.  I^ 
doyen  officie  en  Tabsence  du  Cardinal. 

1769.  —  Lundi  13  mars,  service  de  la  Dau- 
phine (2). 

Mardi  19  décembre,  semce  du  Dauphin. 

1770.  —  Lundi  12  mars,  service  de  la  Dauphine. 
Le  doyen  officie.  —  Mercredi  19  décembre,  service 
du  Dauphin;  officiant,  le  Cardinal. 

portraits  que  J'ay  fait  <le  Monseigneur  le  Dauphin  et  de  M"  la  Dauphine 
pour  le  Chapitre  de  Sens.  A  f^ris,  le  29JuiUet  1774.  Fbbdou.  » 

Os  deux  portraits  sont  conservés  au  trésor  de  la  Métropole  (n**  2SS,  299  du 
catalogue).  Sur  le  cartouclie  surmontant  le  cadre  ovale,  on  lit  :  Donné  par 
le  roi  Lotii»  XV  au  Chapitre  de  Senn,  en  1775.  Et  derrière  la  toile,  une  inscrip- 
tion terminée  par  ces  mots  :  Fkikt  paii  Fredou. 

(les  deux  portraits  ne  sont  vraisemblablement  que  des  copies  exécutées 
par  Fredou.  Nous  n'avons  pu  retrouver  l'original  du  portrait  du  Dauphin. 
Pour  celui  dn  la  Dauphine.  il  reproduit  exactement  un  portrait  conservé 
A  la  préfecture  d'Agcn,  provenant  du  chAteau  d'Aiguillon  et  attribue  à 
Nattier.  (Voir  Marie.-Josèphe  de  Saxe  et  seg  peintres,  par  G.  Stryienski.  (Ga- 
zette dei  Beaux'Artn,  septembre  1902,  p.  230.) 

(1)  Alnmnach  de  Sens  pour  1768,  p.  87. 

(2)  Domini  stntuerunl  adofncium  divinum  solemnisanniversarii  D.  Del- 
phlnac  quod  die  luna'  proximo*  celebrabunt,  stalim  post  Laudes,  Primnni 
dicprc,  Tertinm  liorA  8  1/2,  postea  Sextnm,  Nonam  et  Missam  chori.  Deci- 
m  A  horA  ca  m  panas  ad  capitulum  vocare  ad  exordiendas  commendat  in- 
nés deciniA  horA  cum  mcdiA;  dein  Missi'i  decantatA  et  Libero.  Vesperas 
dicerc;  in  futuruni  idem  licri.  (Heg.  capilulaire.  Arch.  de  l'Yonne.  G  681.) 


-  109  — 

1771.  —  Mardi  12  mars.  Orficiant,  le  doyen. 
Jeudi  19  décembre.  Officiant,  le  Cardinal. 

1772.  —  Vendredi  13  mars  et  samedi  19  décem- 
bre. Officiant,  le  Cardinal. 

1773.  — Vendredi  12  mars.  Officiant,  le  doyen. 

Lundi  20  décembre.  Officiant,  le  Cardinal;  assis- 
tants :  comte  du  Muy,  marquis  de  Rochechouart, 
comtes  de  Tavannes,  de  Talleyrand  et  du  Roure, 
menins  du  Dauphin,  et  marquise  de  Rochechouart. 
^Affiches  de  Sens,  1773,  p.  110.) 

1774.  —  12  mars.  Officiant,  M.  de  Bullioud, 
doyen. 

20  décembre.  (Cette  date  a  été  autorisée  spécia- 
lement par  le  Roi  sur  le  désir  du  comte  du  Muy, 
devenu  ministre  de  la  guerre.)  Ofliciant,  M.  de  Bul- 
lioud, doyen,  le  Cardinal  étant  à  Rome. 

Assistants  :  le  prince  Xavier,  comte  de  Lusace, 
frère  de  la  Dauphine;  comte  du  Muy,  ministre  de 
la  guerre;  vicomte  de  Choiseul,  comte  du  Chate- 
lel,  marquis  de  Tavannes,  comtes  de  Talleyrand, 
du  Roure  et  de  Choiseul,  ex-menins  du  Dauphin. 

Le  duc  de  Luynes,  colonel  du  régiment  de  dra- 
gons, en  garnison  à  Joigny  et  Villeneuve-le-Roi, 
lequel  régiment  est  venu  à  Sens  pour  la  circon- 
stance et  fut  passé  en  revue  par  le  ministre  de  la 
guerre,  comte  du  Muy,  avant  le  service.  (Affiches  de 
Sens  du  25  décembre  1774.) 

1775.  —  13  mars.  Officiant,  M.  de  Bullioud,  doyen. 

19  décembre.  Officiant,  le  Cardinal.  Assistants  : 
comte  du  Chatelet,  marquis  de  Rochechouart, 
duc  de  Montmorency;  comte  de  Choiseul,  vicomte 


—  110  — 

de  Choiseul,  et  les  comtes  du  Roure  et  de  Talley- 
rand,  menins  du  Dauphin.  Un  détachement  du  ré- 
giment Mestre  de  camp  Royal-Dragons,  fait  la  haie. 

1776.  —  12  mars.  Service  de  la  Dauphine. 

19  décembre.  Officiant,  le  Cardinal.  Assistants  : 
comte  du  Chatelet,  duc  de  Montmorency  et  comte 
de  Talleyrand,  menins.  L'escadron  du  régiment  de 
la  Reine-Dragons  fait  la  haie. 

1777.  —  12  mars.  Assiste  un  détachement  du  ré- 
giment de  la  Reine-Dragons. 

19  décembre.  Officiant,  le  Cardinal.  Assistants  : 
duc  du  Chatelet,  duc  de  Montmorency  et  comte  de 
Talleyrand,  menins. 

1778.  —  12  mars.  Service  de  la  Dauphine. 

19  décembre.  Officiant,  M.  de  Champbertrand, 
doyen.  Assistants  :  duc  du  Chatelet  et  comte  de 
Talleyrand,  menins. 

1779.  —  12  mars.  Officiant,  M.  de  Champber- 
trand, doyen. 

20  décembre.  Officiant,  M.  de  Champbertrand, 
doyen.  Assistants  :  dut:  de  Chatelet  et  comte  de 
Talleyrand. 

1780.  —  19  décembre,  service  du  Dauphin.  Offi- 
ciant, le  Cardinal.  Assistants  :  duc  du  Chatelet,  duc 
de  Montmorency  et  comte  de  Talleyrand. 

1781.  — 12  mars,  officiant  :  M.  de  Champbertrand, 
doyen. 

17  décembre,  assistants  :  duc  du  Chatelet,  comte 
de  Talleyrand. 

1782.  —  12  mars,  officiant  :  M.  de  Vaudricourt, 
chanoine,  en  Tabsence  du  doyen. 


—  111  — 

19  décembre,  officiant  :  M.  de  Champberlrand, 
doyen.  —  Assistant  l'duc  du  Chatelet. 

1783.  —  13  mars,  officiant  :  M.  de  Champber- 
trand,  doyen. 

19  mars,  officiant  :  M.  de  Champbertrand.  —  As- 
sistants :  duc  du  Chatelet  et  comte  de  Talleyrand. 

1784.  — 12  mars,  service  de  la  Dauphine. 

20  décembre,  assistants  :  duc  du  Chatelet  et  comte 
de  Talleyrand. 

1785.  12  mars,  service  de  la  Dauphine. 

19  décembre,  assistants  :  duc  du  Chatelet  et  comte 
de  Talleyrand. 

1786.  —  Lundi  13  mars,  officiant  :  M.  de  Champ- 
bertrand, doyen. 

19  décembre,  assistants  :  duc  du  Chatelet  et  comte 
de  Talleyrand. 

1787.  -  -  12  mars,  officiant  :  M.  de  Champber- 
trand, doyen. 

19  décembre,  assistant  :  le  comte  de  Talleyrand, 
seul. 

1788.  —  12  mars,  officiant  :  M.  de  Chambertrand, 
doyen. 

Au  milieu  des  troubles  et  des  préoccupations  si 
graves  du  pays,  la  célébration  des  anniversaires, 
en  1789,  passa  inaperçue.  Bientôt  les  iniques  décrets 
sur  la  Constitution  civile  vinrent  jeter  Talarme,  en 
attendant  la  ruine,  dans  le  pays.  En  en  faisant  part 
à  ses  collègues  du  Chapitre,  le  23  novembre  1790, 
le  doyen,  M.  de  Champbertrand,  les  invitait  à  si- 
gner une  déclaration  dans  laquelle  ils  affirmeraient 
leurs  sentiments.  A  cette  heure  douloureuse,  les 


—  112  — 

chanoines  curent  à  cœur  de  faire  cette  protesta- 
tion : 

«  Nous  n'oublierons  jamais  que  la  dépouille 
mortelle  de  Louis,  Dauphin  de  F'rance,  et  celle  de 
sa  vertueuse  Epouse  reposent  dans  le  sanctuaire  de 
celle  église;  que  la  garde  honorable  de  ce  dépôt  pré- 
cieux à  la  Nation  nous  fut  confiée  par  Louis  XV; 
qu'il  nous  chargea  d'acquitter,  les  19  décembre  et 
12  mars  de  chaque  année,  un  service  solennel  pour 
le  repos  de  leurs  âmes.  Si  nous  sommes  réduits  à 
Timpossibililé  de  remplir  un  devoir  qui  fut  toujours 
^cré  pour  nous,  désirant  donner  au  meilleur  des 
Rois  un  témoignage  de  fidélité,  de  respect,  d'amour 
et  de  reconnaissance,  nous  prenons  rengagement 
de  célébrer,  ces  mêmes  jours,  le  saint  sacrifice  de 
la  messe  pour  ses  augustes  Auteurs,  et  d'assister  à 
leurs  services,  si  les  circonstances  le  permettent.  « 

Le  lendemain,  les  agents  de  la  Révolution  ve- 
naient brutalement  signifier  la  suppi*ession  du  Cha- 
pitre. 

Un  mois  après,  le  20  décembre  1790,  le  service  du 
Dauphin  fut  encore  célébré.  Le  coadjuteur,  Pierre- 
Martial  de  Loménie  y  officia,  entouré  des  curés  de  la 
ville  et  du  séminaire.  Les  chanoines,  fidèles  à  leur 
engagement,  se  réunirent  et  assistèrent  à  la  cérémo- 
nie, groupés  dans  la  chapelle  de  Notre-Danie-dc- 
Lorette  (actuellement  dédiée  au  Sacré-Cœur),  où 
reposaient  les  cendres  du  cardinal  de  Luynes. 


VX.IfeTK    ARCHKOLOGiqpB  DE    SEMS. 


T,  xxn,  PL.  XII,  p.  113. 


LE  DAUPHIN  &  LA  DAUPHINE 

Camée  par  Jacques  Guay 


(Cabinet  de%  Médaittet.) 


LES  JOURS   MAUVAIS 


CHAPITRE  VIII 


VANDALISME   ET   PROFANATIONS   RÉVOLUTIONNAIRES 

Depuis  deux  ans,  les  solennités  des  anniversaires 
avaient  cessé.  Devant  la  persécution,  de  jour  en 
jour  plus  menaçante  et  sanglante,  les  survivants  du 
clergé  sénonais  s*étaient  dispersés.  L'ex-cardinal  de 
l^ménie  de  Brienne,  un  moment  bercé  de  Tillu- 
sion  de  trouver  dans  sa  popularité  un  abri  sûr, 
avait  déserté  son  palais  et  sa  cathédrale  et,  sus- 
pect, il  cherchait  à  se  faire  oublier  dans  sa  retraite 
de  Saînt-Pierre-le-Vif. 

On  était  déjà  aux  jours  les  plus  sombres  de  la 
Terreur,  et  le  mausolée  du  père  de  Louis  XVI  était 
toujours  debout,  au  milieu  du  sanctuaire  mainte- 
nant désert  et  silencieux. 

Les  mutilations  et  le  pillage  officiels,  accomplis 
au  mois  de  juin  1792,  pour  Tenlèvement  des  in- 
scriptions et  ëpitaphes  de  métal  envoyées  à  la  Mon- 
naie, étaient  un  dangereux  exemple. 

Le  3  septembre  1792,  pendant  une  réunion  pu- 

8 


—  114  — 

blique  tenue  dans  la  basilique  profanée,  pour  Télec- 
tion  des  députés  à  la  Convention,  un  groupe  de 
forcenés  avait  failli  briser  et  anéantir  ce  c  monu- 
ment du  despotisme.  »  11  avait  fallu  rintervention 
énergique  du  maire,  Ménestrier,  pour  calmer  leur 
fureur  (1). 


(1)  Grégoire  a\*ait,  dans  son  discours,  fnit  allusion  a  ce  qui  s'était  |>assé 
à  Sens  : 

c  11  y  a  dix-huit  mois  qu'à  Sens  on  avoit  pris  un  arrêté  qui  détruisoit  les 
chartes.  Déjà  l'on  en  avoit  envoyé  des  tonnes.  Le  citoyen  Laire,  zélé  pour 
la  gloire  des  arts,  fit  défoncer  les  tonnes;  il  y  trouva  des  fragments  de  la 
célèbre  chronique  de  Vézelay,  dont  à  Sens  on  possède  le  seul  manuscrit 
peut-être  qui  a  ser\'i  à  l)acher>'  et  qui  est  imparfait. 

<  L'armée  révolutionnaire  et  quelques  êtres  dignes  d'y  figurer,  ont  en- 
core détruit  à  Sens  le  beau  monument  du  chancelier  Duprat;  des  statues 
colossales  et  une  foule  d'autres  statues,  avec  des  bas-reliefs  au  portail  de 
la  cathédrale,  qui  retraçoient  une  histoire  suivie  du  grand  œuvre  des  al- 
chimistes, tel  qu'on  le  concevoit  dans  les  xiir  et  xiv*  siècles.  » 

I^  Père  Laire,  bibliothécaire  du  district  de  Sens,  dans  une  lettre  du  29  fri- 
maire an  III  (19  décembre  1794),  rectifie  quelques-unes  des  affirmations 
du  conventionnel  : 

<  J'ai  lu  avec  satisfaction  votre  troisième  rapport  sur  le  vandalisme  ot 
j'ai  été  touché  sensiblement  de  la  perte  des  monumensdont  vous  donnez 
des  détails  affiigeants...  Mais  je  ne  peux  vous  déguiser  que  j'ai  été  exlrt>- 
mcmcnt  touché  d'y  voir  altérer  un  fait  dont  je  vous  avois  donné  un  détail 
abrégé  cl  dont  la  vérité  et  les  circonstances  ont  été  altérées  par  les  copis- 
tes dans  les  bureaux.  J'y  lis  ces  mots  :  <  Il  y  a  dix-huit  mois  qu'd  Sens  (il 
falloit  lire  :  à  Auxerre)  on  avoit  pris  un  arrêté  (ce  n'étoit  pasle  district  mais 
le  déparloment,  par  son  arrêté  du  8  janvier  1793  v.  s.)  qui  détruisoit  les 
chartes  (qui  aurolt  pu  les  délruirc).  Déjà  l'on  en  avoit  envoyé  des  tonnes  (à 
Auxerre,  et  ces  tonnes  venoient  du  district  d'Avollon,  bien  éloigné  de  Sens). 
Le  citoyen  I^irc  y  trouva  des  fragmens  do  la  célèbre  chronique  de  Véxc- 
lay,  dont  à  Sens  on  possède  le  seul  manuscrit  peut-être  qui  a  servi  à  l>a- 
cher>'  et  qui  est  imparfait.  »  (Mais  cette  imperfection  est  ancienne,  puiscfue 
du  temps  même  de  Dachcry,  elle  se  trouvoit  déjà  dans  le  manuscrit. 
(■f^iiiîiir  i]  <sl  prouvé  par  l'imprimé  de  ce  bénédictin.) 

«  .ïr  i\uii>  ma  LrtitE)ignagc  tt  la  vérité  et  à  la  justice,  tant  à  l'égard  du  district 
de  S*m^  quL-  tU'  In  municipalité.  Ces  deux  administrations  ont  employé  de 
concert  loits  irs  moyens  qui,  dans  ces  temps  malheureux,  leur  rcstoicnt 
|Mtir  s*o|ïposc^r  nux  incursions  des  barbares  et  des  vandalistes.  Plusieurs 


i. 


—  115  — 

Lorsque,  vers  la  fin  de  1792,  émue  par  le  vigou- 
reux réquisitoire  prononcé,  contre  le  vandalisme,  par 
l'abbé  Grégoire,  la  Convention  chargea  la  Commis- 
sion des  Monuments  de  veiller  à  la  «  conservation 
des  objets  qui  peuvent  intéresser  essentiellement  les 
arts,  »  d'irréparables  désastres  étaient  consommés. 

Cette  mesure  toutefois  sauva  le  monument  du 
Dauphin.  Elle  permit  d'oublier  son  origine  et  son 
caractère  si  compromettants,  et  de  n  y  plus  voir 
qu'une  pièce  précieuse  de  musée  :  le  chef-d'œuvre 
deCoustou. 

Le  21  avril  1793,  la  municipalité  sénonaise  déci- 
dait : 

Le  citoyen  Perrio,  oflicier  municipal,  visitera,  avec  Per- 
son,  artiste,  tous  les  lieux  où  Ton  peut  présumer  qu'il  existe 
des  (races  de  féodalité  et  donnera  des  ordres  nécessaires 
pour  qu'elles  soient  enlevées  ;  mais  le  décret  de  la  Conven- 
tion relatif  à  la  conservation  des  monuments  des  arts  sera 
affiché  partout  où  besoin  sera.  {Arrêtés  municipaux,  t.  IV, 
f"  239.) 

Le  4  mai  1793,  les  représentants  Turreau  et  Gar- 
nier,  en  mission  à  Sens,  réunissaient,  dans  la  salle 
des  séances  du  district,  les  corps  administratifs  et 
judiciaires  et,  avant  toute  autre  affaire,  se  préoccu- 
paient de  faire  disparaître  le  mausolée. 


même,  en  imposant  leurs  corps  d  ces  scélérats,  sont  parvenus  à  sauver  les  bas- 
niitfs  da  mausolée  de  Duprat  et  le  mausolée  du  ci-devant  Dauphin, 

«  Faites  disparaîlre,  je  vous  prie,  les  traces  de  cet  odieux  soupçon.  Dans 
«es  circonstances  désastreuses,  ne  pas  coopérer  au  mal  éloit  une  vertu,  et 
i  \  opposer  un  héroïsme. 

<  Salut  et  fraternité.  »  (Signé  :  )  Laire. 

(Affiches  de  SenM,  an  III,  n'  12,  30  nivôse,) 


—  116  — 

Sur  In  représentation  de  plusieurs  citoyens  qu'il  existe 
dans  le  chœur  de  Téglise  Saint-Etienne  de  Sens  le  mausolée 
d'un  ci-devant  Dauphin  de  France  et  qu'il  est  urgent  de 
faire  disparaître  ce  monument  de  la  vanité  des  tyrans; 

Les  Commissaires  de  la  Convention  Nationale,  représen- 
tans  du  peuple,  arrêtent  que,  dans  le  plus  bref  délai,  et 
sous  la  surveillance  immédiate  de  l'Administration  du  Dis- 
trict, le  mausolée  dont  il  s'agit  sera  enlevé,  à  la  diligence 
de  la  municipalité  de  laditte  ville,  qui  demeure  authoriséc 
à  faire  la  dépense  que  nécessitera  ledit  enlèvement,  et  même 
à  demander  à  la  Convention  Nationale,  soit  une  avance  de 
deniers,  soit  un  acompte  sur  le  seizième  qui  lui  revient 
dans  la  vente  des  domaines  nationaux  à  elle  aliénés,  s'en- 
gageant  h  cet  égard  lesdits  représentants  du  peuple  d'ap- 
puyer cette  demande  auprès  de  la  Convention  Nationale, 
sauf  à  laditte  municipalité  à  rendre  aux  administrateurs  de 
département  et  de  district  un  compte  de  l'emploi  des  dittes 
avances  pécuniaires.  [Archives  de  VYonne,  L.  II,  95.) 

Malgré  cette  décision  formelle,  et  sans  doute 
parce  que  personne  n'osait  assumer  la  charge  péril- 
leuse d  enlever  un  tel  monument  au  risque  de  le 
détériorer,  plusieurs  mois  se  passèrent  sans  que  fût 
tentée  Topéralion. 

Mais,  le  4  août  1793,  le  conseil  général  de  la  com- 
mune, appelé  à  statuer  sur  le  sort  du  mausolée, 
prenait  une  délibération  dont  nous  transcrivons 
religieusement  Torlhographe  quelque  peu  révolu- 
tionnaire : 

Le  citoyen  maire  a  dit  qu  aux  termes  du  décret  de  la  Con 
vention  nationale  qui  proscrit  tous  les  monuments  roj'a- 
listes  et  fédéraliste,  et  qui  ordonne  qu'ils  seront  enlevés, 
tant  dans  les  temples  que  lieux  publics  où  ils  pourroient 
être  placés,  il  croyoit  nécessaire  que  le  conseil  général 
prît  une  délibération  par  laquelle  il  statueroit  sur  l'enlève- 


—  117  — 

ment  du  mausolé  placé  sur  la  sépulture  des  cy  devant 
Dauphin  et  Dauphine  de  France,  inhumés  dans  le  cœur  de 
la  paroisse  cathédralle,  et  sur  la  manière  dont  se  feroit  cet 
enlèvement. 

La  matière  mise  en  délibération  :  le  conseil  a  applaudi  au 
zèle  du  citoyen  maire  pour  l'exécution  des  loix  et  décrets 
de  la  Convention,  et  a  arrêté  1»  que  le  citoyen  Pierson  (1),  ar- 
tiste, seroit  à  l'instant  invité  à  se  rendre  à  l'assemblée...;  et 
le  citoyen  Person  s'étant  rendu  à  l'invitation  du  conseil,  il 
fut  consulté  sur  cette  entreprise,  et  aîant  promis  de  sur- 

.1)  Pierre  Person,  originaire  de  Grandpré  (Ardennes),  élève  du  sculpteur 
firidan,  était  venu  se  fixer  à  Sens  au  début  de  la  Révolution  et  y  avait  un 
cabinet  d'architecte. 

Ko  1794.  il  donne  des  *  leçons  de  perspective,  de  la  coupe  des  pierres  et 
des  cinq  ordres  d'architecture,  t  dans  Tccole  gratuite  de  dessin  fondée  par 
]«•  marquis  de  Chainbonas  et  dirigée  par  le  peintre  Langlois. 

11  est,  dès  cette  époque,  chargé  des  travaux  d'entretien  de  la  cathédrale. 
Il  reçoit  la  mission  d'enlever  divers  objets  d'art  dans  les  abbayes  de  Vau- 
luivint  et  de  Sainte-Colombe  et  dans  les  églises  vouées  À  la  destruction  par 
la  barbarie  jacobine.  Il  s'efforça  sans  succès  de  sauver  les  précieuses  ver- 
rières de  l'église  Saint-Romain  de  Sens,  exécutées  par  Jean  Cousin.  Il  en 
av.iit  numéroté  les  panneaux  qu'il  fit  déposer  avec  soin  dans  une  chambre 
du  Chapitre.  Il  projetait  de  les  replacer  dans  les  fenêtres  de  la  chai)elle  de 
:>ainte-<U>lonibe,  h  la  cathédrale. 

I^  11  janvier  1792,  la  municipalité  lui  délivre  «  un  mandat  de  843  livres, 
â  compte  sur  1143  livres  qui  lui  sont  ducs  pour  restant  du  prix  du  buste 
de  M.  de  Chambonas.  voté  par  le  conseil.  >  (Registre  des  arrêtés  munici- 
paux, t.  III.  f*  70.) 

Le  20  mai  1792t  11  dépose  un  projet  i>our  la  restauration  de  la  pyramide 
élevée  sur  l'autel  de  la  patrie,  moyennant  120  livres.  Son  projet  est  ap- 
prouvé. (Ibidem,  P  190.) 

A  la  fin  de  cette  même  année  il  avait  pu  sauver  le  tombeau  des  Condé, 
à  Vallerj*. 

En  janvier  1794.  invité  par  la  municipalité  à  exécuter  l'ordre  du  conven- 
tionnel Maure,  prescrivant  la  destruction  des  cloches  des  églises,  il  dépose 
un  rapport  exposant  que  renlèvenient  de  l'un  des  deux  bourdons,  en  com- 
promettant l'équilibre  du  beffroi,' occasionnerait  des  accidents  considéra- 
bles, et  il  par\'ient  ainsi  à  sauver  les  fameuses  cloches  sénonalses. 

Le  2  août  1794,  la  commune  adopte  son  plan  pour  un  nouvel  autel  de  la 
patrie. 

nés  la  réouverture  des  églises,  le  Bureau  d'administration  du  culte  ca- 


—  118  — 

veiller  Texécution  de  cet  enlèvement,  il  a  prié  le  conseil 
qu*il  lui  permît  de  choisir  et  faire  venir  de  Paris  des  ou- 
vriers marbriers  qui  puissent  entreprendre  de  faire  cet  en- 
lèvement ; 

Le  conseil  a  autorisé  le  citoyen  Person  à  choisir  tels  ou- 
vriers qui  lui  conviendroient,  et  à  faire,  dans  le  délais  le 
plus  court,  un  plan  nécessaire  pour  Texécution  de  Fenlèvc- 
ment  du  susdit  mauzolé,  lequel  plan  il  scroit  prié  de  sou- 
mettre au  conseil  qui  lui-même  le  feroit  passer  à  la  Con- 
vention en  la  priant  d*autorizer  le  conseil  à  faire  la  dépence 
nécessaire  pour  le  déplacement. 

Le  conseil  a  invité  aussi  sur  le  champs  le  citoyen  Person 
à  commencer  sur  le  champs  à  ôter  de  dessus  le  mauzolc 
tous  les  objets  qui  pourroicnt  s'enlever,  en  attendant  les  ou- 
vriers qu'il  attend,  et  déposer  tous  les  débris  du  mauzolé 
dans  le  lieu  cy-devant  chapitre,  ou  dans  tel  autre  qu'il  con- 
viendra, d'en  recueillir  avec  soin  tous  les  objets  sans  ex- 
ception et  de  les  placer  avec  les  scrupuleuses  attention  et 
précaution  qu'il  scroit  possible,  le  conseil  général  s'en  rap- 
portant sur  la  prudence  et  la  vigilance  du  citoyen  Person. 
{Archives  communales  de  Sens,  arrêtés  municipaux,  t.  IV, 
fo  361.) 

Person  se  mit  aussitôt  à  l'œuvre.  Le  19  août,  Cos- 
sard  et  Mulot,  délégués  du  Ministre  de  rintéricur 

tholiquc  do  In  cathf^drnlc.  dans  sa  sôancc  du  20  août  1795,  autorise  son  tn«- 
soricr  ii  se  concerter  avec  Person,  aroliitecte  de  la  commune,  «  qui  s*ctoit 
pn'scnté  à  l*nssoml»lée  g<^nérnle  pour  lui  Taire  les  offres  ics  plus  géné- 
reux. »  El  le  proctVvorbnl,  h  cet  occasion,  rend  hommage  en  ces  ternirs, 
au  dévouement  de  Person  :  «  Ot  nrcliitrcte,  connu  par  les  services  qu'il 
avoit  rendus  dans  les  premiers  moments  de  la  spoliation  des  églises,  en  en 
préservant  celle  de  Saint -Etienne,  en  ménageant  et  mettant,  autant  qu'il 
pouvoit,  a  l'ahri  beaucoup  d'objets  inléressjints.  » 

I^  .30  avril  1807,  IVrson  restitue  à  la  Tabrique  de  la  cathédrale  <leux  bas- 
reliefs  d'argent  de  Thomas  (icrmain.  prov«'nant  do  la  chiVsse  de  S,  I^iup 
et  deux  autres  ayant  orné  le  socle  de  reliquaires  (n**  170,  171  et  172  du  tré- 
sor), avec  dix-huit  fragments  de  bron/e  doré  provenant  du  mausolée. 

Person  mourut  à  Paris,  xlgé  de  quatre-vingts  ans,  le  13  février  1830.  (Affi- 
cher, de  Sens,  du  28  février  1830.) 


—  110  — 

pour  la  conservation  des  objets  d  art,  passent  à 
Sens,  et,  dans  leur  rapport,  signalent  ainsi  le  mau- 
solée : 

Dans  le  chœur  de  la  cathédrale,  nous  avons  remarqué 
que  l'on  s  occupoit  à  démonter  le  tombeau  de  marbre  du  ci- 
devant  Dauphin,  ouvrage  de  Coustou  fils.  L'intention  de  la 
manicipalitéy  pour  le  soustraire  aux  malveillants,  est  de  le 
faire  transporter  provisoirement,  avec  soin  et  par  un  ar- 
tiste, dans  Tancien  chapitre  des  ci  devants  chanoines.  Le 
vœu  commun  paraît  être  de  le  conserver  à  Sens  (1). 

Ce  premier  travail  toutefois  se  bornait  à  Ten- 
lèvement  des  accessoires.  Pour  les  statues,  Person 
n  osait  opérer  sans  le  concours  des  ouvriers  spécia- 
listes réclamés  par  lui.  La  municipalité,  de  son 
côlé,  malgré  les  promesses  des  commissaires  de  la 
Convention,  hésitait  à  engager  une  dépense  dont 
le  remboursement  ne  lui  paraissait  pas  suffisam- 
ment garanti.  De  là  sans  doute  l'idée  préconisée 
dans  les  délibérations  suivantes  : 

Le  5«  jour  du  2*)  mois  de  la  l^e  décade,  l'an  II  (26  octobre 
1793). 

Sur  la  proposition  d'un  membre  de  présenter  à  la  Con- 
TeoUon  les  Mausolé  de  Louis,  père  de  Louis  Capet,  et 
du  cardinal  Duprat;  sur  quoi  délibérant,  ouy  le  citoyen  Du- 
four,  officier  municipal,  faisant  les  fonctions  de  procureur 
de  la  commune  (2),  le  conseil  général  arrête  que  le  citoyen 
Dufour,  oflicier  municipal,  sera  député  auprès  de  la  Conven- 
tion à  reflet  d'y  faire  bornage  desdits  Mauzollés  au  nom  de 
la  commune  de  Sens,  et  de  solliciter  des  secours  à  l'efTel  de 
par\'enir  à  payer  les  dépenses  de  laditte  commune,  et  que 

>1)  Butl.  de  la  Soc.  des  sciencex  de  V Yonne,  t.  XX,  p.  4S. 
2)  Sur  ce  personnage,  voir  dans  J.  PEimiN,  le  Cardinal  de  Brienne,  page 
172  et  suivantes. 


—  120  — 

le  citoyen  Maqui  demeure  chargé  de  rédiger  cette  adresse 
au  nom  de  la  commune  de  Sens  dont  sera  porteur  ledit  cit. 
Dufour.  (Archives  communales  de  Sens,  arrêtés  municipaux, 
t.  V,  ^  23.) 

Le  lie  jour  du  2e  mois  de  la  2e  décade  de  l'an  II  d**»'  no- 
vembre 1793). 

Un  membre  a  annoncé  au  conseil  général  que  le  Mauzo- 
léc  déposé  dans  l'église  cathédrale  de  Sens  étoit  entière- 
ment démoli  ;  que  les  différentes  partie  de  ce  monument 
avoicnt  été  détachées  avec  le  plus  grand  soin  et  qu'elles 
pouvoient  offrir  aux  jeunes  artistes  de  précieux  modèles, 
sans  porter  avec  elles  les  emblèmes  que  Ton  a  voulu  dé- 
truire; il  a  demandé  que  Ton  en  fit  l'offrande  à  la  Nation  et 
que  la  Convention  fût  priée  de  faire  rassembler  dans  le  ma- 
gazin  national  toutes  les  parties  détachées  de  ce  monu- 
ment. 

La  matière  mise  en  délibération  et  le  substitut  du  procu- 
reur de  la  commune  entendu,  le  conseil  arrête,  à  Tunanimité 
et  aux  applaudissements  des  citoyens  présents,  que  le  mau- 
zolée  élevé  dans  la  cathédrale  de  Sens  seroit  offert  à  la  Na- 
tion et  que  la  Convention  nationale  seroit  priée  d'en  faire 
transporter  les  différentes  parties  au  Magazin  National. 

Arrête  en  outre  qu'il  sera  à  cet  effet  adressé  une  pétition 
à  la  Convention  Nationale,  et  que  le  cytoyen  Dufour,  offi  - 
cicr  municipal,  sera  chargé  de  la  présenter. 

Un  membre  a  ensuitte  soumis  au  conseil  le  projet  de  cette 
pétition  conçue  en  ces  termes  : 

«  Citoyens  représentans  du  peuple, 
<  Un  monument  élevé  par  la  plus  basse  adulation  à  Tor- 
gueil  de  nos  tyrans  reposoit  dans  l'église  cathédrale  de  Sens. 
Ce  reste  impur  de  leur  honteuse  magnificence  conlrastoit 
avec  les  principes  sacrés  de  notre  Constitution  et  sembloit 
accuser  de  faiblesse  les  véritables  républicains  :  tout  ce 
qui  peut  retracer  à  leurs  yeux  les  prodigalités  d'une  coiir 
abreuvée  du  plus  pur  sang  du  peuple  doit  rentrer  dans  le 
néant  et,  si  la  Nation  ouvre  les  portes  de  l'Immortalité  aux 


—  121  — 

grands  hommes  qui  ont  servi  notre  Révolution,  elle  doit  ré- 
duire dans  la  plus  vile  abjection  tout  ce  qui  peut  lui  i*ap- 
peller  le  souvenir  de  ses  anciens  tyrans.  Elle  recueille  ac- 
tuellement, avec  un  respect  mêlé  de  reconnaissance,  les 
cendres  des  vertueux  philosophes  dont  la  vie  fut  entière- 
ment consacré  aux  soins  pénibles  et  dangereux  d'éclairer  le 
peuple  sur  ses  droits;  elle  doit  également  disperser  avec 
le  dédain  du  mépris  ces  vils  dépôts  que  les  crimes  ont  as- 
suré et  que  la  vertu  n'a  cessé  de  désavouer. 

c  Représentans  du  peuple,  la  commune  de  Sens  n'a  put 
souffrir  davantage  la  présence  d'un  mausolée  injurieux  au 
peuple  et  à  l'égalité.  Elle  en  a  fait  décomposer  toutes  les 
parties  avec  soin,  et  les  figures  détachées  ne  peuvent  plus 
offrir  les  odieux  emblèmes  qui  ont  trop  longtemps  souillé 
ses  yeux.  Elle  en  fait  l'offrande  à  la  Nation  ;  elle  demande, 
en  outre,  que  les  différentes  parties  de  ce  monument,  chef- 
d'œuvre  de  Coustou  fils,  soient  rassemblés  dans  le  Muséum 
national.  C'est  là,  qu'après  avoir  été  témoins  ostensibles  de 
lavilissement  de  la  Nation  et  de  l'orgueil  de  ses  oppres- 
seurs, elles  attesteront  à  la  postérité  la  haine  des  Sénonais 
pour  les  Rois  et  leur  amour  pour  la  République  (1).  » 

Lecture  faite  de  cette  pétition,  le  conseil  déclare  l'ap- 
prouver en  son  entier. 

lit  Os  déclamations  ne  traduisaient  guère,  comme  bien  on  pense,  les 
seutiroenis  plutôt  pacifiques  et  débonnaires  de  la  population  et  de  la  mu- 
nidpalité.  Pour  connaître  l'état  d'âme  des  Sénoiiais  sous  un  régime  qui 
auiit  envoyé  trente-deux  de  leurs  concitoyens  à  Téchafaud.  il  faut  lire  les 
<lt libérations  du  conseil  de  la  commune  lorsqu'après  thermidor,  délivré 
de  la  t>'ninnie  du  comité  révolutionnaire  devant  lequel  il  avait  trop  long- 
temps tremblé,  il  peut  enfin  s'exprimer  librement. 

11  faut  l'enlendre  s'élever  contre  «  les  cannibales  qui  composaient  l'infAme 
tribunal  révolutionnaire.  »  (Heg.  V/,  fol.  53.) 

Il  l^ut  relire  5on  adresse  à  la  Convention  pour  In  mise  en  lilierté  de  la 
'\\>  de  Louis  XVl  :  «  lx)rsqu'une  faction  impie  étoit  iwirvenne  à  asservir  la 
'rprrst'ntsilion  nationale,  la  terreur  et  la  mort  plaiioient  sur  la  surface  de  la 
France  efiliêre;  lliommc  de  bien  devenu  suspect  étoit  appelé  contre-révo- 
{.«joanairc.  aussitôt  incarcéré,  puis  subitement  conspirateur  :  telle  étoit 
Il  marche  rapide  qui  conduisoit  à  1  echafaud.  »  (Heg.  VI,  fol.  74,  8  mcssi- 
•Hr  an  m.) 


—  122  — 

Sur  Tobservation  faite  immédiatement  par  un  autre  mem- 
bre que  les  frais  de  construction  du  Mauzollée  ctoient  con- 
sidérables, en  raison  de  ce  que  l'on  avoit  été  obligé  d'appe- 
ler des  artistes  de  Paris  pour  décomposer  les  parties  de 
manière  à  ne  point  les  endommager;  qu*il  étoit  impossible 
d'acquitter  cette  dépense  des  deniers  de  la  commune  qui 
éprouve  dans  ce  moment  les  plus  pressans  besoins. 

Le  conseil  général  arrête  que  le  citoyen  Dufonr  demeure 
également  chargé  de  réclamer  auprès  de  la  Convention  Na- 
tionale des  secours  pour  subvenir  aux  dépenses  de  décoo- 
stnictions  du  Manzolée,  aux  autres  besoins  pressans  de  la 
commune,  etc.  t Ibidem,  (•79,) 

Malgré  toute  la  diligence  du  citoyen  Dufour  et  le 
lyrisme  de  son  éloquence  sans -culotte,  Toffre, 
—  nous  devons  nous  en  féliciter,  -  ne  fut  heureu- 
sement pas  acceptée.  Quant  au  paiement  des  frais, 
la  commune,  le  district  et  le  département  s'en  dé- 
sintéressent à  Tenri. 

I^  8  mars  1794,  le  district  : 

Renvoie  au  Ministre  de  llniérienr.  pour  être  examiné  par 
des  gens  de  Tari,  le  mémoire  de  Person,  artiste,  qui  a  dé- 
monté le  monument  des  Dauphins,  s'êlevant  à  4072  livres, 
et  celui  de  1  jûO  13  sols  pour  avoir  enlevé  les  épitaphes. 
armoiries.  tomt>es  et  tombeaux  dans  la  cathédrale. 

Le  Directoire  du  district  estime  qc  il  j  a  lieu  par  le  Minis- 
tre de  1  latêrieur  à  ordoncaaacer  ledit  mémoire  sur  leTré- 
v?r  pzîblic  j^înrs  lavi-ir  prt-jl:ible3ieal  (ait  Térifier  par  les 
jtens  de  Fart  qui  se.-^nt  à  cet  effet  commis,  n'en  ajant  aucun 
s^  les  ::e=i     A':r    •'ï  /<  TV,   r<.  L  II.  S<.  f  98  ) 


F^iire  iS;  a:\iirv  le  m-^n-nT^nî,  cv n'était  pasassex. 
Lt>  ni-.rrjrsj^vv  L Ir.-^.  ci  ^r.t  I  âuJ^-ci:  croîvsail  à  me- 
>j-\:  % --r  >\:T-.m:!  1  w-t.ritr.  fjiNàitrnl  la  loi  dans  la 


—  123  — 

cité  terrorisée  :  ils  exigeaient  une  satisfaction  plus 
complète. 

L'exemple  d'en  haut  ne  les  y  encourageait-il  pas? 
A  Saint-Denis,  le  vandalisme  révolutionnaire  avait 
brisé  cinquante  et  un  monuments,  a  En  trois  jours, 
a  écrit  le  religieux  témoin  de  ce  désastre,  on  a 
anéanti  l'ouvrage  de  douze  siècles  (1)  I  »  Et,  après 
avoir  déblayé  le  sol  de  la  nécropole  royale,  on  en 
avait  ouvert  les  caveaux,  brisé  les  cercueils,  profané 
les  cadavres  et  traîné  les  ossements  à  la  fosse  com- 
mune (2).  Pendant  trois  mois,  cette  horrible  besogne 
s'était  poursuivie  méthodiquement,  sous  une  direc- 
tion oflicielle.  Preuve  nouvelle  et  tristement  élo- 
quente que  tout  sentiment  humain  disparaît  fatale- 
ment lorsque  s'oblitère  le  sentiment  religieux! 

Les  émules  sénonais  des  terroristes  parisiens  pou- 
vaient-ils tolérer  plus  longtemps  le  droit  des  morts 
à  la  paix  du  tombeau?  Puisque  la  municipalité, 
pourtant  bien  asservie,  n'osait  assumer  l'odieux  de 
violer  des  tombeaux  et  d'outrager  des  cadavres,  la 


>It  Chateaubriand  a  publié,  dans  les  notes  et  éclaircissements  du  Génie 
«/u  Christianisme,  la  relation  d'un  religieux  de  Tabbayede  Saint-Denis,  té- 
moin oculaire  de  ces  profanations. 

2)  Extrait  du  récit  du  religieux  de  Saint-Denis  :  «  Mardi  15  octobre  1793. 
on  a  aussi  reUré  du  caveau  des  Bourbons  les  cœurs  de  Louis,  dauphin, 
tiUdeliOuis  XV...,  et  de  Maric-Josêphe  de  Saxe,  son  épouse.  Leurs  corps 
jxaicnt  été  enterrés  dans  l'église  cathédrale  de  Sens,  ainsi  qu'ils  l'avaient 
drnmndé.  Le  plomb,  en  figure  de  cœur,  a  été  mis  de  côté,  et  ce  qu'il  con- 
vmiit  a  été  porté  au  cimetière  et  Jeté  dans  la  fosse  commune  avec  tous  les 
f3<lavres  des  Bourbons.  I^s  cœurs  des  Bourbons  étaient  recouverts  d'au- 
tfTsde  vermeil  ou  argent  doré  et  surmontés  chacun  d'une  couronne  aussi 
d'argent  doré.  L.<?s  cœurs  d'argent  et  leurs  couronnes  ont  été  déposés  à  la 
municipalité,  cl  le  plomb  a  été  remis  aux  commissaires  aux  plombs,  v 


—  124  — 

Société  révolutionnaire,  affranchie  de  tout  scrupule, 
en  prit  rinitiative. 

Voici,  en  effet,  Tunique  mention  de  l'événement 
insérée  au  registre  des  délibérations  de  la  Com- 
mune : 

Séance  du  5  germinal  an  II  {25  mars  ÎIH) 

Plusieurs  commissaires  nommés  par  la  Société  révolution- 
naire à  l'efTet  d'exhumer  les  corps  des  cy  devant  Dauphin, 
Dauphine,  de  Luynes  et  de  Muids,  ont  dépozé  sur  le  bureau, 
présence  du  conseil  général  assemblé,  plusieurs  plaques, 
dont  une  d'argent,  et  trois  chatons,  dont  deux  rouge  et  une 
verte,  lesquels  ont  été  remis  es  mains  du  citoyen  greffier,  à 
titre  de  dépôt,  pour  être  représenté  lorsqu'il  a  sera  requis. 
Le  conseil  arrêtant  que  le  tout  sera  envoyé  à  la  Convention 
par  une  adresse,  ainsi  que  les  croix  cy  devants  ditte  S^  Louis, 
dépozées  pareillement  au  greffe  de  cette  commune  (1). 

C'est  le  22  et  le  23  mars  1791  que  les  jacobins  sé- 
nonais  purent  enfin  assouvir  leur  haine  sur  les  cada- 
vres du  Dauphin  et  de  la  Dauphine  auxquels  ils  as- 
socièrent leurs  deux  amis  fidèles,  le  cardinal  de 
Luynes  et  le  maréchal  du  Muy. 

Aucun  récit  de  ces  scènes  lamentables  ne  nous  est 
parvenu.  Seules  les  allusions  du  Journal  politique  et 
littéraire  du  département  de  V  Yonne  nous  en  font  de- 
viner rhorreur. 

Dans  un  article  intitulé  Mon  Songe,  une  ombre 
conduit  lautcur  devant  la  cathédrale,  et  là  elle  lui 
dit: 

Un  couple  vertueux,  rare  modèle  de  l'union  conjugale; 
un  sage  vénéré  dans  les  camps  et  au  milieu  des  cours  ;  des 
pontifes,  hommes  d'Etat,  vénérables  par  leurs  lumières, 

(t)  Sens,  Archives  commun.  (Ilogi  si  rodes  arrét<^s  delà  nuiirle,  t.  V.  f-  IM>. 


—  125  — 

leur  éloquence  et  leur  humanité,  y  rcposoicnt  dans  la  nuit 
du  tombeau. 

Mais  qu'importent  aux  hommes  féroces,  les  vertus,  les  lu- 
mières et  les  services  rendus  à  la  patrie?  Leurs  monuments 
ont  été  brisés,  leurs  tombeaux  ont  été  profanés,  et  leurs  restes, 
froids  et  inanimés  (ô  honte  de  F  humanité  et  des  mœurs!)  ont 
elè  exposés  nuds  à  la  brutale  curiosité  d'une  multitude  enyvrée 
de  fureur  et  de  licence  (1).  (N»  du  20  mars  1797.) 

Et  ailleurs,  à  propos  du  passage  de  Tambassadeur 
turc  et  de  sa  visite  au  mausolée  du  Dauphin  : 

On  dit  qu'elle  (la  municipalité;  ne  s*est  pas  empressée 
d  instruire  Tambassadeur  que  les  corps  de  ce  Prince  et  de 
son  Epouse,  avaient  été  extraits  de  leurs  tombeaux  et  indi- 
gnement traînés  à  travers  les  rues  de  Sens  par  les  patriotes, 
frères  et  amis.  (N«  du  13  juillet  1797.) 

Enfin,  la  déposition  de  rarchitecte  Person,  en 
1814,  nous  révèle  ces  détails  : 

Les  22  et  23  mars  1794,  Mif  le  Dauphin  et  Madame  la  Dau- 
phine  ont  été  exhumés  de  la  cathédrale  de  Sens  et  transférés 
dans  le  cimetière  de  l'Hôtel-Dieu...;  ils  ont  été  mis  dans  la 
même  fosse  après  avoir  été  extraits  des  cercueils  de  plomb 
dans  lesquels  ils  reposaient;  Ms^  le  Dauphin  a  été  descendu 
le  premier  dans  la  fosse,  et  Madame  la  Dauphine  la  dernière, 
dans  un  sens  inverse,  les  têtes  au  nord...,  le  bras  gauche  de 
Mi-rle  Dauphin  replié  sur  le  corps  de  Madame  la  Dauphine... 

1)  Ces  procédés  inquaUfiables  étaient  alors  d'un  usage  courant.  Dans 
vni  récit  des  prolîinations  de  Saint-Denis,  le  religieux  donne  ces  horribles 
(IrLiils  :  «  On  n*a  ouvert  le  cercueil  de  Louis  XV  que  dans  le  cimetière,  sur 
'.V  bord  de  la  fosse.  Le  corps,  retiré  du  cercueil  de  plomb,  bien  enveloppé 
•le  linges  et  de  bandelettes,  paraissait  tout  entier  et  bien  conservé  ;  mais. 
^fgagé  de  tout  ce  qui  Venveloppait^  il  n*oflrait  pas  la  figure  d'un  cadavre  ;  tout 
If  corps  tombail  en  putréfaction.  »  Les  documents  ofllciels  l'attestent  du 
reslp  :  pendant  toute  la  Terreur,  les  corps  des  victimes  de  la  guillotine 
••taient,  avant  d'être  jetés  dans  la  fosse,  dépouillés  de  leurs  derniers  vête- 
menLs. 


—  126  — 

La  Convention  elle-même  entendit  les  échos  de 
cette  journée.  Le  Moniteur  a  inséré  cette  mention 
de  la  séance  du  15  prairial  an  II  (3  juin  1794)  : 

Une  députation  de  la  commune  de  Sens  félicite  la  Conven- 
tion nationale  sur  le  décret  par  lequel  elle  a  reconnu  TEtre 
Suprême  et  Timmortallté  de  Tâme,  l'engage  à  rester  à  son 
poste  jusqu'à  ce  que  la  paix  intérieure  et  extérieure  soit  ré- 
tablie. 

Elle  témoigne  aussi  de  sa  sollicitude  sur  les  attentats  com- 
mis contre  Collot  d'Herbois  et  Robespierre,  et  jure  de  ne 
jamais  séparer  son  sort  de  celui  des  représentants  du  peuple. 

Enfin,  elle  annonce  que  les  corps  des  père  et  mère  de 
Capet  ont  été  exhumés  du  temple  où  ils  étaient  déposés,  et 
rappelés,  après  leur  mort,  à  une  égalité  qu'ils  n'avaient  pu 
connaître  pendant  leur  vie  ;  elle  présente  les  plaques  qui 
étaient  sur  les  cercueils  qui,  converties  en  balles,  serviront 
a  détruire  nos  ennemis;  elle  remet  seize  croix  de  différents 
ordres  et  2  mars  4  onces  de  galons  d'or  (1).  [Moniteur,  tome 
XX,  p.  640.) 

fij  Extrait  du  Registre  des  offrandes  faites  à  la  Convention 
nationale 

Du  15  prairial  de  l'an  second  (3  Juin  1701)  de  la  république  française,  une 
et  indivisible. 

Le  citoyen  Meure,  de  la  commune  de  Sens,  district  de  Sens,  dépnrtcmrnl 
de  l'Yonne,  a  déposé  sur  le  bureau  de  la  Convention  nationole.  pour  les 
frais  de  la  guerre,  sept  pkiqucs  en  cuivre  et  une  plaque  en  argent,  prove- 
nant des  cercueils  des  père  et  mère  de  Capet;  plus  une  patène  argent  doré; 
deux  marcs  quatre  onces  de  galons  et  glands  dorés;  trois  chatons,  dont 
deux  rouges  et  un  verd,  montés  en  argent  doré,  provenant  du  tombeau  de 
feu  de  Luynes,  archevêque  de  Sens;  enfin,  seize  décorations  militaires, 
dont  une  grande  de  ci-devant  Saint-Louis  et  une  grande  aussi  de  l'ordre 

du  Saint-Esprit. 

Certifié  conforme, 

DVCHOISI, 

receveur  des  dons  patriotiques  près  la  Conoentlon  nationale. 
(Sens,  Archives  communales.  P.  29.) 

Etat  détaillé  des  objets  (ibidem) 
Nous,  Jean-Baptiste  Hunot  et  Jean-Cluude  Josscy,  officiers  municipaux 


—  127  - 

Cest  tout  ce  que  nous  avons  pu  recueillir  sur 
cette  sinistre  page  d'histoire  qu'on  voudrait  pouvoir 
effacer  de  nos  annales. 

de  la  commune  de  Sens ,  nommés  pour  dresser  l'état  des  croix  déposées 

à  la  municipalité  de  Sens,  conformément  au  décret  du  28  juillet  dernier, 
pour  être,  lesdltes  croix  ainsi  que  plusieurs  autres  effets,  envoyés  aux  ci- 
toyens Hérard.  représentant  du  peuple,  et  Meure,  olBcier  municipal,  qid 
les  remettront  sur  le  bureau  de  la  Convention  nationale  pour  et  au  nom  de 
la  commune  de  Sens. 

1*  Une  croix  de  commandeur,  déposée  par  Charles-Etienne  Loménie, 
cy-devant  évéque  de  Sens. 

2*  Une  croix  de  cy  devant  cordon  rouge,  déposée  par  la  citoyenne  Anne- 
.Uexandrine  Bernard,  épouse  du  citoyen  Testu  Balincourt. 
Croix  de  Saint-Louis  déposées  par  : 
3-  Simon -Nicolas  Gabriel,  ancien  capitaine  de  la  garde  parisienne,  de- 
meurant à  Sens. 

4*  Renand  Daleu.  demeurant  à  Sens. 
S-  Citoyen  Bullioud,  — 

C*       —       Treignac,  — 

?•        —       Biencourt,         — 
8*        —       Jussy,  — 

!h       —       Martineau,        — 
10-        —       Potrincourt,      — 

W       —       André-François  Fortin,  demeurant  à  Sens. 
12*       —       Charles-Marie  Nouette-Goudy.  demeurant  à  Sens. 
13"       —       Laurent-Innocent  Maugé-Pramont.         ^ 
14*       —       Hyacinte-Emangard  Beau  val,  — 

15«       —       Philippe-Christophe  Garsement,  dit  Vauboulon.  demeurant 

à  Sens. 
16*       »       Biaise  Pascal,  demeurant  à  Sens. 
Toutes  lesquelles  croix  sont  en  or  et  émail. 
17«  Une  plaque  d'argent  avec  inscription,  trouvée  sur  le  cercueil  de  la 
mère  de  Capet. 

19*  Deux  grandes  plaques  de  cuivre  avec  inscriptions,  trouvées  sur  le 
cercueil  du  père  de  Capet. 

19"  Une  plaque  de  cuivre  avec  inscription,  trouvée  sur  la  boéte  renfer- 
mant les  entrailles  du  père  dudit  Capet. 

TÙ"  Deux  petites  plaques  en  cuivre  avec  inscriptions,  trouvées  Tune  sur 
sur  le  cereueil  et  l'autre  sur  la  boéte  renfermant  les  entrailles  de  la  mère 
dadilt  Capet. 

21*  Une  plaque  de  cuivre  trouvée  sur  le  cercueil  de  Louis-Nicolas- Victor 
Félix. 


} 


II 


—  las  — 

Quelques  mois  après  ces  événements,  le  sort  du 
mausolée  était  de  nouveau  mis  en  question. 

Person  avait  renoncé  à  déposer  les  statues  dans 
le  Chapitre.  Cette  salle  communiquant  directement 
avec  la  cathédrale,  ne  lui  paraissait  pas  assez  sûre. 
Il  avait  préféré  la  salle  hassc  de  la  maison  de 
l'Œuvre,  voisine  de  la  cathédrale  mais  isolée.  Cet 
asile  cependant  n'offrait  pas  une  protection  aussi 
complète  qu'il  avait  espéré.  Le  17  novembre  1794, 
le  conseil  du  district  .s'en  émeut  et  donne  au  Père 
Laire,  bibliothécaire  du  district,  mandat  spécial 
pour  veiller  à  la  conservation  du  précieux  monu- 
ment. 

Sur  la  déclaration  faite  par  un  membre  que  lemausolc  du 
cy-devant  Dauphin,  qui  existait  autrefois  dans  le  temple  de 
la  raison  de  la  commune  de  Sens,  et  qui  aurait  été  transporté 
dans  un  bâtiment  voisin,  était  exposé  à  des  dégradations 
Journalières;  que  la  main  d*un  des  génies  dudit  monument 
avait  été  même  cassée,  pourquoi  il  invite  Tadministration  à 
prendre  des  mesures  pour  sa  conservation  qui  intéresse  les 
beaux  arts. 

L'agent  national  entendu,  le  conseil  général  du  district 

22*  Une  plaque  do  cuivre  avec  inscription,  trouvée  sur  le  cercueil  de 
Paul  d'Albert  de  LuyncH. 

23'  Une  patène  de  calice,  d'argent,  vermeillée  en  dedans,  déposcp  en  la 
municipalité  de  Sens  par  la  fabrique  de  Soucy  h  laquelle  celle  de  Sens 
l'uvoit  prêté  et  qui  n'a  pas  été  insérée  dans  le  dernier  envoi  de  l'argenterie 
fait  ù  la  Monnoye. 

24*  Ht  enfln  2  marcs  4  onces  4  gros  de  galons  et  glands  d'argent  doré  <lt*- 
posés  en  la  municipalité  de  Sens  par  la  citoyenne  Bérulle,  pour  en  fnire 
hommage  i\  la  Nation. 

25*  Trois  diamants  enchâssés  dans  de  l'argent  vermeille  et  trouvés  cinns 
le  cercueil  de  Paul  d'Albert  de  Luyn(*s. 

I-^*  tout  enfermé  dans  une  boète  ficelée  et  cachetée  fut  emporté  par  in  di- 
ligence le  8  ))rairial  an  II  /28  mai  171)4  . 


—  129  — 

de  Sens,  nrrêlc  qu'il  nomme  le  citoyen  Laire,  bibliothécaire 
de  ce  district,  commissaire  à  Tefiet  de  se  transporter  dans 
le  local  où  est  placé  ledit  monument,  et  faire  pour  sa  con* 
senalion  tout  ce  qu'il  croira  convenable  ;  tous  pouvoirs  lui 
sont  donnés  pour  cet  objet;  il  est  autorisé  même  à  faire 
vuider  les  lieux  par  les  personnes  qui  les  occupent,  et  à 
s'emparer  des  clefs  du  local  où  est  le  monument  (1). 

Toutes  ces  décisions  restaient  lettre  morte  devant 
les  menées  du  comité  révolutionnaire,  furieux  de 
n'avoir  pu  anéantir  ces  œuvres  d'art. 

Il  fallait  que  son  audace  allât  bien  loin  pour  que 
le  maire  Gaulthier  eût  le  courage  de  proposer  au 
conseil  communal  la  délibération  suivante  : 

Ce  jourd'hul  4  messidor  an  III*^  (22  juin  1795),  5  heures  du 
soir,  le  Conseil  général  de  la  commune  de  Sens  en  perma- 
nence et  assemblé  au  lieu  ordinaire 

Le  citoyen-maire  a  dit  que,  sur  la  représentation  à  lui 
faite  qu'il  se  faisait  continuellement  des  dégâts  au  superbe 
mausolé  qui  avoit  été  enlevé  de  la  cy  devant  cathédrale  pour 
être  mis  dans  la  maison  ditte  autrefois  VŒuvre^  il  étoit  in- 
stant de  choisir  un  lieu  plus  convenable  et  le  mettre  à  Tabri 
de  tout  dégât;  qu'en  conséquence  il  proposoit  la  pétition 
suivante  : 

c  Les  maire,  officiers  municipaux  de  la  commune  de  Sens, 
aux  citoyens  administrateurs  du  district  de  Sens. 

ff  La  Terreur  avoit  forcé  la  Municipalité  de  faire  disparaître 
de  la  cy  devant  cathédrale  le  superbe  mozolé  que  les  cir- 
constances des  tems  avoient  élevé.  Les  malveillans  qui  ne 
trouvoient  de  plaisir  que  dans  la  destruction  des  objets  les 
plus  intéressans  donnèrent  à  peine  le  tems  à  la  municipalité 
de  se  procurer  un  local  commode  et  qui  mît  à  Tabri  ce  chef 
d'œuvre.  La  maison  ditte  autrefois  «  l'Œuvre  »  parut  par  sa 

a)/Wrf.  L.  U  96.  f-MS. 


—  130  — 

proximité,  plus  propre  à  recevoir  ce  précieux  dépôt,  où  il 
fut  pour  ainsi  dire  entassé.  Malgré  Tordre  que  la  municipa- 
lité avoit  donné  aux  personnes  qui  demeurent  dans  ce  lieu, 
de  surveiller  ce  dépôt,  il  s'est  introduit  à  plusieurs  fois  des 
gens  qui  se  sont  permis  de  mutiler  plusieurs  flgures.  Hier 
encore  on  a  tenté  de  le  détruire  tout  à  fait. 

<  Le  décret  sur  les  arts  met  ce  monument  sur  la  surveil- 
lance des  autorités  constituées;  la  municipalité  sera  la  pre- 
mière à  le  défendre. 

a  Pourquoi  elle  vous  invite,  citoyens  administrateurs,  de 
vouloir  bien  prendre  Tavis  qu*elle  vous  donne  en  grande 
considération  et  ordonner,  attendu  que  le  lieu  où  est  déposé 
tout  ce  qui  compose  le  mozolé  n'appartient  plus  à  la  Nation, 
et  que  de  jours  à  autres,  il  faudra  le  transporter  ailleurs, 
vous  vouliez  bien  arrêter  qu'il  sera  transféré  dans  une  .des 
chapelles  de  la  cy  devant  cathédrale,  que  le  citoyen  Person 
choisira  pour  placer  ce  dépôt.  »  f Arrêtés  municipaux  i.  VI 

/•«  72.; 

Troisjours  après,  le  conseil  du  district,  saisi  de  la 
pétition  de  la  commune,  décide  à  son  tour  : 

La  matière  disculée  et  le  Procureur  syndic  entendu,  le 
directoire  du  district  de  Sens  :  considérant  que  le  mausolc 
dit  du  Dauphin  est  un  monument  public  qui  intéresse  les 
arts;  que  le  local  où  il  est  déposé  est  devenu  une  propriété 
particulière;  que  les  dégra|daJlions  qu'il  a  souffertes  et  cel- 
les auxquelles  il  est  journellement  exposé  rendent  indispen- 
sables sa  translation  ailleurs;  qu'aucun  local  ne  convient 
mieux  à  cet  effet  que  la  chapelle  dite  de  S.  Jcan^  dans  la  ci- 
devant  cathédrale  ou  tout  autre  que  choisira  le  citoyen  Per- 
son, architecte  cl  sculpteur. 

Considérant  en  outre  que  la  translation  susdite  nécessi- 
tera des  dépenses  qui  devront  être  acquittées  par  le  trésor 
public  et  qu'aux  termes  de  la  loi  du  8  germinal  dernier,  le 
directoire  du  district  ne  peut  délivrer  de  semblables  ordon- 
nances sans  l'homologation  du  département  : 


—  131  — 

Est  d*avis  qu'il  y  a  lieu  par  le  département  d'arrêter  ce  qui 
soit: 

1»  La  municipalité  de  Sens  est  autorisée  à  faire  transférer 
le  mausolée  dit  du  Dauphin  de  la  maison  où  il  est  actuelle- 
ment dans  une  des  chapelles  de  la  ci-devant  cathédrale,  en 
prenant  à  cet  effet  toutes  les  mesures  de  sûreté  et  d'écono- 
mie qui  conviennent; 

2^  Les  dépenses  qui  en  résulteront  seront  acquittées  sur 
les  mémoires  des  ouvriers,  vérifiés  par  l'architecte  qui  diri- 
gera les  travaux,  visés  par  la  municipaUté  et  approuvés  par 
l'administration  du  district; 

3»  Il  sera  en  conséquence  délivré  des  ordonnances  du 
montant  desdits  mémoires  à  prendre  chez  le  receveur  du 
district  de  Sens  sur  les  fonds  de  l'Instruction  publique.  {Ar- 
chives de  r Yonne,  L.  I,  7  messidor  III.) 

Enfin,  le  27  messidor  (15  juillet)  le  district,  en 
présence  d'une  lettre  du  directeur  de  la  commis- 
sion des  arts,  l'invitant  à  veiller  à  la  conservation 
des  monuments;  d'une  pétition  nouvelle  de  Person 
le  priant  «  de  protéger  contre  les  ravages  de  la  mal- 
veillance et  de  l'ignorance  les  morceaux  rares  de 
sculpture  qu'il  possède;  ï»  pressé  par  les  instances 
du  citoyen  Guyot,  acquéreur  de  la  maison  de  l'Œu- 
vre, qui  en  réclame  la  libre  et  entière  jouissance, 
charge  Person  de  procéder  sans  délai  au  transfère- 
nient  du  monument  dans  une  chapelle  (ibid.). 

L'opération  fut  menée  promptement.  Person 
n'avait  plus,  cette  fois,  le  concours  de  marbriers 
parisiens.  Mais  sa  sollicitude  suppléait  à  l'inexpé- 
rience de  ses  ouvriers.  Il  fit  déposer  les  statues, 
non  pas  dans  la  chapelle  de  Saint-Jean,  —  elles 
eussent  été  trop  en  évidence  dans  cette  partie  de 
l'édifice  devenue  le  parc  d'artillerie  de  la  garde  na- 


-  1*32  — 

tionalc  (1),  —  mais  dans  la  chapelle  de  Sainte-Co- 
lombe. Il  se  garda  bien  de  les  rapprocher  el  de 
recomposer  le  tombeau  dont  l'aspect  n'aurait  pas 
manqué  de  réveiller  lés  fureurs  inonoclastes  des 
jacobins  du  cru  ;  mais  il  les  dressa  isolées  autour  de 
la  chapelle. 

Telle  en  était  la  disposition  deux  ans  plus  tard. 

Racontant  le  passage  à  Sens  de  l'ambassadeur 
turc  Esseid-Ali-ElTendi  et  plaisantant  l'embarras  de 
la  municipalité  jacobine,  obligée  d'accueillir  hono- 
rablement le  représentant  d'un  tyran  oriental,  le 
Journal  politique  et  littéraire  du  département  de 
l'Yonne,  du  13 juillet  1797,  écrivait  : 

On  dil  que  rambassadeur  s'ctant  rendu  à  la  cathédrale,  a 
désiré  voir  le  mausolée  du  Dauphin,  père  de  Louis  XVI. 

On  dit  que  la  municipalité  n'a  pas  été  médiocrement  em- 
barrassée quand  il  a  fallu  se  résoudre  à  lever  les  lambeaux 
dune  vieille  tapisserie  et  à  montrer  les  débris  épars  de  ce 
monument. 

Ce  retour  à  la  cathédrale  était  le  salut. 

Toutefois  labri  choisi  par  Person  avait  un  gra- 
ve inconvénient.  Le  procés-verbal  de  visite  de  la 
cathédrale  faite,  le  18  juillet  1797,  par  rarchitecte 
Lepére  et  l'ingénieur  Recoing,  après  avoir  signalé  la 
voûte  d'une  chapelle  de  la  nef  prête  à  s'elTondrer, 


(1)  Dans  le  procès- vt'rl)ai  de  la  première  réunion  des  administrateurs 
élus  par  les  citoyens  catholiques,  réunion  tenue  le  19  août  1795  (la  réou- 
verture de  l'église  au  culte  avait  eu  lieu  le  2Juillc(),  on  lit  :  «  11  a  été  ob- 
servé qu'il  étoil  convenable  de  demander  que  les  canons  Aisscnt  retirés  <lc 
la  cha|)clln  de  S.  Jean  qui  va  redevenir  nécessaire  i>our  les  catéchismes 
et  où  cet  attirail  figuroit  mal.  » 


1 


—  133  — 

dépeint  ainsi  l'état  de  la  chapelle  de  Sainte-Co- 
lombe : 

Nous  en  disons  autant,  à  plus  forte  raison,  de  la  chapelle 
de  Sainte-Colombe,  qui  est  encore  plus  mauvaise  et  présente 
de  très  grandes  lézardes.  On  en  remarque  aussi  à  l*extérieur 
dans  les  murs  de  cette  chapelle,  qui  seraient  déjà  écroulés 
depuis  longtemps  s'ils  n'étaient  assujettis  à  la  charpente  par 
de  forts  liens  de  fer.  On  a  déposé  dans  cette  chapelle  un  mo- 
nument précieux  pour  les  arts.  Lorsqu'il  sera  question  de  l'y 
fixer  définitivement,  il  sera  peut-être  prudent  de  faire  une 
nouvelle  visite  de  l'état  des  murailles  et  de  la  voûte.  Les  pré- 
cautions dont  nous  avons  parlé  garantissent  cependant  cette 
chapelle  d'une  ruine  subite  et  imprévue. 

Il  semble  qu'à  la  faveur  de  la  renaissance  reli- 
gieuse qui  prépara  le  Concordat,  le  monument  fut 
à  peu  près  reconstitué  par  la  juxtaposition  des  sta- 
tues. Cest  du  moins  ce  que  paraissent  indiquer  les 
mentions  des  divers  inventaires  dressés  par  les  soins , 
de  la  fabrique  : 

Année  1801.  Article  dQ.  Chapelle  Sainte-Colombe.,.,  «  une  ar- 
moire en  chêne  contenant  les  débris  du  mausolée.  Le  mau- 
solée au  milieu  de  la  chapelle,  b 

Année  1802.  La  chapelle  sert  alors  de  sacristie.  Elle  est 
fermée  par  c  deux  pièces  de  tapisserie.  » 

Année  1807.  Chapelle  Sainte-Colombe  :  c  Le  mausolée  de 
M?*^  le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine  avec  la  grille  qui 
l'entourait  et  une  caisse  dans  laquelle  sont  renfermés  divers 
ornements  en  dépendant.  —  Le  modèle  des  bas-reliefs  desti- 
nés à  la  porte  Dauphine.  » 

Année  1812.  Texte  identique. 


chapitrp:  IX 


1814 


§  P^    RESTAURATION    DU   MAUSOLÉE 

Vingt  années  marquées  de  tant  d'événements  tra- 
giques, n'avaient  pas  effacé  le  pénible  et  humiliant 
souvenir  des  excès  révolutionnaires.  Plus  d'une  fois 
la  vue  des  débris  du  monument,  jadis  objet  de  la 
fierté  des  Sénonais,  avait  éveillé  la  pensée  de  le 
reconstituer.  Et  puis,  les  odieuses  profanations  de 
1794  ne  réclamaient-elles  pas  une  réparation? 

Mais  les  circonstances  rendaient  irréalisable  ce 
désir.  Le  gouvernement  impérial  n'eût  pas  manqué 
de  considérer  comme  une  manifestation  royaliste  et 
hostile  ce  qui  pourtant  n'eût  été  que  Taccomplisse- 
ment  d'un  devoir  de  piété,  de  justice  et  d'humanité. 

Ce  vœu  n'en  était  pas  moins  au  cœur  des  nom- 
breux Sénonais  restés  fidèles  aux  traditions  de  leur 
cité,  car  nous  le  voyons  se  manifester  spontané- 
ment dès  le  premier  instant  où  il  est  possible  de  le 
formuler  librement. 


L*^. 


—  135  — 

i  Nous  oserons  même  réclamer  un  jour  votre  présence 
chérie  pour  notre  ville  fidèle,  di^  aient,  le  29  avril  1814,  dans 
leur  adresse  à  M.  le  comte  d'Artois,  les  délégués  de  la  ville 
de  Sens  (1).  Elle  aura  à  lui  représenter  les  cendres  de  ses 
augustes  parents  dont  nous  étions  dépositaires,  et  que  nous 
avons  su  préserver  de  la  tempête.  Votre  Altesse  Royale 
recevra  ce  monument  consacré  à  leur  mémoire,  et  elle  fera 
renaître  cette  touchante  solennité,  dans  laquelle  notre  pro- 
vince unissait,  chaque  année,  ses  regrets  à  ceux  de  la 
famille  royale,  sur  la  perte  de  Monseigneur  le  Dauphin  et 
de  Madame  la  Dauphine. 

I  Ombres  sacrées,  c'est  vous  dont  les  vœux  pour  la  France, 
unis  à  ceux  de  votre  digne  fils,  ont  opéré  les  merveilles 
dont  nous  sommes  témoins  en  ce  jour  et  qui  assurent  le 
Iwnheur  de  l'Europe.  »  {Affiches  de  Sens,  10  mai  1814.) 

Voilà  nettement  précisé  le  projet  caressé  depuis 
longtemps  déjà  et  dont  l'un  des  représentants  de 
Sens,  M.  Benoisl  de  la  Mothe  (2),  paraît  avoir  été, 
avecrarchitecte  Person,  le  principal  instigateur. 

Bientôt,  la  ville  apprenait  avec  joie  les  paroles 
flatteuses  adressées  par  Louis  XVIIl  aux  envoyés  de 
Sens,  venus  le  saluer  à  Paris,  le  7  mai.  Aussitôt,  le 
conseil  municipal  prend  l'initiative  d'une  souscrip- 
tion c  proposée  aux  habitans  du  département  de 


1)  MM.  Comisset  et  Benoist  de  la  Mothe  désignés,  le  21  avril,  par  le 
Conseil  municiixil  pour  se  rendre  à  Paris. 

2)  Ce  personnage,  si  fervent  royaliste  en  1814,  avait  joué  un  rôle  assez 
bruyant  et  nianifcnté  des  opinions  tout  autres  à  répoque  de  la  Terreur. 
On  peut  lire  dans  les  Affiches  de  Sens  de  l'an  1794  nombre  de  poésies  révo- 
lutionnaires et  d'hymnes  à  l'Etre  suprême  qui  i>ortent  la  signature  :  Be- 
noist Lamothe  (sans  particule). 

il  mourut  en  septembre  1817,  laissant  à  la  ville  de  Sens  une  somme  de 
]  200  livres,  pour  fonder  et  décerner  tous  les  deux  ans  un  prix  de  piété 
liliale.  (Délibérations  du  Conseil  municipal,  23  sept.  1817,  f*  141.) 


' 


—  136  — 

l'Yonne  et  de  l'ancien  diocèse  de  Sens.  »  Voici  le 

texte  de    cette   délibération  qui  fut  imprimée  et 

répandue  : 

RESTAURATION 

DANS   LA  CATHÉDRALE  DE  SENS 

DU  MAUSOLÉE 

DE  MONSEIGNEUR  LE  DAUPHIN  ET  DE  MADAME  LA  DAUPHINE 
AUTEURS  DU    ROI 

Souscriplion  proposée  aux  habitons  du  départemenl  de  V  Yonne 
et  de  l'ancien  diocèse  de  Sens 

Cejourd'huî  14  mai  1814,  le  Conseil  municipal  assemblé, 
sur  la  proposition  d'un  Membre,  qui  a  rappelé  la  réponse 
faite  spontanément  par  le  Roi  aux  Députés  de  la  ville  de 
Sens,  réponse  conçue  en  ces  termes  : 

€  Je  me  souviendrai  toujours  que  les  cendres  des  auteurs 
de  mes  jours  ont  été  conservées  dans  la  ville  de  Sens.  » 

Le  Conseil,  considérant  que  ce  précieux  souvenir  du  Roi 
impose  h  la  ville  le  devoir  de  rendre  sans  délai  h  cet  au- 
guste dépôt  sa  splendeur  première  ; 

Considérant  que  le  moyen  le  plus  sûr  pour  y  parvenir  est 
de  relever  ce  superbe  Mausolée  consacré  à  leur  mémoire, 
et  qui  tout  imparfait  qu'il  est  en  ce  moment,  attire  encore 
l'admiration  de  tous  ceux  qui  le  voyent;  que  ce  monument 
va  acquérir  utï  intérêt  bien  plus  touchant,  par  les  témoi- 
gnages d'amour  dont  tous  les  Français  veulent  entourer 
leur  Roi  ; 

Considérant  que  la  conservation  de  ce  monument  est  duc 
au  zèle  et  aux  talens  de  M.  Person,  architecte-sculpteur  à 
Sens,  et  qu'il  est  de  toute  justice  de  lui  en  confier  la  res- 
tauration ; 

Considérant  que  cette  dépense,  dont  la  ville  aimerait  à 
faire  seule  les  frais  par  une  souscription  volontaire,  devien- 
drait un  fardeau  trop  lourd,  même  pour  rarrondissemcnt, 
dont  la  ruine  causée  par  les  maux  delà  guerre  est  connue 
de  toute  la  France  ; 

Considérant  qu'indépendamment  des  frais  de  restaura- 


—  137  — 

tion,  il  en  est  d  autres  indispensables  pour  préparer  le  re- 
tour de  cette  pompe  funèbre  qui  étoit  célébrée  annuelle- 
ment dans  la  cathédrale  de  Sens,  et  qu'il  est  du  devoir  de  la 
ville  que  cette  solennité  ait  lieu,  selon  Tusage,  le  19  décem- 
bre de  cette  année  ; 

Considérant,  enfîn,  que  c*cst  seconder  le  zèle  et  flatter 
lamour  pour  le  Roi  de  tous  les  habitans  du  département  de 
lYonne,  et  même  de  Tancien  diocèse  de  Sens,  que  de  les 
inviter  à  concourir  aux  hommages  que  les  habitans  de  la 
ville  de  Sens  désirent  rendre  aux  auteurs  de  notre  auguste 
Monarque  ; 

Le  Conseil  arrête  : 

lo  A  compter  du  l«r  juin  prochain,  il  sera  ouvert  une 
souscription  dans  les  cinq  chef-lieux  d'arrondissement  du 
département  de  l'Yonne  ; 

2"  MM.  les  Sous-Préfets  et  les  Maires  des  chefs-lieux  se- 
ront invités  d'en  donner  connaissance  à  lous  leurs  admi- 
nistrés et  de  vouloir  bien  recevoir  tout  ce  qui  leur  sera 
remis  ou  adressé,  depuis  la  somme  de  un  franc,  pour  que 
le  manœuvre  même  ait  la  consolation  de  présenter  son 
offrande  ; 

3o  La  souscription  s'étendra  aux  villes  les  plus  impor- 
tantes de  l'ancien  diocèse,  telles  que  Melun,  Provins,  Fon- 
tainebleau, Nemours,  Montargis,  Etampes,  etc. 

4o  La  liste  des  souscripteurs  sera  rendue  publique  à  la  fîn 
de  novembre  et  adressée  aux  chefs-lieux  de  chaque  arron- 
dissement ; 

a*'  A  partir  du  lor  juin,  M.  Person  prendra  ses  mesures 
pour  commencer  le  travail  de  la  restauration  du  Mausolée, 
et  contractera  rengagement  formel  de  le  rétablir  dans  le 
chœur,  sur  son  ancien  emplacement,  pour  le  30  septembre  ; 

&'  MM.  Lornc,  Benoist  de  la  Mothe,  Pelée  de  Saint-Mau- 
rice, Bardin  etTarbé,  sont  nommés  membres  de  la  commis- 
sion chargée  de  surveiller  cette  opération,  et  d'en  informer 
le  conseil  à  la  fln  de  chaque  mois; 

7'*  Le  conseil  a  choisi  pour  agent  principal  et  comptable 


—  138  — 

• 

de  la  commission  M.  I^noist  de  la  Mothe.  Il  se  chargera 
gratuitement  de  la  recette  de  tous  les  arrondissements,  de 
toutes  les  villes  et  paroisses  de  l'ancien  diocèse,  et  même 
de^>  offrandes  qui  pourraient  être  faites  par  toutes  les  au- 
tres personnes  ;  il  suivra  aussi  tous  les  détails  de  corres- 
pondance et  d'exécution  ; 

8»  Copie  de  la  présente  délibération  sera  adressée  à  Son 
Excellence  le  Ministre  de  Tintérieur  et  à  M.  le  Préfet  du  dé- 
partement. 

Fait  au  Conseil  général  les  dits  jour  et  an. 

Nota.  —  Les  membres  de  la  commission  se  sont  adjoints, 
pour  s'aider  de  leurs  conseils  et  de  leur  zèle,  MM.  de  Vau- 
dricourt  et  de  Formanoir,  le  premier,  grand  archidiacre  du 
diocèse  de  Sens,  et  le  second,  curé-doyen  de  la  ville. 

La  commission,  dans  son  désir  de  faire  vite, 
comptait  sans  les  lenteurs  administratives,  les  sus- 
ceptibilités oml)rageuses,  les  difncultés  financières 
auxquelles  elle  devait  se  heurter. 

Le  préfet  du  département  avait,  il  est  vrai,  ac- 
cueilli le  projet  avec  grand  empressement.  Dès  le 
8  juin,  il  le  soumet  à  Tapprobation  ministérielle. 
Mais,  tout  au  travail  de  l'organisation  du  régime 
nouveau,  le  Ministre  avait  d'autres  soucis.  Un  mois 
seulement  après,  il  se  décide  à  répondre  : 

Paris,  8  juillet  1814. 
Monsieur  le  Préfet, 

J'ai  sous  les  yeux  votre  lettre  du  8  juin  dernier  et  les  piè- 
ces relatives  i\  la  restauration  des  monuments  élevés  autre- 
fois, dans  la  calliédrale  de  Sens,  à  la  mémoire  de  Monsei- 
gneur le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine. 

Cet  ol>jct  est  du  plus  haut  intéréi  et  je  vois  avec  satisfaction 
l'attention  (jue  vous  y  avez  apportée.  Mais  les  observations 
que  vous  faites  à  cette  occasion  sont  fondées  et,  avant  de 
rien  statuer,  il  est  indispensable  de  connaître,  au  moins  ap- 


_  139  _ 

proximativement,  la  dépense.  Insistez  donc  pour  avoir  des 
détails  à  ce  sujet,  soit  du  conseil  municipal,  soit  de  Tartiste 
zélé  à  qui  seront  confiés  les  travaux.  Aussitôt  que  vous  au- 
rez ces  détails,  vous  me  les  adresserez  avec  votre  opinion 
sar  ce  que  vous  jugerez  que  pourrait  produire  la  souscrip- 
tion. Si  ce  produit,  d'après  ce  que  vous  aurez  été  à  même 
de  voir,  ne  devait  pas  s'élever  à  la  somme  présumée  néces- 
saire, vous  indiqueriez  les  moyens  d'y  suppléer. 

Quand  j'aurai  ce  travail,  et  j'espère  l'avoir  bientôt,  je 
prendrai  les  ordres  du  Roi  que  je  vous  transmettrai  en- 
suite. Je  suis... 

Par  ordre  de  Son  Excellence,  • 

Le  Directeur  de  la  correspondance , 
chef  de  la  3^  division. 

De  Neuville. 
,  Archives  de  V  Yonne,  V  20.) 

Heureusement  M.  de  la  Mothe,  dont  Tardeur  ne 
connaissait  pas  d*obstacles,  multipliait  les  démar- 
ches, stimulait  toutes  les  volontés  hésitantes,  met- 
lait  en  mouvement  toutes  les  influences. 

I^  4  août,  il  communique  à  M.  de  Formanoir, 
curé  de  la  cathédrale  de  Sens,  une  lettre  qu'il  vient 
de  recevoir.  L'auteur  n'en  est  pas  désigné,  mais  les 
renseignements  qu'il  fournit  indiquent  assez  qu'il 
occupe  une  haute  situation  : 

Monsieur.  J'ai  cru  ne  pas  devoir  gagner  de  vitesse  M.  le 
Grand  Aumônier,  et  j'ai  voulu  vous  ménager  la  surprise  de 
sa  lettre  qui  doit  être  autographe.  11  m'est  fort  agréable  d'a- 
voir négocié  une  solution  qui  parait  vous  flatter  sous  tous 
les  rapports. 

Voilà  une  première  question  résolue.  Le  mausolée  doit 
lire  replacé  dans  le  chœur  de  la  cathédrale,  c'est  la  volonté 
bien  prononcée  du  Roi  dont  vous  avez  un  témoignage  offi- 
ciel. 


—  140  — 

Quant  à  la  Iranslation  des  cendres,  c*est  un  cérémonial 
absolument  étranger^  l'autorité  du  Roi  et  qui  est  exclusive- 
ment dans  les  attributions  du  pouvoir  épiscopal.  Cette  opi- 
nion ne  peut  être  controversée.  Si  M.  l'évéque  de  Troycs 
ne  juge  point  à  propos  d'y  assister  en  personne,  il  a  seul  le 
droit  de  déléguer  un  commissaire  ad  hoc. 

Il  est  donc  convenable  que  vous  vous  empressiez  d'infor- 
mer M.  révoque  de  l'ordre  du  Roi  qui  vous  a  été  transmis 
par  M.  le  Grand  Aumônier,  et  comme  l'exécution  de  cet  or- 
dre est  subordonnée  à  la  translation  des  restes  des  augustes 
morts,  vous  aurez  nécessairement  à  prier  M.  l'évéque  de 
vouloir  bien  prononcer  le  plus  tôt  possible  sur  le  cérémo- 
nial de  cette  translation  (1). 

A  défaut  de  la  Icllrc  du  grand  Aumônier,  la  pièce 
précédente  en  résume  suffisamment  la  teneur.  La 
décision  royale  tranchait  la  question  de  principe  : 
restaient  les  détails  bien  autrement  difficiles  à 
régler. 

Les  promoteurs  du  projet,  on  Ta  vu,  s'étaient 
assuré  le  concours  du  pouvoir  civil.  Ils  avaient  né- 
gligé l'autorité  religieuse.  Or  l'évéque  de  Troyes, 
Ma*" de  Boulogne,  estimait  qu'on  ne  pouvait,  sans  son 
assentiment  et  même  sa  coopération,  ériger  un 
monument  dans  le  chœur  de  la  cathédrale  de  Sens, 
ni  exhumer,  pour  les  y  replacer,  les  restes  des 
princes.  Il  regardait  le  rôle  accessoire  attribué  à 
deux  ecclésiastiques  par  la  commission  comme  in- 
suffisant, sinon  dérisoire. 

C.onvaincu   que  la  commission  sénonaise   avait 


(I)  r.rllo  IiMlro,  ainsi  que  louli's  ]vs  pircrs  du  (foxnier  de  l'ormatioir  tloxM 
M.  HéniKiic  Tonnellier,  niuicn  niljricicn  de  In  Mitropole,  uous  a  laissé 
df»  copies,  est  en  la  possission  de  la  rainille  de  Sêheville,  lierilière  de 
.M.  l'abbé  de  Fornanoir, 


—  141  — 

empiété  sur  ses  droits,  le  prélat  ripostait,  le  21  juil- 
let, par  une  ordonnance,  nommant  M.  de  Forma- 
noir,  curé-doyen  de  Sens,  commissaire  pour  sur- 
veiller la  restauration  du  mausolée;  Tautorisant 
pendant  tout  le  temps  que  durera  cette  restauration 
à  faire  le  service  divin  dans  telle  partie  de  l'église 
qu'il  jugera  convenable  et  le  chargeant  «  de  lui 
rendre  compte  de  l'exécution  de  ladite  restaura- 
tion, •  déclarant  qu'il  donne  «  d'autant  plus  volon- 
tiereles  mains  à  cette  opération  qu'elle  est  parfaite- 
ment conforme  à  ses  principes  ainsi  qu'à  son  cœur.  ^ 
(Dossier  de  Formanoir.) 

Le  conseil  municipal,  qui  avait  constitué  la  com- 
mission, comprit  la  leçon.  Il  eut  le  bon  esprit,  tout 
en  faisant  ses  réserves,  d'adjoindre  à  cette  com- 
mission, par  une  nomination  en  règle,  les  deux  ec- 
clésiastiques délégués  par  l'évêque. 

Du  reste  un  événement  heureux,  la  visite  de 
Madame  la  duchesse  d'Angoulême,  vint  à  point 
aplanir  toutes  les  difficultés  et  stimuler  le  zèle  de 
tous. 

La  fille  de  Louis  XVI,  revenant  de  Bourgogne, 
Ira  versai  t  le  départemen  t .  Arrivée  à  Avallon  le  10  août 
au' soir,  elle  en  était  partie  le  11  de  grand  matin 
pour  déjeuner  à  Auxerre.  Après  deux  heures  de 
séjour  au  chef-lieu  du  département,  la  princesse 
s'était  dirigée  sur  Sens.  Dans  son  rapport  au  Minis- 
tre de  rintérieur,  la  préfet  raconte  ainsi  cette  vi- 
site (1)  : 

(1)  Dalletin  de  la  Préfecture  de  VYonne,  n- 1"  (20  août  1814). 


—  142  — 

Son  Altesse  Royale  est  entrée  à  Sens  vers  5  heures  du 
soir. 

Des  daines  en  parure  étaient  allées  à  sa  rencontre.  Arrivée 
à  la  porte  Dauphine,  des  mariniers  ont  dételé  les  chevaux 
de  sa  voiture,  et  l'ont  conduite  jusqu'à  la  cathédrale;  elle  y 
a  trouvé  le  curé  et  son  clergé,  est  entrée  dans  le  sanctuaire 
et  s'est  mise  à  genoux  sur  la  tombe  du  Dauphin  et  de  la 
Dauphine,  ses  augustes  aïeux;  et,  après  s'y  être  recueillie 
quelque  tems,  elle  est  entrée  dans  la  chapelle  où  est  déposé 
le  monument  du  célèbre  Coustou,  érigé  en  leur  honneur.  Sa 
voiture,  reprise  par  les  mariniers,  a  été  conduite  à  riiôtel 
qui  lui  avait  été  destiné.  Les  autorités  lui  ont  été  présentées 
et  ont  eu  l'honneur  de  la  haranguer. 

Le  lendemain  12,  à  6  heures  du  matin.  Madame  s'est  mise 
en  roule  pour  Orléans.  Elle  a  été  reçue  à  Pont-sur- Yonne 
et  à  Villeneuve-la-Guyard,  avec  les  mêmes  acclamations  et 
les  mêmes  transports  de  joie  et  d'admiration. 

En  voyant  la  princesse  prosternée  sur  un  tombeau 
vide,  et  douloureusement  émue  devant  les  débris 
du  mausolée,  tous  les  assistants  avaient  éprouvé  le 
regret  de  n'avoir  pas  agi  plus  vite  et  formé  la  résolu- 
tion de  réaliser  au  plus  tôt  leur  projet. 

Le  31  août,  le  conseil  municipal,  statuant  sur  le 
rapport  de  la  commission,  prie  le  préfet  «  d'em- 
ployer ses  bons  offices  pour  obtenir  le  concours  des 
quatre  cent  soixanle-dix-neut  communes  du.dépar- 
tement  et  de  lui  soumettre  le  devis  dressé  par 
Person  (1).  ï) 

Ce  devis  est  d'un  grand  intérêt.  Grâce  à  lui,  nous 
connaissons  exactement  les  dégradations  subies  par 
le  monument  de  Coustou  et  les  parties  refaites  en 
1814. 

(1)  Archives  commun,  de  Sens  (Reg.  des  dêlilKTations  n'  3). 


m 


—  143  — 

DE^'IS    POUR  LA   RESTAURATION   DU  MAUSOLÉE 

Je,  soussigné,  Pierre  Pcrson,  architecte  statuaire,  demeu- 
rant à  Sens,  nommé  par  la  délibération  du  Conseil  muni- 
cipal de  la  ville,  en  date  du  14  mai  dernier,  pour  exécuter 
la  restauration  et  le  replacement  dans  le  chœur  de  la  cathé- 
drale du  mausolée  de  Ms'  le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dau- 
phine,  auteurs  des  jours  du  Roi,  déclare  prendre  envers  la 
commission  chargée  de  la  surveillance  desdits  travaux,  les 
engagements  cy  après,  savoir  : 

1*"  De  fournir  toutes  les  parties  manquantes  en  bronze, 
doré  d*or  moulu,  telles  que  les  écussons  accolés  des  armes 
du  Dauphiné  et  de  Saxe  et  quelques  parties  de  Técusson  du 
Dauphiné; 

2o  Les  deux  couronnes  isolées  terminées  par  quatre  dau- 
phins dont  un  seul  existe  ; 

>  Bouts  de  cyprès  couleur  bronze  et  deux  bouts  du  ruban 
doré  qui  entrelacent  les  cyprès  ; 

4»  Les  étoiles  qui  manquent  à  la  couronne  tenue  par  la 
figure  représentant  la  Religion  ; 

5"  Redorer  les  cartouches  et  généralement  remettre  à  neuf 
toutes  les  parties  dans  leur  état  primitif; 

&*  Fournir  toutes  les  vis  qui  attachent  les  bronzes  sur  le 
marbre,  tous  les  crampons,  crochets,  goujons  et  toutes  les 
cales  de  plomb  nécessaires  pour  la  pose  des  fîgurcs  ; 

7»>  Refaire  à  neuf  la  première  assise  de  pierre  qui  forme 
le  no3'au  du  socle  ; 

8o  Remettre  à  neuf  les  épitaphes  et  en  redorer  les  carac- 
tères ; 

9'>  Réparer  les  fractures  du  socle  en  marbre  blanc  veiné, 
refaire  les  joints  en  entier  et  les  repasser  au  poli  ainsi  que 
Jes  marbres  du  piédestal  ; 

KX*  Démonter  la  grille,  à  hauteur  d'appui,  qui  entoure  le 
monument,  la  reposer  et  substituer  au  grillage  en  laiton  de 
petits  barreaux  de  fer  rond  distans  de  trois  pouces  avec 
des  embases  en  cuivre  ; 

11'*  Fournir  les  cercueils  en  plomb  et  en  chêne  pour  ren- 


—  i;i  — 

feroier  les  augustes  cendres:  en  Caire  rextracUon  du  cime- 
tière, préparer  le  caveau  pour  les  recevoir  et  les  déposer  sur 
des  chenets  de  fer:  refermer  le  caveau,  placer  dessus  le 
inausoiée  entouré  de  sa  grille  et  (aire  toat  le  carrelage 
qa'aura  nécessité  le  mouvement  du  sol  : 

\2*  Recarreler  également  l'emplacement  occupé  pnr  le 
tiKinument  dans  la  chapelle  de  Sainte-Colombe  et  générale- 
ment réparer  le  carreau  et  les  marches  qui  auraient  été  alté- 
rés par  le  déplacement  ; 

1>  De  remettre  pour  le  premier  novembre  prochain  sans 
délai,  le  mausolée  dans  sa  splendeur  primitive  sur  Tancien 
cmpbcement  qu'il  occupait  dans  le  chœur  (1>. 

Je  m'oblige  encor  : 

V-  A  rétablir  sur  le  baldaquin  du  maitre-autel  les  attributs 
fioriés  par  des  anges,  ainsi  que  le  serpent  qui  entoure  la 
boule  au  pied  de  la  croix  ; 

2-  A  refaire  les  bas-reliefs  des  auteb  des  deux  chapelles  ii 
I  entrée  du  chœur,  l'un  représentant  le  mariage  de  S.  Louis, 
1  autre  S.  Martin  qui  partage  son  manteau  avec  cm  pauvre  ; 
rétablir  dans  leur  état  primitif  les  trophées  de  la  Religion 
qui  omoient  les  entre  pilastres  de  ces  chapelles  ; 

3'  Redorer  la  croix  rayonnante,  les  rosaces  et  anneaux  des 
autels  des  chapelles; 

I*'  Raccorder  la  main  de  la  figure  représentant  la  Justice 
placée  au-dessus  de  la  corniche. 

Pour  tous  lesquels  travaux,  dépenses,  avances  et  frais  de 
direction  des  ouvrages,  il  me  sera  payé  la  somme  de  six 
mille  quatre  cents  francs,  savoir  :  trois  mille  quatre  cents 
fnincs,  de  ce  jour  au  premier  novembre  prochain,  époque 
Jîxée  pour  le  perfectionnement  des  travaux,  et  trois  mille 
francs  payables  dans  trois  années  avec  les  intérêts  à  cinq 
|iour  cent. 

Ht  moi,  Louis-Claude  Benoist  de  la  Mothe,  nommé  agent 
de  la  commission,  désirant  que  le  travail  confié  à  M.  Person 

4 II  On  /!/  en  marge  /Nota  :  Ces  conditions  font  seules  In  matière  «lu 
ikvU  nrrélé  iwr  le  Ministre  iwur  7000  francs. 


k 


y>:îETt   ARCHEOLOCHa-B  DE  SESS. 


T.    XXII,  PL.    Xlll.   p.    144. 


LE  CHŒUR  DE  LA  CATHEDRALE  DE  SENS 

en    1 840 


ii 


I' 

I 

f 
I  •. 


î 


I 


—  145  — 

soit  à  Tabri  du  retard  qui  peut  résulter  tant  de  Tincertitude 
do  produit  de  la  souscription  que  de  l'approbation  du  de- 
vis (li  demandé  par  le  ministre  à  mondit  s.  Person,  devis 
qui  s  élève  à  la  somme  de  sept  mille  trente-quatre  francs 
quatre-vingts  centimes,  plein  de  confiance  aussi  dans  la  jus- 
lice  du  Ministre,  dans  la  délicatesse  des  membres  du  Conseil 
municipal  et  dans  la  probité  de  M.  Person,  je  m'engage  per- 
sonnellement vis  à  vis  dudit  sieur  Person,  à  lui  payer  de 
mes  deniers,  d'ici  au  l^r  novembre  prochain,  la  somme  de 
deux  mille  huit  cents  francs,  faisant,  avec  les  six  cents 
francs  qui  lui  ont  été  délivrés  le  25  juillet  dernier,  les 
3400  francs  dont  il  se  tient  satisfait  en  ce  moment,  se  ré- 
servant pour  le  surplus  l'exercice  de  ses  droits  envers  qui 
il  appartiendra. 

Fait  double,  entre  nous  soussignés,  à  Sens,  ce  premier 
septembre  mil  huit  cent  quatorze. 

(Signé  :)  Benoist  de  la  Mothe  et  Person  (2). 

L'harmonie  parait  régner  dés  lors  dans  la  com- 
mission. Elle  déploie  une  heureuse  activité. 

Le  15  septembre,  elle  lance  un  nouvel  appel,  an- 
nonce que  la  première  liste  de  souscripteurs  sera 
publiée  au  commencement  d'octobre  et  promet 
Térection  du  mausolée  pour  le  1er  novembre  (3). 

L'administration  était  moins  empressée.  Le  12  no- 
vembre seulement,  le  Préfet  informe  le  Sous-Préfet 
de  Sens  que  la  restauration  du  mausolée  est  officiel- 
lement approuvée  : 

Monsieur,  je  m'empresse  devons  informer  que  S.  G.  leMi- 
aistre  de  l'Intérieur  a  définitivement  autorisé  la  restauration 

il  En  marge  :  Nota  :  Ijë  devis  n*a  été  nrrclc  par  le  Ministre  que  le 
V>  novembre  1814. 

(2)  Archives  communales  de  Sens,  L  27.  Cette  pièce  est  une  copie  faite,  le 
24  mars  1816,  par  Benoist  de  la  Mothe. 

{3)  Affiches  de  Sens,  20  septembre  1814. 

10 


—  146  — 

du  mausolée  de  Mifi*  le  Dauphin  et  de  Mme  la  Dauphine,  ainsi 
que  le  replacement  de  ce  monument  dans  l'église  de 
S.  Etienne  de  Sens. 

S.  Exe.  a  approuvé  la  dépense,  en  l'arrêtant  à  7000 francs; 
il  n'y  a  plus,  conséquemment,  d'obstacle  à  la  continuation 
des  travaux  de  restauration  et  je  vous  invite  à  donner  des 
ordres  pour  qu'ils  soient  promptenient  terminés. 

Il  me  parait  nécessaire  que,  de  concert  avec  la  commis- 
sion, vous  fixiez  un  terme  pour  la  souscription.  Lorsqu'elle 
sera  close,  vous  m'en  ferez  connaître  le  produit,  afin  que 
je  sollicite  l'allocation  de  la  somme  nécessaire  pour  solder 
la  dépense.  Cette  somme  sera  comprise  au  budget  départe- 
mental et  payable  dans  le  cours  de  l'année  prochaine. 

S.  G.  n'a  pas  encore  fait  connaître  ses  intentions  relative- 
ment à  l'exhumation  des  cendres  de  M?r  le  Dauphin  et  de 
Mnio  la  Dauphine.  Vous  devez  donc,  jusqu'à  ce  que  la  déci- 
sion que  j'ai  sollicitée  vous  soit  connue,  vous  conformer 
aux  instructions  que  je  vous  ai  adressées. 

Mais  il  serait  possible  que,  sans  attendre  que  ces  cendres 
soient  rétablies  dans  le  lieu  qui  leur  est  destiné,  on  voulût 
célébrer  la  cérémonie  religieuse  qui  avait  été  annoncée  pour 
le  20  décembre  prochain.  Je  désire  savoir  très  promptement 
ce  qui  aura  été  arrêté  à  cet  égard  par  TÂutorité  locale,  pour 
que  je  puisse  en  rendre  compte  ù  LL.  AÂ.  RR.  le  duc  d'Ân- 
goulême  et  le  duc  de  Berry,  et  les  prier  d'honorer  cette  cé- 
rémonie de  leur  présence. 

Veuillez  donc,  aussitôt  la  réception  de  cette  lettre,  appeler 
près  de  vous  M.  le  Maire,  le  curé  de  S.  Etienne  et  les  mem  • 
bres  de  la  commission,  à  l'eflet  de  prendre  une  détermina- 
tion cl,  de  concert,  les  moyens  d'exécution. 

Vous  me  ferez  connaître,  Monsieur,  les  résultats  de  cette 
conférence  pour  que  je  fasse  les  démarches  que  je  jugerai 
utiles  et  convenables. 

J'attends  votre  réponse  par  retour  du  courrier  sans  faute. 

Le  Préfet  de  V  Yonne ^ 
Chevalier  de  la  Légion  d*honneur, 

Gamot.  [Arch.  de  l'Yonne,  V.  20.) 


'     —  147  — 

Les  membres  de  la  commission  sénonaîse,  réunis 
le  16  novembre,  répondent  au  Préfet  : 

1*>  Qu'ils  regardent  en  ce  moment  leur  mission  comme 
terminée  puisque  le  mausolée  est  entièrement  replacé  dans 
le  chœur  (1)  et  que  le  sieur  Person  a  justifié,  par  la  perfec- 
tion de  son  travail,  la  confiance  du  conseil  municipal  et  les 
desseins  de  la  commission  ; 

2«  Qu'ils  ont  vu  avec  reconnaissance  Tapprobation  du 
devis  du  sieur  Person  et  la  mesure  prise  par  M.  le  Préfet 
pour  eflcctuer  le  paiement  en  suppléant,  autant  qu'il  sera 
oéccssaire,  ù  rinsuffisance  du  produit  de  la  souscription  (2); 

3»  Quïls  estiment  convenable  de  proroger  la  souscription 
jusqu'au  31  décembre,  tant  pour  profiter  du  zèle  de  toutes 
les  personnes  qui  désirent  y  concourir  que  pour  diminuer 
le  fardeau  des  charges  départementales  ; 


(1)  En  transnietUint  cette  délibération,  le  sous-préfet  déclare  que  «  cette 
opération  importante  est  terminée,  sauf  quelques  accessoires  qui  exigent 
pou  de  travail.  » 

i2)  Au  1"  novembre,  la  souscription  avait  produit  3400  francs.  Le  9  dé- 
cembre, elle  s'élevait  à  3885  fr.  50.  (Lettre  de  M.  de  la  Mothe  au  Préfet. 
Archives  de  l'Yonne.  V  20.) 

Sur  cette  somme,  on  avait  déjA  dépensé  3000  francs  payés  à  Person, 
IjO  francs  pour  les  frais  d'impression  de  M.  Tarbé.  et  8  francs  pour  menus 
frais. 

Comme  il  fallait  le  prévoir,  le  zèle  des  souscripteurs  se  refroidit  bientôt 
avec  celui  des  promoteur^  de  la  souscription,  une  fois  le  monument  ter- 
miné. Lc5  juin  1815,  deux  ouvriers  adressent  à  Person  une  mise  en  demeure 
de  les  payer.  Les  signataires  déclarent  qu'à  défaut  du  Préfet  et  du  Ministre 
qui  ne  les  payent  pas,  ils  ne  peuvent  s'en  prendre  qu'à  celui  qui  les  a  mis 
en  ouvrage.  (Ibid.) 

Dans  une  lettre  du  même  dossier,  sans  indication  du  destinataire,  pro- 
bablement adressée  à  Jean-Charles  Sauvalle,  originaire  de  Sens,  et  alors 
v>crctaire  général  de  la  préfecture,  le  malheureux  Person  expose  son  cruel 
embarras.  «  Sens,  le  19  juin  1815.  Lorsque  j'eus  l'honneur  de  me  présenter 
à  vous  et  de  vous  peindre  ma  position,  vous  eûtes  la  bonté  de  vous  i  inté- 
resser et  déjà  vous  m'en  donâtes  des  marques,  et  je  ne  pouvais  perdre  de 
vue  l'époque  marquée  pour  le  versement  qui  doit  nous  être  fait  le  20  du 
présent.  L'accueil  favorable  que  m'a  fait  aussi  M.  le  Préfet  et  ces  obligente 


m 

mm 

s 

,v;    1  'Il  > 

1 

11 

illuîfli 

J 

N.^ 

—  148  — 

4"  Qu'ils  considèrent  la  reprise  de  l'anniversaire  en  usage, 
le  19  décembre  en  mémoire  de  Mir<  le  Dauphin,  comme  étant 
absolument  dans  les  attributions  de  M^r  Tévcque  de  Troyes, 
a%'ec  lequel  M.  le  curé-doyen  correspond  en  ce  moment  à  ce 
^ujet; 

5»  Qu'ils  partagent  le  vœu  du  conseil  municipal  et  de  tous 
les  habitants  pour  que  cette  cérémonie  du  19  décembre, 
fondée  par  lettres  patentes  du  Roy  du  12  juin  1767,  ait  lieu 
cette  année  même,  et  rien  ne  sera  plus  flatteur  ni  plus  ho- 
norable pour  la  ville  de  Sens  que  la  présence  d'un  de  ses 
augustes  princes; 

6"  Enfln,  qu'ils  expriment  le  même  vœu  pour  la  prompte 
translation  des  cendres  qu'il  est  si  important  de  rendre  au 
lieu  dont  elles  n'auraient  jamais  dû  sortir  et  que  toute  la 
ville  est  jalouse  d'entourer  de  ses  hommages. 

Signé  :  Pelée  de  Saint-Maurice,  Formanoir,  curéj 

D.  DE  Vaudricourt,  Bardin,  t.  Tarbé,  Bfnoit 
DE  Lamothe,  agent  de  la  commission  (1). 

^  II.  TRANSLATION  DES  CENDRES  DU  DAUPHIN 
ET  DE  LA  DAUPHINE 

L'une  des  premières  pensées  de  Louis  XVIII,  à 
son  retour  à  Paris,  avait  été  celle  des  réparations 
dues  à  la  mémoire  des  royales  victimes  de  la  Ré- 

[iromesse  qu'il  a  réitéré,  à  son  dernier  passage,  A  des  personnes  qu*il  aflTec- 
Moiine  et  qui  s'intéresse  i\  moi  auquel  il  a  répondu  qu'il  alail  s'en  occuper 
lUissitôt,  me  font  espérer  que  Je  ne  feré  pas  un  voyage  en  vain  ;  veuillez  donc 
Mrmsieur.  considéré  ma  siUiation  malheureuse  et  l'objet  qui  en  e«t  la 
muse.  Comme  artiste  quel  étail  mon  bonheur  alors  de  trouver  rheureusc 
fK-iasion  de  rétablir  un  monument  aussi  considérable  dû  A  ma  conserva- 
Lion!  Quel  est  ma  position  maintenant  de  me  voir  assailli  par  des  ouvriers 
qui  m'ont  conHé  leur  temps  et  leurs  marchandises,  et  de  n'avoir  pas  le 
ko]  chez  moi.  Enfin,  Monsieur,  vous  êtes  de  Sens;  vous  connaissez  ma  con- 
duite pour  pouvoir  me  rendre  service  :  je  me  jette  dans  vos  bras. 

t  Pbrson.  » 
(1)  Archives  de  l'Y..  V  20. 


—  149  — 

volulion.  Dès  le  mois  de  mai  1814,  une  enquête 
était  ouverte  pour  rechercher  les  restes  de  Louis 
XYI  et  de  Marie-Antoinette. 

Plusieurs  Sénonais,  des  plus  dignes  de  foi,  affir- 
maient avoir  été  spectateurs  de  Thorrible  drame  du 
23  mars  1794.  lis  déclaraient  pouvoir  reconnaître, 
sans  hésitation,  Tendroit  où  les  corps  du  Dauphin 
et  de  la  Dauphine  avaient  été  enfouis.  11  était  donc 
naturel  qu'on  se  préoccupât  de  les  retrouver  et  de 
répondre  ainsi  à  Tun  des  plus  chers  désirs  du  Sou- 
verain. 

Sur  ce  point,  tout  le  monde  était  d'accord.  Mais 
l'entente  cessait  dès  qu'il  s'agissait  de  décider  à  qui 
appartenait  l'initiative. 

Fort  de  l'opinion  du  grand  Aumônier  de  France, 
dont  la  parole  pouvait  être  considérée  comme  l'écho 
des  volontés  du  Roi,  l'Evêque  de  Troyes  entendait 
bien  ne  céder  à  personne  le  soin  de  diriger  les  re- 
cherches. Le  5  octobre,  il  avait  notifié  à  M.  l'abbé 
de  Vaudricourt  qull  déléguait  l'un  de  ses  vicaires 
généraux,  M.  l'abbé  de  la  Tour,  pour  le  remplacer 
dans  la  cérémonie  religieuse. 

Vous  pourrez  vous  entendre  avec  lui,  écrivait-il,  et  lui 
indiquer  le  jour  où  tout  sera  disposé  pour  exécuter  la  trans- 
lation des  précieux  restes...  Vous  prendrez  ensemble  tous 
les  renseignements  qui  ont  été  conservés,  sur  le  lieu  où  ils 
reposent  en  ce  moment,  et  M.  de  la  Tour  sera  chargé  de 
dresser  un  procès-verbal  pour  constater  légalement  l'iden- 
lilc  des  corps.  (Dossier  de  Formanoir.J 

Mais,  de  son  côté,  le  Préfet  revendiquait  pour  lui 
seul  le  soin  de  tout  régler  en  celte  affaire.  Monsei- 


#•* 


—  150  — 

gneur  de  Boulogne  nous  rapprend  par  cette  lettre 
à  rarchiprétre  de  Sens  : 

Monseigneur  de  Boulogne  à  M.  de  Formanoir 

25  octobre  1814. 

J'ai  reçu  hier,  monsieur,  une  leUre  de  M.  le  Préfet 
d'Âuxerre,  relativement  à  la  cérémonie  pour  laquelle  j'ai 
député  M.  de  la  Tour,  par  laquelle  il  me  mande,  en  termes 
très  polis,  qu'il  a  cru  devoir  la  faire  suspendre,  par  la  rai- 
son que  la  commission  ne  peut  pas  faire,  sans  Tinteri^en- 
tion  de  Tautorité  civile,  la  reconnaissance  de  Tidentité  des 
cendres  préalable,  nécessaire  à  leur  translation. 

II  me  fait  part,  en  même  temps,  de  la  lettre  qu'il  envoyé 
à  S.  E.  le  Ministre  de  l'Intérieur  pour  lui  exposer  les  motifs 
qui  l'ont  déterminé  à  provoquer  cette  suspension. 

Sans  trop  entrer  dans  la  justice  de  ces  motifs  qui  peuvent 
bien  n'être  pas  sans  quelque  fondement,  il  est  nécessaire  de 
suspendre  la  translation  que  vous  aviez  fixée  au  26  et  27,  et 
d'attendre  pour  cela  la  réponse  du  Ministre  de  l'Intérieur, 
que  j'ai  vu  hier  soir  à  ce  sujet. 

Il  est  convenu  avec  moi  que,  quand  même  le  Préfet  au- 
roit  droit  d'intervenir  à  la  reconnaissance  de  l'identité  des 
cendres  royales,  leur  translation  dans  l'église,  leur  colloca- 
tion  dans  le  monument  qui  leur  est  destiné,  et  toute  la 
pompe  religieuse  qui  doit  s'en  suivre,  sont  uniquement  de 
la  compétence  ecclésiastique.  Ce  sera  donc  à  mon  repré.sen- 
tant,  M.  de  la  Tour,  à  présider  cette  opération  et  à  en  faire 
le  procès-verbal. 

On  ne  peut  se  dissimuler  que  la  commission  n'ait  agi 
dans  tout  ceci  fort  légèrement,  ne  fût-ce  que  de  s'emparer, 
de  prime  abord,  de  votre  église,  sans  mon  autorisation.  En 
général,  c'est  un  reproche  que  j'ai  à  vous  faire,  mon  cher 
doyen,  c'est  que  vous  n'êtes  pas  assez  maître  chez  vous, 
et  que  vous  êtes  un  peu  trop  obséquieux  envers  vos  auto- 
rités qui,  comme  vous  voyez,  ont  abusé  de  la  permission. 
Je  crains  bien  encore  que,  dans  cette  cérémonie,  on  ne 


—  151  — 

fasse  tout  sans  vous  et  que  vous  ne  soyez  là  qu'en  dernière 
ligne,  de  même  que  vous  avez  souffert  d'être  mis  à  la 
queue  de  la  commission,  en  simple  qualité  d'adjoint. 

J'ai  bien  recommandé  à  M.  de  la  Tour  de  veiller  au  main- 
tien des  règles  et  de  s'opposer,  autant  qu'il  le  pourra,  à  la 
violation  des  droits  ecclésiastiques,  si  toutefois  il  se  trouve 
dans  ce  cas-là. 

Je  regrette  bien  que  ma  santé  ne  me  permette  pas  d'aller 
moi-même  faire  cette  cérémonie  :  c'aurait  été  pour  moi  une 
véritable  satisfaction.  Mais  je  suis  véritablement  indisposé 
depuis  quelque  temps,  ce  qui  me  contrarie  beaucoup. 

Je  vous  prie  de  faire  mes  compliments  à  M.  de  la  Motte, 
toute  rancune  cessante,  et  de  recevoir,  etc.. 

t  Et.-Ant.,  évêque  de  Troyes. 

;  Dossier  de  Formanoir.J 

Quelques  jours  plus  tard,  le  vicaire  général  M.  de 

la  Tour  confirme  à  M.  de  Formanoir  les  intentions 

de  TEvéque  : 

Troyes,  le  7  novembre  1814. 

J  ai  reçu,  hier,  une  lettre  de  Monseigneur  qui  me  marque 

que  le  Ministre  de  l'Intérieur  lui  a  dit  que  la  translation  des 

cendres  de  Monseigneur  le  Dauphin  le  regardoit  lui  seul 

Evèque,  et  que  tout  au   plus   le   Préfet  pouvoit  assister 

comme  commissaire  à  la  reconnaissance  de  l'identité  des 

cendres,  laquelle  opération  n'est  point  la  translation  dans 

1  église  qui  n'appartient  qu'à  l'Evêque  ou  son  représentant... 

En  conséquence,  sachant  ce  que  je  dois  faire,  je  suis  prêt 

à  partir  dès  que  vous  aurez  fixé  le  jour  avec  M.  le  Préfet. 

[Dossier  de  Formanoir.J 

On  Ta  vu  plus  haut,  le  Préfet,  lui  aussi,  a  solli- 
cité des  instructions  à  Paris,  bien  persuadé  qu'elles 
appuieront  ses  prétentions.  Il  écrit,  le  16  novem- 
bre, à  M.  Tabbé  de  Formanoir  qui  lui  avait  de- 
mandé de  prendre  jour  : 


7  V 

il 

i     j 

Il  mr 

i«4 

1 

> 

i 

1  IHBi 

mlÊK^mà 

i 


—  152  — 

J'ai  soumis  à  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  des  observa- 
tions relativement  à  la  translation  des  cendres  de  Monsei- 
gneur le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine,  et  aux  for- 
malités à  observer  pour  constater  l'identité  de  ces  restes 
précieux.  Son  Excellence  ne  m'a  pas  encore  fait  connaître 
ses  intentions,  et  je  crois  devoir  attendre  qu'elles  m'aient 
été  notifiées  avant  de  prescrire  ou  autoriser  aucune  mesure 
relative. 

La  reconnaissance  de  ces  cendres  ne  peut  être  trop  au- 
thentique. Les  formes  que  Son  Excellence  doit  prescrire 
d'employer  peuvent  seules  être  suivies. 

Aussitôt,  monsieur,  que  les  instructions  que  j'ai  sollici- 
tées me  seront  parvenues,  je  m'empresserai  de  vous  en  faire 
part  et  j'aurai  soin,  en  flxant  l'époque  où  la  cérémonie  de- 
vra avoir  lieu,  de  vous  donner  le  temps  convenable  pour 
faire  les  dispositions  et  convocations  nécessaires. 

Je  serai  charmé  de  cette  occasion  de  faire  votre  connais- 
sance, etc.. 

Gamot. 

Sensible  aux  reproches  de  son  évêqiîe,  le  bon 
curé  avait  sans  doute  tenté  de  se  montrer  «  le  maî- 
tre chez  lui.  D  Dans  son  devis,  accepté  par  la  com- 
mission, Person  s'engageait  à  compléter  la  restaura- 
tion du  mausolée  par  le  remplacement  des  divers 
attributs  que  le  vandalisme  révolutionnaire  avait 
arrachés  comme  a  vestiges  du  despotisme  d  au 
maître-autel  et  aux  autels  du  jubé.  Mais  MM.  les 
fabriciens,  froissés  de  n'avoir  pas  été  consultés,  font 
opposition  à  rexéculion  de  ce  travail.  Le  23  novem- 
bre, M.  de  Formanoir  reçoit,  de  M.  de  la  Molhe, 
ravis  suivant,   d*un   ton  peut-être  un    peu    vif  : 

J'étois  convenu  ce  matin  avec  M.  Person,  qui  avoit  aussi 
votre  assentiment,  que  le  baldaquin  du  maître-autel  scroit 
nettoyé  dans  la  journée,  afin  de  s'occuper  de  suite  des  ré- 


—  153  — 

parations  à  faire.  Elles  font  parlie,  comme  vous  savez,  de 
mon  traité*  particulier  avec  M.  Person  et  j'avois  donc  le 
droit  d'en  presser  Texécution.  Cependant  j'ai  appris  que 
ces  travaux  étoient  suspendus  jusqu'à  ce  qu'on  ait  référé  à 
Messieurs  de  la  Fabrique.  On  doit  autant  s'étonner  de  cette 
ingérence  du  bureau  que  de  votre  extrême  indulgence.  Le 
bureau  n  a  rien  h  voir  à  ce  travail  puisqu'il  ne  s'agit  que 
d'une  simple  opération  pour  laquelle  il  ne  lui  est  pas  de- 
mandé un  sol  ;  et  c'est  bien  le  moins  alors  que  vous  ordon- 
niez dans  votre  église  les  dépenses  qui  ne  portent  pas  sur 
la  Fabrique. 

La  conduite  du  bureau  avec  vous  relativement  à  la  cire, 
et  ces  jours  derniers  encor  pour  quelques  misérables  mor- 
ceaux de  fer,  traces  du  vandalisme  auxquelles  vous  allez 
substituer  des  croix  rayonnantes,  tout  cela  vous  dispense 
bien  de  tant  de  déférence. 

Pressez  donc,  je  vous  prie,  M.  le  Curé  doyen,  sans  con- 
sulter personne,  l'exécution  de  mes  conventions  avec 
.M.  Person.  Elles  ont  eu  toutes  pour  objet  le  bien  et  l'orne- 
ment de  l'église  dont  quelques-uns  de  MM.  les  Fabriciens 
D  ont  guères  paru  s'inquiéter  dans  ces  circonstances. 

Benoist  de  ijl  Mothe. 
iDossier  Formanoir.J 

Il  est  permis  de  ne  pas  partager  ropiyiion  de 
M.  de  la  Mothe  sur  les  droits  et  Vingérence  de 
MM.  de  la  fabrique.  Tout,  de  ce  côté,  finit  cepen- 
dant par  s'arranger. 

Mais  le  conflit  entre  TEvéque  et  le  Préfet  avait  eu 
pour  résultat  de  suspendre  toute  décision.  Le  18  no- 
vembre, le  Préfet  avait  envoyé  une  adresse  au  comte 
(l.Vrtois,  Monsieur;  il  y  rappelle  la  tradition  qui 
amenait  à  Sens,  chaque  année,  jusqu'à  la  révolu- 
lion,  pour  l'anniversaire  du  20  décembre,  les  repré- 
sentants de  la  famille  royale;  il  expose  ce  que  la 


/ 


—  I  >i  — 

ville  de  Sem  ùtH  prmr  référer  lemaasolée;  ce  quelle 
«  prop^*  de  Caire  p^>ur  retrouver  les  cehdres  des 
parent-*  da  Koi.  et  conclut  en  suppliant  le  Prince  de 
venir  présider  le  .er^ice  anniversaire  et  linaugura- 
tion  da  tomlie^a  rentâuré. 

f>  devoir  rempli,  le  Préfet  <  attendait  les  Insfruc- 
tion5  de  M.  le  Ministre.  »  lorsque  la  lettre  suivante 
v^nt  tout  à  coup  wouer.  un  peu  durement,  sa 
quiétude.  Le  Ministre  avait  assurément  reçu  les 
doléances  de  quelque  personnage.  -  lequel?  nous 
lignoron*,  -  sur  les  lenteurs  et  les  querelles  admi- 
nistratives. 

Japprtndv  Moasitur,  écrit  d«  Paris,  le  29  novembre,  le 
Ministre  d*  llnteriecr,  qae  la  IraasIaUoo  des  cendres  de 
M.  le  fWDphin  et  de  celles  de  Ma.lame  la  Daophine  que  je 
croyoLs  faite  depuu  longtemps,  ne  lest  pas  encore.  Je  ne 
conçois  pas  qa  une  cérémonie  si  auguste  ait  pu  éprouver 
des  retards  J  écris  en  conséquence  à  M.  le  Sous-Préfet  de 
•Sens  de  la  faire  le  plus  lot  possible  et  d  y  procéder  avec 
toute  la  pompe  qu  elle  mérite  :  je  vous  prie  de  donner  en 
même  temps  tous  les  ordres  nécessaires,  la  lamillc  rovalc 
étant  fort  élonnt-e  que  le  zèle  des  habitanUait  pu  rencontrer 
une  telle  indifférence 

L'abbé  de  MoxTESQiiof. 

.Archives  de  Donne.   V  3r>  ' 

Désolé,  le  Préfet  répond  : 

...Je  SUIS  loin.  Monseigneur,  de  mériter  un  reproche  de 
celte  n.iture  puisque,  depuis  que  je  suis  entré  dans  ce  dé- 
partement, je  n  ai  cessé  ,1e  m  occuper  de  la  rcstauraUon  du 
tombeau  de  ces  auguNics  personnes  et  que,  depuis  près  de 
deux  mois,  Je  sollicite  les  ordres  de  Votre  Excellence  pour 
cette  translation.  Elle  p..urra  en  juger  par  la  copie  des  let- 
tres que  )  ai  1  honneur  de  lui  remettre  et  qui,  probablement. 


—  155  — 

ne  lui  ont  pas  été  représentées,  puisqu'elles  sont  restées 
sans  réponse.  J'en  ai  écrit  plusieurs  à  M.  FEvêque  de  Troyes, 
qui  lua  assuré  qu'il  avait  eu  avec  Votre  Excellence  plusieurs 
conférences  à  cet  égard  et  que  vous  alliez  incessa tii ment 
donner  vos  ordres.  Je  serais  au  désespoir,  Monseigneur^  que 
la  famille  ro^^ale  me  crût  coupable  d'une  telle  négligence  et 
j'ose  espérer  de  votre  justice  que  vous  voudrez  bien  la  dé* 
tromper  à  cet  égard...  *  [Archives  de  r Yonne,  V  ÎOJ 

Et  aussitôt,  voulant  faire  montre  de  zèle,  M.  Ga- 
mol  élabore  Tarrêté  suivant,  qu'il  fait  porter  immt>- 
dialement  à  Sens  par  son  secrétaire  général.  11  le 
communique  en  même  temps  à  TEvéque  de  Troyes. 
Le  malheureux  voulait  encore  un  délai  de  quinze 
jours! 

PRÉFECTURE  DE  l'YONNE 

Du  2  décembre  18U 

Le  Préfet  du  département  de  l'Yonne,  chevalier  de  la  Lé- 
gion d  honneur, 

Vu  la  lettre  de  S.  E.  le  Ministre  de  l'Intérieur,  en  date  du 
27  du  mois  dernier,  qui  ordonne  de  constater  sur  le  cluuiip 
lidentité  des  cendres  de  Monseigneur  le  Dauphin  cl  de 
Madame  la  Dauphine,  et  de  les  transférer  dans  le  tombeau 
qu  elles  occupaient  auparavant,  au  milieu  du  chœur  de  la 
cathédrale  de  Sens; 

Arrête  ce  qui  suit  : 

Article  1er.- —  m.  le  Sous-Préfet  de  Sens  indiquera,  pour  h 
wndredi  16  de  ce  mois,  les  fouilles  nécessaires  à  retrouver 
CCS  restes  augustes. 

Art.  2.  —  Préalablement,  M.  le  Président  du  Tribu  uni  de 
Sens  et  MM.  les  gens  du  Roi  seront  invités  à  faire  toutes  lus 
enquêtes  nécessaires,  à  entendre  tous  témoins  pour  biuu 
fixer  le  lieu  où  les  fouilles  peuvent  être  faites  avec  succès. 

Art.  3.  —  L'audition  des  témoins  aura  lieu  en  présence  de 
M  le  Sous-Préfet,  de  M.  le  Maire  et  de  MM.  les  membres  de 


—  iso- 
la Commission  qui  s*est  occupée  de  la  restauration  du  mau- 
solée. 

Art.  4.  —  D'après  les  indications  données,  des  jalons  se- 
ront placés  pour  circonscrire  le  lieu  où  devront  se  faire  les 
fouilles. 

Art.  5.  —  Le  16,  à  deux  heures  de  Taprés-midi,  la  terre 
sera  ouverte  et,  en  présence  de  Nous,  Préfet,  et  des  autori- 
tés convoquées,  Tidentité  sera  constatée  ;  les  cendres  dépo- 
sées dans  un  cercueil  de  plomb  préparé  à  cet  effet,  et  re- 
mises à  Monseigneur  l'Evêque  de  Troyes,  chargé  de  la  céré- 
monie religieuse  qui  doit  accompagner  cette  translation. 

Art.  6.  —  Il  sera  dressé  du  tout  un  procès-verbal  signé 
par  toutes  les  personnes  présentes. 

Art.  7.  —  Les  dépenses  nécessaires  pour  cette  translation 
seront  acquittées  provisoirement  sur  les  fonds  du  départe- 
ment réservés  pour  les  dépenses  imprévues. 

Auxerrc,  2  décembre  1814. 

Le  Préfet  :  Gamot. 
Par  M.  le  Préfet, 
Le  Secrétaire  Général  :  Sauvalle  {Archives  de  VYonne,  V  20.1 

f  Veillez,  écrivait  le  Préfet  au  Sous-Préfet  de  Sens,  à  ce 
que  les  dispositions  préalables  que  j'ai  prévues  soient  ponc- 
tuellement exécutées.  Suivez  vous-même  cette  exécution 
pied  à  pied,  et  mettez-vous  en  état  de  me  faire  un  rapport 
exact  et  circonstancié  qui  puisse  me  mettre  en  état  de  ter- 
miner, comme  nous  le  désirons,  le  16  de  ce  mois.  (Ibidem).  » 

La  préoccupation  du  Préfet  perce  dans  tout  ceci. 
II  n'a  qu'une  crainte  :  celle  que  le  Sous- Préfet 
agisse  comme  délégué  direct  du  Ministre  et  non 
comme  son  propre  subordonné.  Le  Sous-Préfet  de 
Sens,  M.  du  Busquet,  avait  eu  Tintelligenee  plus 
nette  de  la  situation.  En  même  temps  que  le  Préfet, 
il  avait  reçu  celle  dépêche  du  Ministre  : 


—  157  — 
Le  UinUtrc  de  Vîntétkur  au  Sous-Préfcl  dv  Sens 

Paris,  29  novembre  1814. 
ivois  cm.  Monsieur,  que  Taugustc  transbtioEi  des  der* 
►tes  de  Monseigneur  le  Dauphin  et  do  Madame  la 
ic  ctfîit  ,'ichcvée  lîejHiis  longtemps^  mais  j'apprencls 
i|ije  le  zèle  des  habitants  de  Sens  a  été  lonjours  arrclé  par 
s  difUcuttus  qu'il  ne  semliloit  pas  devoir  rencontrer. 
le  vous  prie  donc,  Monsieur,  de  l'aire  procéder  à  celte 
^[tdal]o^  le  plus  tôt  possible.  Constatez  bien  Le  dépôt, 
ites  cnsiiîlc  îe  procès- verlial  du  transport  et  celui  de  la 
iiîsc  tlaos  Tancienne  sépuilure,  et  donner  à  la  cérémonie 
:imi  de  ponipc  et  de  majesté  que  le  lieu  en  est  suscep- 
M, 

Vous  deveï  vous  enlcntlrc  avec  rautorité  ecclésiastique 
e  je  sais  très  disposée  à  vous  seconder,  mais  faites  qu'on 
anse  des  retards  qui  seroicnt  bientôt  un  scandale. 
J  m  I  honneur  d'élre,  etc. 
^LL'abbé  PB  MoNTËSQumu.  (Dossier  dç  FormanoirJ 

n  Devant  des  injonctions  aussi  foiniellcs,  le  Sons- 
Préfet  n*avait  qu*à  obéii%  Dispcnisc  de  suivre  la 
'ic  hiérarchique,  il  avait  imniédialenieiit  pris  ses 
sures,  fixé  rexliuination  au  7  décembre,  la  ce- 
îiîonie  religietise  au  8,  et  avail  lancé  toutes  les 
convocations , 

Toutes  les  dispositions  étaient  donc  arrêtées 
'■»rst(ue  parvint  à  Sens  Tarrété  préfectoral,  Aussitôt, 
-   Soiis-Frélet  répond  à  sou  supérieur  : 

Sens,  le  3  décembre  181 4« 

Monsieur  le  Préfet, 

reçois  votre  lettre  rlu  2,  relative  a  la  translation  des 

s  de  Monseigneur  le  Dauphin  et  de  Madnnie  la  llau- 

liae.  Je  regrette  que  ma  lettre  du  p'  sur  le  même  sujet  se 

it  croisée  avec  la  vôtre,  mais  les  ordres  de  Son  Excellence 


^-  158  — 

dont  j*ai  déjà  eu  Thonneur  de  vous  informer  sont  trop  posi- 
tifs et  trop  pressants  pour  qu'il  me  soit  possible  de  revenir 
sur  ma  détermination,  car  Son  Excellence  ajoute  qu'un  plus 
long  retard  serait  un  scandale  et  qu'il  a  appris  que  le  zèle  des 
habitants  de  Sens,  dans  cette  circonstance,  a  été  toujours  ar- 
rêté par  des  difficultés  qu'il  ne  semblait  pas  devoir  rencontrer. 
Cette  manière  de  s'exprimer  de  la  part  de  Son  Excellence, 
({ui  me  charge  de  faire  procéder  à  la  translation,  ne  me  lais- 
sait pas,  Monsieur,  la  latitude  ni  le  loisir  d'attendre  vos 
ordres. 

Croyez,  Monsieur,  que  ce  sera  avec  bien  du  plaisir  que 
je  m'acquitterai,  sous  vos  yeux  et  sous  votre  direction,  de 
la  mission  flatteuse  dont  m'honore  Son  Excellence,  et  je  de- 
meure convaincu  que  les  habitants  de  la  ville  de  Sens  ver- 
ront avec  beaucoup  de  satisfaction  le  premier  magistrat  du 
département  augmenter  par  sa  présence  l'éclat  d'une  céré- 
monie digne,  sous  tous  les  rapports,  de  stimuler  notre  zèle 
et  notre  amour  pour  l'auguste  famille  des  Bourbons. 

Au  surplus.  Monsieur  le  Préfet,  ainsi  que  vous  l'annonce 
ma  lettre  du  1er  de  ce  mois,  et  comme  cela  m'est  ordonné, 
je  me  suis  concerté  avec  l'autorité  ecclésiastique  et  je  viens 
de  m'assurer  que  M.  l'Evêque  est  prévenu  et  que  toutes  Icî; 
convocations  sont  faites,  ce  qui  met  un  obstacle  nouveau  au 
retard  que  votre  arrêté  du  2  amènerait  et  m'oblige  à  persis- 
ter dans  la  détermination  dont  j'ai  eu  l'honneur  de  vous 
prévenir.  Agir  diflëremment  serait,  de  ma  part,  contrarier 
les  vues  de  Son  Excellence,  et  vous  sentez  que  cela  n'est 
pas  en  mon  pouvoir. 

J'ai  lu  attentivement  votre  programme  qui  sera  suivi 
exactement,  sauf  quelques  modifications  que  la  saison  com- 
mande; par  exemple,  nous  avons  cru  devoir  décider  que  la 
fouille  au  cimetière  se  ferait  la  veille,  parce  que  le  temps 
qu'il  faudra  employer  à  cette  opération  serait  trop  long  pour 
permettre  de  tout  finir  en  un  jour,  et  que,  l'autorité  ecclé- 
siastique voulant  faire  une  cérémonie  majestueuse,  c'est  in- 
dispensable, pour  répondre  à  ses  louables  intentions,  de  la 


—  159  — 

commencer  dans  la  matinée,  afln  de  lui  donner  la  latitude 
convenable  (1). 

Je  ne  puis  vous  exprimer,  Monsieur  le  Préfet,  combien  il 
m'est  pénible  de  me  trouver  en  contradiction  avec  vous, 
n'ayant  rien  de  plus  à  cœur  que  de  suivre  en  tout  vos  inten- 
tions. Mais  Son  Excellence,  que  j'ai  instruite  du  jour  fixé 
pour  la  cérémonie  m'ayant  marqué  qu'elle  la  croyait  depuis 
longtemps  terminée,  il  ne  me  reste  que  le  devoir  d'accélérer 
le  moment  de  réaliser  ses  intentions.  (Arch.  de  VYonne,VW.J 

M.  Gamot  dut  accepter  sa  déconvenue.  Il  se 
rendit  à  Sens  pour  la  cérémonie  religieuse  du  8  dé- 
cembre, mais  ne  parut  ni  à  Tenquéte  ni  à  Texhuma- 
lion.  Le  Sous-Préfet  présida  à  cette  opération  dont 
il  a  dressé  Tintéressant  compte  rendu  qui  suit  : 


(1)  La  inunici|>alité  avait,  de  son  côté,  pris  les  dispositions  suivantes  : 

POMPE  FUNÈBRE  DE  MONSEIGNEUR  LE  DAUPHIN 

Ojounrhui,  sept  décembre  mil  huit  cent  quatorze,  le  maire  de  la  ville 
de  Sens,  * 

Considérant  qu'il  convient  donner  à  la  pompe  funèbre  de  Monseigneur 
le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine  toute  la  décence  convenable  en  pa- 
rpille  circonstance. 
Arrête  ce  qui  suit  : 

Il  ost  mjoint  aux  habitants  de  la  ville  de  balayer  le  devant  de  leurs  mai- 
sons jeudi  matin.  8  décembre,  avant  9  heures. 

Le  cortège  entrera  dans  la  ville  par  la  porte  d'Yonne,  suivra  la  Grande- 
Rue  jusqu'à  la  rue  Dauphine  et  traversera  In  place  jusqu'à  l'église  Saint- 
ttienne. 

Les  boutiques  seront  exactement  fermécs.sur  toute  la  route  que  parcour- 
rera  ledit  cortège  jusqu'après  son  passage. 

Il  est  expressément  défendu  le  même  jour  d'ouvrir  aucunes  salles  <ie  bals 
ou  autres  divertissements. 

Ceux  qui  contreviendraient  à  la  présente  ordonnance  seront  traduits  à 
b  police. 

Fait  et  arrêté  les  dits  jour  et  an  que  dessus. 

C.  DE  Lauhencin. 

(Archives  communales  de  Sens,  Reg,  des  arrêtés,  tome  XL) 


i 


—  im  — 

pROCèS-YERBAL  DE   LA  TRANSLATION    DES    CENDRES  DE   MON- 
SEIGNEUR LE  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine  dans 

LE  CHŒUR  DE  LA  C\THÉDRALE  DE  SeNS  <\). 

Cejoard'hai,  7  décembre  1814,  heare  de  oeuf  du  matin, 
noas,  Michel-Georges  de  Busqaet,  chevalier  et  ancien  lieu- 
Icnant-colonel  an  régiment  de  Monsieur-Dragons,  chevalier 
de  Tordre  royal  et  militaire  de  Saint -Louis,  Sous- Préfet  de 
Tarrondissement  de  Sens, 

En  vertu  des  ordres  de  Son  Excellence  M.  Tabbé  de  Mon- 
tesquiou.  Ministre  Secrétaire  d'Etat  au  département  de  Mn- 
térieur,  exprimés  en  sa  lettre  autographe  du  29  novembre 
dernier,  et  d'après  Tarrété  de  M.  le  Préfet  du  département 
de  l'Yonne,  du  2  de  ce  mois,  avons  réuni  en  notre  hôtel,  sis 
rue  Saint-Benoit,  à  Sens  :  MM.  Billebault,  président  du  tri- 
bunal civil;  Cornisset,  président  du  tribunal  de  commerce: 
Demay,  procureur  du  Roi,  et  de  Laurencin,  maire  de  la 
ville,  à  TefTet  de  se  transporter  avec  nous  au  cimetière  dit 
de  rHôtel-D*eu,  sis  près  TEsplanade  dudit  Sens,  pour  être 
présens  avec  nous  à  la  reconnaissance  du  lieu  où  sont  dé- 
posés maintenant  les  restes  de  Monseigneur  le  Dauphin  et 
de  Madame  la  Dauphine,  auteurs  de  notre  auguste  Monar- 
que, et  ensuite  assister  à  la  fouille  qui  est  nécessaire,  pour 
reconnaître  ces  précieux  restes  qui,  d'après  les  ordres  sus- 
relatés,  doivent  être  exhumés,  mis  dans  des  cercueils  à  ce 
préparés  et  réintégrés  dans  le  chœur  de  Téglise  cathé- 
drale de  cette  ville,  d'où  ils  en  ont  été  retirés,  pendant  les 
troubles  de  la  France. 

Partis  de  notre  hôtel,  accompagnés  comme  dessus,  nous 
îïommes  arrivés  au  cimetière  susdit,  où  nous  avons  trouvé 
MM.  Benoist  de  la  Mothe,  de  Formanoir,  curé-doyen,  l'abbé 
de  Vaudricourt,  ancien  grand-archidiacre  de  Sens,  Pelée 
de  Saint-Maurice,  avocat,  Lorne,  négociant,  Tarbé,  impri- 
meur, et  Bardin,  juge  de  paix,  tous  membres  de  la  commis- 
BÎon  chargée  par  le  conseil  municipal  de  ladite  ville  de  Sens. 

(1)  Archives  de  l'Archcvôchc. 


b  resdaunilioii  du  tntusolée  de  MoDseigncur  te  Daui^hin 
dr  Matleime  lu  Daupliiiief  cottinie  aussi  des  délnils  et  Im- 
prép«i  rai  Dires  h  la  relnlégration  Û€  leurs  precieuit 
lis  dans  le  chœur  de  K  église  cathédmlev  lesquels  nous 
ni  dil  que,  jaloux  de  répondre  à  ta  couflance  de  leurs  cog* 
i^ovesis^  ils  avaient  pris  tes  mesures  couvenables  pour  facUi* 
r  ooire  opération  cl  qu  a  cet  elîet,  ils  a  voient  fait  appeler  le 
eur  Persôn.  artiste  chargé  des  travaux,  pour  être  par  nous 
rotenda  sur  les  lieux,  aîusi  que  la  dauie  >Vouslourn,  veuve 
Hiiresti,  Thomas  f  aocien  orfèvre,  Ficon  père,  perruquier» 
»iidrot«  docteur  en  chirurgie,  et  Vèrot,  ancien  religieux 
:  itninîcaîu,  comme  témoins  du  lieu  du  dépôt  dans  le  cime* 
urre,  lesquels,  présents  et  InterpeUésséparèmeiTt,  nous  ont 
les  déclarations  suivantes,  savoir  : 
î'  La  dâuie  Wouiitonm,  veuve  Bureau,  a  déclaré  que, 
r  revente  au  cimelière,  lors  de  llnhumation,  elle  a  vu  dépo* 
^^^  les  corps  sans  cercueils,  dans  la  direction  du  nord  au 
^Wd].  à  ta  distance  du  mur,  à  droite  en  entrant  dans  ledit 
|Càizietière|  de  13  a  14  pieds,  et  que  Icsdils  corps  éloient  reu- 
^b  danK  la  même  fosse,  et  a  signé  avec  nous,  Signé  .  Veuve 
^BmcAU  et  tJE  BusQtrr. 

^■î-  Le  sieur  Michel-Savinien  Boudrot  a  déclaré  que,  pré- 
ni  aa  cimetière  lors  de  rinhumation,  il  a  vu  jeter  dans  une 
,  i  droite  du  cimetière,  les  deux  corps  de  M»?"  le  Dim- 
;n  cl  de  M«>^la  Dauphine.  lesquels  éloientnuds,  etont  été 
ensemble  itans  ladite  fosse,  et  a  signé  avec  nous.  Signé  : 

0ROT,  DE  BCSQUET, 

Le  sieur  Edmc*Huberl  Vèrol,  ancien  religieux  domini- 

(î)*  a  déclaré  que,  présent  an  cimelicre  tors  de  linhu- 

on,  et  s*a percevant  de  1  embarras  des  personnes  char- 

is  de  procéder,  à  cause  du  peu  de  largeur  de  la  fosse,  il 


ffVtérr  coiiver*  tïu  t'isu%'enl  «ïest  JiH'oJ>ins  ih*  Suis,  lu^  en  lïjfl,  avait  fait 
ii<»n  rn  IÎH2*  Kit  17W*,  U  «viili  ïuit  dcTlîtnilUm  que  son  désir  vlnU  ilo 
nnii  wm  cot]%  fnt,  mîuii  qtie,  t\an%  Iv  in  s  nù  ta  MinisOM  de  Sens  tie 
n%  cimMTvre,  U  oeerplerfill  la  t^eiision  |Hx*post*e  el  le  reUremlt. 
à0€9  rf#  r hmnr,  sérî vQ.) 

Il 


î 


*     I 


—  162  — 

s'est  empressé  de  les  nider,  et  qu'il  a  déposé  lui-même  dans 
la  fosse,  le  corps  de  Madame  la  Dauphine  sur  celui  de  Mon- 
seigneur le  Dauphin,  qu'il  a  entouré  d'un  des  bras  de  son 
auguste  époux,  et  a  signé  avec  nous.  Signé  :  Vérot,  de  Bts- 

QUET. 

40  Le  sieur  Picon  père,  perruquier,  lequel  a  déclaré  que, 
présent  à  l'inhumation,  il  se  rappelle  très  bien  que  les 
corps  de  Monseigneur  le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dau- 
phine ont  été  déposés  nuds,  dans  la  même  fosse  située  en 
entrant  à  droite,  dans  le  cimetière,  h  une  distance  d'à  peu 
près  treize  à  quatorze  pieds  du  mur,  et  a  signé  avec  nous. 
(Signé  :)  Picon  et  de  Busquet. 

50  Le  sieur  Thomas,  ancien  orfèvre,  demeurant  à  Sens, 
lequel  nous  a  déclaré  qu'étant  venu  au  cimetière  avec  dé- 
funt le  sieur  Macé,  il  a,  de  concert  avec  ledit  Macé,  qui 
avoit  été  présent  à  l'inhumation  en  sa  qualité  d'officier  mu- 
nicipal, reconnu  l'endroit  où  avoient  été  déposés  les  corps, 
et  qu'il  s'est  assuré  que  la  fosse,  en  entrant,  à  droite,  étoit 
à  la  distance  d'environ  douze  à  treize  pieds  du  mur,  suivant 
le  repaire  qui  avoit  été  posé,  pour  signe  de  reconnaissance, 
dans  le  mur;  et  a  ledit  sieur  Thomas  signé  avec  nous, 
(Signé  :)  Thomas  et  de  Busquet. 

C«  Le  sieur  Person,  artiste,  nous  1  déclaré  que,  les  22  et 
23  mars  1794,  Monseigneur  le  Dauphin  et  Mme  la  Dauphine 
ont  été  exhumés  de  la  cathédrale  de  Sens  et  transférés  dans 
le  cimetière  de  THôtel-Dieu,  sur  l'Esplanade,  à  droite,  à 
l'entrée  de  la  porte;  qu'ils  ont  été  mis  dans  la  même  fosse, 
après  avoir  été  extraits  des  cercueils  de  plomb  dans  les- 
quels ils  reposoient;que  Monseigneur  le  Dauphin  a  été  des- 
cendu le  premier  dans  la  fosse  et  Madame  la  Dauphine  la 
dernière,  dans  un  sens  inverse,  les  têtes  au  nord,  et  les 
pieds  au  midi,  le  bras  gauche  de  Monseigneur  le  Dauphin 
replié  sur  le  corps  de  Madame  la  Dauphine;  que  la  disposi- 
tion est  à  treize  pieds  de  distance  du  mur  dans  lequel  il  a 
enfoncé  une  broche  en  fer  jusqu'à  la  tête,  qui  y  est  restée 
jusqu'aujourd'hui,  et  qu'alors  il  existait  un  arbre  essence  de 


—  163  — 

noyer  qui  se  trouvoit  à  deux  pieds  de  la  fosse,  et  a  signé 
avec  nous. 

(Signé  :)  Person  et  de  Busquet. 

Ce  fait,  est  intervenu  M.  Antoine-François  Thomas  de  la 
Tour,  archiprctre  et  grand  vicaire  du  diocèse  de  Troyes, 
chargé  par  Monseigneur  Tévêque  de  la  cérémonie  reli- 
gieuse relative  à  la  translation  des  restes  de  Monseigneur  le 
Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine,  lequel  nous  a  demandé 
à  assister  à  notre  opération  pour  s'assurer,  conformément 
à  ses  instructions,  de  Tidentité  des  précieux  restes  que  nous 
nous  proposions  de  reconnaître;  ce  à  quoi  nous  avons  con- 
senti avec  le  plus  grand  plaisir. 

De  suite,  examen  fait  des  lieux,  et  lecture  donnée  aux 
magistrats  assemblés  des  dépositions  des  témoins,  nous 
avons  fait  appeler  des  ouvriers  pionniers,  lesquels,  sous  la 
direction  dudit  sieur  Person,  ont  de  suite  travaillé  à  la 
fouille  nécessaire,  dans  Tendroit  reconnu  pour  être  le  lieu 
du  dépôt,  et,  après  avoir  travaillé  Tespace  d'environ  deux 
heures,  au  premier  signe  indiquant  que  Ton  approchoit  des 
restes  précieux,  objets  de  nos  recherches,  nous  avons,  tou- 
jours en  présence  de  MM.  les  magistrats,  ci-devant  dénom- 
més, fait  appeler  MM.  Crou,  docteur  en  médecine.  Soûlas, 
chirurgien,  Rétif,  chirurgien,  et  Boudrot,  aussi  chirurgien, 
tous  quatre  attachés  aux  établissements  de  cette  ville,  à 
reflet  de  reconnaître,  d'après  les  indices  résultant  des  dépo- 
sitions des  témoins,  les  restes  des  corps.  Et  de  suite,  MM.  les 
docteurs  susdésignés  ont  découvert  le  bassin  de  la  prin- 
cesse, les  deux  fémurs  et  la  suite  des  extrémités  inférieu- 
res; la  partie  supérieure  du  tronc  et  la  tête  ont  également 
été  reconnus  par  eux  dans  leur  situation  respective  ;  les 
restes  de  Monseigneur  le  Dauphin  étoient  placés  latérale, 
ment  et  un  peu  inférieurement  à  ceux  de  Madame  la  Dau- 
phine;  la  tête  de  Monseigneur  le  Dauphin  s'est  trouvée 
entière  ;  et  celle  de  Madame  la  Dauphine  désarticulée.  De 
suite,  et  sur  notre  invitation,  MM.  les  docteurs  se  sont  oc- 
cupés de  déposer  les  restes  de  ces  précieux  corps  dans  des 


i 

M 


—  106  — 

En  reproduisant  ce  document  dans  VAlmanach 
du  déparlement  de  i  Yonne  et  de  la  ville  de  Sens  pour 
18l6f  Tarbé  Ta  fait  suivre  d'un  récit  détaillé  de  la 
cérémonie  funèbre. 

Marche  du  cortège  lors  de  la  cérémonie  de  Vexhumation  des 
cendres  de  Monseigneur  le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dau- 
phine,  et  de  leur  réinhumation  dans  le  chœur  de  la  cathé- 
drale de  Sens^  le  8  décembre  Î8H. 

La  cérémonie  fut  annoncée  la  veille,  à  5  heures  du 
soir  et  pendant  une  demi-heure,  par  la  sonnerie  en  volée 
des  deux  bourdons  de  la  cathédrale;  et,  le  8  décembre,  à 
7  heures  du  matin,  pendant  le  même  espace  de  temps.   A 

9  heures  et  demie,  roffîcc  fut  annoncé  de  même  et,  depuis 

10  heures  et  demie  jusqu'ù  l'entrée  du  cortège  dans  l'église, 
toutes  les  cloches  furent  également  sonnées  en  volée. 

Les  autorités  constituées  de  la  ville  s'étant  réunies  le  8,  à 
9  heures  et  demie  du  matin,  à  Thôtel  de  la  mairie,  elles  se 
rendirent  rue  de  TEpée,  pour  se  joindre  à  M.  le  préfet  du 
déparlement,  et,  avec  lui,  prirent  leur  direction  sur  la  place 
Saint-Etienne,  devant  l'église  cathédrale,  où  le  clergé,  pré- 
cédé du  corbillard  destiné  à  recevoir  les  corps  de  Monsei- 
gneur le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine,  se  réunit  au 
cortège. 

De  là,  le  cortège  se  rendit  surTEsplanadc,  en  face  du  ci- 
metière d'où  les  corps  des  augustes  Princes  avoient  été 
exhumés  la  veille  et  placés  sous  une  chapelle  ardente. 

Huit  membres  de  la  garde  nationale,  savoir  :  deux  grena- 
diers, deux  chasseurs,  deux  sapeurs-pompiers  et  deux  ca- 
valiers, désignés  pour  remplir  les  fonctions  de  gardes  du 
corps,  enlevèrent  les  cercueils  et  les  placèrent  dans  le  cor- 
billard. Quatre  chevaliers  de  Tordre  royal  cl  militaire  de 
Saint-Louis  et  quatre  chevaliers  de  la  Légion  d'honneur, 
s'étant  placés  de  chaque  côté  pour  porter  le  poèlf*,  y  restè- 
rent constamment  pendant  la  marche,  pendant  la  célébra- 


—  167  — 

tioD  de  Tofflce,  et  jusqu'au  moment  de  la  réinhumation  dans 
le  caveau. 

Pour  se  rendre  à  la  cathédrale,  le  cortège,  marchant  dans 
le  plus  grand  recueillement,  a  observé  l'ordre  suivant  : 

Cent  pauvres  de  la  villç,  revêtus  de  capotes  et  précciiés 
d'une  croix  ;  ils  portoient  chacun  un  cierge  et  marchoient 
sur  deux  haies.  Les  orphelines  tenant  aussi  des  cierges  ; 

Les  dames  Carmélites  et  leurs  élèves  ;  les  dames  de  VHù- 
tel-Dieu;  les  dames  de  la  congrégation  de  Nevers,  leiiis 
pensionnaires  et  leurs  élèves  ;  les  élèves  du  collège  de  Sens 
et  ceux  des  autres  pensionnats  de  la  ville  ; 

Le  clergé,  tant  de  la  cathédrale  que  des  autres  églises  de 
la  ville  et  de  l'arrondissement,  ayant  à  leur  tête  M.  de  la 
Tour,  vicaire  général  de  M.  l'Evêque  de  Troyesj 

Le  corbillard  drapé  en  noir,  décoré  de  branches  de  cy- 
près et  des  armoiries  de  Monseigneur  le  Dauphin  et  de  Ma- 
dame la  Dauphine,  et  attelé  de  huit  chevaux  caparaçonnés 
en  noir; 

Le  char  étoit  conduit  par  un  cocher  et  trois  valets  de  pied 
en  habit  de  deuil  ; 

M.  le  Préfet  et  M.  le  Maréchal  de  camp,  commandant  Je 
département  ; 

Ensuite  tous  les  fonctionnaires  de  la  ville  et  de  l'arron- 
dissement dans  Tordre  des  préséances. 

Toutes  les  autorités  constituées  ayant  été  placées  dans  le 
chœur,  on  a  commencé  l'office  par  les  prières  de  Tab- 
soule  (1);  la  messe  solennelle  a  été  chantée  ensuite  par 
M.  le  vicaire  général  de  Troyes,  ayant  pour  l'accompagner 
tous  les  anciens  ecclésiastiques  de  l'arrondissement.  Fen- 
dant la  prose,  les  bourdons  ont  été  sonnés  en  volée. 

Après  l'Evangile,  M.  l'officiant  a  prononcé  un  discours 
analogue  à  la  circonstance. 

L'offrande  a  eu  lieu,  suivant  le  rite  solennel  de  cette  église, 
et  de  la  manière  suivante  :  d'abord  les  quatre  prêtres  les 


'^1 


.1)  Le  narrateur,  évidemment  peu  renseigné  sur  la  liturgie,  a  pri^  lu 
chant  des  Matines  ou  des  laudes  pour  celui  de  Tabsoute. 


î 


.-,    _  168  _ 

plus  anciens,  portant  chacun  un  cierge  à  la  main,  ont  ofTert 
chacun  le  pain  et  le  vin  dans  le  calice  (1)  ;  ensuite  M.  le  curé- 
doyen,  au  nom  de  la  Fabrique,  tenant  aussi  un  cierge,  a 
ofTerl  le  pain  et  le  vin.  Enfin  quatre  gardes-maires,  portant 
aussi  des  cierges,  ont  offert  le  pain  et  le  vin  au  nom  de  la 
ville. 

Uofflce  a  fini  par  le  Libéra  chanté  à  grand  chœur,  pen- 
dant lequel  les  cloches  ont  été  sonnées  en  volée. 

Après  le  Libéra,  les  huit  chevaliers  ont  descendu  les 
corps  dans  le  caveau,  et  les  ont  placés  sur  des  chenets  de 
fer. 

Le  clergé  a  salué  et  honoré  les  restes  précieux  des  au- 
gustes Princes  en  jetant  de  l'eau  bénite,  ce  qui  a  été  observe 
ensuite  par  M.  le  Préfet,  M.  le  Général  commandant  le  dé- 
partement, M.  le  Sous-Préret,  et  tous  les  autres  fonction- 
naires. 

Après  la  cérémonie,  le  cortège  a  reconduit  M.  le  Préfet 
chez  lui. 

Le  soir  même,  le  Préfet  rendait  compte  au  Mi- 
nistre de  rinlérieur  de  ces  événements.  Le  début 
de  sa  dépêche  n'est  pas  d'une  exactitude  rigou- 
reuse; elle  n'en  est  pas  moins  intéressante  : 

Je  me  suis  transporté  hier  à  Sens  pour  être  présent  à  la 
recherche  des  cendres  de  Monseigneur  le  Dauphin  et  de 
Madame  la  Dauphine.  Cette  opération  a  eu  lieu  comme  je 
lavais  prescrite  et  elle  a  été  couronnée  du  plus  grand  suc- 
cès. 

L'identité  a  été  reconnue  sans  aucun  doute.  Les  précieux 
restes  placés  dans  des  cercueils  de  plomb  préparés  pour 
les  recevoir  et  remis  ensuite  aux  ministres  de  la  Religion. 


(1)  (le  cérémonial  qui  rappelle  si  bien  le  vérllablc  sens  de  roffrando  vi 
les  traditions  IHurgiqiies  de  l'ICglIse  primitive  a  été,  avec  rnison,  conservr 
après  Tadoption  du  rite  romain.  On  l'a  observé,  en  1891,  aux  fUncniilles 
de  s.  K.  le  cardinal  Bernadou. 


—  169  — 

Ui  cérémonie  de  !a  translation  vienl  d'nvoir  lien  avec 
lotîte  kl  pompe  canvenable.  Votre  Excellence  peut  compler 
sur  le  procès- verbal  qui  lui  serii  envoyé.  Le  loin  beau  est 
dans  le  niême  étal  où  il  se  trouvait  avant  qu'il  eut  été  pro* 
tioé  par  des  mains  impies 

le  pars  à  rîastnnt  pour  Auxerre.  (Archwes  de  rVotme^  V  30./ 

Au  lexle  de  celle  dépêche  est  joint  le  projet  d  iiiie 
lellre  au  Ministre.  II  n'est  pas  certain  cjuc  le  Préfet 
ail  ost'  exhaler  la  mauvaise  humeur  qui  s  y  traduit; 
eu  tout  cas,  elle  nous  édifie  sur  ses  sentimenls  au 
soir  des  cérémonies  de  Sens  : 


h 


La  lettre  naiograptte  que  Voire  Excellence  a  écrite  au 

Sous-rrêrct  concernant  la  translation  tics  cendres  de  Mon- 
icigneur  le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine  n'a  pas  pro- 
ditïl  un  elTet  favorable  à  radminislralion.  Je  la  supplie  de 
m  CD  donner  rexplication. 

Voire  ExecUence  ne  connaissait  paj;  ma  correspondance 
à  et  sujet  Elle  a  été  tronipée.  Il  y  a  des  personnes  d*un  ex- 
ceilcnt  esprit,  mais  il  y  a  aussi  quelques  brouillons  qui  en- 
tra veal  auUint  qu'ils  peuvent,  J  aï  été  déjù  obligé  de  les  ra- 
mener à  Tordre  plus  d  une  fois  et  il  est  d  autant  plus  néces- 
saire rie  ne  pas  relslcber  les  ressorts  des  pouvoirs  de  Taulo- 
filé  supérieure  à  qui  l'adniinistraliuu  est  confiée  :  il  y  a  des 
nains  pures  mais  que  1  ïige  a  fort  affaiblies  et  qu*U  est  bien 
nUel  de  diriger. 
prends  lu  liberté,  Moiisei|^neur,  de  souraeltre  ces  ob- 
alions  û  Voire  Excellence»  en  l'assurant  qu'on  peut  sér- 
ie Roi  aussi  bien  que  moi,  mais  pas  avec  ]ïIus  d'amour 
le  zèle  pour  ses  devoirs  el  pour  Texéculion  de  vos  or- 
s*  (Ibidem, J 


C&IPITRE  X 


\n% 


da 


A  M»  nUmr  à  Aitxerrr^  le  Préfet  trouirail  une 

Mptdm   àm  Miiiglii    de  rfadérieiin   Pei^tiadé, 

d*dprés  tes  ra|»port»  anlériean,  qop  la  cérumoaie 

était  relardée  jusqu'à  la  On  du  moisi,  M.  de  Moiilev», 

quiou  éeriYaif  : 

Parti,  ce  9  déecmbre. 

Mo?f$f£t'R,  Frère  àm  Roi,  désirerait  se  tmavrr  à  Stos  pom 
MtJstfT  à  la  céréfnonîe  ftinêlirc  qui  s'y  prépare.  Ce  projeC 
nVîit  pÊ%  encore  arrête;  mais  j'ai  cm  devoir  voua  en  prèveJ 
nir,  je  vais  également  le  faire  dire  à  M,  1  évéquc  de  TroyesJ 
Je  Vûus  ferai  paJi^cr  les  derniers  ordres  dès  que  je  les  aurai 
reçu*,  mab  je  croi?*  que  vou%  pouvez  dt-jî^i  f;iire  quelque! 
filfipriittian»  préltminairex  La  \ûu%  essentielle  est  de  biei 
constnier  TideaLité  rie  ces  vétiérnbles  dépouilIeH,  de  lesfali 
erd'eiitii-r  rlniiH  un  crrfueil  et  de  k's  déposer  dans  un  liei 
viThiu  où  elif!^  Hoiejd  hnnurnljlcnictit. 

Il  ne  nie  pniinl  pus  décent  que  Monsieur  assiste  à  louves 
hiiT  de  cellt^  hi^pulturc,  où  elles  ont  éïù  si  hidêcenimei 
plecfeu^  mai!»  il  pou n ait  ne  trouver  au  lieu  ou  vous  auricd 


—  172  — 

pour  parfaire  les  décorations  de  la  cathédrale,  (aire  prépa- 
rer la  place  qui  doil  être  destinée  à  Monsieur  dans  le  milieu 
du  chœur,  en  avant  du  tombeau,  précisément  là  où  se  trou- 
vait un  groupe  de  dames  à  la  dernière  cérémonie. 

Comme  les  dames  de  la  ville  ne  pourront  point  être  pla- 
cées dans  le  chœur,  on  pourra  marquer  cl  circonscrire  une 
place  dans  la  partie  antérieure  et  extérieure  du  chœur  d'où 
elles  pourront  voir  facilement  le  Prince. 

3»  M'indiquer  le  logement  que  vous  croirés  le  plus  conve- 
nable, sans  rien  arrêter  définitivement  que  je  ne  Taie  ap- 
prouvé. 

Je  désire  que  M.  de  Laurencin  dirige  par  lui-même  ces  ar- 
rangemcns  et  qu*il  choisisse  les  personnes  nécessaires  pour 
Taider. 

Quant  à  la  police  intérieure  de  l'église,  qui  a  été  extrême- 
ment mal  faite  la  dernière  fois,  j'espère  que  M.  TEvêquc 
voudra  bien  me  permettre  d*y  mettre  ordre. 

Le  séjour  du  Prince  nécessitera  quelques  dépenses^;  la 
ville  de  Sens  n'est  pas  riche;  aussi  je  suis  porté  à  pourvoir 
à  tout.  Dites-moi  votre  façon  de  penser  là-dessus. 

En  quel  état  sont  les  arcs-dc-triomphe  sur  la  route?  En 
existe-t-il  encore  quelques-uns  ? 

La  saison  n*cst  pas  favorable  pour  ces  sortes  de  décora- 
tion. On  ne  pourra  guère  non  plus  sabler  les  rues  parce 
que  la  pluie  enlèverait  tout  sur  le  champ. 

Je  serai  rendu  à  Sens  deux  ou  trois  jours  avant  l'arrivée 
du  Prince;  et  je  verrai  tout  et  examinerai  tout  par  moi- 
même. 

Probablement  je  vous  enverrai  M.  Sauvalle  demain  pour 
vous  faire  part  verbalement  de  mes  intentions  ultérieures. 

J'ai  oublié  de  vous  dire,  avant  de  vous  quitter,  que  je  dé- 
sirais qu'aucune  relation  de  ce  qui  s'est  passé  ne  fut  im- 
primée dans  le  département  sans  qu'auparavant  j'y  aie  ap- 
posé mon  visa.  Je  vous  prie  de  tenir  la  main  exactement  à 
cette  disposition. 

Gamot.  [Archives  de  VYonne^  V  20.) 


i 


—  !73  — 

:  tSsculcmenl  le  Ministre  pouvait  informer  offi- 
îlemenl  le  Préfet  de  la  visite  du  Comte  d'Artois  : 

i.e  Roi  vient  de  me  dire.  Monsieur,  que  MoxsiEim»  comte 

'.rtois,  seroit  ix  Sens  niordi  prochain  pour  tjinner  et  qu  il 

isîeroit  Iciendcmaln  au  service  qui  doit  être  célébré  tous 

ms  pour  feu  M.  le  DauphiiK  Je  vous  prie  de  donner  des 

!rrs  en  consêqence.  Moksîëoh  ne  couchera  qu'une  nuit  à 

.  us. 

1^1  nouvelle  ne  surprît  personne  à  Sens.  Depuis 
plusieurs  jours,  grâce  à  M.  de  la  Mothe,  parti  aux 
nouvelles  à  Paris,  on  connaissait  par  le  menu  les 
projets  du  prince. 

Le  maire  de  Sens,  M.  de  Laurencin,  avait   en 

et,  reçu  la  lettre  suivante  : 

Paris,  lundi,  Il  heures  du  soin 
Monsieur, 
ivaisvu  M.  BourleM premier  valet  dcMoKSiEUR)(î)  avant 
lîncr  el  voici  ce  que  j'ai  recueilti. 
l*  Il  n'a  point  écrit  dimanche  ù  Madame  d'Yau ville  (sa 
in  parce  que  rien  n  élail  encore  déterminé;  la  lecture  du 
^..ocès-verbal  qui  aura  préparé  l'article  inséré  dans  le  Motii- 
tatrât  ce  jour  hâtera  sa  décision  ; 

2>  Rien  de  plus  certain  que  le  Uoi  seul,  par  égard  pour  la 

^nié  de  MoxsiEL"a.  s'est  opposé  à  ce  qu'il  assistât  à  ta  cérc- 

ciie  de  l'exhumation  et  deréinhumation^  et  ouest  content 

glie  soit  faite  ; 

MoNsiELH  ne  sera  à  Sens  que  le  19  et  peut-être  le  20;  il 

aorche  point  le  dimanche  et,  le  19  lundi  étant  jour  de 


irbns  If  Ctiîeihtrisr  th*  fa  Ctttir  pour  17W9,  M.  fHoiirlt't  di*  VniiJicc«;ï]Ë& 

*  eomiiii^  |irt't)tîç-r  valrt  çlr  la  (!,hLïfii)>ri-  (tu  nuiiite  «l^ArtoK  ;  Mm  tUs  c^t 

triiitnt  |>rfmii-r   vîilcl   liiï   la  Cliambre   pnr  ijuarlicn  l**iilibr'  Slnidîi- 

.ifio  Hiiiirl^l  iJr  Vuojicrilcs,  chiiiialnc  i-l  vituiiri*  geiirml  de  Sens,  l-IaII 

-  'Il  cuire  H  Icctctir  du  Prince*  (V&tr p,  53,  nntc  H.} 


—  174  — 

Conseil,  auquel  il  se  fait  un  devoir  d'assister,  peut-être 
craindrait-il  d'arriver  trop  tard.  Alors  la  cérémonie  n'aurait 
lieu  que  le  21  ;  il  n'y  aurait  pas  grand  mal  à  cela,  nous  au- 
rions plus  de  temps  pour  les  préparatifs  ; 

4»  La  suite  de  Monsieur,  en  admettant  la  présence  de  ses 
deux  fils,  n'excéderait  pas  dix-huit  personnes.  Monsieur 
couchera  chez  Madame  d'Yauville(l),avec  son  capitaine  des 
gardes,  son  premier  gentilhomme,  et  quatre  à  cinq  person- 
nes de  suite  au  plus,  mais  un  homme  seulement  pour  sur- 
veiller le  service. 

5»  On  prendra  toutes  les  mesures  possibles  pour  qu'en 
sortant  du  service,  et  avant  le  repas  destiné  à  Monsieur  i\ 
la  mairie,  il  veuille  bien  passer  en  revue  la  garde  nationale; 

6"  Si  les  deux  princes  viennent,  ils  seront  placés  chez  Ma- 
dame Larcher(2)  et  chez  M.  de  Fontaine  (3);  le  premier  au- 
mônier de  Monsieur,  M.  l'abbé  de  Lallit,  chez  M.  l'abbé  de 
Vaudricourt  (4)  (tout  cela  dans  la  même  rue).  Il  paraît,  au 
surplus  que  Monsieur  se  fait  une  loi  d'abandonner  à  MM.  les 
Préfets,  dans  toutes  ses  tournées,  le  soin  de  marquer  son 
logement. 

Voilù,  Monsieur  le  Maire,  le  résumé  de  mon  long  entre- 
tien avec  M.  Bourlet,  qui  désire  ardemment  accompagner  le 
Prince  dont  les  bontés  pour  lui  sont  extrêmes,  et  nous  pour- 
rions nous  en  ressentir. 

De  la  Mothe. 

(Archives  de  V  Yonne,  V  20.) 

De  son  côté,  le  curé  de  Sens,  M.  de  Formanoir, 
était  avisé  par  Mg»*  de  Boulogne  : 

16  décembre  1814. 
Plusieurs  incidents  et  divers  malentendus  relatifs  à  la  cé- 
rémonie de  Sens  m'ont  empêché  de  répondre  aux  deux  lel- 

(1)  Rue  du  Snint-Ksprit,  n*  6. 

(2)  Rue  du  Saint-Esprit,  n*  10. 

(3)  Rue  du  Saint-Esprit,  n*  9. 

(4)  Rue  du  Saint-Esprit,  n-  4. 


—  175  — 

très  que  vous  m*avez  écrites.  Je  vous  apprends  par  celle-ci 
que  Monsieur  allant  à  Sens,  mardi  prochain,  pour  assister 
au  ser\'ice  solennel  qui  aura  lieu  pour  M.  le  Dauphin,  je 
partirai  lundi  pour  arriver  sur  les  huit  heures  du  soir  à 
Sens  et  descendre  chez  vous,  très  fâché  de  vous  donner 
rembarras  de  ma  personne,  mais  très  charmé  du  plaisir  que 
j'aurai  de  vous  voir.  Nous  aurons  par  là  le  temps  de  tout 
préparer  pour  le  service  du  surlendemain  que  je  célébrerai 
pontificalement. 

11  faudra  tâcher  de  convoquer  le  plus  que  vous  pourrés, 
les  prêtres  des  environs,  tant  pour  servir  à  l'autel  que  pour 
augmenter  la  pompe  de  la  cérémonie. 

J'ai  donné  avis  aussi  dans  ce  sens  là  à  Fabbé  de  la  Tour, 
qui,  peut-être,  n'aura  plus  la  force  de  revenir  à  Sens,  tant  il 
a  été  fatigué.  Je  crains  de  Têtre  aussi,  vu  ma  mauvaise  santé 
et  ce  mauvais  temps,  mais  il  faut  savoir  se  résigner  quand 
il  le  faut. 

Je  suis  fâché  de  n'avoir  pas  eu  le  temps  de  faire  une  pe- 
tite oraison  funèbre  et  d'avoir  été  pris  au  dépourvu  à  cet 
égard.  D'ailleurs  je  n'aurais  pas  pu  prêcher  et  officier;  mais 
j  ai  évoqué  quelques  lignes  pour  dire  à  Monsieur. 

J'espère  que  tout  se  passera  dans  l'ordre  et  la  décence 
convenable.  Je  vous  renouvelle,  en  attendant.  Monsieur, 
tous  les  sentimens  d'estime  et  d'affection  que  vous  me  con- 
naissez et  auxquels  je  me  flatte  que  vous  rendez  justice. 
Et.-Ant.,  Evèque  de  Troyes.  [Dossier  de  Formanoir.J 

Le  Bulletin  de  la  Préfecture  de  V  Yonne  (no  XIII) 
a  publié  le  compte  rendu  officiel  de  la  réception 
faite  à  Sens  au  fils  du  Dauphin.  Nous  avons  extrait 
de  la  phraséologie  préfectorale  les  détails  qu'on  va 
lire  : 

S.  A.  R.  arriva,  le  mardi  20,  à  4  heures  du  soir,  à  Ville- 
neuve-la-Guyard.  Le  Préfet  et  le  Général  commandant  le 
département  Vy  attendaient  avec  un  détachement  de  gen- 


w 

m 

1 

.   1 

H 

1 

i 

II 

1 

1 

^^■rl  2UmI 

1 

1 

1 

^B^^^^^^H 

^ 

« 

f 


—  176  — 

darmeric.  Après  avoir  reçu  les  salutations  du  Préfet,  qui  lui 
présenta  l'arrêté  réglant  le  cérémonial  de  la  soirée  et  du 
lendemain,  le  Prince  continua  sa  route.  A  Pont-sur- Yonne, 
le  Sous-Préfet  de  Sens  se  joignit  à  la  suite.  Les  lanciers  de 
Berry  et  la  gendarmerie  formaient  l'escorte.  Aux  limites  du 
territoire  de  la  ville  attendaient  le  Maire  entouré  du  corps 
municipal,  la  garde  nationale  à  pied  et  à  cheval,  et  une 
multitude  considérable. 

Dans  son  discours,  le  Maire  eut  soin  de  faire  ressortir  le 
soin  pieux  avec  lequel  les  Sénonais  avaient  relevé  le  tom- 
beau du  Dauphin,  c  L'empressement  qu'a  mis  la  ville  de 
c  Sens  à  la  restauration  du  Mausolée  des  auteurs  de  vos 
«  jours  prouvera  à  Sa  Majesté ,  ainsi  qu'à  Votre  Altesse 
c  Royale,  tout  le  prix  que  nous  attachons  à  la  conservation 
c  de  ce  précieux  dépôt  dans  notre  cité.  » 

Monsieur,  dans  sa  réponse,  fit  l'éloge  du  zèle  et  de  In 
piété  des  habitants  de  Sens  et  leur  en  témoigna  sa  grati- 
tude. 

Pendant  ce  temps,  un  groupe  de  mariniers  dételaient  les 
chevaux,  s'emparaient  du  carrosse  du  Prince,  et  le  traînaient 
en  triomphe  jusqu'à  l'hôtel  de  Mm«  d'Yauville,  où  il  devait 
résider. 

Après  un  instant  de  repos,  le  Prince,  entouré  d'un  cortège 
d'honneur,  se  rendit  à  l'hôtel  de  ville.  La  mairie  était  alors 
installée  dans  le  vieux  palais  des  archevêques,  à  moitié 
ruiné.  C'est  là  qu'eut  lieu  le  banquet  offert  par  la  ville.  Pen- 
dant le  repas,  la  foule  circulait  dans  la  salle  où  le  frère  du 
Roi  avait  convié  les  autorités  du  département  et  dans  celle 
où  une  table  de  cent  couverts  réunissait  la  suite  du  Prince, 
les  gardes  du  corps  et  les  principaux  fonctionnaires. 

Après  le  dîner.  Monsieur  s'est  rendu  dans  la  plus  grande 
salle  de  l'hôtel  de  ville  (1),  destinée  pour  la  présentation  des 
autorités.  Une  double  rangée  de  dames,  élégamment  velues, 
étaient  placées  sur  un  des  côtés  de  la  salle  ;  l'autre  côlé, 
était  occupé  par  les  autorités,  dans  Tordre  des  préséances. 

(1)  Sans  doute  la  saUc  synodale  de  rofncialit<^. 


—  177  — 


:  f  Préfet  fil  les  présentations,  4  On  a  remarqué  dans  ces 
prmntnHons»  dit  le  procès-verbnU  celle  de  trois  fin  mes  de 
>  IIS»  Mesdames  Duroulîn,  Bernard  cl   Follet  qui,  i^i  une 

,)oqiie  encore  rècenle  où  cette  ville  élnil  nicnncéc.  pour  la 
sccDodc  fois,  du  pitiage  et  de  Hncendic  par  les  armées  ol- 
lÎLTs,  se  sont  exposées  h  tous  les  dangers,  et  ont  obtenu  des 
uhefN  b  suspension  des  Lostdilés.  Le  Prince  a  entendu  ces 
(LiiBes  avec  intérêt  el  a  donné  à  leur  dévouement  l'éloge  le 
plus  llatteur  {l}. 

<  La  couiniîssion  nommée^,  pour  suivre  ta  restauration 
il  riionumcnt  consacré  h  la   mémoire  de  Monseigneur  le 

'  upliin  el  de  Mudame  b  Daupliine,-.  ^>ant  été  également 

résenlée  au  Prince,  S.  A.  Royale  n  daij^né  1  accueillir  avec 

►nté.  Elle  a  fait  connaître  à  M.  Person,  artiste  distingué, 

uelk*  n'ignora  il  pas  tout  ce  que  cette  restauration  devait 

son  ïéle  et  u  son  tolent.  » 

Après  celte  soirée,  te  Prince  fut  reconduit  i\  riiôtel  de 
M'»'   il  Yau ville,  acclnnié  par  la  population.  La  ville  cnliére 

'lit  illuminée.  »  Le  mot  d'ordre  donné  parle  Prince  lui- 
iiiâne  a  été  :  Sainl  Louis,  Sens.  » 

*  Le  lendemain,  mercredi  21  décembre,  une  salve  dartiL 
Ktic  el  les  cloches  de  la  catliédrale  ont  annoncé,  dés  7  heu- 
\s  du  matin,  la  pieuse  cérémonie  i\  laquelle  ce  jour  devail 

l'Q  consacré.  Elle  avait  été  fixée  à  10  heures  précises  du 

udin.  Ué^  9  tieures  et  demie,  les  Autorités  se  sont  réunies 

1  iîtitel  de  Ville  et  se  sont  rendues  au  palais  de  SA.  Royale. 

«  Avant  dé  sortir,  le  Prince  a  reçu  cheval iers  de  Suint- 
Lnuis,  M,  Iloudîn^  maréchal  de  camp,  commandant  le  De- 
p^Értement,  et  M.  le  comte  de  Laurencin.  chevalier  de  Molle, 
Micîen  lïeutenanl*coloncl  de  cavalerie  et  maire  de  la  ville 

t  Jîens,  auxquels  S.  A.  Royale  venait  d'accorder  cette  dé- 

-ration. 

f  A  10  heures,  MoxsiLCK,  escorté  comme  le  jour  précédent, 
pû  allé  à  Végtise  cathédrale;  les  rues  que  S,  A.  Royale  a 
traversées  étalent  remplies  dliabitans,  et  les  cris  de  :  Vîm 


Tinr  J<  PiuinfH,  Sîhjet  tir  Smt,  t)|>^  ^«  Ui  qï  2B, 


12 


11 


—  178  — 

!e  Roi^  Vive  Monsieur!  se  faisaient  entendre  de  toutes 
parts. 

t*  Arrivé  à  Téglise,  M.  Tévêque  de  Troycs,  à  la  tête  du  clergé, 
a  reçu  le  Prince  sous  le  dais,  à  l'entrée  de  la  cathédrale  (1), 
et  lui  a  adressé  un  discours  aussi  touchant  qu'éloquent.  On 
a  retenu,  dans  la  réponse  de  S.  A.  Royale,  ces  mots  dignes 
du  nis  de  saint  Louis  :  c  Je  ne  doute  pas  que  la  France  ne 
doive  aux  prières  de  nos  illustres  parens,  dont  les  cendres 
reposent  dans  cette  enceinte,  le  bonheur  que  Dieu  lui  a 
rendu      i 

«  Monsieur,  se  rendant  ensuite  à  la  place  qui  avait  été  dis- 
posée dans  le  sanctuaire  pour  le  recevoir,  est  entré  dans  le 
chœur;  arrivée  devant  le  Mausolée,  S.  A.  Royale  s'est  pros- 
ternée sur  la  tombe  de  ses  pères  et  y  a  fait  sa  prière.  Le 
service,  malgré  l'affluence  du  monde  qui  se  pressait  de 
toulos  parts,  a  été  célébré  avec  une  pompe  et  une  majesté 
dignes  de  son  objet.  Les  cérémonies  (2)  observées  dans  cette 
méui omble  circonstance  rappelaient  les  plus  beaux  jours 
de  la  iloligion;  et  rien  n'était  plus  touchant  que  cette  réu- 
nion, au  pied  des  autels,  d'un  Prince  justement  chéri  et 
d'un  IVélat  que  ses  vertus  et  ses  talents  distinguent  si  émi- 
ueuiuient. 

0\  M  Quatre  curés  portaient  le  dnis.  M"  TEvêquc  présenta  h  S.  A.  Ro>*alc 
L't-Ai)  iM-nite»  lui  Ot  Imïscr  la  Vraie  Croix,  lui  donna  l'encens...  »  (Relalion 
th  lAUntmach  Tarbé,  1810,  p.  179.) 

i'I)  m  ï/(ifTrandc  a  été  faite  suivant  l'usage  par  quatre  curés  les  plus  nn- 
ckns  <lp  l'arrondissement,  après  lesquels  le  Prince  s'est  aussi  présenté 
]ioi)r  lulro  la  sienne;  et  ensuite  M.  le  Curé,  au  nom  de  la  Fabrique  et  suivi 
i\v  quîiln^  bedeaux  portant  cierge,  a  offert  le  pain  et  le  vin.  Un  membre 
du  rtiiisril  municipal,  suivi  de  quatre  gardes-maires,  a  fait  semblnblc 
DlTnindc,  au  nom  de  la  ville. 

N  i^v  rninfalquc,  A  trois  rangs  de  gradins,  couvert  de  cierges,  était  sur- 
nioiUi'  ft'un  ditis  de  velours  noir,  aux  armes  du  Dauphin.  Sur  le  cutafal- 
qiu'  iHnU  étendu  un  riche  manteau  royal,  parsemé  de  fleurs  de  l}'s.  Sur 
un  coussin  cramoisi,  brodé  en  or  et  garni  de  ses  glands,  était  posée  la  cou- 
ronne' il  IL  Dauphin,  et,  au-dessous,  était  suspendu  le  grand-cordon  de  l'or- 
dre du  Saint-Esprit,  le  tout  couvert  d'un  crêpe. 

s  I^i  quête  a  été  faite,  tant  pour  l'église  que  pour  les  pauvres,  par  Mes- 
dsimos  Bt' nord  et  Desgranges.»  (Alnmnach  T€irbé,  Ibidem), 


—  179  — 

«  Après  la  cérémonie,  cl  en  repassant  devant  le  Mausolée, 
le  Prince  a  réitéré  sa  prière  et  a  été  ensuite  reconduit  sous 
le  dais  par  Mp"  TEvêque,  à  la  tête  de  son  clergé,  jusqu'à  la 
porte  de  l'église. 

«  De  là,  S.  A.  Royale  est  relournée,  avec  son  cortège,  à  son 
palais  ;  elle  y  a  passé  en  revue  la  garde  nationale  de  la  ville 
de  Sens,  et  le  Prince,  sur  la  demande  de  M.  le  Préfet,  a  au- 
torisé tous  ceux  qui  la  composent,  à  porter  le  liseré  noir 
qui  rappellera  la  circonstance  qui  a  donné  lieu  au  voyage 
de  S.  A.  Royale. 

<  Le  Prince  a  fait  remettre  à  M.  le  Préfet  la  somme  de 
5000  francs,  pour  distribuer  des  secours  aux  cinq  arrondis- 
sements du  Département;  et  de  plus,  2000  francs  à  M.  le 
curé-doyen  de  Sens,  pour  les  pauvres  de  cette  ville. 

<  Dans  la  distribution  des  croix  de  chevaliers  de  la  Légion 
d  Honneur,  faite  à  celte  occasion,  nous  relevons  les  noms  de 
M.  de  Busquet,  Sous-Préfet  de  Sens,  ancien  lieutenant-colo- 
nel des  Dragons  de  Monsieur,  aujourd'hui  Louis  XVIII,  et 
gentilhomme  de  sa  chambre  ;  Miron,  président  de  la  dépu- 
tation  de  Sens  envoyée  au  Roi  ;  le  chevalier  de  Busquet, 
chevau-léger  de  la  Garde  du  Roi,  fils  du  Sous-Préfet  de 
Sens. 

c  S.  A.  Royale  a  été  conduite  avec  les  mêmes  escortes  et  le 

même  cortège  jusqu'aux  limites  du  territoire  de  la  ville 

M.  le  Préfet,  le  maréchal  de  camp  Boudin,  M.  le  marquis 
de  Tanlay,  les  lanciers  et  la  gendarmerie  l'ont  accompagnée 
jusques  aux  limites  du  Département.  » 

La  cérémonie  du  21  décembre  1814,  en  faisant 
revivre  les  traditions  de  l'Eglise  sénonaise,  marquait 
louverture  d'une  ère  nouvelle.  Désormais,  les  ser- 
vices du  Dauphin  et  de  la  Dauphine  seront  célébrés, 
chaque  année  avec  la  solennité  d'autrefois.  A  défaut 
des  princes  de  la  famille  royale  dont  les  visites  ne 
coïncideront  guère  avec  les  dates  des  anniversaires, 


\ 

m  j 

\î 

à 

itl 

il^l 

^H  ^^^^^r^^^^P^^I 

■'.l 

^^' 

Ji 

ilH 

\ 

I 

I 

^^^^^^H 

—  180  — 

le  premier  gentilhomme  de  la  Chambre  du  Roi,  un 
capilaine  des  Gardes  et  l'Intendant  des  Menus, 
viendront  (uièlement,  du  moins  les  premières  an- 
nées, y  représenter  le  Roi. 

En  mars  1815,  à  la  veille  des  événements  qui  vont 
obliger  Louis  XVIII  à  reprendre  le  chemin  de  Texil, 
le  service  pour  la  Dauphine  a  eu  lieu  (1). 

Dés  les  premiers  jours  de  décembre  suivant,  le 
Préfet,  M.  de  Goyon,  songe  aux  moyens  de  célébrer 
ranniversnirc  du  Dauphin,  car  aucune  subvention 
de  l'Elat  n*a  été  prévue  pour  cet  objet.  Un  devis 
s'élevant  a  156  francs  lui  paraît  trop  élevé.  Préoccupé 
«  des  rédticlionsque  commande  la  situation  finan- 
cière de  la  caisse  communale,  ^  le  Préfet  est  d'avis 
de  ne  dépenser  que  253  francs. 

Je  conçois,  écrit-il  au  Sous-Préfet  de  Sens,  que  si  M.  le 
Pi  ince  vie  ni,  cet  échafaudage  d*économie  croulera  néces- 
sairement. Mais  alors  nous  aurons  d'autres  moyens;  tandis 
que  si  S.  A.  H.  ne  vient  pas,  nous  n'en  aurons  aucun  et 
j'ignore  quelle  est  la  caisse  qui  en  supportera  définitivement 
la  dépense...  C'est  pourquoi  je  vous  invile  à  soumettre  le 
calcul  d'autre  part  à  M.  le  doyen,  curé  de  Sens,  pour  en  dé- 
fltïiUf,  en  passer  par  ce  qu'il  jugera  convenable.  {Archives 
de  t Yonne,  y.  20.) 

Aucun  pritice  n'assista  à  la  cérémonie,  qui  eut  lieu 
le  mardi  19  décembre.  M.  de  Goyon  était  venu 
d*Auxerju  pour  y  prendre  part. 

Le  service  pour  la  Dauphine  devait  avoir   un 


(Il  Compter  tk  fa  fabrique  de  Saint- Etienne  de  Sent  :  «  11  mors  (1815). 
po«*  rt  di^pfinr  fir  In  rcprcscnlnllon.  pour  le  service  de  M**  la  Dauphine.  » 


—  181  — 

grand  éclal,  grâce  à  la  présence  de  Marie-Thérèse 

(Je  France,  sa  petite-fille. 

Dès  le  2  mars,   Mgr  de  Boulogne  l'annonçait  à 

l'abbé  de  Formanoîr  : 

Ce  dimanche  2  mars  1816. 

Je  vous  préviens  que  Madame  la  duchesse  d'Ângoulême 
se  rendra  à  Sens,  le  12  de  ce  mois,  pour  l'anniversaire  de 
Madame  la  Dauphine  qui  aura  lieu  le  lendemain.  Vous  aurés 
soin,  en  ce  qui  vous  concerne,  que  tout  soit  prêt  dans 
léglise  pour  la  recevoir  dignement.  J'ai  eu  l'honneur  de  lui 
faire  ma  cour  ce  matin.  Elle  m'a  dit  qu'elle  désiroit  que 
loffice  se  fît  à  neuf  du  matin.  J'officierai  pontificalement, 
suivant  ses  intentions:  Je  vous  recommande  la  chaire  épis- 
copale,  pour  quelle  soit  décemment  ornée.  Il  y  a  toute  appa- 
rence que  nous  n'aurons  pas  ce  fou  de  capitaine  des  Gardes 
qui.  Tannée  dernière,  eut  l'imprudence  de  tout  bouleverser 
de  son  chef  et  à  mon  insçu  ;  mais  quand  nous  l'aurions,  je 
vous  promets  bien  que  je  ne  lui  passerons  aucune  insolence. 

Il  est  nécessaire  que  vous  convoquiés  tous  les  desservans 
de  votre  arrondissement,  comme  l'année  dernière,  pour  que 
la  cérémonie  funèbre  se  fasse  avec  dignité. 

Je  vous  donnerai  encore  l'embarras  de  ma  personne,  mais 
ce  ne  sera  pas  pour  longtemps;  ce  sera  pour  moi  un  vrai 
plaisir  de  vous  revoir  et  de  vous  renouveler,  mon  cher 
doyen,  l'assurance  de  tous  les  sentiments  d'estime  et  d'affec- 
tion que  je  vous  ai  voués. 

Et.-Ant.,  Evêque  de  Troyes, 

«  Je  partirai  le  onze  pour  arriver  à  Sens  entre  7  à  8  heu- 
res du  soir.  »  (Dossier  de  Formanoir.) 

La  Ville  de  Sens,  lisons -nous  dans  le  compte  rendu 
officiel  (l),  a  eu  le  bonheur  de  posséder  dans  ses  murs 
Madame,  Duchessse  d'Angouléme,  à  l'occasion  du  Service 
yjlcnnel  anniversaire  qui  y  a  été  célébré,  le  13  courant,  en 
mémoire  de  Madame  la  Dauphine,  son  aïeule.  Déjà  toutes 

<I   Acte^  adminittratifx  du  Drimrtenient  de  l'Yonne,  n*  9. 


i 

H  i^^^l 

1 

i^i^lBs  ' 

m 

i 
i 

i 

j 

H* 

5 

1 

j 

à 

«it^^^^^^^^^^^H 

—  182  — 

les  Gardes  Nationales  des  diverses  villes  du  Département... 
étaient  rèiiiiie^ï  au  nombre  de  plus  de  six  cents. 

L'ivrrivcc  de  S.  A.  R.  étant  annoncée  pour  le  12  courant, 
six  lieurcs  du  soir,  le  Préfet,  le  général,  le  marquis  de  Vil- 
lefranchc,  le  Sous-Préfet  et  le  Maire  de  Sens  à  la  tête  de 
son  conseil  mtinicipal,  se  rendirent,  dès  4  heures,  à  l'entrée 
de  la  ville-  Maiume  y  arriva  à  5  heures  et  demie,  accompa- 
gnée de  la  CuLiitesse  de  Choisi,  sa  dame  d'atour,  la  Comtesse 
de  liiron  une  de  ses  dames,  le  vicomte  d  Âgout,  son  premier 
écuycr,  el  M.  Marguerye,  officier  des  Gardes  du  Corps,  et 
escortée  pni  un  détachement  des  lanciers  de  la  Garde 
Hoyalc... 

S,  A.  H.  étant  arrivée  à  l'entrée  de.  la  ville  de  Sens,  les 
mariniers  saisirent  le  moment  où  les  autorités  déposaient 
aux  pieds  de  Madame  Thommage  de  leur  respect,  pour 
dételer  les  chevaux  de  sa  voiture,  malgré  ses  plus  vives 
iiislnnees  tie  bonté  pour  se  soustraire  à  ce  témoignage 
d'amour  et  de  dévouement. 

Madame  ûi  alors  son  entrée,  accompagnée  des  Autorités, 
d  ini  défaeltcnient  de  la  Garde  Nationale  avec  la  Garde  à 
clievul  en  té  te,  et  précédée  de  la  musique  de  la  Garde 
Nationale  d'Auxcrre,  qui  jouait  l'air  :  Oiipeul-on  être  mieux 
if  n'ait  srùî  4iv  sff  famille  ? 

Toutes  les  fenêtres  étaient  garnies  de  drapeaux  blancs 
ornés  de  ileurs  de  lis  et  de  légendes  qui  toutes  consacraient 
les  scnliuieiils  des  Français  pour  leur  Roi  légitime,  pour 
lauguslc  Utie  *ie  leur  Roi.  Toutes  les  rues  étaient  bordées 
de  deux  haies  de  Gardes  Nationales 

Maiïami:,  arrivée  à  l'hôtel  qui  lui  était  destiné  (1),  y  a  été 

C(:ue  pnr  M la  comtesse  de  Goyon,  l'une  de  ses  dames, 

fciiime  du  Fréfcl,  et  par  les  principales  dames  de  la  ville, 
qui  s'étaient  rangées  sur  son  passage 

(1}  l^s  Affffhc%  ife  Senx  précisent  :  «  ("est  In  maison  de  M.  <le  Fonlaino, 
itoiil  le  û\%t  giinle  (lu  corps,  a  suivi  le  roi  n  Gand.  i  Cet  hôtel,  aujourd'hui 
hfibité  piir  M.  Ii'  mni-quis  de  Trayncl,  porte  le  n*  9  de  la  rue  du  Saint- 
HspHt,  aclucUenienl  rue  Abnilard. 


—  183  — 

Le  dîner  étant  servi,  Madame  a  bien  voulu  y  admettre 
M™*'  la  comtesse  de  Goyon,  M.  TEvêque,  le  Préfet,  le  maré- 
chal de  camp  Boudin,  commandant  le  département,  le  mar- 
quis  de  Villefranche,  maréchal  de  camp,  inspecteur  général 
des  Gardes  Nationales  de  l'Yonne,  et  M.  de  Beurnonville, 
commandant  des  Gardes  Nationales  de  Sens.  Après  le  re- 
pas, toutes  les  Autorités  ont  été  admises  à  paraître  devant 
Madame  qui  les  a  reçues  avec  une  bienveillance  égale.  Après 
les  Autorités,  les  dames  ont  été  présentées  et  nommées  à 
Madame  qui  les  a  vues  avec  cette  afTabilité  et  celte  amabilié 
si  remarquables  qui  inspirent  le  dévouement  en  même  temps 
que  le  respect 

Le  lendemain,  Madame  reçut,  de  grand  matin,  les  Dames 
Carmélites,  les  Dames  de  Nevers,  qui  se  dévouent  et  se  con- 
sacrent à  Finstruction  de  la  jeunesse,  les  Dames  Orphelines 
et  enfin  celles  de  l'Hôtel-Dieu.  Pendant  ce  temps,  les  Gardes 
Nationales  de  Sens,  Joigny,  Auxerre,  Avallon,  Tonnerre, 
Villeneuve-le-Roi  et  Brienon,  occupaient  le  jardin  et  s'y 
étaient  rangées  en  bataille,  présentant  les  trois  côtés  d'un 
beau  carré.  Madame  parut  alors  sur  son  perron,  accompa- 
gnée de  sa  suite.  M.  le  maréchal  de  camp,  marquis  de  Ville- 
franche,  vint  prendre  ses  ordres,  et  les  Gardes  Nationales 
défilèrent  devant  elle  dans  un  ordre  admirable,  aux  mêmes 
cris  de  Vive  le  Roi!  Viiw  Madame!  Après  cette  espèce  de 
parade,  les  commandans  des  Gardes  Nationales  à  pied  de 
Tonnerre  et  de  celle  à  cheval  de  Sens  obtinrent  de  S.  A.  R. 
la  faveur  de  lui  présenter  leurs  drapeau  et  guidon,  dont 
Madame  daigna  attacher  les  cravates. 

S.  A.  R.  se  rendit  ensuite  à  la  cathédrale  et  fut  reçue  et 
complimentée,  sous  le  dais,  par  M.  TEvêque,  à  la  tête  de 
son  clergé.  Ce  prélat,  dont  on  connaît  la  pieuse  éloquence, 
adressa  à  Madame  un  discours  dans  lequel,  retraçant  toutes 
les  vertus  de  ses  augustes  parens,  il  se  plut  à  les  retrouver 
toutes  réunies  dans  Madame,  comme  elles  sont  toutes  con- 
sacrées et  transmises  dans  ces  deux  tcslamens,  monumens 
de  piété  que  l'histoire  réservera  pour  l'instruction  des  peu- 
ples... 


\ 

i 

i 

\ 

In 

J 

] 

^^ 

—  18t  — 
Les  Afpches  de  Sens  (1)  complètent  ces  détails  : 

M.  )c  comte  de  la  Fcrté  cloil  venu  s'assurer  de  l'exécution 
des  onircs  qu  îÏ  avait  transmis  d'avance  pour  la  décoration 
lie  i'é^lise;  le  i^rand  portail  extérieur  et  tout  l'intérieur  de 
celle  liclle  bnsilique  éloient  tendus  en  entier  de  la  manière 
la  |>1lis  noble  et  la  plus  convenable  à  la  circonstance;  de 
nombreux  èc lissons  onioient  cette  lugubre  tenture  (2l 

MAtiAMii,  placée  au  milieu  du  sanctuaire,  avoit  autour 
d'elle  M"""^  Ic^  comtesses  de  Choisy,  de  Biron,  de  Goyon, 
M.  le  vieomle  d'Agout,  son  premier  écuyer,  M.  le  marquis 
de  Marjtîuerjc,  bflioier  des  gardes  de  Monsieur.  Tout  le 
clcrf^é  de  Tnirondissement,  les  quatre  chanoines,  seuls 
restes  du  Chapitre  de  Sens,  et  toutes  les  communautés  reli- 
gieuses garnîssoicnt  le  sanctuaire.  Les  principales  autorités, 
les  membres  des  tribunaux,  les  officiers  et  la  musique  rem- 
plissoienl  le  chceur;  les  jubés  et  plusieurs  gradins  placés 
dans  le  pourtour  du  chœur,  réunissoient  un  concours  im- 
mense, sans  eaiîscr  de  lumullc. 

Le  recueilïciuent  de  Madame  pendant  tout  l'office  com- 
numdoil  le  silence  et  l'admiration.  Après  la  messe,  elle  s'est 
rendue  nvec  le  clergé  auprès  du  catafalque  pour  s'unir  plus 
parlictdiéieinenl  aux  prières  qui  terminent  la  cérémonie. 
On  la  vue  lixer  les  yeux,  avec  un  vif  intérêt,  sur  ce  beau 
mausolée  qui  couvre  les  restes  de  Mj?""  le  Dauphin  et  de 
M la  DaujdniïC;  elle  y  a  répandu  l'eau  bénite  que  lui  a  pré- 

(1^  Aiiiiri^  t«lG.  n*K. 

(2l  l'ii  iTiinioîrp^  fuinont  pnrile  de  la  coUccllon  FôUx  Chnndcnicr.  |>orlc 

Kurcles  roiii'iillurt'^t  Taitcs  à  Paris  : 

A  (liceH.  pdiiliirtî 2r>4  fr.    » 

A  l^lmUf.  U'tiUirt's  mortuaires 2718       55 

{les  iJt'iH'iisi'S  soiïl  réglôcs  A 2C90fr.  ni 

A  Hi'hiiïrtLT,  clrsslnatciir  <lc  la  Chambrr  (l'molumcns  pour 

roiiiitiilr  dp  trin  siiix  ii  Paris  et  n'^glemens.  à  raison  de  0  fr.  04 

fmr  riïMU'j.     .     ,     » 107       W» 

A  lïedorf,  InsjK-eteur  (frais  de  voynj»c  à  Sens  et  éniolu- 

iii«<t»s> l.'i()     _ 

~yiM7rr.~G4 
A  Pli  ri»,  ce  4  nuij  1810. 


Wf  ».  ntirès  avoir  ainsi  sutisrait 

S. .  Rvêquc  ^c  Troycs  P^f ^^"^^„,,.,,  Ma  porte 

,  jevoirsde  la  piélc^  "'"''•^- ''*^  "^^  hc^ro.  .1  demie  à  son 
rcgii..    M...VMH,  -;--  ^  ;:,,e.  .e  son  extrême 

,„,,.  y  «  donné  -"«='^••7^";  ^Ï;, élément  qu -1  ne  Vac- 
,,,,„,  Elle  a  e«.jnu  or  o-fon^ 

,,„  ,es  salles  de  ^^^^;^^_  ,:^,^.  et  ses 
venus  à  la  cérémonie  fuaêbrc 

■Siut  Lom.  a  évoque  nalu  ^"-         ,^,^^  1„  „,,velle 
r  s^.jou.s  du  saint  ro..  Aussi,  en  «   P"^  ^^^   .^,    „,veu  du 

t)fUX.SK-iles,  le  ^'""''.'^;  ^metlevœu.iciuen 

r.'.iini  le  1"'  avrd  loi")  ^'"*-'         ,        ,     via 
réuni  it  »  ._  ^^^.^  ^  ^j^„5  la  Me- 


juvcnir 


du  mariage  de  saint 


Pour  lluiH.' «»«>""'»"  *"■"'""""  ,...■■•       —5— 
.Ictnull»                       .     .    ■     •    •  KJW. 


—  186  — 

tropolc  (le  Sens,  le  cortège  amenant  à  Paris  la  fu- 
ture duclicsse  de  Berry  devant  passer  à  Sens,  le 
maringe  ou  tout  au  moins  les  fiançailles  des  jeunes 
princes  soient  célébrés  à  Sens  (1). 

Ce  dcsir  ne  fut  pas  accueilli  et,  le  7  avril,  le  Mi- 
nisliT  i\v  rintérieur  informait  la  municipalité  séno- 
naîse  que  le  Roi  a:  a  reçu  ce  vœu  avec  bonté,  qu'il 
y  a  élé  sensible  et  s'est  exprimé  en  termes  très  hono- 
rables pour  sa  fidelle  ville  de  Sens,  mais  n'a  pu  ac- 
corder la  demande  qui  lui  est  faite  (2).  i^ 

La  ville  de  Sens  fut  plus  heureuse  dans  la  négo- 
ciation du  rétablissement  du  siège  archiépiscopal 
dont  1  avait  frustré  le  Concordat  de  1801.  Dès  1816, 
le  roi  Louis  XVIII  avait  sollicité  et  obtenu  du  Sou- 
verain Pontife  la  restauration  de  tous  les  évéchés 
de  Tancienne  France.  Une  bulle  du  Pape  avait  san- 
ctionné cet  accord,  et  l'ancien  évêque  de  Nancy, 
M.  de  la  Fare,  l'un  des  fidèles  du  Roi  pendant  les 
années  d'exil,  devenu  le  premier  aumônier  de  la 
Daiiphiue,  avait  été  nommé  archevêque.  Mais  des 
diflicultés,  surtout  financières,  avaient  retardé  l'exé- 
lion  du  nouveau  Concordat.  Trois  années  s'étaient 
écoulées  et  l'archevêque  de  Sens  n'avait  pas  encore 
pu  prendre  possession  de  son  siège.  Le  Conseil  mu- 
nicipal de  Sens,  interprète  des  vœux  de  la  popula- 
tion, tnil  l'heureuse  pensée  de  formuler  l'adresse 
snîvanle  : 
Adf€S!;e  ou  Roi  pour  lui  demander  Varrhyêe  de  V Archevêque 

Cejourtl  liiiy,  30  janvier  1821,  le  conseil  municipal...  in- 

(\ï  DéUbétûUoH^  du  Comeil  miiniciiml  de  Srin,  reg.  ni.fol.  100,  verso. 
(2>  fhfrf.,  mi.  102. 


—  187  — 

siruil  par  la  voix  publique  que  le  gouvernement  de  Sa  Ma- 
Lstê  s'occupe,  dans  sa  soUicîlude,  du  rctahUsscmcnt  ûg 
-   plasteurs  des  sièges  éptscopaux  compris  dans  le  Concordat 
hjt  1K17. 

^■f  énélré  de  la  nécessité  pour  la  YJlle  de  Sens  et  pour  non 
^arrondissement  de  voirrArchevêque  de  Sens  prendre  enfin 

ïiïïssession  du  Sie^e  auquel  il  est  depuis  longtemps  appelle, 
^■Kécessiié  commandée  par  la  Heligion  qui,  dans  cet  ar- 
rondissement surtout,  voit  ses  ministres  tous  les  jours  ravis 
I   par  la  mort  sans  être  remplacés  ; 

I  CertaiD  que,  pour  lixer  la  bienveillance  de  Sa  Majesté  en 
I  faveur  de  la  ville  de  Sens*  il  ne  sera  nécessaire  que  de  lui  ex- 
■   poser  les  titres  qui  parlent  hautement  pour  elle  :  les  va^ux 

iola  Religiont  rancîcnuelé  du  sié^^e,  la  mémoire  des  ancê- 

1res  de  Sa  Majesté  : 
I      Arrête  que  1  adresse  suivante  sera  déposée  aux  pieds  de 
I   Sa  Maje4ité  : 

^B  4  Sire, 

^r  t  yualre  années  se  sont  écoulées  depuis  que  Votre  Ma- 
jeslé,  pleine  de  sollicitude  pour  la  prospérité  de  noire  au- 
Jdste  tieligion  et  pour  les  besoins  de  ses  peuples,  conclut 
avec  Noire  Saint-Père  un  Concordat  qui  relevait  en  France 
kx  sièges  nombreux  d  évéques  el  ti  archevêques  qui  firent 
trefois  la  gloire  de  FH^lise  gallicane  et  parmi  lesquels 
liait  celui  de  Sens,  tant  par  son  ancienneté  que  par  les 
ijerlMs  éminentes  des  prélats  qui  ravalent  occupé, 

•  l.es  mallicurs  des  temps,  causés  surtout  par  une  der- 
érc  révolle  impie,  en  épuisant  nos  ressources,  pour  satis- 

Jjifc  nu\  clîarges  imposées  par  rélranj*er,  arrêta  Votre  Ma- 
ic-Mé  dans  leitéculion  de  ce  traité  auguste, 

*  Cepcudanl.  Sire,  Votre  Majesté,  depuis  ce  lenqïs,  s'est 
cu|ïée  conslamment  des  moyens  qui  poujTOïcnl  amener 
a  eitêcutîtin  entière  ou  partielle  :  elle  a  consulté,  dans 
s  vues,  ^'i  dillérentes  fois^  les  villes  auxquelles  ces  sièges 

ieot  promis. 
t  La  ville  de  Sens  surtout  fui  distinguée;  Votre  cœur  con 


—  188  — 

naissoit  ses  titres;  aussi  cette  ville  s'emprcssa-t-elle  de 
montrer  par  les  demandes  et  par  les  offres  qu'elle  fit,  avec 
quelle  ardeur  elle  désire roit  voir  son  Eglise,  éplorée  de- 
puis longtemps,  consolée  enfin  par  la  présence  du  Prélat 
respectable  qui  lui  était  promis. 

t  La  tranquillité  dont  nous  jouissons  sous  votre  règne 
chcrî  répare  nos  malheurs;  la  fortune  publique  qui  s'aiïer- 
mit  permet  Téxécution,  éloignée  jusqu'à  ce  jour,  de  ce  Con- 
çu rdnt;  quelques  mots  sans  doute  se  sont  échappes  de  la 
bouche  de  Votre  Majesté,  et  on  lésa  saisis  avidement  puis- 
que partout  s'éveille  Tespérance  du  rétablissement  de  plu- 
sieurs des  sièges  assurés  par  le  Concordat  de  1817. 

a  Dans  une  telle  circonstance,  le  conseil  municipal  de  la  i 
ville  de  Sens,  Sire,  ne  restera  pas  muet  ;  des  motifs  trop 
puissants  et  trop  sacrés  l'animent  pour  ne  pas  rompre  un 
silence  que  le  respect  lui  avoit  imposé. 

«  Il  vient  supplier  Votre  Majesté  de  jetter  un  regard  favo- 
rable sur  l'Eglise  de  Sens,  autrefois  si  florissante  et  maîntc- 
nîinl  si  délaissée  ;  il  vient  la  supplier  d'accorder  à  ses  vœux 
le  |)rélat  vénérable  nommé  son  archevêque  et  honore  de  ce 
titre  par  Votre  Majesté. 

«  Votre  cœur  paternel  et  chrétien,  Sire,  gémiroit  en  voyant 
Fétat  déplorable  dans  lequel  se  trouve  réduit,  dans  ce  dé- 
jîiiriement,  notre  religion  ;  il  n'y  reste  plus  pour  la  soutenir 
qiip  quelques-uns  de  ses  anciens  ministres,  vieux  athlètes, 
échoppés  aux  malheurs,  et  chaque  année  voit  la  mort  les 
niciissonner,  sans  que  de  nouveaux  viennent  les  remplacer. 

«  Il  gémiroit  en  voyant  privée  de  son  rang  et  de  ses  hon- 
neurs celte  ville  illustrée  par  un  siège  épiscopal,  l'un  des 
i\vn  premiers  en  France;  cette  ville  chérie  de  vos  ancêtres 
qui  Ui  dislingttèrent  entre  toutes  les  autres  villes  de  la  France 
pour  être  dépositaire  de  leurs  cendres. 

rf  Hllc  n'a  point  trompe  un  choix  aussi  glorieux,  Sire,  cl 
son  îimour  a  clé  assez  heureux  pour  conserver  ces  restes 
aui^ustcs,  et  sauver  des  fureurs,  des  tourmentes  qui  nous 
oui  iigitès,  un  monument  qui  atteste  et  le  génie  de  celui  qui 
l'élrva  et  la  douleur  de  la  France. 


—  189  — 

«  Que  Votre  Majesté,  Sire,  daigne  entendre  les  vœux  et 
les  prières  du  conseil  municipal  delà  ville  de  Sens;  qu'elle 
écoute  la  voiiL  des  cendres  de  ses  ancêtres  ;  qu'elle  cède  aux 
supplications  de  notre  auguste  Religion. 

c  Et  alors,  le  siège  archiépiscopal  de  la  ville  de  Sens  sera 
rétabli;  les  cendres  de  vos  ancêtres  s* en  réjouiront  ;  la  Reli- 
gion sera  consolée  et  tous  les  malheurs  de  cette  ville  seront 
oubliés. 

•  Par  cet  acte,  Sire,  de  votre  bonté  toute  Royale,  vous 
comblerez  les  vœux  des  fîdèles  habitants  de  la  ville  de  Sens 
et  vous  acquérerez,  s'il  étoit  possible,  de  nouveaux  titres  à 
Tamour  qu'ont  pour  votre  auguste  personne.  Sire,  de  Votre 
Majesté,  les  très  humbles  et  très  obéissants  serviteurs  et  su- 
jets, les  membres  du  conseil  municipal  de  la  ville  de  Sens. 

c  Fait  et  délibéré  en  l'hôtel  de  la  mairie  de  la  ville  de 
Sens,  lesdits  jours  et  an  que  dessus.  > 

[Registre  des  délibérations  du  conseil  municipal, 
t.  III,  p.  177.) 

Cet  appel  à  la  piété  filiale  du  Roi  devait  être 
bientôt  exaucé.  Si  le  Souverain  avait  pu  hésiter  un 
instant,  le  souvenir  du  Dauphin  et  de  la  Dauphine, 
ce  n'est  pas  douteux,  aurait  exercé  une  heureuse 
influence  sur  sa  décision. 

Le  31  octobre  1821,  Monseigneur  Anne-Louis- 
Henri  de  la  Fare  avait  pris  possession  du  siège  mé- 
tropolitain par  les  soins  de  M.  l'abbé  de  Vaudri- 
court,  son  fondé  de  pouvoirs.  Le  1''''  novembre,  par 
une  ordonnance  datée  de  Paris,  il  reconstituait  le 
Chapitre,  et,  le  21  novembre  suivant,  il  faisait,  à 
Sens,  son  entrée  solennelle,  accueilli  par  Tallégresse 
de  la  cité  et  de  tout  le  diocèse. 

L'un  des  premiers  soucis  du  nouvel  Archevêque 
de  Sens  fut  d'assurer  à  son  Eglise  les  ressources  in- 


—  190  — 

dispensables  pour  célébrer  dignement  les  anniver- 
siiiies  des  Princes. 

Les  visites  de  la  famille  royale  devenaient 
rares  (1)  et  les  frais  nécessités  par  les  voyages  des 
représentants  envoyés  par  le  Roi,  à  chaque  cérémo- 
nie, laissaient  prévoir  la  suppression  de  cet  usage. 

Dans  un  rapport  au  Roi  (2),  daté  du  17  décem- 
bre 1821,  le  grand  Aumônier  de  France  rappelle 
que,  par  lettres- patentes  du  12  juin  1767  et  du 
5  mai  1768,  S.  M.  Louis  XV  fonda  à  Sens,  pour 
le  prix  de  2000**,  deux  services  anniversaires. 

...Le  premier  besoin  du  cœur  de  Votre  Majesté,  écrit-il, 
fut  d'ûccepter,  à  son  retour,  ce  pieux  héritage;  ...elle arrêta 
qu'un  premier  gentilhomme  de  sa  chambre,  un  capitaine 
iies  i^nrdes  et  Tlntendant  des  Menus  se  transporteraient  le 
13  mars  et  le  21  décembre  de  chaque  année,  à  Sens,  pour  y 
liiirc  célébrer  ces  anniversaires.  Les  frais  payés  jusqu'à 
préîïent  sur  le  trésor  de  Sa  Majesté  s^élevaient  à  2800**  (frais 
de  route,  travaux  préparatoires,  offrandes  et  part  des  pau- 
vres) (5600'»  par  an)  (3). 


(1)  Depuis  In  venue  de  la  duchesse  d'Angouléme,  en  1816,  seul  le  duc 
d'Aiigoiilémc  nvalt  fait  une  courte  opparition  h  Sens,  le  27  avril  1X20,  à 
l'occnstim  de  son  voyagea  Dijon  : 

«  MtHHeigneur  le  duc  d'Angouléme  est  orrivé  à  Sens  jeudi  dernier,  à 
4  hriirot>  du  soir.  S.  A.  Royale  a  couché,  et  en  est  repartie  1a  lendemain 
mutin,  n  8  heures,  après  avoir  entendu  la  messe  à  la  cathédrale.  Le  Prince 
éUiJl  cucompagné  de  M.  le  duc  de  Guiche,  de  M.  le  comte  Bourdcsoult  et 
lie  M.  Nompcre  de  Champigily,  son  aldc-de-camp;  il  a  laissé,  d  son  jkis- 
^QÇ!,o  11  Pont-sur- Yonne  et  h  Sens,  aux  pauvres  et  h  l'église  cathédrale,  des 
pr^tivrs  de  sa  muniflccnce.  »  (Affiches  de  Sens,  1820,  n'12.) 

(lu  Archives  nat.,  03  20. 

{Z)  L'ii  mémoire  des  t  frais  de  poste  et  menues  dépenses  A  l'occasion  du 
Rervice  funèbre  célébré  à  Sens  le  20  décembre  »  payé  ou  baron  de  la 
Ferlé,  Intendant  génénU  des  Menus-plaisirs,  s'élève  à  622fr. 33  et  com- 
prend li;s  détails  suivonts  : 


-  m  — 

^Aujourd  htii,  conclul-îJ,  que  la  viUc  de  Sens  a  repris  son 
siège  nietropnUlîiin,  rArchevêquc  et  le  CJiapilrc  sollicitent 
le  rétahltssemenl  de  la  fondntîun,  telle  qu  elle  a'été  Qxéc 
imrLonîs  XV. 

Ort  propose  de  payer  leii2000*  sur  In  liste  civile,  et  que  le 
iloi  ne  s  y  fasse  plus  représenter, 
.•lu  htti  fie  ce  tappoti^  ie  Boî  a  écrit  :  «  Approuvé  :  Louis.  » 

Ottc  mesure  fut  ap])liquée  dès  Tannée  siii vante. 
I-e  9  février  1822,  l  Intendaut  du  matériel  des  fêtes 
et  cérémonies,  baron  de  la  Ferté,  avise  rArclievéque 
de  Sens  qu'une  somme  de  2(KX)  francs  esl  à  la  dispo- 
sition du  Chapitre  pour  la  eélébralion  des  deux  an- 
niversaires. Le  13  mars  1822,  eut  lieu,  pour  la  der- 
tiière  fois  le  service  pour  Marie-Joséphe  de  Saxe. 
■  l-e  11  décembre  de  la  même  année,  le  Hoi,  ac- 
cédant aux  désirs  manifestés  par  Xh^  de  la  Fare, 
prend  une  nouvelle  décision.  Il  consent  ;i  la  sup- 
pression du  service  du  13  mais  el  à  la  célébration 
d  un  anniversaire  unique  pour  te  Dauphin  et  la  Dan- 
[ïhine,  qui  aura  lieu  en  décembre.  De  plus,  à  Tal lo- 
cation annuelle  de  2(KX*  francs  faite  au  Chapitre  pour 
h  célébration  de  cet  anniversaire,  il  en  ajoute  une 
lUlre  de  1000  francs  pour  fonder  une  messe  quoti- 
licmie  pour  ses  parents. 
Le  l*'  mais  1823,  rArclievéque  i égle  par  une  or- 
ïnuance  rexécuUon  de  cette  fondation  et  décide 


|f«ll*  il*  poslr  <îe  rtriïcniljmi  ,,.,.,.  lllfr.  75 

ft  «tu  gùrtlonijignsin  génL^nit  ttî  inspcscieur  gé- 

I  rt  Intriftport  di»*  i-ffels  t>rt^ck*ii*  .      * 38>î      m 

prase  à  Foit(itini>blciiii  H  ^  Sotis  pour  ftUer  *.*t  relour  vi 

2m       » 

(Afthltm  naht  03  203, t 


—  192  — 

que  la  messe  sera  célébrée  chaque  jour,  par  les 
soins  du  Chapitre,  à  Tautel  de  Saint-Savînien.  En 
vain,  dans  leur  réunion  du  16  décembre  1821,  les 
chanoines  protestent-ils  respectueusement  contre  la 
suppression  du  service  du  13  mars.  Le  cardinal 
de  ta  1  are,  habituellement  retenu  à  Paris  par  ses 
fonctions  à  la  Cour  et  les  séances  de  la  Chambre  des 
Pairs,  éprouvait  sans  doute  quelque  difficulté  à  re- 
venir a  Sens,  chaque  année,  au  mois  de  mars.  De  là 
probablement  son  refus  de  se  rendre  aux  vœux  de 
son  (  Jiapitre.  Les  dispositions  de  Tordonnance  ar- 
chiépiscopale devinrent  la  règle  fidèlement  obser- 
vée jusqu'en  1830.  Le  gouvernement  de  Juillet 
n  ayant  pas  maintenu  les  allocations  destinées  à  en- 
Iretenîr  ces  fondations,  le  Chapitre  se  vit  alors  dans 
la  nécessité  de  cesser  la  célébration  du  service  an- 
nuel et  de  la  messe  quotidienne. 

Aucun  de  ces  anniversaires  ne  fut  marqué  par 
di\s  manifestations  comparables  à  celles  du  21  dé- 
cembre 1814  et  du  13  mars  1816.  Plusieurs  fois  en- 
core, cependalit.  Sens  eut  Thonneur  de  recevoir  les 
penis^enfants  du  Dauphin  el  de  la  Dauphine. 

Lt'  1 1  juillet  1826,  c'est  une  fois  encore  la  fille  de 
Louis  XVI  et  de  Marie-Antoinette.  La  duchesse  d'An- 
^oulénie,  après  avoir  traversé  Avallon,  Vermenton, 
Saint-Bris  et  passé  la  nuit  à  Auxerre,  arrive  à  Sens 
dans  la  matinée. 

s.  A.  Royale  était  attendue  au  Palais  archiépiscopal  par 
S.  Km.  le  Cardinal  de  la  Fare...  Après  quelques  instants  de 
repos  au  Palais,  la  Princesse,  accompagnée  de  Son  Erainence, 
son  premier  Aumônier,  et  du  Préfet  du  département,  se 


—  193  - 

rendit  à  la  Cathédrale  (1),  au  tombeau  de  Monseigneur 
le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine,  ses  augustes  aïeuls; 
après  sa  prière,  S.  A.  Royale  rentra  au  Palais  et  re^*ut  les 
autorités;  ensuite  elle  admit  à  sa  table  Son  Huiinence  le 
Cardinal,  M.  le  Préfet,  Mp"  FEvêque  de  Sainosale  (2),  le 
Maire  de  la  Ville,  le  Président  et  le  Procureur  du  Roi  du 
tribunal  civil.  S.  A.  Royale  ne  tarda  pas  à  remonter  en  voi- 
lure... Une  foule  immense  couvrait  les  rues  ou  devait 
passer  S.  A.  Royale  et  elle  quitta  Sens...  aux  acclamations 
de  toute  la  population  et  emportant  avec  elle  les  vœux  et 
les  regrets  de  tous  ceux  qui  avaient  été  assez  heureux  pour 
la  voir  et  pour  rapprocher. 

Toute  la  route  que  S.  A.  Royale  avait  parcourue,  depuis 
son  entrée  dans  le  département  jusqu'à  sa  sortie,  était  cou- 
verte d'arcs  de  verdure  et,  autour  de  ces  modestes  monu- 
ments, parmi  lesquels  se  faisaient  particulièrement  remar- 
quer ceux  de  Sens  et  d'Auxerre,  s'était  rassemblée  toute  la 
population  des  environs.  (Bulletin  administrai  if  de  ta  Pré- 
fecture de  l'Yonne,  n«  158.) 

Le  12  octobre  1829,  la  veuve  du  duc  de  Ikny,  se 
rendant  incognito  au  devant  du  Roi  et  de  la  Reine 
deNaples,  ses  parents,  fit  séjour  à  Sens.  Lu  relation 


(1)  Oatre  la  lampe  de  vermeil,  donnée,  en  1821,  à  sort  niimùnlt-r.  Monst^L- 
gneur  de  la  Fare  pour  son  église,  la  métropole  de  Sfïii<i  cousit vr  un  pré- 
cieux souvenir  des  visites  de  la  princesse,  l^s  chnnoinc-s  ïIc  St^ns  ont  eon- 
ûgné  dans  leur  registre  capltulaire  le  souvenir  de  ce  présent.  <  l4!Clha[iltre 
métropoUtain  de  Sens  ayant  été,  aii^ourd'hui  14JuJii  IS3B,  cïtrïiai'dîmUre- 
ment  assemblé.  M.  le  Président  a  dit  que  S.  Em.  le  (jiidirnil  Arclu'vf'iiuo 
avait  apporté  de  Paris  et  fait  déposer  à  la  sacrisOe  tic  lu  cftLlu-dnile  un 
don  de  la  munificence  de  S.  A.  R.  Madame  la  Dauphim^  qtic-  ee  don  ckI  im 
ornement  composé  d'une  chasuble  et  de  deuxdalntEiiiqucn;  qu'il  nnt  d  nu- 
tant  plus  précieux  qu'il  est  l'ouvrage  des  mains  de  ct^Uv  pieuse  H  ad  mira - 
blc  princesse,  qui  a  bien  voulu  l'accordera  la  dcmntide  de  S,  E,  U-  Ciinli* 
nal  Archevêque  pour  la  décoration  de  son  Eglise...  » 

(2)  M"  Célestin  du  Pont,  auxiliaire  du  Cardinal  Archcvi>ciac  dp  Sens,  plun 
tard  Cardinal  Archevêque  de  Bourges. 

13 


H 


à 


—  194  — 

officielle  de  son  voyage  nous  apprend  seulement  que 
la  Princesse  arriva  «  le  lundi  12  sur  les  4  heures  de 
raprès-niidi  ;  après  quelques  moments  de  repos, 
elle  se  rendil  à  TEglisc  métropolitaine,  où  elle  fil 
sa  prière  et  visila  ensuite  le  superbe  mausolée  érigé, 
dans  celle  église,  à  la  mémoire  des  Aïeux  de  ses  au- 
gustes enfans,  ainsi  que  les  autres  monumens  qu'elle 
renferme.  » 

La  Princesse  passn  la  nuit  à  Sens,  vraisemblable- 
ment au  palais  arcluL-piscopal.  Partie  de  grand  ma- 
tin, le  13,  elle  déjeuna  à  Auxerre,  à  la  préfecture, 
et,  après  avoir  visité  la  cathédrale,  prit  la  route 
d\\vanon  oii  elle  arriva  seulement  à  10  heures  et 
demie  du  soir,  après  avoir  diné  au  château  d'Arcy, 
dont  elle  avait  voulu  explorer  les  grottes.  Après  une 
luiit  à  Avallon,  à  l'hulel  de  la  Poste,  la  duchesse  de 
Berry  se  rendit  à  Chastellux,  où  elle  passa  la  jour- 
née (1). 

I^  dernière  visite  lut  celle  du  duc  d'Angouléme, 
qui  porlait  alors  le  litre  de  Dauphin.  I^  prince,  re- 
venant de  Toulon,  où  il  avait  passé  la  revue  des 
troupes  destinées  a  Texpédition  d'Alger,  était  arrivé 
à  Auxcirc  le  1 1  mai  18:10.  Le  lendemain  il  passait  à 
Sens.  Nous  n'avons  jm  trouver  aucune  relation  de 
son  séjour  (2). 


(Vy  Bulletin  admiiiiMtratif  de  Ut  préfecture  de  l'Yonne,  n*  216. 


CHAFITRb;  XI 


DERNIER  TRANSFERT  Dl*  MAISOLÉE 


Lé  tombeau  du  Daupliin,  le  c lie f-d^œ livre  de 
CouKtoii,  n*est  plus  aujourd'hui  sur  la  sépulture 
qu*il  devait  abriter. 

Ce  ne  sont  plus,  cette  fois,  les  fureurs  iconoclastes 

et  la  démence  sectaire  d'une  Hévolnlion  qui  Font 

bîl  disparaître  et  rclégLié  dans  une  chapelle  ahan- 

titinnée,  sorte  de  dépôt  des  marbres. 

^K  Nous  reproduirons  ici,  sans  comnienlaires,  ce  dcr- 

^^îer  chapitre  de  Thistoire  du  Mausolée,  tel  qu'il  a 

Lté  écrit  au  registre  des  délibérations  de  la  Fabri- 

,    que  la  Métropole  : 

^^ippartfaii  par  M.  Cartier,  chanoine  et  trésorier  de  la  Fabrique 
^H     à  ttt  séance  du  Conseil  de  Fabrique,  le  ÎSjuittel  1S52 

«  Depuis  de  longues  années,  les  fidèles  de  la  paroisse  Mé- 
iropoîitaine  se  plaîgnaienl  de  ne  pouvoir  assister  commo- 
dèuteat  aux  offices,  parce  que  le  Mausolée  du  Dauphin  in- 
lerceptail  coniplettemeut  la  vue  de  l'autel  aux  personnes 

lâcccs  dans  la  nef. 

i  En  effet, Je  Mausolée,  exécutésur  les  plans  du  philosophe 

itterot,  et  composé  de  personnages  eni|)runlés  au  paga- 

^me,  n  offrait  aux  regards,  du  côte  de  la  nef,  que  des  sta- 

*s  à  peQ  prés  oues  de   Saturne^  de  riiy menée   et   de 

fAmour,  de  lelle  sorle  que  le  prélrc  h  Taulcl,  que  le  Saiul- 

rcrement  exposé  sur  l'aulel,  que  les  cérémonies  de  lEgUse 


—  196  — 

étaient  dérobées  aux  regards  <lcs  Hrlèles  par  des  statues  di- 
gnes d'un  temple  pnïen,  mais  que  lo  Heligion  a  toujours  re- 
poussé de  son  sancluairc. 

a  II  y  n  plus,  lorsque  le  prêtre  pen<lant  les  offices  de  TEglisc 
venait  jeler  de  Teau  iiéuile  ou  Urùler  de  Tencens  sur  les 
resles  vénérés  du  Dauphiu  et  de  la  Dauphine,  le  prêtre  de 
Jésus-Christ  semblait,  aux  yeux  des  assistants  mal  instruits, 
rendre  hommage  aux  divinités  paye  unes  qu*un  philosophe 
aussi  impie  que  Diderot  a  seul  pu  placer  sur  la  tombe  de 
Princes  éminemment  chrétiens. 

et  En  lin  ce  Mausoléc.par  ses  proportions  gigantesques,  en- 
combrait tcîtemenl  le  chœur  de  la  Métropole  que  les  céré- 
monies de  l'Eglise  y  licvenaicnt  souvent  impossibles  et  que, 
puur  les  premières  commun  ions,  les  confirmations,  les  con- 
ciles (1)  et,  en  général,  pour  toutes  cérémonies  tant  soit  peu 
solennelles,  il  fallait  sortir  du  chœur 

a  Ce  Mausolée  avait  été  primitivement  placé  dans  la  cha- 
pelle Sainle-Colombe,  derrière  le  chœur  (2);  plus  tard,  on 
lit  la  faute  de  le  transporter  sur  le  caveau  même  qui  renfer- 
mait les  restes  du  Dauphin  et  de  la  Dauphine.  Il  fut  une  se- 
conde fois,  pendant  la  Révohitiou,  transporté  dans  la  cha- 
pelle Sainte-Colombe  et  encore  rapporté  dans  le  chœur 
pendant  la  Hestauration,  par  suite  de  souscription.  Aujour- 
d'hui, les  rée  la  ma  lions  des  fidèles  étaient  tellement  vives  et 
rïombreuses  qu1l  était  nécessaire  d  y  faire  droit. 

Le  trésorier  a  donc  cru  que  1  Iteurc  était  venue  de  faire 
disparaître  du  chfcur  de  la  Métroiiole  un  monument  qui 
rappelle  bien  muins  les  vertus  et  la  foi  vive  du  Dauphin  et 

(Il  Lv  conclliMk'  In  provînct'c'ccit'siHsikjueilc  Sens  avait  tenu  ses  réunions 
ilfiriii  lu  MùU'npl>ll^  au  inoli»  ilc  st-pU'nibrâ  IS-'iO.  Il  faut  remonter  à  plu- 
Kli^iir»  sit'cio!!  flQiiii  riihloire  de  IliigliNc  si^nomiise  pour  retrouver  d'autres 
conrlli'^  tenus  f*  Sens. 

(2)  (^t'itc  nssfrlUïn,  iiinsii  que  cdic  ûc  r Intervention  de  Diderot  dans  le 
|}iiiti  liu  uinnuiUL-nt.  hoitL  nlisolunienl  iiieK:ii:Les,  nous  l'avons  suflisam- 
mc'Ml  i^muvt*.  N  t%i  regrtUnbïe  qur  U-*  ilcUJt  arguments  historiques  qui 
|}firiiiK!»'n1  nvoir  surUtiil  luniieiicé  lu  rléelslon  adoptée  ne  soient  pas  plus 


~  197  — 

de  la  Dauphine  que  la  triste  époque  d'aveuglement  général 
où  dominait  en  France  cette  philosophie  délétère  qui  ïlc- 
Iniisit  le  goût  du  beau  et  du  bon,  corrompit  les  cœurs  el  tes 
esprits,  et  finit  enfin  par  faire  crouler  dans  des  fleuves  de 
saog  toutes  nos  institutions  sociales,  politiques  et  reli- 
gieuses ! 

<  Le  trésorier  s*est  donc  adressé  à  TAdministration  des 
Cultes,  il  a  fait  valoir  les  besoins  du  culte,  les  vœux  des  fit  té- 
lés, Tinconvenance  d'un  pareil  monument  qui,  d'un  côté,  ne 
montrait  aux  jeunes  filles  placées  dans  la  nef  que  des  sta- 
tues d'hommes  d'une  nudité  à  peu  près  complète,  et  de 
lautre,  montrait  aux  jeunes  séminaristes  une  statue  de 
femme  dont  les  formes  les  plus  sensuelles  sont  suffisamment 
accusées  on  complètement  nues. 

c  La  question,  quoique  posée  d'une  manière  aussi  nette, 
cependant  conservait  un  caractère  de  gravité,  car  il  s'agls- 
sait  de  toucher  à  un  tombeau,  et  surtout  au  tombeau  d  un 
Prince  et  d'une  Princc«^sc  vénérés,  que  leurs  vertus  cmi- 
nentes  ont  rendus  chers  à  la  France  et  à  l'Eglise.  M.  le  Di- 
recteur général  des  Cultes  voulut  juger  les  choses  par  lui- 
même;  il  se  transporta  donc  à  Sens,  accompagné  de  phi- 
sieurs  membres  du  conseil  attaché  nu  ministère,  et,  après 
un  mur  examen,  il  s'est  convaincu,  par  ses  propres  yeux, 
qu  un  semblable  monument  était  plutôt  une  insulte  qu'un 
hommage  à  la  mémoire  d'un  Prince  chrétien,  et  qu'il  clnii 
extrêmement  gênant  pour  le  culte;  en  conséquence,  il  or- 
donna, qu'aux  frais  de  l'Etat,  il  serait  réintégré  pour  la  trui- 
sième  fois  dans  la  chapelle  de  Sainte-Colombe. 

t  Cet  ordre  vient  d'être  exécuté,  à  la  grande  satisfaction  de 
tous  les  fidèles. 

«  Du  reste,  ce  monument,  qui  est  un  chef-d'œuvre  de  sta- 
tuaire, a  été  transporté  avec  tout  le  soin  dû  à  un  objet  d  nrt 
aussi  parfait  d'exécution  :  ce  sont  MM.  les  ouvriers  du  Lou- 
vre qui  ont  été  chargés  de  l'opération,  et  elle  s'est  faite  sans 
qu'on  ait  a  regretter  la  plus  légère  égratignure.  » 

Après  avoir  entendu  cet  exposé,  le  Conseil  de  Fabrique, 
considérant  que  le  Mausolée  dont  il  s'agit  était  aussi  gên^int 


( 


—  198  — 


\  • 


pour  le  culte  qu*il  était  blessant  pour  des  yeux  chrétiens  et 
qu'en  conséquence  les  motifs  qui  ont  déterminé  la  conduite 
de  son  trésorier  sont  d'une  complette  exactitude,  approuve 
son  opération  à  l'unanimité  (1),  le  remercie  de  l'initiative 
qu'il  a  prise  dans  cette  affaire  et  ordonne  qu'il  sera  iait 
mention  du  tout  au  procès -verbal  de  la  séance  de  ce  jour. 
Le  Conseil  de  Fabrique  ordonne  en  outre  qu'une  table  de 
marbre  blanc,  sur  laquelle  seront  gravés,  en  caractères  do- 
rés, les  épitaphes  et  les  armoiries  du  Dauphin  et  de  la  Dau- 
phine,  soit  placée  sur  le  caveau  où  reposent  leurs  cendres, 
et  que  cette  table  soit  toujours  recouverte  d'un  tapis  de  ve- 
lours violet. 

L'afTaire  eut  un  épilogue.  Le  registre  des  délibé- 
rations fabrîciennes  en  a  gardé  un  écho  très  atténué. 
Ce  n'était  pas  assez  d'avoir  transformé  un  tombeau 
en  simple  pièce  de  musée,  on  avait  songé  à  le  déro- 
ber complètement  aux  regards.  Au  procès -verbal 
de  la  réunion  suivante,  tenue  le  13  janvier  1853,  on 
lit: 

Monseigneur  l'Archevêque  donne  lecture  d'une  lettre  de 
M.  Gaultry,  membre  du  Conseil,  par  laquelle  il  s'excuse  de 
ne  pouvoir  assister  «^  la  séance  et  appelle  l'attention  du 
Conseil  de  Fabrique  sur  plusieurs  points. 

M.  Gaultry  demande  d'abord  que  les  lettres  de  convoca 
tion  soient  adressées  aux  membres  du  Conseil  huit  jours 
d'avance... 

M.  Gaultry  demande  enfin  que  le  rideau  qui  masque  la  cha- 
pelle Sainte-Colombe  disparaisse,  et  fait  valoir  dans  sa  lettre 

(1)  Cinq  sljçnnturps  sculomonl  figuroni  au  bns  de  cette  ttélibérntion.  O 
sont  celles  de  rArcliev^que,  de  son  vicaire  général  M.  nrigond.de  M.  Pr- 
titpas.  neveu  de  M.  Corlicr.  de  M.  I^roux,  et  celle  de  M.  Carlier  lui-nicne. 
Les  autres  membres  du  conseil.  MM.  Colllnot.  orcbiprétre.  Grapinet.  ch.*!- 
noine,  Larcher  de  Lavernode,  Gaultry  et  Cliauveau,  semblent  être  rcslis 
étrangers  i\  cette  afTaire.  Il  ne  parait  ))as,  du  reste,  que  la  fabrique  nit  été 
appelée  à  formuler  son  avis  aiHint  Topération. 


—  199  — 

des  motifs  dont  chacun  des  membres  a  été  à  même  de  re- 
connaître la  justesse,  Le  Conseil  revient  dont  sur  la  per- 
mission qu'il  avait  donnée  précédemment  ^1)  de  poser  ce 
rideau  et  ordonne  qu*il  sera  enlevé. 


(1)  Les  registres  de  délibérations  ne  gardent  aucune  trace  de  cette  auto- 
risation. 


jp*^ 


i^v  r 


CHAPITRE  XII 


LA    SÉPULTURE   DU   MARECHAL   DU   MUY 


HUC  USQUE  LUCTUS  MEUS! 

Cqllc  devise  d'une  fidélité  que  môme  la  mort  n'a 
pu  vaincre  se  lit  sur  une  tombe  de  marbre  blanc, 
devant  rentrée  principale  du  chœur  de  la  Métro- 
pole. 

Depuis  1765,  chaque  année,  à  l'anniversaire  du 
11)  décembre,  le  comte  du  Muy,  menin  du  Dauphin, 
élaîl  venu  à  Sens  s'agenouiller  sur  le  tombeau  du 
prince  qu'il  pleurait. 

C*était  pour  le  noble  soldat  plus  qu'un  devoir  de 
sa  charge;  c'était  surtout  un  besoin  de  son  cœur, 
Umi  restait  vivant  son  culte  pour  le  prince  dont  il 
avilit  été  plus  encore  que  le  serviteur,  le  confident 
et  Tami. 

Afin  de  perpétuer  cette  tradition  d'une  piété  re- 
connaissante et  de  continuer,  môme  au  tombeau,  sa 
garde  d'honneur,  le  menin  du  Dauphin  réclama, 
pour  sa  propre  sépulture,  une  place  aux  pieds  de 
sort  maître  regretté. 

L'histoire  du  mausolée  de  Louis  de  France  serait 


—  201  — 

incomplète  si  Ton  n'y  ajoutait  celle  de  la  modeste 
tombe  qui  en  est  comme  le  satellite. 

On  lit  au  registre  des  délibérations  du  Chapitre  de 
Sens  (séance  du  mardi  28  avril  1767)  : 

M.  le  DoycD  a  dit  que  M.  le  comte  du  Muy,  lieutenant  gé- 
néral des  armées  du  Roy,  commandeur  des  Ordres,  et  menin 
de  feu  Monseigneur  le  Dauphin,  dont  le  corps  est  inhumé 
dans  le  chœur  de  TEglise  de  Sens,  Tavoit  chargé  de  deman- 
der de  sa  part  au  Chapitre  d'être  luy  mesme  enterré  dans 
leur  église,  le  plus  prés  qu'il  seroit  possible  et  convenable 
de  cet  auguste  prince  qui  Ta  honoré  de  ses  bontés  particu- 
lières et  pour  lequel  il  conservera  jusqu'au  dernier  soupir 
rattachement  le  plus  respectueux,  le  plus  vif  et  le  plus 
Gdéle;  que  Mirr  le  Cardinal  de  Luynes,  archevêque  de  Sens, 
ayant  rendu  compte  au  Roy  de  ce  désir  de  M.  le  comte 
du  Muy,  Sa  Majesté  l'avoit  approuvé,  sous  la  condition  néan- 
moins que  la  sépulture  demandée  par  M.  du  Muy  seroit 
placée  non  dans  Tintérieur  du  chœur,  entre  les  deux  portes 
du  jubé,  mais  en  deçà  la  porte  du  chœur,  entre  les  deux 
auteh.  qui  sont  à  son  entrée. 

Que  Mrle  Cardinal  de  Luynes,  prévenu  de  cette  demande, 
avoit  témoigné  être  disposé  à  y  donner  son  consentement, 
et  avoit  marqué  avec  les  députés  du  Chapitre  la  place  du  lieu 
susdit,  où  pourra  être  construit  un  caveau  et  être  placée 
une  tombe  de  marbre  avec  cpitaphe. 

Qu'enfin  M.  le  comte  du  Muy  s'obligeoit,  non  seulement 
à  faire  construire  le  caveau,  à  placer  la  tombe  sculptée  et 
gravée,  à  réparer  le  dommage  que  pourroil  occasionner  cet 
ouvrage,  le  tout  à  ses  dépens,  mais  d'y  ajouter  une  somme 
de  trois  mille  livres,  sans  aucune  charge,  laquelle  sera 
payée  incessamment  au  Chafiltre,  et  une  autre  somme  de 
mille  livres,  payable  par  ses  héritiers  après  son  déceds, 
pour  les  frais  funéraires  qui  seront  à  faire  par  le  Chapitre 
lors  de  son  inhumation  et  dans  leur  église  seulement. 

Messieurs,  après  en  avoir  délibéré  çt  sur  l'assurance  qui 


—  202  — 

leur  a  été  donnée  tant  de  Tagrémcnt  du  Roy,  que  du  con- 
sentement de  Son  Eminence  Mtn-  le  Cardinal  de  Luynes,  ont 
unanimement  consenti  que  M.  le  comte  du  Muy  puisse  être 
inhumé  dans  leur  église,  au  lieu  désigné,  aux  offres  et  con- 
ditions cy  dessus  énoncées  et  par  eux  acceptées. 

Ont  de  plus  arrêté  que  leur  présente  délibération  sera 
présentée  à  Mirr  le  Cardinal  de  Lynes,  archevêque  de  Sens, 
pour  être  parluy  consentie,  approuvée,  ratifiée  et  confirmée 
de  la  manière  et  en  la  forme  qu'il  plaira  à  Son  Eminence. 

Enfin  qu'il  sera  fait  deux  expéditions  de  la  présente  déli- 
bération, dont  l'une  demeurera  entre  les  mains  de  M.  le 
comte  du  Muy,  et  l'autre  sera  parluy  signée  et  renvoyée  nu 
Chapitre  (1).  {Archives  de  l'Yonne,  G.  681.) 

Pendant  huit  années,  depuis  Toclroi  de  cette 
concession,  le  loyal  serviteur  accomplit  son  pèleri- 
nage annuel.  Lorsqu'une  dernière  fois  il  revint,  en 
1774,  il  occupait  dans  le  gouvernement  de  la  France 
Tune  des  plus  hautes  dignités. 

L'un  des  premiers  soins  de  Louis  XVI,  en  mon- 
tant, à  vingt  ans,  sur  le  trône,  fut  d'entourer  son 
inexpérience  et  sa  faiblesse  de  conseillers  sûrs  cl 
consciencieux. 

Au  premier  rang  des  hommes  que  l'opinion  et 
aussi  les  instructions  paternelles  désignaient  à  son 
choix,  était  le  comte  du  Muy.  Un  jour  le  Dauphin 
ayant  trouvé  le  livre  d'heures  de  M.  du  Muy,  y  avait 


(1)  I/nrticle  nécrologique  publié  par  les  Affichée  de  Scna,  à  la  mort  do 
M.  du  Muy,  déclare  qu'il  avail  fail  construire  son  cnveau  ««i  Ï766,  pou  de 
jours  après  l'inhumation  du  Dauphin.  Ce  caveau  était  fermé  d'une  toml>c 
de  marbre  blanc,  sur  laquelle  et  au-dessous  de  l'écusson  des  armes  i\c 
M.  le  comte  du  Muy,  on  lisait  ses  noms  et  qualités...  ■  Quoique  la  date  di* 
17GG  soit  assurément  inexacte,  il  est  probable  que  M.  du  Muy  rcnltsu  son 
désir  aussitôt  qu'il  eut  obtenu  l'autorisation. 


—  203  — 

écrH  celte  prière  :  «  Mon  Dieu,  protégez  votre  fidèle 
serviteur  du  Muy,  afin  que  si  vous  m'obligez  à 
porter  le  pesant  fardeau  de  la  couronne,  il  puisse 
nie  soutenir  par  ses  vertus,  ses  conseils  et  ses  exem- 
ples. » 

Le  jeune  Roi  connaissait  ce  vœu  de  son  père.  Il 
avait  hâte  d'exécuter  ce  testament  sacré.  Deux  se- 
maines après  la  mort  de  Louis  XV,  il  écrivait  à 
M.  du  Muy,  alors  gouverneur  de  Flandre  : 

Monsieur,  bien  des  raisons  m'obligent  d'ôter  Tadministra- 
tion  des  affuircs  à  M.  d'Aiguillon  ;  la  réputation  que  vous 
avez  acquise  généralement  de  la  plus  grande  probité  et  la 
confiance  qu'avait  mon  père  en  vous,  m'engagent  à  vous 
offrir  le  Secrétariat  de  la  Guerre.  Je  sais  bien  que  vous  l'avez 
refusé  de  la  main  du  Roi  ;  mais  les  mêmes  raisons  ne  sub- 
sistant plus,  et  même  votre  conscience  vous  l'ayant  repro- 
ché souvent,  j'espère  que  vous  l'accepterez  de  la  mienne. 
Vous  ferez  en  cela  le  bonheur  du  public  et  le  mien  en  par- 
ticulier... 

Le  vieiix  soldat  ne  pouvait  répondre  par  un  refus 
à  cet  appel,  —  le  premier  probablement  qu'ait  for- 
mulé le  fils  de  son  maître.  «  Je  voudrais,  écrivit-il, 
avoir  plus  de  talent  que  je  n'en  ai  pour  remplir  la 
place  à  laquelle  vous  me  destinez;  j'y  porterai  du 
moins  un  zèle  incoiTuptible  et  Tamour  le  plus  tendre 
pour  votre  personne  sacrée.  » 

Les  historiens  rendent  unanimement  hommage  à 
l'administration  ferme  et  éclairée  du  premier  Minis- 
tre de  la  Guerre  de  Louis  XVL  Plusieurs  des  sages 
réformes  opérées  par  M.  du  Muy  et  des  règlements 
édictés  par  lui  ont  résisté  à  Tépreuve  du  temps  et, 
après  plus  d'un  siècle,  sont  encore  en  vigueur. 


i 


—  204  — 

Parvenu  à  cette  haute  fortune,  M.  du  Muy,  bien 
que  sexagénaire,  épousa  à  Tautomne  de  1774,  une 
noble  demoiselle  allemande,  M"*  de  Blanckart,  cha- 
noinesse  de  Neusse  (1),  dont  des  circonstances  for- 
tuites l'avaient  rapproché  pendant  la  guerre  de 
Sept-Ans,  et  qu'il  avait  toujours  rêvé,  si  des  circon- 
stances particulières  n'y  eussent  fait  jusque-là  obsta- 
cle, d'associer  à  sa  vie. 

Malgré  tant  de  préoccupations,  M.  du  Muy  n'ou- 
bliait pas  le  prochain  anniversaire  du  Dauphin.  Des 
raisons  particulières  lui  faisaient  désirer  que  le  ser- 
vice tût  célébré  le  20  décembre  comme  l'année  pré- 
cédente. Le  doyen  du  Chapitre  lui  avait  écrit  l'em- 
barras de  ses  confrères  désireux  de  respecter  les  in- 
tentions du  Roy  dont  les  ordonnances  fixaient  au 
19  cette  cérémonie. 

Le  15  décembre,  le  doyen  communiquait  au  Cha- 
pitre cette  lettre,  datée  de  Versailles  le  13  dé- 
cembre : 

J"ay  reçu,  Monsieur,  la  réponse  que  vous  avez  bien  voulu 
me  faire,  Iç  11  de  ce  mois.  Je  ne  suis  point  étonné  de  votre 
exactitude  et  de  celle  de  Messieurs  du  Chapitre  à  maintenir 
Tordre  de  la  fondation  établie  pour  feu  Mfe'i*  le  Dauphin,  et 
Ton  ne  peut  qu'approuver  les  scrupules  que  vous  marques 
pour  en  changer  le  jour  sans  y  être  autorisés  par  le  Roy  luy 
mesme  ;  je  viens  d'en  rendre  compte  h  Sa  Majesté  qui,  sur 
les  motifs  que  je  luy  ai  exposés,  a  bien  voulu  consentir,  pour 
cette  année  seulement,  que  la  cérémonie  soit  remise  au  20 
de  ce  mois,  quoique  la  fondation  porte  que  ce  sera  le  19;  elle 

(1)  Sur  la  recomnmndntion  de  rimpêratricc  sa  mère,  la  reine  Marie-An- 
toinette flt  un  accueil  des  plus  bienveillants  à  la  femme  du  Ministre  de  la 
(juerre. 


i 


—  205  — 

m'a  chargé  en  même  temps  d'avoir  Thonneur  de  vous  en 
informer  ainsy  que  Messieurs  du  Chapitre  auxquels  vous 
voudrez  bien  en  faire  part.  Je  préviens  de  ce  changeincnl 
Messieurs  les  menins  et  Monsieur  le  duc  de  Luytics. 

J'ai  l'honneur  d'être,  avec  un  très  sincère  attachement, 
Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

Du  Ml  Y. 

Cesl  au  mois  de  mars  suivant  que  le  comte 
du  Mny  fut  élevé  à  la  dignité  de  maréchal  de 
France.  L'affaire  fil  quelque  bruit  et,  parce  qu'elle 
met  en  relief  son  caractère  ferme,  équitable  et  dé- 
sintéressé, il  est  bon  d'en  rappeler  les  détails  : 

«  Le  duc  de  Filz-James,  grand  seigneur,  très  bien 
en  cour,  secondé  par  sa  femme  et  par  Mni<?  de  Clvi- 
niay,  dame  d'honneur  de  la  Reine,  avait  fini  par 
obtenir  de  Marie-Antpinette  qu'elle  sollicitât  pour 
lui  le  bâton  de  maréchal.  La  Reine  en  parla  à  son 
mari.  M.  de  Maurepas,  qui  ne  cherchait  qu'à  se 
faire  des  amis,  appuya  fortement  la  demande. 
L austérité  et  la  rigueur  bien  connue  des  principes 
de  M.  du  Muy  le  firent  tenir  en  dehors  de  toute  cette 
intrigue,  si  bien  que  ce  fut  M.  de  Fitz-James  lui- 
même  qui  lui  apprit  la  décision  que  le  Roi  venait  de 
prendre  en  sa  faveur.  Vivement  blessé  du  procédé, 
M.  du  Muy  s'opposa  fermement  à  cette  nomination 
que  ni  l'ancienneté  ni  les  services  ne  pouvaient  jus- 
tifier. 

4  Le  Roi,  confus  de  sa  précipitation  et  sentant 
bien  qu'il  avait  eu  tort  d'agir  sans  prendre  conseil 
de  son  ministre,  retira  d'abord  sa  promesse  ;  puis, 
poussé  sans  doute  par  la  coterie  de  M.  de  Fitz- 


^ 


V  :■  ru" 


\-    z 


ns  d  iJfupw  m  M.  da  Mb;  «r  Eure 

de  «pi  narechasi^  dMnpmanl  M.  de  Fitz-Jainfs 

ellLdalfQylaKMéMe  rnir  lii^pirMir  fiç Tiii 

mgs^kiciKM!»  wfttt  puptaidasdMdeM 
Moy  que  te  oomiitatiQa  eiliautdbuire  i  laqaetl 
il  venait  de  s'oppoier.  Ce  D'élnl  pw  poar  se  fai 
donner  le  Uloii  à  lui^fliétiie  qaH  s*élait  refnsé 
le  laisser  doimer  i  tto  antre,  hmsi  sispposthl 
de  toutes  ses  forces  an  projet  do  Roi  ;  niais,  cettf 
Ibfaïf  tes  efforts  rureot  inutiles.  Il  eut  t»eau  rep\ 
^nler  qtse  le  public  ne  manquerait  pas  de  l'accu- 
ser d  avoir  eu  utijquetnenl  en  vue  sa  propre  élcv-a- 
Ijon  ;  rien  n'y  fit.  I>e  roi,  heureux  à  la  fois  de  tenir 
une  promesse  imprudemment  accordée  et  de  don- 
ner à  M.  lie  Muy  une  marque  éclatante  de  son  cs^ 
lime,  tint  bon,  et  M.  du  Muy  fut  nommé  maréchal 
de  France,  malgré  lui,  au  mois  de  mars  1775.  Ou 
peut  juger  du  bruit  que  fit  cette  aventure.  Pendant 
quelque»  jour;»^  elle  fut  l'unique  sujet  des  conver- 
sations à  Verîiuillçs  et  à  Paris  (1). 

M.  du  Muy  jouit  peu  de  temps  des  honneurs  dont 
i)  était  comblé.  Après  avoir  figuré  au  sacre  du  Roi, 
à  Heînis,  en  juin  1785,  il  voulut  profiter  du  %^oyage 
de  la  cour  à  Fonlainebleau  pour  prendre  quelques 
joursi  de  repos  et  chercher  dans  une  opération  le 
remède  a  lu  cruelle  maladie  dont  il  souffrait  depuis 
quelque  temps.  Avait-il  un  pressentiment?  I^  veillei 
du  jour  où  il  s*était  décidé  à  subir  Topération  rie  la 


U  tmrérhftt  àtt  Mtty.  (Uon»  le  C^rrexpontiant,  n-  tlu  10  juin  imi  i%.  «27  i 


—  207  — 

pierre,  il  avait  remis  au  Roi  son  portefeuille,  ajou- 
tant qu'il  avait  un  peu  forcé  le  travail  pour  que  tout 
fût  en  règle  et  que,  s'il  ne  devait  pas  survivre,  son 
successeur  trouverait  les  choses  en  ordre.  L'opéra- 
tion fut  faite,  sous  les  yeux  du  médecin  Richard,  par 
le  fameux  moine  opérateur,  le  frère  Côme. 

Le  bon  frère,  accompagné  du  médecin,  arriva,  dit 
Métra,  à  sept  heures  et  demie,  lorsque  le  maréchal  allait  à 
la  messe,  c  Je  ne  vous  attendais  pas  si  tôt,  messieurs,  mais 
entrez  dans  mon  cabinet.  Je  vous  rejoindrai  à  Theure  dite.  » 

Au  retour  de  la  messe,  M.  du  Muy,  entra  chez  madame 
la  maréchale,  qui  n'était  prévenue  de  rien  ;  il  la  trouva  au  lit, 
la  badina  sur  sa  petite  paresse,  et  la  quitta,  en  la  priant 
d  empêcher  que  quelqu'un  ne  vînt  le  troubler  dans  son  ca- 
binet, où  une  aUaire  de  la  plus  haute  importance  Tobligeait 
à  s'enfermer. 

Depuis  trente  minutes,  M.  du  Muy  gémissait  sous  le  fer 
de  l'opérateur  et  souffrait  de  cruelles  douleurs  sans  jeter 
an  cri,  lorsqu'une  femme  de  chambre,  imprudente  autant 
qu'attendrie,  court  chez  la  maréchale  d'un  air  effaré,  et  lui 
crie  :  «  Ah,  madame,  que  cette  opération  est  longue  et 
terrible!  »  I^  maréchale,  doutant  d'abord  de  ce  dont  il 
s  agit,  s'élance  du  lit  et  court  en  chemise  au  cabinet  de  son 
mari.  On  croit  que  ses  cris  et  ses  sanglots  troublèrent  l'opé- 
rateur et  lui  firent  trembler  la  main 

Le  maréchal  ainsi  mal  opéré,  la  blessure  s'enflamma  et 
il  mourut  peu  de  temps  après,  au  milieu  d'atroces  souffran- 
ces. >  (Cité  par  E.  de  Broglie,  op,  citatiim.) 

Une  mort  si  imprévue  ne  fut  pour  le  soldat  chré- 
tien ni  une  surprise  ni  un  effroi,  a  Voici  quarante  ans, 
disait-il  peu  auparavant,  que  je  ne  me  suis  jamais 
couché  sans  penser  être  prêt  à  paraître  devant  Dieu 
pendant  la  nuit,  d 


r 


M 


!    "«^ 


r  ij|; 


i  i 


—  208  — 

Mais  révéncment  souleva  à  la  cour  une  profonde 
émotion.  On  en  retrouve  Técho  dans  ce  passage 
d'une  lettre  de  Marie-Antoinette  à  sa  mère. 

ft  La  mort  du  maréchal  du  Muy  est  affreuse,  mais 
c'est  surtout  pour  sa  femme,  qui  est  aimée  de  tout 
le  monde  par  sa  douceur  et  son  honnêteté.  Ma  chère 
maman  serait  touchée  de  l'état  affreux  où  elle  est. 
Elle  n'apprit  qu'on  taillait  son  mari  qu'en  enten- 
dant ses  cris  ;  en  entrant  dans  la  chambre  elle  a 
tombé  sur  le  seuil  de  la  porte,  où  elle  a  resté  pen- 
dant toute  l'opération,  qui  a  duré  trente-cinq  mi- 
nutes. Il  a  souffert  des  douleurs  inouïes  et  est  mort 
dans  les  deux  fois  vingt-quatre  heures.  On  craint 
que  la  maréchale  ne  lui  survive  pas  longtemps;  c'est 
tout  ce  qu'elle  désire.  Le  Roi  lui  avait  donné 
10 000 francs  de  pension  à  son  mariage;  il  vient  de 
lui  en  donner  30000;  c'est  un  traitement  sans 
exemple  pour  la  veuve  d'un  ministre  qui  Ta  été 
aussi  peu  de  temps  ;  elle  est  bien  faite  pour  cette 
exception,  et  on  ne  lui  fera  jamais  autant  de  bien 
que  je  lui  en  souhaite  (1).  » 

Le  maréchal  mourut  le  10  octobre. 

Messieurs  du  Chapitre,  instruits  le  surlendemain,  ordon- 
nèrent à  l'instant  la  sonnerie  de  toutes  les  cloches.  Le  13, 
le  convoi  arriva  à  Sens,  à  1  heure  après-midi  ;  quelques 
courriers  avaient  prévenu  Messieurs  du  Chapitre. 

Le  cortège,  parvenu  au  faubourg  Saint-Didier,  se  mit  en 
rang  et  fit  son  entrée  parla  porte  d'Yonne  dans  l'ordre  sui- 
vant : 


(1)  Correspondance  secrète  entre  Mnrie-Thérèse  ©t  Mcrcy,  pubHéc  par 
d'AnNBTH  et  Gefproy,  tome  II,  p.  384. 


—  209  — 

—  Char  fuDèbre  traîné  par  six  chevaux  caparaçonnés  de 
drap  noir  chargé  de  bandes  de  moire  d'argent  ;  à  côté  du 
cercueil,  deux  de  ses  valets  de  chambre  ; 

—  Douze  pauvres,  vêtus  de  noir,  tenant  des  flambeaux, 
enlouroient  le  cercueil  ; 

—  Suivoient  deux  carrosses  drapés;  dans  le  premier,  deux 
vicaires  de  Saint-Sulpice  de  Paris,  MM.  Claude-Louis  Bar- 
ber de  TEspada,  chevalier,  licencié  de  rUniversité  de  Paris, 
en  surplis  et  étole,  et  Guillaume-Robert-Marguerin  de  Queu- 
deville,  docteur  en  Sorbonne,  aussi  en  surplis; 

—  Le  second  carrosse  étoit  occupé  par  MM.  Viquesnel  et 
Barrier,  exempts  des  gardes  de  la  Connestablie-Gendarme- 
rie-Maréchaussée  de  France  des  camps  et  armées  du  Roi, 
qui  portoient  le  bâton  de  maréchal  de  France,  la  couronne, 
le  collier  des  ordres  et  les  autres  attributs  de  dignités  de 
M.  du  Muy. 

—  Un  détachement  des  gardes  de  la  même  compagnie 
escortoit  le  convoi; 

—  Messire  Jean-B.-Louis-Philippe  de  Félix  d'Oliéres,  ba- 
ron de  Saint-Maime,  colonel  du  régiment  de  Soissonnais- 
Infanterie,  neveu  du  maréchal,  étoit,  avec  le  premier  secré- 
taire de  ce  ministre,  en  grand  deuil  dans  un  quatrième  car- 
rosse; 

—  La  livrée  en  deuil  fermoit  la  marche. 

Le  corps  fut  présenté  par  l'abbé  de  TEspada  au  Chapitre 
assemblé  à  la  porte  de  l'église  et  présidé  par  le  doyen,  M.  de 
Bullioud,  par  qui  l'inhumation  fut  faite. 

Il  y  eut  le  lendemain  service  solennel  auquel  assistèrent 
les  corps  ecclésiastiques  et  laïques.  Les  gardes  de  la  Conné- 
tablie  sous  les  armes  entouroient  le  catafalque.  Un  détache- 
ment de  la  milice  bourgeoise  formoit  double  haie  dans  la 
nef.  (Affiches  de  Sens,  1775.) 

Voici  le  texte  du  procès-verbal  de  cette  cérémo- 
nie, inscrit  au  registre  des  sépultures  du  Chapitre 
(aciuellement  aux  archives  du  tribunal  civil  de 
Sens)  : 

14 


l, 


\ 


'1 


r     »i 


^  I 


•  I 


—  210  — 

CejourcThuy,  13  octobre  1775,  le  corps  de  Très-haut  et 
Très-puissant    Seigneur    Louis-Nicolas-Victor   de    FÉLIX, 
comte  du  MUY,  maréchal  de  France,  chevalier  des  ordres 
du  Roy,  menin  de  feu  Monseigneur  le  Dauphin  fils  de  Teu 
Louis  XV,  gouverneur  de  Villefranche  en  Roussillon,  Mi- 
nistre et  Secrétaire  d'Etat  ayant  le    Département   de  la 
Guerre,  âgé  de  soixante-quatre  ans,  décédé  en  son  hôtel, 
rue  Saint-Dominique,  paroisse  de  Saint-Sulpice,  le  10  octo- 
bre de  la  présente  année,  nous  a  été  présenté  par  Messire 
Claude-Louis  de  Barber  de  TEspade,  chevalier,  prcstre  et 
licencié  de  TUniversité  de  Paris,  vicaire  en   la  paroisse 
Saint-Sulpice,  et  par  Messire  Guillaume-Robert-Maguerin 
de  Queudeville,  docteur  de  Sorbonhe  et  vicaire  de  Saint- 
Sulpice;  l'inhumation  s'est  faite  par  Messire  Jean-Claude  de 
Bullioud,  doyen  et  chanoine  de  cette  Eglise,  grand  vicaire 
de  S.  Em.  Miri*  le  cardinal  de  Luynes,  Archevêque  de  Sens, 
et  Officiai  du  Diocèse,  député  à  cet  effet  par  MM.  les  véné- 
rables (foyen,  chanoines  et  Chapitre,  en  présence  de  Très- 
haut  et  Très-puissant  seigneur  Jean-Baptiste-Louis-Philippe 
de  Félix  d'Obiéres,  baron  de  Saint-Maisme  et  de  Dauphin, 
colonel  du  régiment  d'infanterie  de  Soissonnais,  neveu  de 
feu  Monsieur  le  Maréchal,  et  d'un  détachement  de  la  com- 
pagnie (\fis  gardes  de  la  Connétablie,  Gendarmerie,  Maré- 
chaussée de  France,  des  camps  et  armées  du  Roy,  com- 
mandés par  M.  Viquesncl  et  par  M.   Barrier,  tous  deux 
exemps  des  gardes  de  laditte  compagnie,  et  en  celle  de 
Messire  Isaac-Edme  Gauthier,  faisant  les  fonctions  de  secré- 
taire, en  labsence  de  M.  Legris,  leur  secrétaire  ordinaire. 
(Signé:  )  de  Félix  de  Saint-Maisme;   Viquesnel; 
Bahrier;  Lucenay;  de  Barbeu,  vicaire 
de  Saint-Sulpice;  de  Queudeville,  vi- 
caire de  Saint-Sulpice;   de  Bullioud. 
doyen  de  Sens. 

La  correspondance  de   Métra  raconte  que  «  le 
quinzième  jour  avant  sa  mort,  le  feu  maréchal  avail 


—  211  — 

fait  graver  une  pierre  pour  être  mise  sur  sa  tombe, 
où  étaient  inscrits  son  nom  et  sa  dignité  ;  il  n'y  res- 
tait plus  à  ajouter  que  le  jour  de  son  décès  :  elle 
était  même  posée  avant  sa  mort.  »  Peut-être  pour  y 
faire  figurer  les  nouvelles  dignités  que  le  Roi  venait 
délai  conférer,  avait-il  fait  graver  une  nouvelle  épi- 
taphe  destinée  à  remplacer  la  première  devenue 
incomplète.  Cette  tombe  brisée  par  les  révolution- 
naires a  été  reproduite  par  la  tombe  actuelle,  placée 
en  1864(1).  Au  sommet  figurent  les  armoiries  du  ma- 
réchal :  écartelé  aux  1  et  4  de  gueules  à  la  bande 
d'argent  chargée  de  trois  F  de  sable  (Felices  fue- 
runt  fidèles)  ;  aux  2  et  3  de  gueules  au  lion  d'or,  à 
la  bande  d'azur  brochante  sur  le  lion.  L'écu  ac- 
compagné de  deux  hercules  pour  supports  est 
posé  sur  deux  bâtons  de  maréchal  en  sautoir,  en- 
touré du  cordon  du  Saint-Esprit  et  sommé  d'une 
couronne  de  marquis. 

(1)  La  tombe  de  marbre  blanc  qui  recouvre  actuellement  le  caveau  du 
maréchal  du  Muy,  devant  les  degrés  de  l'entrée  du  chœur,  a  été  posée 
en18&4.  aux  frais  des  descendants  du  maréchal. 

C'est  sans  doute  à  la  suite  d'une  visite  à  Sens  que  le  petit-neveu  du  maré- 
chal, M.  le  chevalier  de  Félix,  comte  du  Muy,  ému  de  Tétat  de  dégradation 
de  la  pierre  tombale,  avait  sollicité  de  l'archevêque  de  Sens  Tautorisation 
de  la  remplacer  par  une  tombe  de  marbre  reproduisant  fidèlement  l'in- 
scription et  rornementation  de  la  première.  M*'  JoUy  s'empressa  d'accor- 
der cette  autorisation,  le  14  avril  1857.  Semblable  autorisation  fut  donnée, 
le  as  mai,  par  l'Administration  des  cultes.  Le  comte  du  Muy  chargea  de  ce 
travail,  dont  il  s'engagea  à  faire  tous  les  frais,  un  marbrier  parisien,  F.  Da- 
mien.  demeurant  rue  de  la  Roquette. 

Malheureusement,  il  mourut  en  voyage,  avant  que  le  travail  fût  terminé, 
et  la  pierre  tombale,  une  fois  achevée,  resta  en  détresse  dans  le  chantier 
du  marbrier,  qui  attendait  des  ordres  pour  son  transport  à  Sens. 

Après  quelques  atermoiements,  l'afTaire  finit  par  s'arranger,  et,  dans  une 
lettre  du  21  novembre  1864,  la  fabrique  de  la  Métropole  en  exprime  sa  grati- 
tude à  M**  la  comtesse  du  Muy. 


—  212  — 
Au-clessous,  Tinscription  : 
D.  O.  M. 

LoUIS-NlCOLAS-VlCTOR  DE  FÉLIX 

Comte  du  MUY,  maréchal  de  France, 
chevalier  des  ordres  du  roi, 

MINISTRE    ET    SECRÉTAIRE    D'ÉTAT 
AU    DÉPARTEMENT    DE    LA    GUERRE, 

MENiN  DE  Louis,  dauphin,  fils  de  Louis  XV, 

DÉCÉDÉ   LE  X   OCTOBRE  MDCCLXXV 


HUC   USQUE  LUCTUS   MEUS 

Quelques  mois  après  les  obsèques,  le  Chapitre 
recevait,  de  la  veuve  du  maréchal,  la  lettre  sui- 
vante : 

Messieurs  les  doyen  et  chanoines  du  Chapitre  de  Sens 
tn'ayant  accordé,  par  un  acte  du  26  février  1776,  la  per- 
mission que  je  leur  ai  demandée  de  choisir  ma  sépulture 
dans  leur  église  et  dans  le  même  caveau  où  est  inhumé  M.  le 
maréchal  du  Muy,  mon  inary,  en  reconnaissance  je  m'oblige 
envers  ledit  Chapitre  de  l'Eglise  métropolitaine  de  Sens  . 

1»  De  lui  donner  ou  faire  donner  par  mes  héritiers  une 
somme  de  4  000  livres  pour  les  frais  de  mes  funérailles, 
dont  le  Chapitre  voudra  bien  se  charger; 

2«  Que,  dans  le  cas  où  le  caveau  se  trouveroil  trop  étroit 
et  où  il  seroit  nécessaire  de  l'élargir,  la  dépense  en  sera 
faite  au  frais  de  mes  héritiers; 

3*^  Que,  si  il  est  nécessaire  de  mettre  un  jour  une  plus 
grande  tombe  de  marbre  sur  ledit  caveau  et  d'y  faire  graver 
une  nouvelle  inscription  avec  des  nouvelles  armoiries,  la- 
dite tombe  sera  fournie  et  gravée  à  mes  dépens  ; 

4"  Et,  attendu  que  je  ne  donne  rien  de  mon  vivant  pour 
le  droit  de  sépulture  que  j'acquerre  dans  ladite  église  de 
Sens,  parce  qu'il  pourroit  arriver  que  je  mourrus  dans  un 
pays  fort  éloigné,  auquel  cas  mon  inhumation  ne  pourroit 


i 


—  213  — 

se  faire  à  Sens,  je  m'oblige  néanmoins  et  mes  héritiers  à 
faire  payer  après  mon  décès,  audit  Chapitre  de  Sens,  ladite 
somme  de  4000  livres,  comme  si  j'eusse  été  inhumée  en 
I  église  de  Sens,  sous  la  condition  cependant  que  le  Chapi- 
tre eraployera  lesdites  4000  livres  à  la  fondation  d'un  obit 
pour  le  repos  démon  âme,  savoir,  3  000  livres  pour  ledit 
obit,  et  1  000  livres  pour  les  frais  de  fondation. 

Fait  à  Paris,  le  12  mars  1776. 

Aprouvé  récriture  cg-dessus, 

Blanckart,  Maréchale  du  Muy  (1). 

[Archives  de  VYonne,  dépôt  de  Sens,  G  135,  n»  99.) 

Ce  projet  ne  devait  jamais  se  réaliser.  Après 
avoir  refusé  Toffre  du  Roi  qui  voulait  lui  conserver 
la  jouissance  de  Thôtel  de  Cambrai  à  l'Arsenal,  la 
maréchale  s'était  d'abord  retirée  à  Paris,  dans  un 
couvent.  A  l'approche  de  la  Révolution,  elle  quitta 
la  France.  Après  des  séjours  à  Dusseldorf,  à  Pader- 
born,  elle  se  fixa  enfin  à  Alsdorf,  près  d'Aix-la- 
Chapelle,  dans  le  château  de  sa  famille.  C'est  là 
qu'elle  mourut,  le  22  mars  1802. 

Le  tombeau  où  elle  avait  pensé  rejoindre  son 
époux  était  vide.  Dans  leurs  odieuses  profanations, 
les  jacobins  sénonais  avait  été  les  exécuteurs  incon- 
scients de  la  volonté  suprême  du  loyal  serviteur. 
Ils  lui  avaient  permis  de  suivre  ses  maîtres  jus- 
qu'au cimetière  commun.  C'est  le  25  mars  1795, 
dit  Tarbé,  que  fut  violée  la  sépulture  du  maréchal 
en  même  temps  que  celle  du  cardinal  de  Luynes. 

Il  est  bien  regrettable  que,  lorsqu'en  1814,  on  rap- 


(ll  Cette  lettre  porte  un  cachet  de  cire  noire  offrant,  accoles  sous  une  cou- 
ronne de  marquis,  deux  écus  ovales,  l'un  aux  armes  du  maréchal  du  Muy, 
rnttlre.  da/.ur  à  un  pic  de...  pose  en  hande. 


I 


1* 


A 


—  214  — 

porta,  à  la  cathédrale,  les  cendres  du  Dauphin  et 
de  la  Dauphine,  on  n'ait  pas  songé  à  rechercher 
celles  du  maréchal  du  Muy.  L'un  de  ses  neveux, 
M.  du  Muy,  pair  de  France,  ayant  visité  la  cathé- 
drale de  Sens,  en  1820,  fut  sollicité,  raconte  Tarbé, 
d'accomplir  ce  pieux  devoir.  Ce  désir  ne  fut  pas  en- 
tendu ;  la  tombe  du  maréchal  recouvre  maintenant 
un  caveau  vide  (2)  :  le  nienin  du  Dauphin  n'est  plus 
à  son  poste  d'honneur,  mais  du  moins,  selon  la  ré- 
flexion de  Tarbé,  «  si  leurs  dépouilles  mortelles  se 
trouvent  aujourd'hui  séparées,  leurs  âmes  géné- 
reuses sont  réunies  dans  le  séjour  éternel  (1).  » 


(1)  Recherches  sur  la  ville  de  Sens^  p.  361. 


5^^*?*; 


J 


LA  SEPULTURE  DU  DAUPHIN  ET  DE  LA  DAUPHINE 
DANS  LA  CATHÉDRALE  DE  SENS 


APPENDICES 


L  APPARTEMENT   DU   DAUPHIN   A  FONTAINEBLEAU 

L  appartement  où  mourut  le  Dauphin  occupe 
Textrémité  de  l'aile  séparant  la  Cour  Ovale  de  la  cour 
des  Princes,  le  pavillon  qui  termine  cette  aile,  à 
gauche  du  Baptistère,  et  les  premières  pièces  de 
Taile  faisant  retour,  vis-à-vis  la  Cour  des  Cuisines. 

On  y  accède  par  le  vestibule  de  TEscalier  de  la 
Reine,  ouvrant  sur  la  Cour  Ovale  et  communiquant 
avec  les  appartements  de  la  Reine  et  avec  les  gale- 
ries des  Cerfs  et  de  Diane. 

Le  Dauphin  habitait  le  premier  étage;  la  Dau- 
phine,  le  rez-de-chaussée. 

Ces  appartements  offrent,  aujourd'hui  encore,  le 
même  aspect  que  du  temps  du  Dauphin.  Boiseries, 
cheminées,  plafonds,  de  pur  style  Louis  XV,  ont 
sans  doute  été  exécutés  pour  le  Daupliin  et  Marie- 
Josèphe  et  rappellent  la  décoration  de  leurs  appar- 
tements, à  Versailles. 

Lii  première  pièce  était  la  Salle  des  Gardes.  Elle 


\ 


% 


—  216  — 

est  éclairée  par  deux  fenêtres  ouvrant  sur  la  Cour 
Ovale,  vis-à-vis  la  chapelle  de  la  Sainte-Trinité.  Les 
panneaux  ne  portent  aucune  décoration. 

La  seconde  pièce,  de  proportions  identiques, 
également  éclairée  par  deux  fenêtres  sur  la  même 
cour  est  la  Salle  des  Nobles  ou  Vantichambre  du 
Dauphin. 

Les  murs  sont  revêtus  d'une  série  de  peintures  de 
chasses,  entre  lesquelles  subsistent  quelques  pan- 
neaux de  boiserie.  La  superbe  cheminée  en  brèche 
est  contemporaine  du  Dauphin.  Autour  du  plafond, 
divisé  en  trois  travées,  court  une  frise  finement 
ciselée  où  se  jouent  des  amours  et  des  dauphins. 

De  la  Salle  des  Nobles,  on  passe  dans  une  pièce 
plus  étroite  :  la  seconde  antichambre.  Vis-à-vis  la 
fenêtre  prenant  jour  sur  la  Cour  Ovale,  une  porte 
ouvre  sur  le  couloir  qui  longe  les  pièces  précéden- 
tes. Cette  pièce  est  entièrement  recouverte  de  pan- 
neaux peints  (sujets  de  chasse). 

De  cette  antichambre  on  pénètre  dans  la  Chambre 
du  Dauphin,  C'est  dans  cette  pièce  qu'est  mort 
Louis  de  France.  Des  tentures  modernes  ont  fait 
disparaître  en  grande  partie  les  boiseries  sculptées 
d'époque  Louis  XV.  Quelques  panneaux  cependant 
subsistent,  grâce  auxquels  on  peut  facilement  re- 
constituer la  physionomie  primitive  de  cette  belle 
salle,  qui  a  gardé  sa  somptueuse  cheminée  de 
marbre  et  son  plafond  orné,  où  les  mappemondes  et 
les  cartouches  meublés  de  carquois  en  sautoir  se 
détachent  sur  les  fleurs  de  lis  et  les  coquilles. 

Les  petits  cabinets  de  service  qui  complétaient 


—  217  — 

rappartement  du  côté  de  la  Cour  des  Princes  en 
sont  aujourd'hui  séparés.  Us  ont  été  annexés  à 
TEcole  d'artillerie. 

Mais  un  cabinet  minuscule,  occupant  l'angle  du 
pavillon  du  côté  du  Baptistère  et  éclairé  par  une 
fenêtre  sur  la  Cour  des  Cuisines  a  été  respecté,  et 
garde  encore,  avec  ses  boiseries  ciselées  et  sa  che- 
minée de  marbre,  l'aspect  charmant  qu'il  offrait  au 
temps  du  Dauphin. 

Un  petit  escalier  ouvrant  sur  ce  cabinet,  établis- 
sait une  communication  entre  l'appartement  du 
Dauphin  et  celui  de  la  Dauphine. 

Ce  dernier,  qui  occupait  l'étage  inférieur,  offre 
une  disposition  absolument  identique.  Cependant 
les  boiseries  y  ont  été  mieux  respectées. 

IL 

LES   INSIGNES  ROYAUX   CONSERVÉS   AU   TRÉSOR 
DE  SENS 

Le  récit  officiel  des  obsèques  du  Dauphin  semble 
indiquer  que  le  manteau  et  la  couronne  restèrent 
dans  le  caveau,  sur  le  cercueil.  Il  n'en  fut  rien  ce- 
pendant, puisque  le  procès-verbal  de  la  réunion 
capitulaire  qui  eut  lieu  le  lendemain  30  décembre, 
relate  que  «  la  couronne  et  le  manteau  ont  été  dé- 
posés au  trésor.  »  (Archives  de  V  Yonne,  G  681.) 

Les  différents  inventaires  de  la  fm  du  xviii*  siècle 
constatent,  en  effet,  la  présence  de  ces  insignes  au 
trésor. 


—  218  — 

Dans  une  armoire  de  bois  blanc  à  deux  battants  brisés,  au 
trésor  d*cn  haut  : 

€  Un  manteau  dit  à  la  Royale,  de  velours  violet,  semé  sur 
les  bords  de  Qeurs  d'or  et  garni  tout  autour  de  fourrure 
blanche  en  façon  d'hermine,  doublé  de  taffetas  violet.  Ce 
manteau  a  servi  à  l'inhumation  de  feu  Mfr^  le  Dauphin  et  a 
été  laissé  à  cette  Eglise.  Il  sert  tous  les  ans  à  son  obit  et  à 
celui  de  M*"»  la  Dauphine. 

P.  11.  Item,  la  bordure  en  hermine  du  manteau  à  la  Royale 
de  Mer  Je  Dauphin.  (Inventaire  de  1776 J 

N"  29.  Item,  s'est  trouvé  (au  trésor),  une  couronne  de  ver- 
meil fermée  par  dessus  avec  des  dauphins  qui  est  la  cou- 
ronne qui  a  servi  à  l'inhumation  de  feu  Monseigneur  Louis 
de  Bourbon,  Dauphin  de  France,  mort  à  Fontainebleau  le 
20  décembre  1765  et  enterré  dans  Téglise  métropole  de  Sens, 
au  milieu  du  chœur,  samedy  28  décembre  1766,  laquelle  est 
restée  audit  trésor.  Elle  a  de  hauteur,  la  fleur  de  lis  qui  la 
ferme  comprise,  huit  poulces  sept  lignes.  {Inventaire  de  1768.) 

N»  33.  Item,  s'est  trouvé  une  autre  couronne  de  vermeil, 
fermée  par  dessus  par  des  dauphins,  qui  est  la  couronne 
qui  a  servi  à  l'inhumation  de  feu  Madame  Marie-Josèphe 
de  Saxe,  Dauphine...,  morte  à  Versailles  le  13  mars  1767  et 
enterrée...  dans  le  même  caveau  de  Mtrr  ic  Dauphin,  le  lundy 
23  mars  dit  an;  laquelle  dite  couronne  a  de  haulteur,  la 
Qeur  de  lys  comprise,  sept  poulces  six  lignes,  et  pèse  deux 
marcs  quatre  onces  cinq  gros;  à  56"  le  marc,  faitl43"7  *6\ 
(Ibidem.) 

«  Emblèmes  du  despotisme  i>  et  objets  d'orfèvrerie, 
les  couronnes  ne  pouvaient  échapper  aux  pillages 
révolutionnaires. 

Nous  les  trouvons,  en  efTet,  signalées  dans  d  17/]- 
ventaire  des  effets  dor  et  dargent  de  la  paroisse 
cathédrale  de  Sens,  fait  par  nous,  Etienne  Macé  et 
Jean-Claude  Jossey,  officiers  municipaux  de  la  ville 


—  219  — 

de  Sens,  et  dont  la  pesée  a  été  faite  par  les  ciloyens 
Thomas  et  Jolly,  orphèvres,  désignés  par  ledit  Con- 
seil général,  20  octobre  1792  (1).  ï>  (Archives  de 
i  Yonne,  série  Q). 

(1;  Une  année  s'écoula  avant  que  la  commune  de  Sens  fit  par\'enir  à  In 
Monnaie  ces  «  effets  d*or  et  d'argent  »  qui,  en  plus  de  la  valeur  du  mélal« 
la  seule  prisée  par  le  gouvernement  Jacobin,  représentaient  des  trésors  ines- 
timables d'art  religieux. 

L'extrait  suivant  des  Registreê  des  délibérations  de  la  maison  commune  de 
Sens,  donne  sur  ce  sujet  d'intéressants  détails.  (Archives  comm.  de  Sens, 
P29.) 

c  Ce  jourd*huy,  septième  frimaire  de  l'an  II  (27  novembre  1793)  de  la 
R.  F.  Une  et  Indivisible, 

<  Le  Conseil  général  de  la  commune  en  permanence,  présence  du  citoyen 
substitut  procureur  de  la  commune,  assisté  du  citoyen  Adenis,  secrétaire 
greffier. 

f  I.es  membres  tant  du  Conseil  général  que  du  Comité  de  surveillance^ 
chargés  de  dresser  l'état  de  toute  l'argenterie,  argent  monoyé,  ornemeus 
d'étoffes  d*or,  d'argent  et  galons  de  semblable  matière,  qui  jusqu'à  présent 
ont  servi  au  culte  des  différentes  paroisses  de  cette  commune  et  que  It^^ 
citoyens  habitans  se  sont  empressés  d'offrir  à  la  patrie,  comme  anciens 
signes  d'une  superstition  qui  ne  peut  s'allier  avec  l'esprit  de  philosophie* 
et  de  patriotisme  qui  vient  de  nous  régénérer,  ont  dit  qu'il  résulte  du  pro 
cès-vertml  par  eux  rédigé  les  20,  21,  23  et  25  brumaire,  5*  et  7'  jour  de  fri- 
maire.  qu'il  a  été  déposé  au  trésor  de  la  paroisse  principale,  savoir  : 

«  En  or,  3  marcs  4  onces  1  gros  1/2; 

«  En  argenterie,  1 534  marcs  6  onces  6  gros  ; 

t  En  argent  monoié,  555  livres  ; 

«  En  cuivre  doré,  argenté  et  uni,  9056  livres; 

f  En  étain  et  en  plomb,  139  livres. 

<  Que  ces  effets  ont  été  embalés  dans  des  tonneaux  et  conduits  au  coche- 
de  Sens,  pour  être  rendus  à  Paris  et  offerts  à  la  Convention  nationale. 

•  Sur  quoi  le  Conseil  général  et  le  Comité  de  surveillance  réunis,  le  sub- 
stitut du  procureur  de  la  commune  entendu,  a  nommé  les  citoyens  Meiircv 
officier  municipal,  et  Beraudon,  membre  du  Comité,  pour  se  rendre  i\v- 
main  à  Paris,  surveiller  ledit  envoi,  l'offrir  à  In  Convention  nationale  et  \r 
déposer  au  lieu  qui  leur  sera  indique.  » 

\je  directeur  général  de  la  Monnaie,  dans  un  reçu,  daté  de  Paris  le  15  fri- 
maire an  II  (5  décembre  1793),  reconnaît  par  nillours  avoir  pris  livrni!u»ii 
d'un  envoi  contenant  : 

—  Plusieurs  morceaux  d'or,  partie  éniaillés  et  partie  garnis  de  pierrib 
de  peu  de  valeur,  13  mnrcs  8  onces  9  gros; 


—  220  — 

Item,  les  deux  couronnes  de  Monseigneur  et  Madame, 
Dauphins  de  France,  d'argent  vermeille,  pesant  cinq  marcs 
cinq  onces  six  gros. 

Quant  au  manteau  a  à  la  royalle,  ^  il  avait  été 
lacéré  en  même  temps  que  les  ornements  servant 
aux  anniversaires.  A  ceux-ci  on  avait  arraché  les 
écussons  armoriés,  «  vestiges  de  la  féodalité;  »  les 
broderies  fleurdelisées  du  manteau  eurent  le  même 
sort. 

L'inventaire  fait  le  10  prairial  an  II  (1)  (20  mai 
1793),  mentionne  :  «  L'hermine  d'un  manteau  galéc 
par  la  mitte.  ï> 

Un  billet  joint  à  l'inventaire  porte  : 

Les  administrateurs  du  district  de  Sens  sont  invités  à 
donner  aux  citoyens  Langlois  et  Pierson,  des  anciens  orne- 

—  Vermeil  (soleils,  calices,  ciboires),  313  marcs  6  onces; 

—  Argent,  582  marcs  1  once  ; 

—  Pierreries  et  perles  : 

—  Un  gros  saphir  pesant  24  karats,  ledit  saphir  est  faible  en  couleur  ; 

—  Deux  mauvais  vermeil,  une  tête  do  chaque  ronde  avec  sept  roses,  y 
compris  celle  du  milieu  qui  est  un  peu  plus  forte; 

—  Deux  mauvais  am<^thistes  percées; 

—  Deux  morceaux  de  pierres  de  rubis  ; 

—  Deux  autres  d't^mernudcs  ; 

—  Sept  chatons  d'or,  quarrés.  avec  petit  morceau  de  pierres  d*ëmemudrs 
et  rubis,  entourés  en  totalité  de  44  perles  baroques  et  moyennes,  plus 
15  autres  perles  baroques  petites  avec  morceau  d'or  et  d'argent; 

—  Grande  quantité  d'étoffes  brochées  et  tissus  d*or  et  d'ai^gcnt,  pcsnnt 
1 396  marcs  2  onces  ; 

—  Cuivre  doré,  1 907  marcs  ; 

—  argenté,  1268  marcs; 

—  rouge,  230  marcs  ; 

—  jaune,  12657  marcs; 

—  Etnin  et  plomb,  962  marcs. 

(Registre  des  arrêtés  de.  la  commune  de  Sens,  tome  V,  1*  50,  séance  du  4  ni- 
vôse an  II.) 
(1)  Architfes  de  l'Yonne,  série  Q. 


—  221  — 

ments  d*église  dont  ils  pourraient  disposer  pour  la  festc  de 
la  Raison  qui  doit  avoir  lieu  le  décadi  prochain. 

En  la  maison  commune  à  Sens,  le  six  ventôse,  en  la 
deuxième  année  de  la  Républiqne  Une  et  Indivisible. 

HÉDiARD,  officier  municipal 

Cet  ordre  fut  exécuté,  car  Tlnventaire  continue  : 

Le  citoyen  Drouet  (1)  nous  a  déclaré  que  le  citoyen  Glial- 
tas  avait  en  sa  possession  un  manteau  violet  en  velours  ser- 
vant aux  fêtes  civiques. 

Les  débris  du  manteau  ne  furent  cependant  pas 
perdus.  Une  note,  en  marge  de  la  mention  précé- 
dente, déclare  : 

Le  manteau  m'a  été  remis  le  7  fructidor  an  lU^  (24  août 

1795). 

Signé  :  Jacquier,  archiviste. 

Désormais  les  inventaires  constatent  la  présence, 
dans  les  armoires  du  trésor,  «  d'un  grand  manteau 
de  velours  violet  (2).  ^ 

  Tépoque  de  la  Restauration,  ces  lambeaux  du 
manteau  du  Dauphin  furent  employés  à  confection- 
ner des  ornements  liturgiques.  On  peut  encore  re- 
connaître sur  le  velours  de  plusieurs  chasubles  de 
la  cathédrale,  l'empreinte  des  fleurs  de  lis  brodées 
qui  Font  jadis  décoré. 

Lorsque,  en  1814,  fut  reprise  la  célébration  des 
anniversaires,  la  Direction  du  Mobilier  des  Bâti- 
ments du  Roi  fournit  tous  les  objets  nécessaires.  Ces 
objets,  transportés  à  Sens  pour  chaque  service,  eu 
étaient  emportés  après  la  cérémonie. 

(1)  Sacristain  de  la  cathédrale. 

(2)  Invent,  du  19  brumaire  VI  (9  novembre  1797). 


4 

0 


—  22i  — 

à  leur  Jvglisc  les  liccora lions  Cuuèbrcs  eiivoym, 
chaque  annce,  pour  les  services,  par  le  Cràrde- 
Meuble.  Celle  dcmarche  icsie  sans  succès.  .  J'ai 
eu  soin,*criiriijteiitlanl.  le  ;3()  mars,  dv  faire  cou- 
iiiulre  à  celui  de  vos  collègues  qui  m'a  d'abord  en 
lieleiiu  de  votre  désir  qu'il  sérail  i  ni  possible  dV 
acquiescer,  par  la  raison  que  les  tentures  qui  ser* 
valent  «ians  les  céiénionics  de  Sens  ilaicnl  égale 
inenl  nécessaires  et  pareillement  employées  daas 
toutes  les  cérémonies  luuèbrcs  et  notamment  dan.-», 
celles  de  l'église  royale  de  Saint  Denis,  i. 

Dés  son  arrivée  à  Sens,  M<J'  de  la  Fare  avait  sol 
licite,  en  même  temps  que  des  allocations  pécu- 
niaires, le  matériel  nécessaire  pour  les  fondation* 

J'ai  reçu,  lui  dcril.  le  10  mars  1.-22,  le  Minislrc  de  la  M>i 
son  «lu  Roi,  la  IctUc  que  vous  mnvcz  fait  Ihonneur  tli 
m'écrire  au  nom  du  Chnpiire  lie  la  calliéflralc  ilc  Sens,  L 
IcHot  Joblcnîr.iles  bontés  du  Roi,  les  tcnluies  noires  fatlM 
s|>écialenicnl  pour  les  deux  services  anniversaires  ilc  Mon- 
seigneur le  Dauphin  cl  de  Madame  la  Daupliiue,  ainsi  que 
le  drap  mortuaire,  les  insignes  et  les  autres  objets  deMînèc 
pour  le  catariilque. 

Vous  ne  devez  pas  douter.  Monseigneur,  de  tout  mon  era- 
prcssemcnl  à  saisir  l'oteasion  de  vous  être  agréable,  el  j'au- 
rais voulu  pouvoir  accueillir  votre  demande  dans  toute  son 
étendue;  mais  une  partie  des  objets  quelle  comprend  ser- 
vent pour  les  autres  anniversaires  qui  se  font  à  SalnlDcnb 
et  ailleurs  par  ordre  du  Roi.  Je  ne  pourrais  en  disposer 
sans  les  faire  remplacer,  et  les  charges  de  ta  Liste  civile  ne 
me  laissent  pas  la  possibilité  de  subvenir  it  une  semblable 
dépense  Cependant,  voulanl,  aulanl  qu'il  dépend  de  raoi, 
vous  prouver  tout  le  prix  que  j'attache  à  remplir  vos  dé- 
sirs, je  vais  prier  .Sa  Majesté  d'autoriser  M.  le  baron  de  la 


—  225  — 


iéA  meltre  h  Icntîérc  disposition  du  Chnpilre  niélropo- 
^cns,  Jes  ornemcns  et  le  drap  niortiinire  qui  exi^« 
lî  déjù  dans  la  cotliédralc,  et  à  lui  faire  remettre  égale- 

h  Le  carreau  en  velours  %ioleL  el  glantis  d'or; 
2-^  l^  couronne  de  Daupltiii»  dorée; 
3"  Les  armoiries  sur  ctiassis,  de  (î  pieds  de  haut; 
^    i"  Les  douze  armoiries  sur  cnrlon,  de  2  pieds  ^ 
BEI  5'  les  trois  armoiries  aux  armes  de  France,  peintes 
T  toile,  qui  avaient  été  faites  spL-cialtmient  pour  cette  ce- 
.  .nionie,  et  que  Ion  transporlail  h  Sens^  lors  de  chaque  an- 
niversaire- 
Veuillez  agréer,  Monseigneur,  l'assurance  de  mes  senti- 

fns  respect  u  e  u  X . 
Le  Ministre  secrétaire  d*Efttl  de  la  Mai  son  dit  Roi, 
Marquis  dk  Lauhiston, 

Ce  premier  succès  ne  pouvait  qu*cn cou  rager  le 
>rclînai  de  la  Fare  à  renouveler  sa  dcmanUe. 

Je  vous  aï  entrelenu,  a  Paris,  écrit-il,  le  8  août  1826,  au 
[directeur  du  Mobilier  de  la  Couronne,  de  rélnl  incomplet 
le  roriïement  noir  dont  on  se  sert,  dans  tnon  église  métro- 
politaine, pour   le  service  anniversaire   solennel   de  feux 
Mânsei|*neur  le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine.  Ce  que 
jà  la  munificence  du   feu  Hoi  a  bien  voulu  consacrera 
:   u^age  si  privilégié  est,    connue  j'ai  eu  Tlionneur   de 
us  raHlrnier,  trop  insuffisant  pour  faire,  avec  la  décence 
ta  pompe  convenables,  un  service  aussi  auguste.  IVaprès 
nutre  convention,  je  vous  transmets  ci-jointe  la  note  dos 
objets  importans  qui   manquent  encore.  Je  comtïte,  Mon- 
ur  le  Viconjle,  sur  vos  bons  ofllces  auprès  de  S,  E.  le  Mi- 
are  de  la  Maison  du  Roi,  afin  de  complelter  le  premier 
fi  et  1  intention  du  feu  Roi,   Le  Chapiirc  de  Sens  et  son 
chevéque  vous  auront  une  sensible  obligation  de  tout  ce 
I  que  vous  aurez  bien  voulu  faire  pour  un  objet  qui  intéresse 
lé  ht  lois  la  dignité  du  cuUe  et  la  piété  lUialc  de  Sa  Majesté 

15 


—  2;^G  — 

Note  des  objets  indispensables  pour  completter  Vornemcnl 
noir  employé  au  service  anniversaire  de  feus  Monseigneur 
le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine  dans  l* Eglise  mclro- 
politaine  de  Sens,  où  LL.  AA.  Royales  sont  inhumés  : 

1°  Quatre  chappcs  de  velours  noir,  orfrois  en  drap  d'ar- 
gent moiré  et  galons  d'argent  ; 

2?  Un  parement  d'autel,  de  velours  noir,  galon  d'argent, 
avec  une  croix  à  huit  pointes  au  milieu,  en  moire  d'argent, 
et  de  la  dimension  de  10  pieds  4  pouces  de  large,  sur  4  pieds 
6  pouces  de  hauteur; 

3»  Un  autre  parement  pour  le  trône  avec  une  croix  sem- 
blable, à  huit  pointes,  ledit  parement  de  7  pieds  6  pouces 
de  hauteur,  sur  3  pieds  de  largeur; 

4*"  Deux  parements  de  9  pieds  de  longueur  sur  22  pouces 
de  largeur,  de  velours  noir  galonnés  en  argent,  pour  couvrir 
les  deux  pupitres  de  l'Epitre  et  de  l'Evangile.  (Ces  pare- 
ments se  nomment  épistoliers.) 

5»  150  aunes  de  drap  noir  pour  couvrir  les  degrés  du  ca- 
tafalque, ceux  du  sanctuaire  et  du  trône; 

6°  Supplier  le  Roi  de  faire  remplacer,  dans  la  décoration 
du  catafalque,  le  collier  des  Ordres  que  Louis  XV  avait  ac- 
cordé pour  cet  usage,  mais  qui  a  été  enlevé  avec  toutes  les 
richesses  du  Trésor  de  l'Eglise  de  Sens  (1); 

7"  Un  carreau  de  velours  noir,  galonné  d'argent,  avec 
ses  quatre  glands,  destiné  à  porter  le  collier  des  Ordres; 

8'»  Un  manteau  royal  de  velours  violet  parsemé  de  fleurs 
de  lys  en  or  et  bordé  d'hermine  ; 

(1)  Voici  In  curieuse  desciiplion  de  ce  collier  et  de  quelques  accessoires 
servniU  à  la  décoration  funèl*re  des  anniversaires  donnée  par  Tinventaire 
de  1770  : 

Au  Trésor  d'en  haut.  —  «  Item,  une  couronne  de  carton  et  un  cordon  de 
l'ordre  de  Saint-Michel,  aussi  de  carton  et  doré,  avec  un  cordon  bleu  ;  le 
tout  servant  à  Yohit  de  M"  le  Dauphin. 

«  Deux  petits  coussins  couverts  de  velours  noir  de  coton,  garnis  d'un  g;\- 
lon  d'argent  et  de  quatre  glands,  ces  deux  coussins  servant  à  mettre  sur  In 
représentation  aux  ohits  de  M»  le  Dauphin  et  de  Madame  la  Dauphine. 

a  Huit  écussonsaux  armes  de  Madame  la  Dauphine.  » 


—  227  — 

9<>  Quatre  grands  panaches  blancs  pour  le  dais  du  cata- 
lalque; 

10^»  Quatre  bandes  de  20  pouces  de  hauteur,  dont  deux  de 
6  pieds  9  pouces  de  longueur,  et  deux  de  5  pieds  9  pouces  en 
largeur,  le  tout  en  velours  noir  galonné  en  argent,  pour 
faire  les  pentes  du  dais. 

A  la  réceplion  de  ce  document,  la  Direction  du 
Mobilier  de  la  Couronne  fait  établir  des  devis  (1) 
pour  la  fourniture  des  objets  demandés  par  le  Car- 
dinal. 

Celui  de  Desmarais,  chasublier  des  Menus-Plai- 
sirs, demeurant  rue  de  la  Lanterne,  au  bas  du  pont 
Notre-Dame,  évalue  :  les  quatre  chappes  à  1 456  fr.  ; 
le  devant  d'autel  à  643  fr.  55;  le  parement  du  trône 
à  173fr. 35;  les  deux  épistoliers  à  358  francs;  les 
pentes  du  dais  à  952  francs  ;  les  tapis  à  1  650  fr.  ; 
le  carreau  de  velours  à  178  fr.  65. 

Perrot,  plumassier,  offre  de  fournir  les  panaches 
du  dais  en  plumes  d'autruche,  y  compris  les  ai- 
grettes, pour  270  francs. 

Dallemagne,  Guibout  et  C^e,  brodeurs  passemen- 
tiers du  Roi  et  de  la  Cour,  rue  des  Deux-Portes- 
Saint-Sauveur,  n**  12,  proposent  de  confectionner 
le  manteau  royal  pour  5  200  francs  (2). 


1)  Archives  nat.,  03  1924. 
(%i  12  août  1826.  —  Devis  d'un  manteau  royal  : 

Un  manteau  royal  en  velour  violet  fin,  avec  bordure  en  broderie  or  my 
tin  placée  au-dessus  de  l'hermine,  parsemé  de  fleurs  de  lys  en  arbachure, 
doublé  d*hermine  fausse. 
Esliraé  :  cinq  mille  deux  cents  francs. 

Dallemagne,  Guibou  et  G". 
(Archives  nat.,  03  1924.) 
Le  même  brodeur  avait  également  fourni,  à  l'église  Notre  -  Dame  de 


—  228  — 

Enfin,  le  devis  de  Cahier,  orfèvre  du  Roi,  poar  I 
fabriciilioii  d  un  faux  collier  desi  Ordrtîs,  en  coh 
doré  et  imitation  d  emaux«  niofile  à  GGO  ffancs. 

En  tratismrll^iitt  ces  propoiiitîons  au  vicomte  de 
la  Roche  fou  cauld.  AidcHle-cainp  dti  Rtii  et  Surin- 
tendaril  des  Bcaux-vlrit,  le  Directeur  du  Mabilier 
cxplifjtiaH  qu'une  pen!iée  déconomie  lui  a^-ait  fait 
élablir  un  devi%  pour  un  faux  collier,  un  collier  d'or 
représentant  une  dépeuî^e  considérable.  Mais  il  sug- 
géniil,  en  nicmc  leuip^,  Tidéede  demander  au  Roi 
daccordcr  à  lEgU^ie  de  Sens  lun  des  grands  collic 
préparés  à  1  occasion  du  sacre  et  restés  sans  emplc 

Le  3  septembre»  le  roi  Charles  X  mettait  sa  signa-  ' 
ture  uu  bas  du  rapport  suivant  : 


luppoaT  AC  aôi 


îiirt', 


S.  Elu.  le  Ciirdinnl  de  la  Fare,  Archevêque  de  Sens,  d^* 
raat  doniter  au  service  atuuicl  qui  se  célèbre,  dans  sa  calhé- 
drille,  en  cainméaioriilioa  des  oiigusles  fiatetirs  de  Votre 
Majesté,  Maaseigaeur  le  Dauphin  et  Madame  la  DauplitnOt 
toute  11)  pompe  dési rallie,  demande  que  Von  complète  t  or^ 
nemenl  qui  SL*rl  lors  de  cetlc  eérémonie, 

r&i  cru  que  ceUe  demande  était  trop  jusle  pour  ne  pas  la 

mettre  sous  tes  yeux  de  Votre  Majesté.  Ù'ûl  fait  dresser  le 

devis  dt*  ta  dépense  à  Incjuetle  elle  pourruit  diïnner  licu^ 

^  11511  fr.75. 

Amwoiwé  :  Chah  LES. 

^  Archiva  tiaL^  Oa  ld22.) 


PurU,  poni'  ht  iitnii|H'  FiiitiVlirM  tljef^tiuivXVI,  ijii  tmtik'Ou  ftiyfili|iiJ  fu!  |tA 
i^iiUunrtil  2\m  fr.  Ml.  f  îbuL,  0:i  2£0,) 

i\t^  ittunte^m  fui  livré,  le  'M  iïdVf'mhre  182<i.  Il  flgun^  ii^Uielt^menl  au  ' 
iwr  tfi«  lu  MiHrtïpi»liî*ir  irt9  ,  Alntilpbl  ili^mcnlii*  ht  légcniîp  dnîirt^»  laquo 
ce  miinkniti  iiurnJl  Hi^  pôfU  \mv  1r  td)  Oiiirtcii  X,  1c  Jour  de  hjiî  mcf^ 
lleinii,  im  iiiiil  Ih2.ï. 


—  229  — 

Aussitôt,  M.  de  la  Rochefoucauld  informe  le 
cardinal  de  la  Fare,  lui  exprimant  le  regret  qu'on 
ne  se  soit  pas  adressé  directement  à  lui,  ce  qui  au- 
rait permis  une  solution  plus  prompte. 

«  Je  croyais,  répond  le  prélat  en  le  remerciant, 
à  la  date  du  7  septembre,  que  Tordre  de  Tadminis- 
Iralion  exigeait  que  ma  proposition  vous  fût  défé- 
rée et  soumise  par  M.  le  Directeur  du  Matériel  des 
Fêtes  et  Cérémonies  et  du  Mobilier  de  la  Couronne. 
L'aimable  reproche  que  vous  avez  la  bonté  de  me 
faire  à  cet  égard  est  un  motif  de  plus  à  la  confiance 
que  vous  m'avez  toujours  inspirée.  » 

Le  24  novembre,  le  Mobilier  de  la  Couronne  ex- 
pédiait, à  Sens,  tous  les  objets,  sauf  le  collier.  Ces 
différents  objets,  suivant  l'estimation  officielle,  re- 
présentaient une  valeur  de  10  824  fr.  75. 

Quant  au  collier,  le  Roi  avait  approuvé  le  24  sep- 
tembre, la  proposition  de  remplacer  le  collier  de 
cuivre  auquel  on  avait  d'abord  songé  par  un  des 
colliers  précieux  n'ayant  pas  eu  de  destination  à 
l'époque  du  sacre.  (Archives  nat,,  0^  551.) 

En  annonçant  l'octroi  de  cette  faveur  au  cardinal 
de  la  Fare,  le  comte  de  Sèze,  grand  Trésorier  des 
Ordres  du  Roi  et  premier  Président  de  la  Cour  de 
Cassation,  informe  le  prélat  qu'il  remet  le  collier  de 
l'Ordre  du  Saint-Esprit  au  vicomte  de  la  Rochefou- 
cauld, Directeur  général  des  Beaux-Arts. 

«  Le  magnifique  présent  que  le  Roi  daigne  faire  à  mon 
Kglise  métropolitaine  d'un  collier  du  Saint-Esprit,  répond, 
le  10  novembre,  le  Cardinal,  est  pour  moi  du  plus  haut  prix. 
En  remplissant  une  pieuse  et  royale  destination,  il  contri- 


—  230  — 

bue  ni  II  la  gloire  de  ma  superbe  basilique  et  sera,  chaque 
année,  un  Icnnoignage  éclatant  des  bontés  du  Hoi  envers 
mon  Eglise  nrchiépiscopale  et  mon  clergé,  et  un  gngcdum- 
ble  de  sa  piété  filiale...  t 

L'abbé  de  Bellaud,  vicaire  général  de  Sens  et  au- 
mônier de  la  Dauphine,  alla  prendre  possession, 
au  nom  du  cardinal  de  la  Fare,  du  précieux  joyau 
rclîgitHistnnent  conservé  depuis  au  Trésor  de  la 
Mclmpole  (1). 

Quelques  mois  plus  tard,  le  26  avril  1827,  le 
comte  de  Sèze  informait  le  Cardinal  de  Tenvoi,  pour 
coniplt^ter  le  don  royal,  «  d'un  cordon  bleu  avec 
la  croix  et  la  plaque  qui  raccompagnent  tou- 
jours (2j.  p 

<1>  s-  347  de  Vlnvenlaire  publié  en  1897. 

0  N"*248ct  âlOde  V Inventaire.  Le  cnrilinnl  de  In  Fare  avall  égalcincnl 
«oUic)l<^.  iM)  1K2II.  pour  décorer  les  autels  des  Jubés  de  la  cathédmle,  deux 
itiiLuc\*(.  l'unr  tje  saint  Louis,  l'autre  de  saint  Martin.  Le  Directeur  des 
Ikfiux-Arls  exprime  nu  prélat,  dans  une  lettre  du  14  novembre,  son  regret 
dr  ne  pouvoir  lui  donner  satisfaction,  h  cause  de  In  dépense  très  élevée 
qu'ncmitioiiniM ait,  même  en  pierre,  lexccution  de  ces  ouvrnges.  Lnnnêe 
|tri*t!tklfnitt".  Ir  ^  k^omte  de  In  Rochefoucauld  avait  fait  attribuer,  à  la  Métro- 
poks  il*  lîrniul  Inbleau  représentant  l'entrée,  dans  la  catliédrale  de  Sens, 
de  saUïi  Louis  iiortant  la  couronne  d'épines,  par  Caillot.  Ce  tableau  fîgurc 
actuellviueiil  dans  la  salle  Synodale. 


m 


LA   PORTE   DAUPHINE 


Pendant  un  siècle,  la  rue  principale  de  Sens 
porta  le  nom  de  rue  Dauphine,  en  souvenir  des 
princes  qui  étaient  venus  chercher  un  dernier  asile 
dans  la  cathédrale.  Cest  en  1770,  au  dire  de 
Tarbé  (1),  que  ce  nom  fut  donné  à  la  vieille  rue 
Couverte, 

Par  la  porte  Commune  cette  rue  ouvrait  sur  la 
route  de  Lyon.  Le  19  juillet  1768,  une  «  ordon- 
nance des  Président,  Trésoriers  Généraux  et 
Grands- Voyers  de  France  (2)  »  avait  prescrit  la  dé- 
molition, dans  les  trois  jours,  vu  sa  caducité,  de 
la  porte,  construite  vers  1283,  qui  avait  longtemps 
été  le  siège  de  l'administration  municipale. 

Cet  ordre  fut  sans  doute  immédiatement  exécuté. 

d»  Les  registres  des  délibérations  du  corps  de  ville  ù  celle  époque  ont 
disparu. 
2)  Archioes  communales  de  Sens,  DD  9. 


_  232  — 

Néanmoins  une  partie  de  Tédifice  restait  encore 
debout,  quelques  années  plus  tard,  car,  à  la  suite 
du  terrible  incendie  qui,  en  juillet  1776,  détruisit 
une  partie  de  la  rue  Dauphine,  on  adjuge,  le  15  sep- 
tembre, la  démolition  de  ce  qui  subsiste  de  la  porte 
Commune  (1);  cette  démolition  doit  être  achevée 
pour  le  l^r  octobre. 

II  était  alors  décidé  que,  sur  remplacement  de 
Tancienne  porte,  serait  érigée  une  entrée  triomphale 
qui  rappellerait  la  mémoire  du  Dauphin  et  porte- 
rait son  nom. 

La  seule  mention  insérée  dans  les  registres  de  la 
intinicipalité  se  trouve  dans  un  mémoire  rédigé, 
le  30  janvier  1786,  pour  revendiquer  la  propriété 
de  la  Grosse-Tour  dont  Tlntendant  prétendait  dis- 
poser en  faveur  du  collège.  Nous  y  lisons  ces  détails 
parmi  les  preuves  alléguées  par  la  ville  pour  éta- 
blir son  droit  : 

ff  C'est  à  cet  effet  (à  titre  de  propriétaire)  que 
riniiiée  1766,  le  corps  municipal  sentit  Timportantc 
nécessité  de  bâtir  la  porte  Dauphine,  et  que,  n'ayant 
aucune  ressource  pour  faire  cette  dépense,  il  fut 
autliorisé,  par  assemblée  de  la  commune  du  21  mars 
de  lad  ite  année,  à  démolir  celte  tour  et  à  en  employer 
ks  matériaux  à  cet  effet;  mais  le  plan  ultérieur  de 
cette  porte,  qu'on  décida  devoir  être  sculptée,  ne 
pcrmcltant  pas  de  faire  usage  de  la  pierre  dure 
employée  dans  cette  tour,  les  officiers  municipaux 
suspendirent  cette  démolition;  ils  allaient  s'en  occu- 


iNflvm.  Arrôlrs  de  la  moiric,  reg.  1,  f*  4, 


—  233  — 

per  pour  la  consh*uction  de  la  porte  Royale,  qu'ils 
vont  se  trouver  forcés  de  bâtir  incessamment,  at- 
tendu que  l'ouverture  de  la  route  doit  avoir  lieu  au 
printemps  prochain  (1).  » 

La  construction  de  la  porte  Dauphine  eut  lieu  en 
1777.  Dans  une  délibération  en  date  du  24  août,  la 
municipalité  décide  de  faire  démolir  «  la  vieille 
tour  restant  du  côté  droit  en  sortant  de  la  porte 
Commune,  »  et  d'inscrire  au  cahier  des  charges  la 
condition  pour  l'adjudicataire  «  de  ne  pas  endom- 
mager les  pilastres  actuellement  commencés  de  la 
porte  neuve  (2).  » 

Il  nous  a  été  impossible  de  retrouver  les  devis  et 
projets  relatifs  à  cette  construction.  Nous  savons 
seulement  qu'elle  fut  exécutée  sur  les  dessins  de 
Charles  Guillaumot  (3),  architecte  de  l'Intendance. 
«  Elle  est  composée,  écrit  Th.  Tarbé,  d'une  ouver- 
ture en  arcade  avec  deux  massifs,  ornés  chacun  de 
trois  médaillons  sur  chaque  face.  Du  côté  du  fau- 
bourg, les  deux  médaillons  du  haut  devaient  conte- 
nir les  bustes  du  prince  et  de  la  princesse.  Les 
deux  du  milieu  devaient  représenter,  d'un  côté,  le 
moment  de  la  bataille  de  Fontenoy  où  le  fils  de 
Louis  XV  voulut  se  mettre  à  la  tête  de  la  maison  du 
Roi;  de  l'autre,  le  mariage  du  Dauphin  (4).  » 


(1  Arrêtés  de  la  mairie,  reg.  I«  T  68.  (Note  coinmiiiilquée  par  M.  le  doc- 
teur Moreaa.) 

<2)  Archioes  communales  de  Sens,  BB  4. 

•T,  Charles-Axel  Guillaumot,  né  en  1730.  à  Stockolm,  de  parents  fran- 
çais, était  membre  de  TAcadémie  d'architecture.  Il  a  constmit  la  caserne 
de  Joignr.  Il  moorol  à  Paris  en  1807. 

(*  Histoire  de  Sens,  p.  m\. 


u 


_  234  — 

Les  iiiodèles  en  plâtre  de  ces  médaillons  furent 
exécutés  ])ar  le  sculpteur  Dupaquet  (1). 

Les  matériaux  employés  étaient  de  bien  mauvaise 
qualilé.  Six  ans  après  rachôvement  de  la  porte 
Dûiiphine,  on  reconnaissait  la  nécessité  d'y  faire 
d'iniportantes  réparations. 

Le  20  mars  1784,  de  Montfeu,  inspecteur  des 
Ponts  et  Chaussées  de  la  Généralité  de  Paris,  dé- 
pose un  <i  devis  pour  la  réfection  totale  de  Tenla- 
blemeiit  de  la  porte  Dauphine,  dont  la  pierre  est 
ciiticMt  nient  dégradée  et  ruinée  par  les  gelées  de 
rhivcr,  et  pour  la  couverture  en  plomb  dudit  en- 
tablement, ainsi  que  du  socle  de  couronnement  de 
ladite  porte  afin  de  prévenir,  pour  la  suite,  de  nou- 
velles dégradations.  ï» 

Ce  projet  spécifie  que  l'entrepreneur  sera  tenu  de 
supprimer  les  bossages  ménagés  pour  recevoir  la 
sculpture  des  médaillons,  afin  de  les  araser  avec  le 
parement  de  la  pierre.  La  dépense  devait  s'élever 
à  3  2(1(1  livres,  mais  le  l"août  suivant,  Tarchitecte, 
«  vu  la  difficulté  de  se  procurer  de  la  pierre  de  Ton- 
nerre et  la  modicité  de  ses  premières  estimations,  ^ 
déclare  qu'il  y  a  lieu  de  prévoir  une  augmentation 
de  500  a  600  livres  (2). 

L'année  suivante,  seulement,  ce  travail  fut 
exécuté.  Le  registre  des  délibérations  du  corps  de 
ville  y  fait  Tallusion  suivante,  à  la  date  du  16  août 


(lï  Osl  II'  tiipni  donnô  par  les  chroniqueurs  contemporains,  notnnnnenl 
Mjiucïi^rr  '  i/s.  de  la  mbliulh.  dr  Sens,  (omc  II,  p.  SG),  qui  donne  une  éléva- 
tion rk*  hi  I  i'jrle  Daupliine. 

Cl.  Archit*ti  cvnumin<iles  de  Senx,  DDD. 


—  235  — 


1785  :  c  Les  réparations  de  la  porte  Dauphine  dont 
on  s'occupe  obstruant  le  passage  ordinaire,  on  se 
trouve  dans  la  nécessité  d'ouvrir  la  porte  Saint- 
Reniy  et  d'y  établir  un  bureau  de  perception  des 
droits  d'aydes  (1).  » 

Les  sculptures,  toutefois,  restaient  à  faire.  L'Etal 
sans  doute  devait  y  pourvoir.  Mais  la  pierre  de 
Bailly  dont  était  construite  la  porte  étant  d'un  grain 
peu  favorable  au  modelé  des  bas-reliefs,  l'Inten- 
dant avait  invité  la  Ville  à  faire  incruster  dans  les 
médaillons  destinés  aux  sculptures  de  la  pierre  de 
Tonnerre. 

La  ville  de  Sens  recule  devant  ces  frais.  «  Le 
maire,  lisons-nous  au  procès-verbal  de  l'assemblée 
du  4  août  1787,  a  dit  que  Ms»"  l'Intendant  a  donné 
des  ordres  pour  faire  reconduire  à  Paris  les  médail* 
lions  en  plâtre  qu'il  avait  envoyé  (sic)  pour  guider 
l'artiste  dans  l'opération  de  sculpture  à  faire  sur  la 
porte  Dauphine,  sur  les  motifs  que  le  corps  muni- 
cipal avoit  paru  répugner  à  la  dépense  qu'engendre- 
roit  la  pierre  de  Tonnerre  à  réincruster  au  lieu  de 
celle  du  Bailly  qui  forme  aujourd'hui  les  médail* 
lions;  qu'il  pensoit  que  Msr  ITntendant,  qui  connoit 
le  peu  de  facultés  de  la  ville,  en  demandant  qu*ellc 
supportât  cette  dépense,  se  feroit  un  plaisir  de  venir 
à  son  secours,  tant  pour  cette  dépense  que  pour 
toutes  autres;  que  par  ces  considérations  il  croyoil 
qu'il  falloit  marquer  à  Mgr  l'Intendant  que  le  corps 
municipal  espéroit  dans  ses  bontés  des  ressources 

(2  Ibidem,  BB  4,  t  f9,  veno. 


f 

il 


i 


—  236  — 

pour  toulc  la  dépense  qu'occasionneroit  la  porte...; 
,.,.ont  ai  resté  de  prier  M^""  Tlntendaut  de  vouloir 
bien  envisager  (jue  le  peu  de  ressources  qui  prove- 
noît  des  revenus  de  la  ville  les  faisoit  ésiter  à  entre- 
prendre toutes  dépenses  extraordinaires;  que  celle 
de  la  sculpture  et  autres  réparations  à  faire  présen- 
toit  un  tableau  d  une  dépense  effrayante  pour  une 
communauté  sans  ressources,  que  néanmoins  le 
corps  municipal  s'en  rapportoil  à  sa  prudence  et  à 
sa  sagesse  pour  1  ensemble  de  cette  dépense,  bien 
persuadé  qu  il  ne  lui  fera  rien  entreprendre  au  delà 
de  ses  forces  et  faculté  (1).  v 

Ces  démêlés  attendaient  encore  une  solution 
lorsqu'échila  la  Uévolution.  Les  sculptures  ne  fu- 
rent JLiniais  exécutées.  Les  maquettes,  déposées 
quelque  temps  dans  une  chapelle  de  la  cathé- 
drale (2),  trouvèrent  asile  au  musée  de  la  mairie, 
où  elles  figurent  aujourd'hui. 

Quant  à  la  pnrte  Dauphine,  après  avoir  vu  passer 
les  cortèges  grotesques  des  saturnales  révolution- 
naires, après  avoir,  pendant  tout  un  siècle  de  monar- 
ehicH,  de  répuhli(|ues  et  d'empires,  gardé  son  nom 
histori(|ue  et  déeoré  l'entrée  principale  de  la  cité, 
elle  fut  rasée  par  une  municipalité  jalouse  surtout  de 
continuer  les  traditions  de  celles  qui  avaient  jeté 
bas  les  portes  de  Notre-Dame,  de  Saint-Antoine  et 
de  Saint-Didier  et  dont  le  conseil  général  du  dé- 
partement, en  liSll,  Montalembert  et  Victor  Hugo 

tt>  AnltiL'rs  çtimmumtU^.  »B  4,  f*  79. 

(2)  Vn  ItivtfnUUnt  cte  tH(i^7  note  leur  présence  duns  la  chapelle  de  Sainte- 
€olatnKi?,  pri<&  tli!«  !i(^l^e^  du  niausok^clu  Dauphin, 


—  237  — 

au  Parlement,  en  1844,  avaient  stigmatisé  le  vanda- 
lisme (1). 

Nous  devons  résumer  ici,  si  peu  honorable  qu'elle 
soit,  cette  page  d'histoire  sénonaise. 

Le  15  novembre  1881,  un  conseiller  municipal, 
nommé  Huchard,  déposait  la  proposition  suivante  : 
«  Le  conseil... 

c  Considérant  qu'il  est  de  toute  nécessité  que 
l'accès  d'une  ville  soit  très  facile,  au  moins  pour 
les  voies  principales,  décide  que  les  pilastres,  co- 
lonnes et  portes  qui  obstruent  plusieurs  des  entrées 
de  la  ville  seront  démolis  et,  dans  le  xîas  où  quel- 
ques-unes de  ces  constructions  auraient  une  certaine 
valeur  artistique,  de  les  réédifier  sur  des  emplace- 
ments à  choisir,  où  ils  pourraient  servir  d'orne-» 
mentation.  » 

Celte  proposition,  renvoyée  à  une  commission, 
revenait  devant  l'assemblée  communale  à  la  séance 
du  8  février  1882. 

Les  conclusions  du  rapporteur  étaient  ainsi  for- 
mulées : 

c  La  commission...,  nommée...  pour  examiner 
s'il  y  avait  lieu  de  démolir  ce  qu'on  appelle  les 
portes  Saint-Hilaire,  Formeau,  Notre-Dame,  Saint- 
Didier,  d'Alsace  (porte  Dauphine)...,  à  l'unani- 
railé  a  décidé  que,  pour  rendre  plus  facile  la  circula- 
tion des  voitures  à  l'entrée  de  la  ville,  dans  ces  di- 
vers endroits,  il  y  avait  lieu  de  supprimer  toutes 
ces  portes...  » 

(l  Voir  Vaudin,  Fastes  de  la  Sênonle,  pp.  191  et  193. 


—  238  — 

Dix-huil  conseillers  seulement  étaient  présents: 
dix  volèrent  pour  Tadoption  de  ces  conclusions. 

DiïîonsH  Hionnenr  des  Sénonais  que  cette  mesure 
borbarc,  ([ue  ces  considérations  charretières  soule- 
vcrent  rélonncment  et  Tindignation.  La  presse  lo- 
cale en  a  gardé  les  échos. 

Une  adresse  au  maire,  M.  Lalande,  lui  expose 
ces  représcnlalious  : 

a  Démolir  pour  améliorer  et  embellir,  passe  en- 
core; mais  détiuire  pour  détruire,  sans  nécessité, 
sans  utilité,  sans  même  le  moindre  intérêt  d'ar- 
gent, c'est  insensé! 

a  Songez-y,  ni  on  sieur  le  maire,  votre  nom  restera 
implacablement  attaché  à  cette  œuvre  de  destruc- 
tion (1)!  0 

Un  long  mémoire,  reproduit  par  le  même  journal 
(numéro  du  "2  juin),  s  efTorce  de  sauver  le  monument 
dont  ioiil  le  inonde  reconnaît  la  grâce  et  l'harmo- 
nie des  proportions  dans  la  sobriété  des  détails  : 
«  Notre  ville  a  perdu  prasque  tous  les  fleurons  de  sa 
couronne  murale.  La  porte  Dauphine  lui  reste  en- 
core. Simple  darehitecture,  elle  se  ressent,  il  est 
vrai,  de  lYpoque  où  elle  fut  bâtie;  ...cependant  elle 
a  grande  mine,  à  l'extrémité  de  la  rue  principale 
qu'elle  encadre  noblement  dans  ses  pilastres  de 
pierre;  du  eùlé  du  faubourg,  elle  relève  l'aspect  de 
la  place  et  détourne  les  regards  des  constructions 
mesquines  qui  1  entourent. 

«  On  aime  à  saluer  en  elle  le  souvenir  de  nos 
gloires  passées,  qu'elle  nous  rappelle  dignement. 

(I)  Vnfon  iit  VYoniie,  n-  du 2  juin  1883, 


r  1 


—  239  — 

«  Elle  a  une  tradition  :  elle  a  remplacé  le  beffroi 
de  nos  libertés  communales,  l'antique  porle  Com- 
mune où,  durant  de  longs  siècles,  se  concenira  lac- 
livilé  municipale  de  nos  aïeux. 

«  Par  son  nom,  elle  a  conservé  longtemps  la 
mémoire  d'un  grand  et  vertueux  prince,  inbumc 
dans  nos  murs. 

«  Tout  récemment,  hélas  !  elle  a  vu  gratter  son 
vieux  nom  par  la  municipalité  républicaine  qui  Ta 
appelée  :  porte  d'Alsace,  quoiqu'elle  regarde  le 
Midi » 

Toutes  les  protestations  furent  inutiles.  Le  2  juin 
1883,  le  maire  de  Sens,  M.  Lalande,  adjugeait  la  dé- 
molition des  portes  de  la  ville.  La  porte  Dauphiiie, 
dite  d'Alsace,  fut  attribuée  à  M.  Emile  Gaujard  pour 
la  somme  de  180  francs. 

Lacquéreur  s'empressa  de  faire  connaître  qu'il 
avait  agi  au  nom  d'un  comité  formé  pour  la  con- 
servation du  monument  (1). 

En  vain  ce  comité,  fort  de  Tadhésion  de  cinq  cent 
cinq  habitants,  sollicita  une  prolongation  du  délai 
imposé  pour  la  démolition. 

Le  journal  YUnion,  dans  son  numéro  du  15  sep- 
tembre 18S3,  annonçait  que  la  destruction  de  la 
Porte  Dauphine  était  opérée  depuis  quelques  jours. 


'  i 


*['l| 


(1)  Ce  comité  était  composé  de  MM.  A.  Chocat,  Ch.  Duimml,  E.  Gaujard. 
A.  Grelot  et  Horace  Lefort.  U  a\*ait  provoqué  une  souscription  duii^  le  but 
de  faire  reconstruire  la  porte  Dauphine  et  de  la  faire  décorer  dr-  s^ulptu- 
rn  reblives  à  l'histoire  de  Sens.  La  destruction  prématurée  du  monu* 
ment  ne  permit  pas  de  réaliser  ce  projet. 


i 


TABLE  ALPHABÉTIQUE  GÉNÉRALE 


ÂdretttAe  la  ville  de  Seni au  comte 
Agout  (  ^  irumle  d').  l£4. 

Aiiujiioii  utucd't,  aos. 

AU  KiTifndi.  son  p<i«»i|i<?4  Sens,  132. 
AlLnrd,  curc  de  Verwllk^t,  W. 
ALïtioiti'  frti/itrnii  d'  ,  p*^  d'AJx- 
la-Chïipellr,  213. 

Amdot,  tninlsdr,  83,  89. 
And  oui  Ut'»  rhfrurgled,  13,  56. 
il  AnglvÉîler,  77<  7»,  m.  «^  99.  100. 
Afigoulêroe  (duc  d'i.  Ilfi,  190, 194. 
AnciOuli'iTiP  (dtichr^Kr  d*}^  141,  142, 

1«l  d  1S5, 192, 193. 
AtuUtftrsaire».  IW  à  112,  153,  179. 

1"JU.  192. 
At*partemrfUt  du  Ihtttphiti.,  215,  217. 
Arfhfi>éthé.  22.   lUfi.   191,   adresse 

munUiimle  pour  son  rèlnblisse- 

meni,  IHC-II». 
Ancï-siR-Ci'iiF*  ItM* 
jlr/ïi«jfr/fi  flu  tjtiuphitt.  2lTi. 
Artois  rcomle  d'avoir:  Charles  X. 
AudLmc  (doeteiir^  3G. 
dtttel  tie  ta  pQtrir.  117. 
il  Uf 4-1)1  dajtilé$.  230. 
Atiiop9ie  dr  ia  Dauphin f,  34-36. 
Aulopiiie du  Vkntphiu,  13,  14. 
Aun^nE,  2:i.  m ,  141, 182, 183. 192,194. 
AvAixoM,  HU  1K3,  1^.  t1>1, 
A%*io?ftj}«  (cathédrali^  d'i^  12. 

de  Batliicourl,  127. 


Baqucf,  gni%'eiir,  51. 

Barber  de  1  Espada  (l'abbé),  209. 

210. 
Bardin,  Juge  de  paix,  137,  148,  IGi* 
Beaumont  (comtesse  de).  63. 
Bcauval,  127. 
Bémud  (M~),  libératrice  de  la  vilk 

de  Sens  en  1814, 164.  177,  178. 
Beooist  de  la  Molhe,  135, 137  à  139 

144, 145, 148.  152, 153,  ICO.  173. 
Bérenger  (comte  de).  63,  C6. 
Bemadou  (cardinal),  archevêque 

de  Sens,  168. 
Bernardin  de  Saint-Pierre.  101. 
Berr>'  (duc  de),  146.  185. 
Berry  (duchesse  de).  185. 193 
Berthelin.  chanoine,  4.  29,  G8. 
de  Bérulle.  128. 
de  Beurnouville,  183. 
de  Biencourt,  127. 
Billebaut.  président  du  tribunal, 

136. 
Biron  (comtesse  de),  184. 
de  Blanckart,  maréchale  du  Muy. 

204,  207.  212,  213. 
Boiscoillaud  (docteur),  14,  56. 
Boudin  (général),  177, 179. 
Boudrot  (docteur),  161, 163. 
Bouilhac  (docteur),  56. 
de  Boullongne,  1(6. 
de  Boulogne,  évéquc   de  Troyei», 

140,  149, 150, 174,  178, 181, 183. 
Bourdelin  (docteur),  56. 


—  241  - 


Bourdesoult  (comte),  100. 

de  Bourge,  100. 

Bourlel  de  Vauxcelles,  chanoine, 

33. 173. 
liourlet   de    Vauxcelles,    premier 

valet  de  chambre  de  Charles  X, 

173. 
Brancas  (duchesse  de),  C3,  66. 
de  Hrieiine  (Voir  :  Lomcnie). 

BlUENON.  183. 

Broglie   (Emmanuel    de),    auteur 

ciié,  ayj. 

de  BuUioud,  127. 

de  Bullioud,  chanoine,  5,  29,  67. 

8i>,  109.  209.  210. 
du  Busquet,  sous -préfet  de  Sens. 

i:*  à  1G5. 179. 

Cahier,  orfèvre  du  roi,  228. 

Cahors  (collège  de),  42. 

Cambrai  (hôtel  de)  à  Paris,  213. 

Canons  remisés  dans  la  cathé- 
drale, 132. 

Cardinaux  ténonais,  2. 

Carlier,  chanoine,  196. 

Carmélites  {religieuses/ ,  167,  183. 

Cjumont  (duchesse  de),  63. 

C^lestins  de  Sens,  32. 

de  Chalmazet,  év.  de  Coutances,  25. 

Chambonas  (buste  de),  117. 

de  Champbertrand,  doyen,  4,  29, 
G7. 86.  91, 110, 111. 

Champigny  (Nompère  de),  190. 

Champion  de  Cicé,  év.  d*Auxerre, 
25. 

Chandenier  (collection),  38,  42,  44. 

Uuipflle  ardente  j  13-16 

Chapitre  de  Sens,  délibérations,  5, 
19,  30,  37,  68;  suppression,  112, 
IMireconstituUon,  189. 

iharli-s  X,  I3â,  i:i3,  170.  2*S. 

CIiaMoiîui;  m. 

Chiisubh  tirodèc  par  la  duchesse 
d  AngDitléitie,  19S. 

Chatclrl  (comte  dy),  100  A  lll. 


Chatelet  Laumont  (eomtossc  du), 

63. 
Chauvelin  (marquiiï  iki,  17,  t S,  2G. 
Chimay  (princesse  ilv,  20». 
Choiseul  (vicomte  di  j,  109. 
Choisy  (comtesse  do,  XM. 
de  Cicé  (voir  :  Chan\|jion). 
Cimetière  de  IHôtel-ltuu,  im,  im, 
Cochin,  (Ch.-Nicolas)    iû,  4B  h  51, 

75,93,101. 
Cochin  (gravures  de)  12,  33,  35,  53^ 

72. 
Collet,  confesseur  de  la  Dûuphîiie, 

17. 
Co//i>r  des  ordres,  22Ci,  229,  230. 
Côme  (frère),  chlrurgii-n,  2  -7. 
Commission  pour  ta  n^atatittjlion 

du  Mausolée,  137,  U:t,  Ul,  177. 
Concile  de  Sens.  19G. 
de  Condé,  chanoine.  €8,  m,  m. 
Convention,  126. 
Corbel,  marbrier,  82. 
Cordeliers  (couvent  dt-s)^  23. 
Cornisset,   président   du   Inbunat 

de  commerce,  15G. 
Cornut  (Gauthier  et  G i le},  archevê- 
ques de  Sens,  21. 
Cossard,  118. 

Couronnes,  23.  30,  217  à  219. 
Cousin   (Jean),  peintre  :  vitraux* 

117. 
Coustou  (Guillaume),  *>!♦  71,  77,  33 

à  95. 
Coutances  (évéque  d«r),  25, 
Croix  de  Saint' Louis ^  127. 
Crou  (docteur),  163. 

Dallemagne.  brodeur,  227. 
Dauvergne,  chanoine.  4,  29,  G8,  Sil. 
Décoration  funèbre,  2î. 
Demay.  procureur  du  r#>i.  I^, 
Desgranges  (M**)  178* 
Desmarais,  brodeur,  2Z7. 
Destruction  de  la  porte  Itouphine* 
237  à  239. 

10' 


—  212  — 


îlettîMpnurlartsImtraimn  du  A/ciii- 

DitUxot,  41Î  à  :i2.  105,  ItïG. 

lïir.i'.  ;iukur  tikMir»,  UQ,  10.1. 

Ilrrtu  fm!ir(|uis  lU'i,  il.  2*1,  04.  Go. 

l>j(Hm\  m n ri* lier,  lUO* 

Drmu  t,  sjKTÎsliiint  221. 

JlnAnir,  oïtkiiT  rmjiiîi'i|ml^  122. 

l)U|]ar|tli'l.  stulpU'îiJ-,  ZU. 

Diiponl.  iM*i  auxUlulrr'  <lii  cardi- 
nal de  Li  Fiij-L',  ICCÎ. 

Dii|>ruL,  (itKiiiuitifrit  du  l'urdinul), 
lij. 

Du  roui  in  [yi-),  177. 

lUival  fdock'uru  14. 

KlUfrai,  Va,  l'urnu.  lOK. 

t''liiiuphr%.  41  !i  J,"î   51,  70,  71. 
îl^ihuittutùtn  l'ti  1777.  Mi, 
L^ihamutûtn  eu  ISll,  118. 

lùihriqttf  (coniietl  dt'ï  iit-  hi  Mélro- 

}HyU\  ira 

cl<*  In  Fan?  (cardiiui!}  iirchevêque 
de  Sens,  mi  \m.  Vêt   VJI,  222  à 

iËl>,  2:ïï*  Si  :i:kK 

de  IVliï  d  iHiiTi'is,  2U9.  210. 
Fl^iU'  dianm  df  Un.  (i2.  184.  190. 
1-1 U  -  J  il  m  es  i  d  u  i"  \U*    ISCi ,  'iWi. 
riruiy  (duc  df  lt»K 
de  FouLdne  (Voir  :  Cnir-si-mcnl). 
Fuxi  \ixem.t-M',  là,  17,  3-'ï,  O,  100, 

llCi.  191,  2i:.  A  217. 
de    rornuMinlr^    çun*  de  lu  t'athc- 

ilrale,  lltS  ïi  Hl,  14S,  i:d.  LV2, 1(X>. 

m»  WL 

Forliii,  127* 

lVMlf>u,  |>cintri\  im. 

Fronsuc  (ducdc»,  i:i,  14,  IT.  26,  89. 

Fantrtùtlt%  tle  ia  thm^^bint  tJ,  G8. 

de  Gabridt*  vîe«lr«^  grucraL  23,  20. 


Gabriel.  127. 

Gnillot,  pcintro,  230. 

Gamot,  préfet  de  l'Yonne.  116,  Uj, 

152  a  159,  164.  108,  1G9  à  172 
GarnuT,  conventionnel.  155. 
Garscmentdc  Fontaine,  chtiiioine. 

4,  7.  29. 
Garsenient  de  Fontaine,  174. 1^ 
Garsement  de  Vauboulon,  127. 
Gaultliier.  maire  de  Sons.  12H,  121*. 
Gaultry,  198. 
Gauthier,  secrétaire  du  chapilri. 

210. 
Gayet,  architecte,  38,  42. 
Gigot  de  Boisbernier,  chanoine,  l 

29,G8,  C9.  91. 
Gois,  sculpteur,  102. 
Goret,  chanoine,  68. 
Goyon     (comte    de),     préfet     de 

l'Yonne,  180. 
Goyon  (comtesse  de)  182. 
Gradot,  chanoine,  86. 
Gratien  Dugaudin,  chanoine,  29. 
Grégoire,  114. 
Guiche  (duc  de),  190. 
Gulllauniot,  architecte,  233. 
Quistel  (princesse  de),  63. 
Guyot.  propriétaire  de  la   maison 

de  l'Œuvre,  131. 

de  la  Haize,  chanoine,  4, 29.  C8. 0. 

86. 
Ilédiard.  chanoine,  4. 29,  68. 
Ilédiard,   officier  municipal,  221 
Hérauts  d'armes,  16,  27. 
d'Hesselin    de   Hauteville,   doyen 

5,26,29,31,57,  67. 
Ilévin  (docteur),  14,  56. 
Ilôlel'de-oilU  176. 
le  Houistel,  chanoine,  4,  7,  29.  ii8 
Huerne,  chanoine,  26,  29,  (H. 
Bureau  (voir  Woustourn). 

Jacquier,  archiviste  de  la  ville,  221 
de  Jarente,  évêque  d'Orléans,  llB, 


243  — 


JOIGNT.    183. 

J^Hy  (M-O.    archevêque   de  Sens, 

1»S.  211. 
Jolly.  orfèvre,  219. 
Jorre  de  Saint-Jorre,  chanoine,  62. 
Josoph  II,  empereur clAllemagne. 

94. 

Jô5ie\\  omcltr  rnunlcîiirti,  21X, 
Julien,  se  o  1  p  Ipu  r,  96. 
cîê  Jussy,  127, 


Labreuillp  (docl«tirï,  IJ,  SSl 
l-î>'re  ^P.  ,  m,  os,  129 
Liîaiide,   maire  de  Sen*,  23 
l^llil  (ablké  dr\  171 
£^u3tfw.  «|(ui  de  la  diwliei» 

itioricsr».  14.  st 
i 
de  Lam 

leo.  171.177. 


I.  2B 
iTAa. 

M^  IL 


iai«.a- 


Loustaunaux  (docteur),  14,  .W. 

Louvols  (marquis  de),  185. 

Luynes  Cardinal  de),  2,  8.  A  It  2(», 
24  à  29.  31,  38  à  44,  M.  .'i?,  3.  **., 
69,  71,  82  à  84.  98.  112,  124,  Wt 
128.  201,202. 

Luynes  (duc  de;  92, 109. 

Macé,  officier  municipal»  2M, 

Mahiet.  chanoine,  29, 

Maillet  de  la  Trémoye,  29,  «>.  r^' 

Maladif  de  la  Dauphine,  ii.  il,  :.,'}, 

MaJlft.  chanoine,  29.  CZ  t'J, 

Ma  ni  eau  Rogal,  23,  Uf.  C2,  217.  2lJl, 

220.  221.  23f.  a  228. 
Harche  0>mt4!-vwe  de  L»'.  û:;.  3§,<3^ 

Marco-^rj*-   Xau-qi-it  d^    IM. 
JLr=r-.'>7^  /r-yct-x  2.  1»:; 
îliri^-Ai.W:î>»^i#'  r"es:^  4»^  lrMM^« 
lO   JM.  2U;   jîJ». 

C  «. 
Xair-»    vxnr  'nilirriri.»:     :"*' 

r7iV»^<^^-|f     fit      "^    i   '^g. 


J 


—  244 


îliroii,  im 

de  Morilmurgt  chanoine,  4,  29,  65, 

m,  GO,  m. 

Mimmiir  (nlij<'ls  envoyé»  à  la)  113, 

21Î>.  220. 
de  Mi>jitnî|;ton.  auteur  cité,  102. 
MoTilnlet  ilr  Vniebreuil,  chauoine, 

2D. 
Monlf'sijulau  (nbbé  de),  ministre 

dc5 1  tnkVik-nr.  154, 157, 170. 
Mtinlnioreiii^y  (duc  de)  109,  110. 
Moorc  (collecllon),  52. 
df  MorntiKi'l.  inspecteur  des  bûtl- 

Mdrfjui  ilf  Vormes.  80. 

Mode*",  cîmnoine.  G,  25, 29,  65. 

.l/eirf  ilfhltatiphine,54,  55. 

Mt^N  ffii  nauphin,  50. 

tlv  Ia  MuUif,  Voir  :  Denoist. 

de  tn  MuUc,  évêquc  d'Amiens,  40, 

Mu  loi,  L18. 

MtutkipttUté  de  Sên$,  ordonne  l'en- 
lévi'inrnt  du  mausolée  116  à  122; 
cnvc>le  une  adresse  à  la  Conven- 
lion,  VMi  :  fait  tronsporter  le  mo- 
nunicnl  à  la  cathédrale,  128  A 
131  ;  fltVlfle  sa  restauration.  136  à 
13K:  riVLime  le  rétablissement 
rir  1  iuvhtvi'ché.  18G  A  189. 

dr  Munit,  %  iraire^néral,61. 

Muy  itxtmW  du), 66,  109.  124,  127, 
2iy  à  2tl  :  son  tombeau,  201, 211, 
2i:j,  211 

Muy  tmureclialc  du),  Voir  :  Blanc- 
knri* 

de  NnnïouîUct,  maître  des  céré- 
nionies,  ti. 

Ne^k'  (marquis  de),  03,  66. 

Ne  ver?»  <n  JÎKH'uses  de),  107,  189. 

dcNk'fïliiy,  évoque  de  Verdun,  61, 

fa,  m, 

Noé  (vicomte-  de),  17, 


Nouette-Goudy,  127. 

Œuvre  (maison  de  1'),  128, 129.  131. 

Office  divin j  composé  par  le  Dau- 
phin, 40,  41. 

Officiante,  176. 

Offrande  liturgique,  167, 178. 

Orlêaks.  142. 

Orléans  (duc  d),  17,  23,  26,  31. 

Ornements  liturgiques,  106,  222  à 
226. 

Paris  (Notre-Dame  de),  42,  227. 
Paris  (Saint-Sulpice  de),  209. 
Pascal,  127. 
Pauvres  conviés  aux  obsèques,  24, 

37,  64, 167. 
Pelée  de  Saint-Maurice,  137,  118. 

ICO. 
Pelée  des  Tanneries,  chanoine,  G8. 
le  Pellerin,  chanoine.  4,  7,  29,  6K. 
Perrin,  ofllcier  municipal,  115. 
Perrot,  plumassier  h  Paris,  227. 
Person,  sculpteur,  115, 117, 118. 128, 

130,  131,  135  à  137,  142  à  145,  147, 

152. 153,  161  à  163.  177.  220. 
Petit  (docteur),  56. 
Perroux  (Sallot  du),  chanoine.  02. 

105. 
Pibroc  (docteur).  5G. 
Picon,  ICI,  102. 
Pierre,  peintre,  95. 
Pigalle,  sculpteur.  56,  76,  95. 
Poêle,  23. 
Pollet  (M-).  177. 
Pons  (comtesse  de),  17. 
Pons  (marquise  de),  C3. 
PoNT-sun-YoNNB,  142, 176. 
Portai  (docteur),  56. 
Porte-Dauphine,  133,  231  à  239. 
Portraits  du  Dauphin  et  de  la  Dau- 

phlne,  1  (grav.),  36. 53  (grav).  107 
Portraits  du  comte  et  de  la  comtesse 

de  Provence,  93. 
de  Potrincourt,  127. 


-  245 


Provence  (comte  de),  91  à  93. 
Proyart.  auteur  clic.  40. 

Recoir.g,  ingénieur,  132. 
RfcEXNEs  (château  de),  91. 
Bègiments  :  Reine- Dragons,  89,  91, 
98,  109, 110. 
~        Mestre  de  camp  Royal- 
Dragons,  110. 

—  Monsieur- Dragons,  1(30, 

170. 

-  Lanciers  de  Berry,  176. 
Rpgnaull  (R.  P.),  auteur  cité,  37. 39, 

40,  41. 
Reims  (nrchevéque  de).  16, 26,  31. 
Beîiefs  (bas),  destinés  à  la  porte 

Dauphine,  60  (grav.\  133. 
Renou,  peintre,  95. 
Rrprésenlation  sur  la  sépulture,  30, 

33. 
Rétif  (docteur),  163. 
de  la  Roche-Aymon,  archevêque 

de  Reims,  16,  26,  31. 
Rochechouart  (marquis  de),  109. 
lîochefoucauld  (vie.  de  la),  228  à 

230. 
Boid  Armes,  16. 
Roure  ^coTite  du),  109. 
Roure  (comtesse  du),  63. 
Rousset,  chanoine.  5,  23,  68. 
Roy.  chanoine.  5,  29,  C8. 
Rue  Couverte,  à  Sens,  231. 
Hue  Dauphine,  à  Sens,  231,  232. 
Hue  du  Saint-Erprit,  174,  182. 

Snbran  'comtesse  de),  €3. 
Sarre  des  rois,  3. 
Saint-Bris,  192. 
Saijpt-Dexis-les-Sens,  23 
Saikt-Dexis,  rabbaye  de)  123. 
Sainl-Florenlin,  (Comte  de)  19,  65" 
Saint  Ijiuis,  portant  Ut  sainte  cou- 
ronne, tableau,  230. 
Saint-Loup  (Châsse  de)  118. 


Saint-Maime  (baron  de),  Voir  :  de 

Félix. 
Saint-Maximin-de-Sens  (prieur  de) 

24. 
Saint-Pierre-le-Vif,  abbaye,  à  Sens, 

21.  113. 
Saint-Romain  de  Sens,  église,  117. 
de  Saint-Sauveur,  Chef  de  brigade, 

26. 
Saintb-Colombe-les-Sens.  (abbaye 

de)  23,  117. 
Samosate  (évéque  de),  voir  :  Du- 
pont. 
Sauvalle,  secrétaire  général  de  la 

préfecture,  147, 156. 172. 
Saxe  (Christine  de),  11, 35. 
Saxe  (Xavier  de).  36.  109. 
de  Sébeville.  140. 
Sénac  (docteur),  14,  56. 
Senlis  (évéque  de),  16. 
Sens  (cathédrale  de  Sens) 
Autels  des  jubés,  144, 152. 
Bourdons,  117. 
Caveau  du  Dauphin,  6,  7,  21, 

77  à  79,  88.  98, 124, 1C8. 
Chapelle  de  N.-D.  de  Lorette, 

112. 
Chapelle  de  Saint-Jean,  131. 
Chapelle  de  Saint-Louis,  4, 30, 33 
Chapelle  de  Sainte-Colombe,  7. 
58,   88.  92,   100,   117,  132.  133, 
144.  1%,  198. 
Chapelle  de   la  Sainte -Vierge, 

58. 
Dallage,  100. 
Décoration  funèbre,    21. 
Maître-autel,  42.  144,  152. 
Parc  d'artillerie,  132. 
Plan,  37.  38,  42. 
Salle  capitulaire,  128. 
Sépulture  (motifs  du  choix  du 

Dauphin),  5,  8  à  11. 
Visite  en  1797, 132. 
Ser>'andoni,  architecte,  42. 
Sèze  (comte  de),  229, 


—  iîiS  — 


mm 


De  Sina^ê»!.  vlcnlrr  grn«^l.  23,  M, 

^iroaetlr,   imtM^ri^ur  de*  Menus- 

Slodx.  tculptcur»  70. 

Srinilni  ^ahWi  3^.  38,  41.  12  44,  35, 

SorcT,    pàfol*««,   arrondiM^nient 

de  %tn*.  19. 
SottirinC   rrrrnijttfi,   architecte,  77, 

B,  g»,  îi». 

Sotil^m*  iâactenr  ICI, 
Sftmeripthm  pour  la  rrttattration 

a»  MauMtl^^.  ir«  a  13»,  145. 
Slr*ieni»îii,  atilrtir  cité,  36,  'A. 
Siïlly  itluclif^wfr  df^>,  r3. 

TanÎJiy  i  Marr|Mt*  de    170.  1K3. 
Talwiirr^ui,  m'  cliarpenficr,  K2, 
Taliifïm.  («Il lie  d^  »  2R. 
Tabni,  tV'tïir  :  r.hnlmazel;. 
Tïilnry.  tAffinjui^f'  de*  f>3. 
Talkjmndp    rOiirile   de»   100,  110, 

lit 
Tftphtfrif*   ife   In   Calhrtralr,  132, 

133. 
1  îîrlw^.  aiiîi-ur  ^^ilt-,  ÎJ5,  1)7,  137,  148, 

Tiivai>nr%  i4L(Mnl«'   de    IfO. 
T*''***'  fr^Kritt-vw  «le»  ij^. 
TeAtamrtti  tftt  Ihiuphin.  .'».  10  à  12. 
Thoma-*,  orfrvrf,  l'd,  102,  210, 
Ti»!^l.  clixinmne,  4   2.), Cl, 67. 
Ttjmbt  prttuiÈidrf.  72,  74. 


Tonnellier  htnk^nt)  140. 

TOîntEBRE,  IfG. 

Totilotrv  iCjomt*^%f  de»  V). 

TfMr  fia  qru'xef  "ESI. 

To'.r  «abbé  de  LS'.   ticairc  f«rn rn 

de  Trore*,  irj  â  l'»l.  ICi.  If^  IC 

175. 
de  Treignac,  177. 
Trcumeik  <ï>uc  de»  17.  2B. 
Tmnchin  docteur  .^2,  .V». 
Turreao,  Oinventionnel.  113. 

de  Vaadricoart.  chanoine,  1KM>. 

14«.  IfiO,  174,  W9. 
VAiLiisAvr.  abbaye.  117. 
Vauxcelleii.  (Voir  :  Eourl^-ti 

VEfl5fF-3n05J.  192. 

Vérol.  161. 

VEit»AiLi.Es,  «N.  D.  de  r,».> 

\VA\SK\\A,WJ>>,  <palai'^  de;  '.il.  Sô,  <i?> 

VtfzELAT,   114. 

Villefranche  (Marquis  de>  g<  n.  rjl 
MO. 

VlLLEJVIF,  161 

VlLLE.>F.l  VF.-iJi-rftTAR  ',     142,  ITT.. 

ViLl.EXF.vvE-LE-Roi  <ou  sur-Yonji' 

1K3. 
Villeroy,  chanoine.  Oi. 
Villeroy,  entreprcnenr,  K2. 
VinUition  drr.  .'rimJturer,  123,  127. 
Volland    M'">  4'..%. 
Yamille  tM-  «1*,  173,  174,  170.  177. 
Woustourn,  vtuve  Hureau,  Itîl 


Chapitre 
CHAprrnB 
Chapitre 


II... 
ni.. 


Chapitre  rv. 


V.... 

ClLVPITRE 

VI... 

Chapitre 

VII.. 

Chapitre 

VIU. 

Chapitre 

IX... 

Chapitre 

X.... 

Chai*itre 

XI... 

Chapitre 

XII.. 

TABLE   DES   MATIÈRES 


Comment  Sens  fut  choisi  pour  la  sépulture  du  Dauphin  1 

La  mort  du  Dauphin  et  les  obsèques  à  Fontainebleau  VA 

La  pompe  Tunèbre  à  Sens 19 

Les  services  funèbres 3Ù 

Jugement  sur  le  Dauphin 33 

Le  Veuvage  de  Marie- Josèphe 3j 

Lepitaphe  du  Dauphin ^12 

Projets  de  monument  funèbre 46 

Mort  et  funérailles  de  la  Dauphine 53 

Le  Mausolée  :  le  modèle 72 

Reconstruction  du  caveau  et  exhumation.      ...  77 

Érection  du  monument  et  mort  de  Coustou    .       .      .  ÎIB 

Les  anniversaires 14>I 

Les  jours  mauvais  :  leVandalisme  révolutionnaire.       .  l  i:î 

Violation  des  sépultures 123 

1814.  Restauration  du  Mausolée 134 

Retour  des  Cendres U& 

Anniversaires  et  visites  des  princes 170 

Dernier  transfert  du  Mausolée t£6 

.  La  sépulture  du  maréchal  du  Muy 200 


APPENDICES 

I L'appartement  du  Dauphin  à  Fontainebleau  .      .      .      .    213 

Il Les  insignes  royaux  conservés  au  trésor  de  Sens  .      .317 

III La  porte  Dauphine 2.')0 

Table  alphabétique  générale »    24Û 


TABLE    DES    GRAVURES 


Pa^rt 


Frontispice.  —  Portrait  dc  Dauphin,  peinture  par  Frédou.  Don  du 
roi   Louis  XV  au  cliypilrc  de  Sens,  en  1773 

TonTHArr  oe  Lqi^is  he  Frakce,  Dauphin*  graAoïre  de  Ijempereur, 
en  léle-  du  ■  Fortran  de  fta  Monseigneur  le  Dauphin,  d  Paris  1766  9, 
3S  p.  in-S*,  Paris,  chez  Lottln  l'ainé 


i 


V 


-.  248  — 

Crl^ryr'fafJrJJf^  ;  ARMOIRIES  db  la  ville  de  Sens.  Bols  appartenant  à 
M.  Puul  Duchemin,  imprimeur  à  Sens Il 

t^  MotiT  i}v  n.iUPiiiN,  Allégorie.  Dessin  de  Chnrles-Nicolas  Cochin. 
gravure  tli-  C  Bnquoy.  17G6,  pour  le  frontispice  de  l'Oraison  funèbre 
prfïiioiicri''  iians  l'église  de  Paris,  le  1*'mars  17G6,  par  messire  Charles 
clr  Lonii' ni  u  de  Brlenne,  archevêque  de  Toulouse  ...         .      U 

ÏM  ï>AVPEi)x  i.T  KEs  ciNg  FiLs,  médaillou  du  (labinet  des  Médailles.         .       11^ 

Vifjttfiîcs  1*1  t'itls-de-tampendu  XVIIt*  tiède.—  Roisappartcuontà  M.  Paul 
Duchi  min,  imprimeur  A  Sens    ...        18, 19,  52.  71,  103,  134,  171 

I^  MoriT  iii'  Dauphin.  Dessin  de  Schenou  et  gravure  de  Littret.  24 

PoMi'ii  Fi  ^tiiiin  de  Morie-Thérèse  d'Espagne,  Dauphlne  de  France,  en 
l'éf^ilKe  f1f^  Notre-Dame  de  Paris,  le  24  novembre  1746.  Composition 
de  SlotU/,  dessin  et  gravure  de  Ch.  N.  Cochin  le  flls        ...      33 

G£ni£s  t'LKi  iui4T  ET  GLORIFIANT  LA  Dauphinb,  dessin  de  C.  N.  Cochin, 
gnivuri'  11,  L.  Prévost  pour  la  Dexcription  du  Mausolée  de  Marie- 
ifûsï'phr  th'  Saxe,  fait  A  Paris  dans  l'église  de  Notre-Dame,  le  3 
sepli^inhiT  1767 2j 

PoiiTitJViT  UE  LA  Dauphins,  pastel  de  1^  Tour,  au  Musée  du  I»uvre    .       40 

Le  MAtîsnii  k^  ensemble 4* 

PoEiTiiAiT  tiK  LA  Dauphine,  pcinturc  par  Fredou,  reproduisant  le  por- 
tniil  CfuiMTvé  A  la  préfecture  d'Agcn  attribué  h  Nottier.  Don  du 
roi  Louis  XV  au  Chopitre  de  Sens,  en  1773 .'J 

|j^  Motn  iiE  LA  Daupiiink.  Allégorie.  Dessin  de  C.  N.  Cochin,  gravure 
(ie  IÎh  L,  Prévost,  pour  la  Description  du  Mausolée.  La  Dauphine 
éploréir^  iiKilgré  les  appels  de  ses  enfants,  se  Jette  sur  le  lit  funèbre 
au  iiifd  lUtquel  est  assise  la  France  et  où  reposent  le  Dauphin  et 
]e  tint.-  tU*  lïourgogne 53 

1^  MoitT  m  ]>AUPHiN  KT  DE  LA  Dauphine,  modèlcs  par  Dupaquet.  de 
deux  lU's  niédnillons  destinés  à  la  porte  Dauphine.        ...      GO 

I,A  MonT  DE  LA  Dauphine.  Allégorie.  Dessin  et  gravure  de  Littret.        .      Cô 

AKïiiiS  pi.ci  riËLUS.  Dessin  de  C.  N.  Cochin  gravure  de  B.  L,  Prévost, 
pour  rOrnlson  funèbre  du  Dauphin,  par  Loménie  de  Brienne    .      72 
Inin^ortiiîitét  la  Hcligion,  le  Génie  des  Arts,  détails  du  Mausolée  Hl 

|je  Tr'iups.  I  Amour  Conjugal,  l'Hymen,  détails  du  Mausolée       .        .      ^> 

AuMomifcs  m  Dauphin,  grovécs  pour  l'Oraison  funèbre  du  Dauphin, 
pnclifi'  (c  22  jonvier  1766,  dans  l'église  des  Capucines  de  Paris,  par 
U*  H.  P.  Tidèle,  de  Pau,  A  Paris,  chez  Vente,  libraire.  Montagne 
Sairtti'-ru-neviève,  1766 

Le  lÎAt  iMiis  ET  LA  Dauphine,  camée  par  Jacques  Guay.  au  Cabinet  des 

Méildiïic* 113 

Le  CTiŒtni  nv.  i.a  Catuédrale  i>k  Srns,  ovcc  le  Mausolée,  dessin  d'uprès 
nature  ol  iïthogniphic  par  Ikiclielicr 144 

La   Poiiis  Dai  PHLNE,  en   1880 231 


LE   DOCTEUR  GASTELLIER 

PLUSIEURS   DE   SES   MÉMOIRES 
ÉCRITS    DANS   LA   PRISON   DE   SENS   EN   l'aN    II 

(1793-1794) 


AVANT-PROPOS 


Comme  Sénonais  et  comme  médecin,  je  désire 
donner  à  mes  compatriotes  et  à  mes  confrères,  les 
moyens  de  faire  connaissance  avec  le  doctenr 
René-Georges  Gastellier,  dont  on  trouve  plusieurs 
ouvrages  aux  bibliothèques  de  Sens,  d'Auxerre  et 
de  Montargis,  et  dont  je  possède  trois  intéressantes 
brochures. 

Je  n'ai  ni  l'intention  ni  les  moyens  décrire  la 
biographie  complète  de  Gastellier,  qui  avait  près 
de  cinquante-deux  ans  lorsqu'il  quitta  Montargis, 
et  qui  n'est  resté  que  quelques  années  à  Sens  ;  cette 
élude  sera  particulièrement  consacrée  à  son  séjour 
dans  notre  ville;  il  m'a  paru  toutefois  nécessaire 
d'indiquer  sommairement,  ce  qu'il  fit  avant  son 
arrivée,  et  je  n*ai  pas  voulu  le  perdre  complètement 
de  vue  après  son  départ. 

10> 


I 


gastelijhh  a  montargis 

GaHttlIier  René-Georges,  fils  de  Georges  Gastd* 
lier  vi  de  Mmguerile  Gîislellier,  «ion  épouse,  csl  né 
à  FcrricrcsHn4tàlinaîs*  le  l**"^  octobre  174L 

De  bïïiiiie  Iiuiiie,  il  iiionlra  mu-  vive  in  tel  licence 
et  un  ardent  amour  du  travaiL  Ayant  étudié  le 
droit,  il  fut  reçu  avocat  au  Parlement  de  Vnm\ 
sVMiuit  tait,  en  nulre/înscrire,  le  23  novembre  1762, 
sur  les  registres  de  la  Faculté  de  médecine  de 
Paris,  il  obtint  au  houL  de  quelques  années  le  titre 
de  docteur,  II  s*altacha  surtout  à  Fart  de  guérir  et 
s  installa  eomuie  médecin  a  Montargis. 

Les  occupations  de  la  clieidéle  ne  suffisaient  pas 
à  son  uclivilé;  voulant  faire  proliter  de  sou  expé- 
rience ses  concitoyens  et  ses  confrères,  peut-être 
aussi  poussé  par  le  besoin  d'écrire  et  par  le  désir 
de  se  faire  cotmaître»  il  publia,  de  1770  à  181î>(c*est 
à-dire  de  Tage  de  vingt-neuf  aus  a  celui  de  soixante- 
dix-buH),  de  uondjieitx  ouvrages,  donl  plusieurs 
furent  couronnés  par  la  Société  royale  de  méde- 
cine. Ses  écrits,  dont  on  trouvera  une  longue  liste  à 
la  suite  de  celle  étude,  se  rapportent  les  uns  à  h 
pnliti(jue  et  les  autres,  en  plus  grand  nombre,  à  la 
médecine  et  aux  sciences  et  plus  parlîcnliéremenl 
aux  maladies  épîdémitiucs,  ù  la  Oévre  miliaîre  et 
aux  afîecliuns  des  femmes  en  coucbes* 

Nous  nous  nrrèterons  seulenieul  quelques instunU 
sur  son  curieux  Traité  des  Hprd/ifjnes  en  mé(^ecin€^ 
1783,  dédié  a  Franklin,  alors  ministre  pléuipoten 


—  251  — 

tiaire  des  Etats-Unis  à  la  cour  de  France.  Cet  ou- 
vrage (1),  auquel  TAcadémie  de  Dijon  refusa  de 
décerner  un  prix,  parce  qu'il  émettait  des  îdt^es 
contraires  à  celles  généralement  admises^  fut  ac- 
cueilli avec  empressement  par  la  Société  royale  de 
médecine,  qui,  sur  le  rapport  présenté  le  9  aoiïE 
1782,  le  reconnut  digne  de  son  approbation  et  d'être 
imprimé  sous  son   privilège  (2).  Gastellier,  s  ap- 
puyant sur  les  observations  et  les  réflexions  qu'a vn il 
pu  lui  fournir  son  expérience,  concluait  que  pai* 
suite  de  a  la  diversité  des  constitutions  individuel- 
«  les,  ï  «  il  n'y  a  point  en  médecine  de  vrais  spé- 
«  cifiques,  »  car  «:  la  vraie  méthode  de  guérir,  di- 
«t  sait-il,  est  de  n'en  avoir  aucune,  tout  l'art  con- 
I  siste  dans  la  vraie  application  des  moyens  cura- 
d  tifs,  dans  la  manière  de  les  appliquer  aux  circon- 
i  stances.  ^  Ce  n'est  pas  sans  une  certaine  surprise 
que  Ion  voit  comment  il  énonçait,  près  d'un  siècle 
avant  le  docteur  Gavarret,  la  théorie  de  la  chaleur 
et  du  mouvement  :  a  Le  feu  élémentaire,  écrivall-il, 
€  semble  être  dans  la  nature  le  principe  de  Tactivi  te  ; 
0  il  est  pour  ainsi  dire  un  levain  fécond  qui  met  en 
i  fermentation  la  masse  et  lui   donne   la  vie.    ï» 
iTraité  des  spécifiques,  page  33.) 
Nous  ne  voulons  pas  nous  attarder  davantage 


if^-i 


(1 1  Se  trouve  aux  bU)Uothèques  de  Sons  et  de  Montnrgis. 

(2)  Le  docteur  FrankUn,  ayant  entendu  ce  rapport,  Thonora  de  son  suf- 
frage el  de  la  manière  la  plus  flatteuse;  peu  de  jours  après,  il  adrcssii  à 
lautcur  (le  ce  traité  un  diplôme  d'associé  étranger  de  la  Société  pliilnsii- 
phique  de  Philadelphie  et  une  lettre  de  félicitations,  aussi  (îastcllit^r  lui 
dédia-t-il  son  ouvrage  pnr  reconnaissance.  (Voir  Sotice  chronique  tir  mes 
otwrage»,  Î8i6.j 


I 


—  252  — 

sur  les  œuvres  de  Gastellier,  dont  la  lecture  fait 
reconnaître  des  idées  larges  et  un  esprit  judicieux. 
Nous  jellernns  un  coup  d*œil  rapide  sur  son  séjour 
à  Mf)nlnr|Tis,  où  il  se  créa  une  importante  situation, 
lanl  [Kir  sou  l;ilent  et  son  activité,  que  par  sa  bonté 
et  8011  dévouement  au  bien  public,  et  nous  dirons 
quelques  mots  liu  médecin,  du  savant  et  de 
riioiiunu  pi)Iilîcjiic. 

(iaskllitr,  qui  fut  depuis  1770  employé  pour  les 
tnahidies  épidémiques  et  épîzootiques  et  qui  était 
médecin  du  duc  d'Orléans,  fut  nommé,  en  1775,  à 
riiôlel-Dieu  el  a  lliospice  général  pour  les  orphe- 
lines, et,  malgré  ses  occupations  comme  maire,  à 
parlii-  de  1782,  il  donna  ses  soins  aux  malades  de 
ces  établissenienls  et  à  ceux  des  prisons  jusqu'à  sa 
nominal  ion  coin  me  député  du  Loiret  à  TAsseîTiblée 
législalivu,  vu  se|>lembre  1791;  médecin  du  bureau 
de  eharilé  depuis  le  7  mai  1776,  il  soigna  également 
les  pauvi  es  avec  la  j)lus  grande  assiduité,  et  lors  de 
la  disette  de  l'hiver  de  1781-1785,  il  parvint,  avec 
le  secours  de  ses  enllégues  et  celui  des  âmes  chari- 
tables, a  iinurrii'  el  à  chauffer  pendant  six  semaines 
plus  de  douze  cents  personnes. 

(le  travail  leur  infatigable  trouvait  encore  le 
temps  de  s'occuper  des  diverses  questions  scientifi- 
ques cjui  îiitéressaîenl  son  pays,  il  fut  associé  regni- 
cole,  puis  munilire  de  la  Société  royale  de  médecine 
de  Paris,  ass<Kié  non  résident,  puis  membre  de  la 
Société  royale  d'agriculture  d'Orléans  et  associé 
corresi>uiuiaul  de  F  Académie  des  sciences,  arts  et 
belles-lelties  de  Dijon;  il  avait  été,  en  1776,  chargé 


Société  Archéologique  de  Sens.  T.  xxii. 


PI. 


Le    Docteur  REnÉ-QEOROES   Gf^STELLIER 

Mûïfe  de  Montariîis 

Députa    à   t'n^ïcmbiét"    léfllslutivc 

M^d^dn  àci  Hoïpirc»  de  5cîi!i 

174]'lS2l 


_  253  — 

par  Turgot  de  faire  un  rapport  sur  Tétat  agricole 
et  commercial  du  Gâtinais,  rapport  qui  lui  valut 
une  lettre  de  félicitatîon  du  ministre. 

Maire  de  Montargis,  du  29  mars  1782  au  20  sep- 
tembre 1791,  il  s'opposa,  peu  de  temps  après  son 
entrée  en  fonctions,  à  ce  qu'un  nouveau  rôle  des 
vingtièmes,  fait  sur  l'ordre  de  Tintendant  sous  le 
prétexte  spécieux  de  mutations,  fût  rendu  exécu- 
loire,  et  évita  à  la  commune  de  Montargis  la  charge 
de  cet  impôt  arbitraire;  plus  tard,  en  1785,  il  alla 
à  Paris  pour  se  plaindre  des  rigueurs  du  receveur 
des  tailles  et  obtint  un  ordre  qui  y  mit  fin,  et  en  1787, 
nommé,  malgré  l'intendant,  membre  de  l'Assemblée 
provinciale  d'Orléans,  il  défendit  les  intérêts  du 
peuple  et  combattit  encore  les  abus  des  impôts  et 
particulièrement  ceux  des  vingtièmes  (1).  En  1788, 
il  organisa  une  maison  philanthropique,  grâce  à 
laquelle  il  parvint  à  éteindre  la  mendicité.  En  1789, 
il  s'occupa  activement  d'approvisionner  Montargis 
et  les  communes  voisines  menacées  de  disette;  il 
rédigea  alors  un  projet  de  police  générale  sur  les 
grains,  projet  qui  fut  adressé  à  l'Assemblée  consti- 
tuante, et  qui  fut  plus  tard  adopté  parla  Convention 
presque  sans  modifications.  En  outre,  malgré  ses 
nombreuses  et  diverses  occupations,  il  présida 
pendant  deux  ans  (1769  à  1791)  le  bureau  de  con- 
ciliation, où  il  put  prévenir  de  nombreux  procès. 

Les  services  qu'il  rendit  ainsi  le  firent  nommer 


i 


(It  Ces  diflerents  renseignements  sonl  exlraits  de  la  lettre  de  Gastellier 
nui  fiioycns  composnn!^  là  Sciciêté  révolutionnaire  de  la  commune  de 


L 


À 


—  254  — 

électeur  à  trois  reprises  difTérentes,  président  des 
AssembliTS  générales  de  la  municipalité,  du  canton 
et  du  dîsUict,  et  enfin  député  du  département  du 
Loiret  à  TAssemblée  législative,  le  premier  sur 
neuf  membres  composant  la  députation. 

Dans  cette  Assemblée,  où  il  trouva  vingt-six 
confrères,  Gastellier  siégea  à  droite  et  se  fit  remar- 
quer par  sa  loyauté;  il  fit  partie,  ainsi  que  son 
compatriote  Tenon  (1),  du  Comité  de  secours  pu- 
blics qui  comprenait  dix  médecins  sur  vingt-quatre 
membres. 

Dans  la  séance  du  20  avril  1792,  Louis  XVI  étant 
venu  proposer  à  l'Assemblée  nationale  la  guerre 
contre  le  roi  de  Hongrie  et  de  Bohême,  Gastellier 
donne  j)nur  les  frais  de  cette  guerre  cinq  médailles 
d'or  (ju  il  avait  reçues  en  récompense  de  ses  tra- 
vaux et  quatre-vingts  jetons  d'argent  (Moniteur  1792, 
page  il  IV  11  proteste  le  11  juillet  contre  les  pétition- 
naires piuisiens  proposant  de  mettre  Lafayette  en 
accusation,  et  de  réintégrer  Pétion  et  Manuel  dans 
leurs  fonctions  municipales  :  a  Quatre -vingt  deux 
départements,  dit-il,  ne  nous  ont  pas  envoyés  pour 
que  le  quatre-vingt-troisième  usurpe  tout  notre 
temps,  r>  (Chronique  médicale  du  30  mars  1902.)  11 
est  enfin  un  des  premiers  à  prêter,  dès  le  matin,  le 
serment  prescrit  par  le  décret  du  10  août  et  conçu 


n  ï  TiMum  riicqucs-Honé,  nt^  n  Sépeaux,  près  Joigny,  le  21  février  1724. 
*ii?fi'fli'  Il  l'sii  ih^  rue  (lu  Jardinet,  n*  3,  le  13  jiinvier  181G,  fui  chinirgicn  ii  In 
Ssil|ïiHrîrre%  professeur  nu  Collège  de  Frnnce  et  membre  de  rinstitut;  il 
iiidiqtm,  **%i  ITîtB.  l'emplacement  de  riiApllal  qui  porte  aujourd'hui  Mtn 
nfîUi,  iiprès  s  élre  appelé  Ménilmontant. 


—  255  — 

en  ces  ternies  :  «  Au  nom  de  la  Nation,  je  jure  de 
«  maintenir  de  tout  mon  pouvoir  la  liberté  et 
<i  Tégalité,  ou  de  mourir  à  mon  poste.  i> 

Cependant,  Gastellier  avait  des  ennemis;  le  plus 
acharné  était  Manuel  (1),  qui,  dès  1791,  à  la  veille 
de  Touverture  de  l'assemblée  électorale,  lisait,  au 
club  des  jacobins  d'Orléans,  un  libellé  diiTamatoire 
contre  Gastellier,  ce  qui  n'empêcha  pas  ce  dernier 
(i'élre  nommé  président  de  l'assemblée  électorale, 
el  le  premier  de  la  députation  du  Loiret.  A  la  fin  de 
la  législature,  Manuel  poursuivant  de  plus  en  plus 
Gastellier  de  sa  haine,  l'accusa  d'être  un  représen- 
tant infidèle,  d'avoir  signé  des  protestations  contre 
les  décrets  de  l'Assemblée  législative,  d'avoir  écrit 
une  lettre  au  roi  et  à  la  reine,  et  enfin  d'être  sur  la 
liste  civile  ;  il  fit  imprimer  une  fausse  liste  civile  où 
le  nom  du  député  était  inscrit  en  toutes  lettres,  et 
la  répandit  dans  tous  les  départements  et  tout 
spécialement  à  Montargis.  Aussi  Gastellier,  informé 
de  ces  manœuvres  et  de  l'irritation  de  ses  conci- 
toyens (2),  crut-il  qu'il  était  plus  sage  de  s'éloigner 
d'une  ville  où  il  serait  devenu  un  sujet  de  discorde, 
et  se  délermina-1-il  a  fixer  son  domicile  à  Sens  où 
il  était  connu,  et  où  déjà  il  avait  été  appelé  à  voir 
des  malades. 

'1)  Manuel,  né  à  Montargis,  en  1751,  Ht  ses  études  nu  grand  séminaire  de 
Sens,  sous  la  direction  du  pèreMontault;  vers  la  fin  de  Tannée  scolaire  de 
1779  ou  de  1780,  étant  régent  du  collège  de  Noyers,  il  alla  voir  Buflbn  n 
Monlbard,  mais  ayant  crevé  son  cheval  de  louage,  dans  son  embarras  pour 
le  payer,  il  disparut  subitement  de  Noyers,  il  revint  ensuite  à  Montargis. 

{2,  4  Ma  tête,  écrivait  Gastellier,  a  été  mise  à  prix  dans  un  libellé  im- 
t  primé  et  répandu  à  profusion  à  l'Assemblée  législative  et  dans  mon  dé- 
t  paKemciit-  mon  iioiii  i»  élv  affiché  avec  l'épithète  de  Traître  à  la  Patrie, 


—  25(i  — 

Il  veut  toutefois  répondre  aux  accusations  diri- 
gées contre  lui,  et,  le  3  octobre  1792,  il  écrit  sa 
Troisième  et  dernière  Adresse  à  mes  concitoyens, 
dont  voici  le  résumé  : 

(liislellier  vient  d'apprendre  que  le  30  septembre, 
lors  de  lîi  prestation  solennelle  du  serment,  un 
citoyen  IMvait  déclaré  traître  à  la  patrie  et  que  ses 
concitoyens  ont  gardé  le  silence,  sans  songer  que 
le  nieiiu^  sort  les  attendait  peut-être.  En  présence 
d'une  telle  accusation,  il  réclame  d'être  jugé  avec  la 
pins  {grande  sévérité  si  Ton  peut  découvrir  dans  sa 
conduite  comme  homme  public  ou  comme  homme 
prive,  le  moindre  indice  de  trahison,  ou  même 
dlncivisnie.  Il  se  demande  à  lui-même  s'il  est  sur  la 
liste  civile,  s'il  a  eu  quelques  correspondances 
secrètes  avec  le  roi,  la  reine,  les-  ministres,  ou  avec 
les  puissances  étrangères,  les  émigrés  ou  quelques 
aiisloemles,  sMl  a  voté  contre  les  intérêts  de  la 
eliuse  publique,  contre  le  salut  public  ou  la  souve- 
ainelè  du  peuple,  s'il  a  promulgué  des  opinions 
eontriiires  aux  décrets  de  rAssemblée,  s'il  a  cherché 
a  soulever  les  esprits  contre  la  révolution,  enfin  s'il 
a  trahi  la  confiance  de  ses  commettants  :  à  toutes 
ces  questions,  il  répond  non. 

•  au  piliïH  tir  la  place  de  Montorgis  dont  j'nvnis  été  pendant  onze  ans 

m  Cinq  cm  si\  mauvais  sujets  que  ron  enivroit  visitaient  toutes  les  voilu- 

•  rcs  publiqui*?;  pour  m'y  prendre  et  me  couper  la  tête,  ce  qui  me  seniil 
f  Jnriiill!hh''ini'iiL  arrivé,  sans  le  tendre  intérêt  d*un  généreux  ciloyon 
t  (M*  iVlît,  ;uiqitel  je  voue  une  éternelle  reconnaissance),  qui  vint  ou- 
ïe ilc!v;ii)l  dr  Tiiri}  sur  la  route  pour  m'avertir  du  sort  qui  m'attendait.  • 
fErposi^  tii  tjia  conduite  active  comme  homme  public,  1816,  Bibliothèque  de 

MnnUirgts.) 


—  257  — 

On  a  fait  courir  le  bruit  qu'il  était  débiteur  envers 
la  ville  de  plus  de  30000  livres,  comme  si  un  maire 
maniait  les  deniers  de  la  ville  et  quoiqu'il  ait 
rendu  ses  comptes  et  que  ceux-ci  aient  été  impri- 
més et  examinés  par  les  directoires  du  département 
et  du  district,  et  par  le  conseil  général  de  la  com- 
mune. 

On  avait  aussi  prétendu  qu'il  était  émigré,  qu'il 
avait  emporté  à  l'étranger  pour  des  millions  d'assi- 
gnats et  qu'il  avait  été  pris  et  conduit  dans  les  pri- 
sons d'Orléans,  mais  sa  présence  à  Montargis  à 
cette  époque  (mai  1792),  montra  la  fausseté  de 
tous  ces  bruits  mis  en  circulation  par  la  perfidie  des 
méchants.  Du  reste,  le  ministre  Servan,  qui  avait 
dû  prendre  des  informations,  lui  donna  un  brevet 
de  médecin  militaire  à  l'armée  du  Rhin  ;  s'il  était 
coupable,  il  n'aurait  pas  refusé  cette  nomination 
qui  lui  eût  permis  d'émigrer  facilement,  il  n'aurait 
pas  préféré  revenir  dans  ses  foyers,  il  n'insisterait 
pas  enfin  pour  rentrer  au  milieu  de  ses  concitoyens, 
où  il  est  sûr  de  reconquérir  l'estime  et  la  confiance 
qu'il  n'a  jamais  déméritées. 

Malgré  l'envoi  de  cette  adresse  Gastellier  ne  crut 
pas  devoir,  pour  le  moment  du  moins,  retourner  à 
Montargis. 

GASTELLIER  A  SENS 

PREMIÈRE  ANNÉE  DE   SON   SÉJOUR  A  SENS 


Gastellier  ne  vint  pas  se  fixer  à  Sens  aussitôt  après 
la  bnisque  séparation  de  l'Assemblée  législative 
(21  septembre  1792);  c'est  de  Sens,  il  est  vrai,  et 

17 


I 


M 


à  la  dale  du  3  octobre  1792,  que,  pour  proltsti 
coulre  les  nccUHJilions  de  seii  ennemis,  i]  écTÎvtl  1., 
Troisième  et  demirrr  mhesne  à  mes  eomiUtfiens, 
niîiiïi  c'est  île  Xeniourn  qui!  envuie,  le  11  octobr! 
à  MM.  les  convinksajrcs  de  la  Coiivention  mitiomil 
dans  le  département  de  l'Yonne,  sêans  à  Sens,  un 
lettre,  dont  on  lira  avec  intérêt  les  pasïtage^  mi- 
vauts  (I)  : 

€  (jtovens. 

<  Quoitpie  souvent  partagé  d'opinion  avec  vous 
je  m'adresse  avec  confiance  aux  représentante  de  la 
nation,  pour  les  prier  d'éclairer  quelque^uns  de 
mes  compatriotes  égarés  «iur  mon  compte  ;  j'ai 
ihonneur,  en  consécjuence,  de  vous  envoyer  ci- 
inclus,  une  tioUiérne  et  derruére  adresse  que  jeteur 
ai  faite  et  d'après  la  lecture  de  laquelle,  je  vom 
prie  de  me  faire  une  répouî^e  cathé^tnicpie  à  toutes 
les  questions  que  je  me  suis  faites  à  moi-même.., 

€  Je  me  dispenserai  de  toute  espèce  de  réflexions. 
De  nouveaux  détails  deviendraient  des  ix*dites 
inutiles;  ils  send)leraieiit  faits  pour  toucher  votre 
sen&iliilité  en  faveur  d'un  père  de  famille,  dont  ou 
veut  à  la  fois  attaquer  F  honneur,  la  vie  et  les  pro- 
priétés; de  tels  moyens  ne  doivent  être  mis  i 
usaye  que  par  ceux  ([ui  sollicitent  leur  grâce  el  Hl  .. 
par  celui  qui  ne  demande  que  justice. 

<c  Recevez, citcïyens....*  B 

Lesconiniîssaires  de  la  Convention  s'empresscnl 
de  répondre  par  la  lettre  suivante,  qui  renseigna 


—  259  — 
sur  la  conduite  et  les  opinions  de  Tancien  député  (1). 

«  A  Sens,  le  14  octobre  Tan  le 
de  la  République. 
d  Citoyen  et  ancien  collègue,  la  diversité  d'opi- 
nions n'a  jamais  pu  altérer  les  sentiments  d'estime 
que  nous  ont  inspiré  la  pureté  de  vos  intentions  et 
la  sincérité  de  votre  civisme.  Comme  collègues, 
nous  pouvons  dire  avec  toute  vérité  que  vous  avez 
été  exact  à  votre  poste,  et  nous  ne  doutons  pas  que 
vos  opinions  n'ayent  été  le  résultat  de  votre  con- 
science, et  non  celui  d'une   influence   étrangère. 
Comme  membres  du  comité  fait  pour  veiller  à  la 
sùrelé  générale  de  la  République,  nous  assurons  que 
dans  toutes  les  recherches  et  les  découvertes  faites, 
que  dans  tous  les  faits  ou  renseignements  qui  sont 
parvenus  à  notre  connaissance,  nous  n'avons  point 
trouvé  la  trace,  le  moindre  indice  du  plus  léger 
soupçon  contre  vous,  en  conséquence,  nous  répon- 
dons à  toutes  vos  questions  affirmativement,  comme 
vous-même. 

«  Ne  perdez  point  courage,  cher  collègue,  la  vé- 
rité percera  les  nuages  épais  que  vos  ennemis  parti- 
culiers, ou  de  trop  ardents  zélateurs,  s'efforcent 
de  grossir  tous  les  jours.  Vos  concitoyens  seront 
forcés  de  rendre  justice  à  vos  talents  et  à  votre 
patriotisme.  Venez  voir,  si  le  temps  vous  le  per- 
met, d'anciens  collègues  qui  vous  estiment  et  vous 
chérissent. 


(1)  Affiches  de  Sens,  n*  du  23  octobre  1792. 


—  260  — 

fL  Les  ctnnniissaircs  de  la  Convention  nationale 
dans  le  département  de  l'Yonne, 

«  J„-S.  RovÈRE.  CL  Claude  Fauchet.  0 

On  ne  soupçonnerait  guère  à  la  lecture  ce  celle 
lettre,  que  l'homme  à  qui  elle  était  adressée  devait, 
un  an  après,  être  arrêté  comme  suspect  et  maintenu 
plus  de  huit  mois  en  prison.  Toutefois,  Gastellicr, 
rassuré  par  un  certificat  de  civisme  aussi  positif,  se 
décida  it  s  intaller  à  Sens,  où  l'appelait  du  reste  la 
note  suivante  du  rédacteur  des  Affiches  du  2")  oc- 
tobre :  <i  Le  citoyen  Gastellier,  docteur  en  médecine 
et  membre  de  plusieurs  académies  et  sociétés  hllé- 
raircs,  de  présent  à  Sens,  est,  dit-on,  encore  dans 
rincerlitude  d'y  fixer  son  séjour.  Un  grand  nombre 
de  citoyens  à  qui  ses  talents  sont  précieux,  ont  fait 
auprès  de  lui  plusieurs  démarches,  pour  l'engager  à 
s'y  étal)lir.  Nous  espérons  qu'elles  ne  seront  pas 
vaines,  et  si  le  dessein  de  ce  citoyen  estimable  n'est 
pas  de  rolourner  à  Montargis,  nous  avons  lieu  de 
croire  que  notre  ville  aura  la  préférence.  » 

Dès  lors  (iastellier  n'hésite  plus,  et  quelques  jours 
après,  il  répond  par  cette  lettre  qui  montre  com- 
bien il  est  toujours  préoccupé  des  attaques  de 
Maimel,  et  combien  il  tient  à  se  justifier  des  accu- 
sations portées  contre  lui  (1). 

a:  Le  9  novembre,  l'an  I^r  de  la 

République  française. 
•  Citoven, 

a  Sensible  aux  choses  infiniment  honnêtes  que 

vous  me  dites  dans  votre  feuille  du  25  octobre,  je  ne 

{1)  Affiche',  tfrSens,  10  novembre  1792. 


—  261  — 

crois  mieux  pouvoir  y  répondre  qu'en  vous  priant 
d'annoncer,  dans  celle  de  demain,  la  location  de 
ma  maison  à  Montargis,  ce  qui  sera  annoncer  en 
même  temps  à  vos  concitoyens,  que  je  m'empresse 
de  répondre  à  leur  aimable  invitation  et  à  la  vôtre. 
Je  m'empresserai  aussi  de  leur  témoigner  toute  ma 
gratitude  et  mon  dévouement,  non  par  de  vains 
discours,  mais  par  des  actions;  et  c'est  également 
par  mes  actions  que  je  viendrai  à  bout  d'effacer; 
avec  le  temps,  jusqu'aux  cicatrices  de  la  calom- 
nie que  l'on  s'efforce  de  répandre  dans  toutes  les 
parties  de  la  République  contre  la  pureté  de  mon 
civisme,  qui  n'a  jamais  été  équivoque.  Pas  un  seul 
mot  de  vrai,  dans  toutes  les  inculpations  dirigées 
contre  moi  aux  jacobins,  aussi,  a-t-on  passé  à  Tordre 
du  jour.  Au  surplus,  je  ne  cherche  pas  à  me  dé- 
fendre contre  ces  traits  empoisonnés  qui  ne  m'at- 
teindront jamais  ;  la  calomnie  est  un  titre  de  plus  à 
l'estime  des  homme  de  bien.  La  seule  réponse,  et 
la  dernière  que  je  veuille  faire  à  mes  détracteurs, 
est  une  longue  lettre  que  je  viens  de  recevoir  d'un 
membre  de  la  Convention  qui  a  été  à  portée,  à 
l'Assemblée  nationale  législative,  de  me  connaître 
et  de  méjuger. 

«  Paris,  le  4  novembre,  l'an  1er 
de  la  République. 
e  Mon  cher  confrère  et  ancien  collègue,  j'avais 
reçu  hier  la  lettre  par  laquelle  vous  m'informiez 
des  nouvelles  persécutions  dont  vous  êtes  l'objet, 
avant  de  recevoir  celle  par  laquelle  vous  m'annon- 
ciez l'heureux  effet  de  votre  troisième  adresse  à 


—  262  — 

vos  concitovcns,  et  de  la  lettre  de  Rovère  et  de 
Faiiclicl.    Je   m'empressai  de  chercher  ces    deux 
ciloyens  cl  ilc  les  engager  à  vous  rendre  à  nouveau 
Va  justice  ((lie  vous  méritez,  en  vous  procurant  de 
la  part  du  ( limité  de  sûreté  générale  un  certificat 
qui  atteste  la  fausseté  de  la  liste  que  vos  ennemis 
ont  eu  la  perfidie  de  taire  réimprimer  pour  y  ajou- 
ter votre  nom,  qui  ne  devait  s*y  trouver  sous  aucun 
rapport.  F:iuchet  a  mis  le  plus  grand  zèle  à  vous 
fournir   le   moyen  de  répondre  à  cette  nouvelle 
calomnie,  il  a  obtenu  du  Comité  de  sûreté  générale 
le  certificat  que  vous  êtes  en  droit  de  réclamer  et 
il  Ta  adressé  aujourd'hui  au  Directoire  du  déparle- 
ment du  Loiret,  conformément  à  la  demande  que 
vous  hii  en  avez  faite  (1).  Je  pense  que  vos  conci- 
toyens, convaincus  par  le  certificat  irrécusable  de 
votre  inncîeence  et  de  l'acharnement  de  vos  enne- 
mis à  vous  persécuter,  sauront  désormais  les  appré- 
cier e!  (|ue  la  calomnie,  contre  vous,  ne  fera  plus 
d'impression  sur  leur  esprit.  La  vertu  triomphe  tôt 
ou  lard  de  la  perversité  ;  ce  moment  est  arrivé  pour 
vous,  il  n'est  pas  possible  que  les  citoyens  de  Mon- 
targis,  reconnaissant  la  fausseté  et  la  perfidie  de  la 
dernière  inculpation  que  vous  a  faite,  n'en  concluent 

(1)  Ckiitifktat  du  Comité  de  sûreté  générale  : 

1^1-  r,fïmiU'  ïif  srtrclé  gi^nérnle  nUesle  que  clans  lous  les  papiers  de  la  lislp 
eivile  c|Ul  nnl  iHi-  aoumis  à  son  examen,  le  citoyen  Oastellier,  ancien  mcm- 
bff  Uc  rAsseiiil>lée  législative,  n*es!  nullement  compromis. 

Au  rouillé  di-  si'ireté  génénile  «le  la  Convention  nationale,  le  A  novrni- 
bn*  17192,  l'nn  1^  de  la  Hriiubllqiie  Trançaise. 
Signe  :    IIÉnAi  Lt,  préaident:   Claude  Kaichet,  Kngrand,  J.-M.    Missft. 

Ltcoi^TitE,  PïiVRAVAi'x,  RovÉRK,  RiAMP,  DupRAT,  Daurére,   vicc  préit- 

dfnt;  Jarcosï,  setrétaire. 


—  263  —  • 

avec  raison,  que  toutes  les  autres  avaient  été  dictées 
par  le  même  esprit  de  méchanceté  la  plus  noire? 
Cet  espoir  me  flatte  et  répond  aux  vœux  sincères 
que  je  fais  pour  votre  bonheur. 

a  Jard  Panvuxer  (1).  » 

En  quittant  Montargis,  Gastellier  abandonnait 
une  vaste  maison,  située  rue  du  Bon-Guillaume,  et 
consistant  en  vestibule,  salon,  salle  à  manger,  cui- 
sine, quatre  chambres  à  feu,  trois  chambres  sans 
cheminée,  écurie,  remise,  etc.,  et  près  de  la  maison» 
superbe  jardin  de  trois  quartiers,  entouré  de  murs. 
Il  ne  fut  certainement  pas  aussi  grandement  logé  à 
Sens;  en  tous  cas,  il  habita  d'abord  rue  des  Trois- 
Croissants,  puis  rue  des  Ïrois-Rois  (rue  qui,  avec 
la  rue  du  Cerf-Couronné,  prit,  en  1793,  le  nom  de 
rue  de  la  Loi,  et  qui  s'appelle  maintenant  rue  Allix), 
enfin,  en  1796,  rue  de  la  Charonnerie  (rue  de  Laii- 
rencin),  et  place  Drappès,  c'est-à-dire  probable- 
ment au  coin  de  cette  rue  et  de  cette  place. 

L'ancien  maire  de  Montargis  s'était  trop  occupé 
de  politique  pour  se  tenir  complètement  à  l'écart; 
du  reste,  il  voulait  par  ses  actions  effacer  les  traces 
de  la  calomnie  et  s'il  n'avait  pas  donné  des  preuves 
de  son  civisme,  il  eût  offert  trop  facilement  prise 
aux  calomnies  de  ses  ennemis. 

Peu  de  Jours  après  son  arrivée  à  Sens,  il  est  invité 


(Il  I^  docteur  Jard-PanvUler  Louls-Alcxandre,  né  à  Niort,  en  H.V.ï,  fiJs 
d'un  chiruiigicn,  maire  de  Niort  en  1790,  député  des  Deux-Sévres  n  lAs- 
Minhiée  nationale,  membre  de  la  Convention,  où  il  a  voté  contre  la  ninrl 
(IcI^uis  XVI,  fut  plus  tard  run  des  présidents  de  In  Cour  des  conjptrs; 
il  mourut  à  Paris,  en  avril  1822. 


_  264  — 

à  deux  banquets  offerts  aux  deux  représentants  du 
pLii|)le,  commissaires  du  département,  Rovère  cl 
Fauchel,  qui  avaient  été  ses  collègues  à  rAssemblée 
k'gislativc.  Dans  une  séance  publique  de  la  Société 
fraternelle,  qui  suivit  un  de  ces  banquets,  il  est,  sur 
une  liste  de  seize  candidats,  admis  à  Tunaniniité 
membre  de  cette  Société  (1).  Il  se  fit  «  un  devoir 
d'assister  avec  exactitude  aux  séances  (de  la  So- 
ciété), auxquelles  un  cruel  accident  le  força  de 
reiioneer  pour  un  temps,  une  chute  de  cheval  sur 
la  glace,  au  mois  de  janvier,  qui  lui  fractura  les 
deux  os  de  la  jambe  droite  ;  cette  fracture  le  retint 
deux  mois  entiers,  et  il  fut  encore  plus  longtemps 
à  ne  niaichcr  qu'en  tremblant,  à  Taide  de  deux 
béquilles,  ce  qui  lui  occasionna  une  absence  d  en- 
viron cinq  mois.  A  celte  époque,  la  Société  procéda 
a  un  scinilin  épuratoire  et  il  fut  du  nombre  des 
rurorjviés,  parce  que,  disail-on,  on  avait  imaginé 
qu  il  y  avait  eu  de  sa  part  indifférence  et  même 
insouciance,  tandis  que  c'était  uniquement  impos- 
sil)itilé  physique,  et  on  Tavait  jugé  ainsi  parce  qu'on 
Tavait  aperçu  traîner  dans  les  rues;  en  effet,  com- 
mandé par  le  besoin  d'être  utile  à  ses  concitoyens, 
il  visitait  quelques  malades  dont  le  nombre  s'ac- 
croissait chaque  jour,  au  point  que  ses  forces  ne 
ptnu aient  plus  y  suffire.  En  outre,  il  fut  obligé  de 
donner  ses  soins  à  une  épidémie  affreuse  qui  déso- 


{!)  Li?s  lïoms  iïc  Socic>té  fralernoUe.  Société  patriotique.  Société  popu- 
lain-,  Socii'U"  ivvolutiomiuire,  que  l'on  rencontre  successivemenl,  doivenl 
&*apjj|iqutT  II  Ui  même  Société;  le  musée  de  Sens  possède  le  scenu  de  la 
&(>citaéptttriiHlqi<e  de  hi  vlUe  de  Sens. 


—  265  — 

lait  plusieurs  communes  circonvoisines;  telle  est 
l'unique  raison  qui  Tempêcha,  pour  Tinstanl,  de 
faire  des  démarches  pour  rentrer  dans  la  Société, 
aux  séances  de  laquelle  il  lui  était  physiquement 
impossible  d'assister;  il  attendait  un  temps  plus 
opportun,  où,  plus  libre,  il  puisse  fraterniser  avec 
autant  d'assiduité  que  de  plaisir.  »  (Extrait  de  son 
adresse  aux  citoyens  composant  la  Société  révolu- 
tionnaire de  la  commune  de  Sens.) 

Si  Gastellier  exerçait  sa  profession  de  médecin 
pour  être  utile  aux  Sénonais  qui  avaient  sollicité  sa 
venue  dans  leur  ville,  c'était  aussi  pour  subvenir 
aux  besoins  de  sa  famille;  car,  outre  sa  femme  et 
deux  enfants  (1),  il  avait  deux  sœurs.  Tune  infirme 
demeurant  avec  lui,  qui  mourut  le  17  décem- 
bre 1797,  et  une  autre,  restée  veuve  avec  deux 
enfants  et  dans  la  plus  grande  indigence,  lui-même 
ayant,  suivant  sa  propre  expression,  plus  de  dettes 
que  de  bien.  Il  faisait  de  fréquentes  visites  à  la  cam- 
pagne, et  de  plus,  il  alla  plusieurs  fois  à  Mon- 
targis  et  aux  environs  pour  y  voir  des  malades  ;  les 
instances  les  plus  pressantes  lui  furent  même  faites 
pour  y  retourner,  et  il  fut  accueilli  avec  la  plus 
tendre  sollicitude  par  ses  anciens  concitoyens,  tan- 
dis que  Manuel  faillit  succomber  sous  leurs  coups. 

Il  s'intéressait  surtout  aux  cultivateurs.  Il  publie 
dans  les  Affiches  de  Sens  du  10  juillet  1793,  une 
note  sur  la  santé,  pour  prémunir  ses  concitoyens 


il)  Il  avait  épousé  Mnrie-Annc  Gasant  de  la  Bénardière;  Tune  de  leurs 
enfants.  Félicité-Antoinette-Louise,  fut  baptisée,  à  Montargis,  le  5  avril  1779. 


#^ 


îëïïx  banquets  offerb  aux  deuK  ! 
peuple,  commissnircs  du  depar 
Fimchet  ijui  av;iienl  eleHevcullèfl 
le«islaUve.  Dans  une  séanee  pablj 
rnUemellc,  qui  suivil  un  de  ces  hn 
une  lÎHte  de  seize  caiididab,  adm^ 
nienibre  de  celte  Société  (Ik  II  «êJ 
d'iissiskT  avec  exactitude  aui  sw^ai 
ciélë)*  auxquelles^  un  rruel  acn 
renoncer  pour  nii  lemp«,  une  chab 
la  glace,  au  nioiv  de  janvier,  qui 
lieux  os  de  la  jambe  droite;  celte  fi 
deux  mois  en  tiens,  el  il  fut  encnre 
à  ne  marcher  qu  en  tremblanl,  h  ' 
béquilles,  ce  qui  lui  oceasifiinia  um 
viron  cinq  mois,  A  celle  époque,  la  S 
a  un  scruiin  épura  taire  et  H  fui  i 
réfoniîés,  parce  que,  diMiiKon,  04 
qu  il  y  avait  vu  de  m  part  îfidîl! 
insoucîancei  tandis  que  r  était  un 
sibilité  jdiVîiique.  et  i«»   '        -       * 
I  avait  aperçu  Irainci 
mandé  par  te  besoîfi 
il  vissilnil  (|(ielqti' 
croissait  chaifuc  * 


-il- 


r  û 


^^ 


—  267  — 

débute  par  une  étude  de  la  topographie  de  Cerisiers, 
bourg  assez  considérable  contenant  environ  1 600  in- 
dividus, dont  la  moitié  dans  dix-huit  écarts  ou 
hameaux.  Il  rappelle  Taffreuse  inondation  du  5  sep- 
tembre 1736,  où,  à  la  suite  d'un  orage,  les  eaux 
s'étaient  élevées  à  trente  pieds  de  hauteur,  ce  qui 
causa  de  terribles  désastres  racontés  dans  une  rela- 
tion, certifiée  par  le  citoyen  Lhermitte  de  Chamber- 
Irand,  alors  lieutenant  général  à  Sens.  Puis  il 
s'occupe  de  la  source  apparue  le  27  février  1793, 
que  Ton  accusa  d'être  la  cause  de  Tépidémie  surve- 
nue peu  après,  car  a  on  calomnie  parfois  la  bienfai- 
sance en  tout  genre,  i^  mais  qu'il  considère  comme 
devant  être  une  cause  de  prospérité  pour  le  pays. 

Cette  maladie,  qu'il  attribue  aux  chaleurs  torrides 
de  l'été  de  1793,  succédant  à  une  année  humide  et 
pluvieuse,  ainsi  qu'à  la  malpropreté,  à  la  mauvaise 
manière  de  vivre  et  à  la  position  du  bourg  qui  a  été 
particulièrement  atteint,  était  une  fièvre  intermit- 
tente; cette  affection,  généralement  bénigne  par 
elle-même,  dégénérait  en  fièvres  putrides,  en  fiè- 
vres malignes  et  en  hydropisies  lorsqu'elle  était 
mal  soignée,  surtout  lorsqu'on  s'était  adressé  aux 
charlatans,  dont  le  plus  célèbre  était  Brissot,  an- 
cien berger  d'Egriselles.  Toutefois  elle  n'était  pas 
contagieuse,  elle  n'atteignit  que  les  habitants  du 
pays  et  épargna  les  étrangers,  notamment  deux 
ministres  du  culte  venus  de  Sens  pour  suppléer  le 
curé,  trois  médecins  habituellement  au  milieu  des 
malades,  des  gardes  et  des  parents  qui  leur  don- 
naient des  soins  nuit  et  jour. 


m 


II 


—  208  — 

Lors  de  ses  premî<!^res  visites,  avec  les  ciloyei 
Agaust  père  et  fi  h,  ofllciei-s  de  santé,  Gnstcllicr  ! 
trouva  eu  présence  du  spectacle  le  plus  affreux  J 
plus  déchirant,  le  plus  digne  de  corn pnss ion  qu 
eût  jamais  vu  depuis  plus  de  trente  ans  de  pnil 
que  :  il  trouva  jusqu'à  neuf  malades  dans  U  mên 
maison,  il  yen  avait  trois  cent  trente-trois  dansi 
bourgel  soîxïuitt-qtialorzc  dans  lesluuiieaux,  vinp 
cinq  dijà  avaient  succombe  depuis  le  U  aoùl  ; 
nonilne  des  décès,  pour  celle  épidémie,  s  est  cle^ 
à  quatre-vingts  pour  le  hourg  de  Cerisiers  et  à  viu 
pour  les  hameaux. 

A  Vaumorl,  sur  trois  cents  hahîtanls,  le  chitli 
des  nudadcs,  qui  était  de  ecul  vingt,  le  11  seplcii 
bre,  lors  de  la  première  visite  générale  de  Gastellie 
est  monté  à  cent  quarante-six,  c'est-à-dire  moitié  c 
la  population,  et  il  y  a  en  douze  morts, 

I /épidémie  fut  encore  moins  viole ji te  à  Theîl  c 
il  n*y  eut  qu*un  tiers  des  habitants  atteints  :  cei 
oiixe  sur  trois  cent  trente  et  cinq  décès;  du  rest 
grâce  H  ta  terreur  que  la  municipalité  et  le  cui 
avaient  drt  inspirer  aux  charlatans,  ceux-ci  n*: 
valent  guère  pu  exercer  leur  intluence  dans  i 
village. 

Gastellîer,  qui  dénonça  le  mal  causé  par  ces  fei 
esc  u  lapes,  se  loue  au  contraire  de  Taide  que  lui  o 
donnée  les  eu  les  des  trois  paroisses;  ceux-cî  o 
fait  preuve  du  plus  grand  zèle  et  du  plus  grai 
dévouement  ;  avant  même  que  1  administrnlic 
départemenkile  cul  envoyé  des  secours,  ils  avuie 
fourni  du  vin  et  du  bouillon  aux  malades,  et  * 


—  269  — 

comme  les  deux  autres,  le  curé  de  Cerisiers  n'ac- 
compagnait pas  le  médecin  dans  ses  visites,  c'est 
qu'il  a  été  lui-même  gravement  atteint  et  qu'il  a 
failli  succomber  à  plusieurs  rechutes;  et  au  moment 
où  Gastellier  terminait  son  mémoire,  il  était  encore 
appelé  auprès  du  curé  de  Cerisiers,  pour  lui  donner 
des  secours,  qu'il  eut  le  regret  de  ne  pouvoir  lui 
porter  par  suite  de  sa  réclusion. 

C'est,  en  effet,  dans  la  maison  de  détention  que 
le  médecin,  à  la  longue  expérience  et  au  dévoue- 
ment éprouvés  de  qui  l'administration  départemen- 
tale avait  fait  appel,  écrivit  cette  histoire  d'une  épi- 
démie contre  laquelle  il  avait  lutté  pendant  plus  de 
deux  mois  et  qu'il  avait  eu  la  joie  de  voir  cesser. 
Les  premières  lignes  de  son  rapport  contiennent 
une  allusion  aussi  certaine  que  discrète  à  cette 
situation  ;  elles  méritent  d'être  reproduites,  d'au- 
tant plus  qu'elles  montrent  l'élévation  et  la  fermeté 
des  sentiments  de  leur  auteur  : 

«  Servir  la  Patrie  quand  elle  nous  honore  de  sa 
confiance,  immoler  son  repos  à  ses  concitoyens 
quand  ils  rendent  justice  à  votre  zèle  n'est  pas  d'une 
vertu  bien  difficile.  L'honnête  homme,  le  bon 
citoyen  doit  faire  plus  encore  :  il  doit  vouloir  être 
utile,  lors  même  que  les  agents  subalternes  du  gou- 
vernement, soit  par  erreur  soit  par  méchanceté,  le 
privent  du  plus  sacré  de  ses  droits  :  de  sa  liberté.  > 

Comme  pour  accentuer  encore  le  contraste,  le 
président  de  l'administration  départementale,  le 
citoyen  Housset,  adressait  au  prisonnier  une  lettre 
de  félicitations,  et,  rendant  la  plus  entière  justice  à 


n 


—  270  — 

ses  talents,  il  Tinvitait  à  donnera  son  mémoire  la 
plus  grande  publicité  pour  confondre  le  charlata- 
nisme, et  rendre  à  Fart  de  guérir  sa  véritable  di- 
gnité. (6  pluviôse  an  II,  25  janvier  179iJ 

DÉTENTION  DE  GASTELLIER 

Ici  se  pose  la  question  de  savoir  à  quel  moment 
Gastellier  fut  arrêté  :  il  est  difficile  d'y  répondre 
avec  précision,  d'autant  plus  que  les  registres 
d'écrou,  conservés  à  la  prison  de  Sens,  ne  commen- 
cent qu'au  1'*"  vendémiaire  an  III,  et  ne  concernent 
que  la  prison  ordinaire  ;  il  est,  néanmoins,  possible 
d'indiquer  cette  date  d'une  façon  approximative  à 
l'aide  de  certains  rapprochements,  et  un  coup  d'œil 
jeté,  à  cet  effet,  sur  les  événements  qui  se  passaient 
à  Sens  permettra  d'expliquer  l'incarcération  de 
l'ancien  député  du  Loiret. 

Malgré  la  modération  relative  des  Sénonais,  mal- 
gré même  les  courageux  essais  de  résistance  du 
Conseil  de  la  Commune,  l'influence  des  Jacobins 
devint  toute  puissante.  Les  représentants  Turreau 
et  Garnier,  commissaires  de  la  Convention  dans 
les  départements  de  l'Aube  et  de  l'Yonne,  prenaient, 
le  9  avril  1793,  un  arrêté  ordonnant  la  mise  en  état 
de  réclusion  des  prêtres  non  fonctionnaires  et  la 
saisie  des  correspondances  venant  de  l'étranger,  et 
le  14  avril  quarante-huit  prêtres  furent  mis  en  état 
d'arrestation  chez  eux,  sans  qu'il  fût  dit  pour  quelle 
durée.  Cependant,  grâce  aux  vœux  répétés  de  la 
municipalité,  •  grâce  à  la  demande  des  citoyens 
réunis  en  assemblée  générale,  le  26  mai,  pour  la 


—  271  — 

célébration  d'une  fête  civique,  et  la  prestation  de 
serment  de  la  nouvelle  municipalité,  ils  étaient  le 
22  juin,  remis  en  liberté,  à  Texception  toutefois  de 
trois  chanoines  :  M.  Lhermitte  de  Chambertrand, 
doyen,  M.  Seguier,  archidiacre  de  Melun,  et  M.  Ro- 
ger, archidiacre  de  Provins  (1). 

  la  suite  de  la  mutinerie  de  la  garnison  de 
Mayence,  de  passage  à  Sens  (13  août),  le  Comité  de 
salut  public  de  Sens,  encouragé  par  le  citoyen 
Maure,  représentant  du  peuple,  prétendit  que  cette 
garnison  avait  été  travaillée  par  Taristocratie,  et 
décida  l'arrestation  des  contre-révolutionnaires  et 
des  suspects;  le  5  septembre,  il  convertit  en  maison 
d'arrêt  le  grand  séminaire,  connu  sous  le  nom  de 
couvent  des  Célestins  (le  lycée  actuel),  et,  dès  les 
premiers  jours  d'octobre,  les  détenus  y  étaient  en- 
tassés. Peu  de  temps  après,  le  9  novembre,  les 
commissaires  civils  du  pouvoir  exécutif  écrouaient 
à  la  maison  de  réclusion  Tex-cardinal  de  Loménie 
de  Brienne,  qui,  vu  son  grand  âge  et  ses  infirmités, 
fut  autorisé,  le  6  nivôse  (26  décembre),  à  rentrer 
dans  sa  demeure  de  Saint-Pierre-le-Vif,  où  il  fut 
gardé  à  vue  jusqu'à  sa  mort  (1***  ventôse,  19  fé- 
vrier 1794.) 

Enfin  Maure  et  Garnîer,  qui  étaient  revenus  à 
Sens  le  25  frimaire  (15  décembre),  procédaient,  le 
6  nivôse,  au  renouvellement  et  à  Tépurement  du 
conseil  général.  C'est  vers  cette  époque  que  Gastel- 

(1)  Voir  le  Ceurdinal  de  Loménie  de  Brienne,  archevêque  de  Sens,  ses  der- 
nières années,  épisodes  de  la  Révolution,  par  Joseph  Perrin,  Sens,  impri- 
merie de  Paul  Duchemin,  1896. 


I 


—  272  — 

lier  fut  incarcéré,  ainsi  que  l'indique  le  passage 
suivant  de  son  adresse  aux  citoyens  composant  la 
société  révolutionnaire  :  a  La  levée  des  scellés,  dit- 
il,  a  dû  découvrir  dans  mon  cabinet  une  lettre  que 
je  vous  écrivais  dans  le  commencement  de  décem- 
bre (vieux  style),  pour  vous  prier  de  recevoir  une 
médaille  d'or  de  deux  cents  livres  (la  seule  qui  me 
reste  de  mes  travaux  littéraires),  en  faveur  des  or- 
phelins et  des  veuves  des  défenseurs  de  la  Patrie. 
Comme  j'allais  vous  la  faire  parvenir,  on  annonça 
l'arrivée  prochaine  des  représentants  du  peuple, 
Maure  et  Garnier,  alors  je  crus  devoir  suspendre 
l'envoi  de  mon  offrande,  afin  qu'on  ne  vint  point 
en  altérer  la  pureté  des  motifs.  Quelle  fut  ma  sur- 
prise 1  lorsqu'on  vint  m'annoncer  à  Nailly,  où  je 
voyais  des  malades,  sur  la  réquisition  des  admi- 
nistrateurs du  District,  que  Ton  avait  été  chez  moi 
pour  me  mettre  en  arrestation.  Eh  bien,  répondis- 
je,  je  ne  sais  qu'une  chose  :  c'est  d'obéir.  En  effet, 
je  me  suis  rendu  seul  et  sans  gardes  à  la  maison 
d'arrêt.  A  coup  sûr  je  n'aurais  pas  tenu  cette  con- 
duite si  j'eusse  pu  me  soupçonner  coupable.  i> 

Il  lui  eût  été  facile,  en  effet,  soit  de  se  cacher  chez 
quelqu'un  de  ses  clients,  soit  de  se  réfugier  au  châ- 
teau du  Chesnoy,  où  l'abbé  Salgues,  le  marquis  de 
Pange  et  d'autres,  trouvèrent  un  asile,  d'autant 
plus  que  le  docteur  Chauvot-Beauchêne  était  pro- 
priétaire de  ce  domaine  depuis  le  15  octobre  1791. 

Quelle  était  la  cause  ou  plutôt  le  prétexte  de  son 
arrestation?  C'est,  raconte-t-il,  que  traitant  depuis 
un  mois  le  citoyen  Berthelin  pour  une  jaunisse, 


—  273  — 

lorsque  celui-ci  fut  conduit  à  la  maison  d'arrêt,  et, 
traitant  aussi  son  épouse  qui  était  atteinte  d'une 
fièvre  putride  et  qui  était  en  danger,  il  délivra,  sur 
une  demande  faite  au  nom  des  membres  du  Comité, 
un  certificat  attestant  la  vérité  de  ces  faits.  Des  dé- 
marches et  des  explications  avec  le  citoyen  Maure 
n'empêchèrent  pas  le  mandat  d'arrêt,  qui  lui  fut 
signifié  pendant  son  absence  et  auquel  il  obéit. 

Il  est  intéressant  de  connaître  le  régime  auquel 
étaient  soumis  les  nombreux  prisonniers  détenus 
dans  l'ancien  couvent  des  Célestins,  d'autant  plus 
que,  malgré  les  recherches  de  M.  Perrin,  les  ren- 
seignements à  cet  égard  sont  encore  rares;  ce  ré- 
gime différait  certainement  de  celui  de  la  prison 
ordinaire,  affectée  aux  criminels  de  droit  commun, 
ainsi  qu'aux  déserteurs,  et  ne  rappelle  nullement 
l'affreux  tableau  offert  par  cette  prison  (1).  Ainsi 
qu'on  Ta  déjà  vu,  Gastellier  put  profiter  de  ses 
premiers  loisirs  pour  rendre  compte  au  départe- 
ment de  Fépidémie  de  Cerisiers  ;  il  reçut  la  lettre  de 


(1)  Extrait  du  registre  municipal  tome  U,  folio  104.  8  janvier  1731.  «  MM. 

Storre,  Saignes,  députés  pour  la  visite  des  prisons  et  des  prisonniers 

ont  dit  que  s'étant  présentés  ce  matin  aux  prisons ils  ont  trouvé  seize 

hommes  qui  ne  leur  ont  représenté  que  le  spectacle  de  In  plus  profonde 
misère,  que  leurs  corps  étaient  à  peine  vêtus  de  quelques  misérables 
lambeaux  qui  ne  sçauruient  subsister  encore  que  très  peu  de  temps,  que 
plusieurs  d'entre  eux  sont  absolument  sans  chemise  ;  qu'ayant  ensuite  voulu 
prendre  des  renseignements  sur  leurs  nourritures,  ils  se  sont  fait  représen- 
ter ce  qui  devait  entrer  dans  la  composition  de  leurs  soupes,  qu'on  n'a  pu 
leur  produire  qu'environ  une  once  ou  deux  de  beurre  absolument  insufllsant 
pour  faire  la  soupe  de  seize  personnes  ;  ils  se  sont  assurés  que  les  prison- 
niers n'avaient  que  très  rarement  quelques  légumes  de  mauvaise  qualité, 
qu'enfin  tout  avait  imprimé  dans  leur  Ame  i.n  sentiment  pénible  et 
douloureux.  »  (Note  due  d  l'obligeance  de  M.  l'abbé  Chartraire.) 

18 


I 


M 


félicitations  du  président  de  radministration  du  dé- 
partement de  l'Yonne,  en  date  du  G  pluviôse  an  II, 
et  probablement  une  lettre  que  le  docteur  Antoine 
Petit  lui  écrivait  de  Fontenay-aux-Roses,  le  1 
avril  1794,  pour  le  féliciter  <i  sur  une  de  ses  opinions 
imprimées;  »  il  put  aussi  se  procurer  un  certificat 
du  maire  et  des  officiers  municipaux  de  Montargis, 
en  date  du  19  ventôse  an  H  (10  mars  1794),  décla- 
rant qu'il  n  était  nullement  inculpé  dans  les  papiers 
concernant  la  liste  civile;  il  prenait  enfin  connais- 
sance du  Moniteur  du  15  thermidor  an  II. 

Opendant  les  communications  avec  Textérieur 
étaient  interdites  aux  suspects  détenus  dans  l'an- 
cienne maison  des  Célestins;  diaprés  le  règlement 
du  3  novembre  1793  {Affiches  de  Sens,  n»  du  21) 
brumaire  an  II),  ils  ne  pouvaient  a  recevoir  ni  en- 
voyer au  dehors  aucuns  papiers  et  lettres  qui 
n'aient  été  communiqués  au  Comité  de  surveillan- 
ce; id  à  partir  de  la  même  date,  ils  ne  pouvaient 
plus  faire  venir  leurs  aliments  du  dehors;  ils  man- 
geaient en  commun  et  à  frais  communs,  de  manière 
néanmoins  que  le  riche  vint  au  secours  du  pauvre. 
Ils  avaient  en  outre  à  pourvoir  aux  dépenses  tant 
du  corps  de  garde  que  de  la  garde  composée  de 
seize  hommes  y  compris  l'officier,  chaque  citoyen 
de  garde  ayant  trois  livres  par  jour;  toutefois,  sur 
leurs  réclamations  réitérées  la  garde  fut,  à  partir  du 
14  janvier  1794,  réduite  à  onze  hommes,  savoir  un 
sergent,  un  caporal,  huit  hommes  et  Un  tambour  (1). 

(1)  Voir  le  Cardinal  Loménie  de  Drienne,  par  J.  Perrin,  (pièces  justifica- 
Uvcs). 


—  275  — 

Le  règlement  du  16  octobre  1793  fournit  des  indi- 
cations sur  l'installation  des  reclus;  il  dit,  en  effet, 
qu'il  y  aura  deux  infirmeries,  une  pour  les  hommes 
et  l'autre  pour  les  femmes,  une  cuisine  placée  dans 
la  pièce  servant  autrefois  de  cuisine  aux  Célestins, 
un  réfectoire  commun  dans  l'ancienne  chapelle  et 
une  chapelle  dans  la  salle  appelée  les  Etuves; 
il  ajoute  qu'il  sera  établi  dans  toutes  les  chambres 
des  vasistas  à  quatre  carreaux,  sauf  aux  détenus, 
voulant  avoir  plus  de  jour  et  d'air,  à  faire  à  leurs 
frais  baisser  le  mur  des  croisées,  en  remplaçant  le 
vide  par  des  barreaux  de  fer  et  grillage.  Toutefois, 
après  un  passage  de  Guénot  à  Sens,  l'arrêté  du 
5  prairial  an  II  décida  que  les  chambres  donnant 
sur  le  Mail  ne  seraient  plus  occupées  par  les  détenus 
et  que  ceux-ci  seraient  transférés  dans  les  chambres 
basses. 

Nous  avons  cherché  à  connaître  quelques-uns  des 
compagnons  de  captivité  du  docteur  Gastellier.  Il 
dut  rencontrer  l'ex-cardinal  de  Loménie  de  Brienne 
qui  séjourna  dans  la  maison  de  réclusion,  du  9  oc- 
tobre au  26  décembre;  d'un  aulre  côté,  l'arrêté  du 
Comité  de  sûreté  générale  du  14  germinal  (3  avril 
1794)  donne  les  noms  d'un  certain  nombre  de 
prévenus  sénonais  qui  devaient  être  transférés  à  la 
Conciergerie,  ce  sont  :  Megret  de  Sérilly,  sa  femme 
et  leur  domestique  Lhoste,  Mégrel  d'Eligny  et  sa 
femme,  Alexandre  de  Loménie,  ex-colonel,  et  son 
frère  Charles  de  Loménie,  arrêtés  le  13  février  1794 
par  Guénot,  Dufour,  officier  municipal,  arrêté  le 
17  février,  Tex-coadjuteur  Martial  de  Loménie,  le 


â 


■I     f< 


I1t\ 


•f 


M 


—  276  — 

comle  de  Loménie,  ancien  maire  de  Brienne,  cl 
M"**  de  Canisy,  arrêtés  le  19  février,  Tabbé  Lher- 
mille  de  Chamberlrand,  arrêté  depuis  le  11  avril 
1793,  Mnic  Rossel  de  (.hanibertrand,  M^c  Rossel  de 
Cercy,  M"'«  de  Monlmorin  et  son  fils,  et  les  nommés 
Hall  père  et  fils,  manuracturiers  (1). 

Maure  dit  aussi,  dans  une  lettre  adressée  le 
25  avril  1794  au  Comité  de  salut  public,  qu*il  en- 
voie à  Sens  deux  prêtres  qui  étaient  détenus  dans 
la  maison  de  réclusion  d'Auxerre,  et  dont  Tun  était 
sorti  la  nuit,  grâce  à  la  complaisance  du  second. 
(Recueil  des  actes  du  Comité  de  salut  public,  t.  XIII, 
page  60.) 

Nous  croyons  devoir  citer  plus  particulièrement 
le  docteur  Chauvot-Beauchène,  qui  peut  à  plus 
d'un  titre  être  rapproché  du  docteur  Gastellier. 
Chauvot-Beauchène  (2),  qui  exerça  d'abord  la  mé- 
decine à  Paris,  fut  nommé  médecin  consultant  de 
Monsieur  (26  avril  1789),  puis  médecin  de  l'hôpital 
militaire  du  Gros-Caillou  (hôpital  de  la  garde  na- 
tionale 1790),  il  fut  élu  membre  de  la  commune  de 
Paris,  en  1789  et  1790  ;  il  se  retira  ensuite  à  Sens  et 

(1)  Snur  Ilnll  père  qui  mourut  à  la  Conciergerie,  Dufour  qui  fut  acquitté 
et  M"*  (le  Scrilly  que  son  mari  avait  déclaré  enceinte,  tous  ces  détenus  fu- 
rent condamnés  à  mort  par  le  tribunal  révolutionnaire,  et  exécutés  ic 
21  florc>nl  an  II  (10  mai  1794j,  sur  la  place  de  la  Révolution,  en  même  temps 
que  Madame  Elisabeth;  ils  furent  inhumés  au  cimetière  Monceau.  (Voir  : 
le  Cardinal  Loménie  de  Brienne,  par  J.  l'errin.  et  Madame  de  Sérilly.  par 
Félix  Chandenier,  dans  les  Bnlletins  de  la  Société  archéologique  de  Sons, 
tome  XVI.) 

(2)  Edme-Pierre  Chauvot-Ueauchéne,  né  à  Tabbaye  des  Escharlis,  paroisse 
de  Villefranche,  prés  Joigny,  le  3  mars  1749,  époux  de  Catherine  Bcaude- 
laire.  décédé  ù  Paris,  le  21  décend)re  1821.  (Voir  la  Biographie  générale,  par 
Eirmin  DinoT.) 


—  277  — 

acheta  du  futur  conventionnel  Claude  Chastelain  le 
domaine  du  Chesnoy  (15  octobre  1791).  De  même 
que  son  confrère,  et  probablement  avant  lui,  il  fut 
membre  de  la  Société  populaire  de  Sens,  aux  séan- 
ces de  laquelle  il  assista  régulièrement,  sans  tou- 
tefois prendre  part  à  aucune  délibération.  Cepen- 
dant, lorsqu'il  fut  question  d'envoyer  une  adresse 
à  la  Convention,  pour  la  féliciter  à  Toccasion  de  la 
mort  de  Louis  XVI,  il  s'y  opposa  de  tout  son  pou- 
voir; cet  acte  de  courage  était  plus  que  suffisant 
pour  le  désigner  à  la  haine  des  jacobins,  il  fut  donc 
considéré  comme  suspect  et  enfermé  dans  la  maison 
de  détention.  Sa  captivité  nest  pas  douteuse,  elle 
est  relatée  notamment  par  l'abbé  Saignes,  mais  nous 
n'avons  pu  retrouver  ni  la  date  de  son  arrestation, 
ni  celle  de  sa  libération. 

11  y  avait  certainement  dans  la  maison  des  Céles- 
tins  un  grand  nombre  d'autres  détenus.  Deux  docu- 
ments fournissent  des  indications  à  cet  égard  :  l'un 
deux  est  une  lettre  adressée  au  citoyen  Maure  et 
reproduite  par  les  Affiches  de  Sens  du  30  germinal 
an  III  (20  avril  1795),  qui  contient  cette  phrase  : 
«  Sur  cent  vingts  détenus  à  peu  près,  tu  n'en  as 
remis  en  liberté  que  huit  à  dix,  et  pas  un  seul  de 
Sens,  »  il  est  vrai  qu'il  n'est  pas  suffisamment  spé- 
cifié s'il  s'agit  des  prisons  de  Sens  ou  de  celles  de 
Paris,  et^  le  doute  semble  d'autant  plus  permis  que 
la  même  lettre  parle  des  trente-deux  citoyens  de  la 
ville  de  Sens  qui  furent  envoyés  à  Téchafaud.  Or 
M.  Perrin  dit  (ouvrage  cité)  que  si  la  guillotine  fut 
dressée  aux  premiers  jours  de  messidor,  après  l'af- 


/ 


A 


\iiwt 


—  278  — 

faire  des  Loges,  et  si  elle  resta  debout  en  perma- 
nence pendant  six  semaines,  elle  disparut  aprx*s  la 
chute  de  RolKfspierre  sans  avoir  eu  l'occasion  de 
fonctionner  une  seule  fois.  (Nous  signalerons  ce- 
pendant qu'un  nommé  Guillion,  condamné  à  mort. 
fut  amené  à  la  prison  de  Sens,  par  un  gendarme  de 
Joigny,  le  7  messidor  an  III  (27  juin  1795;  et  exé- 
cuté le  lendemain,  ainsi  que  le  constate  le  registre 
d'écrou.) 

Il  ne  saurait,  au  contraire,  être  question  que  de 
l'ancien  couvent  des  Célestins  dans  le  second  docu- 
ment, c'esl-à-dire  dans  l'arrêté  municipal  du  28  fruc- 
tidor an  II  (Xi  août),  décidant  de  remplacer  les 
hommes  de  garde  par  deux  guichetiers;  or  le  consi- 
déi'ant  de  cet  arrêté  dit  t  que  sur  80  détenus  dans 
la  maison  de  réclusion,  il  y  a  5U  ci-devant  prêtres 
qui  n'ont  aucune  ressource,  que  dans  les  37  parti- 
culiers restants  il  s'en  trouve  qui  n'ont  pas  plus  de 
ressources;  »  sans  doute  ces  chiilres  ne  sont  pas 
très  exacts,  ils  montrent  toutefois  que,  sept  semai- 
nes après  la  mort  de  Rohespierre,  le  nombre  des 
détenus  était  encore  élevé.  Malgré  cet  arrêté,  mal- 
gré même  la  liberté  donnée  aux  prisonniers,  à  qui 
l'on  permit  dès  lors  de  se  rendre  chez  eux  pour  sur- 
veiller leurs  vendanges  ou  rétablir  leur  santé,  la 
garde  continua  à  fonctionner;  c'est  seulement  le 
21)  octobre  179 1  qu'elle  fut,  sur  une  nouvelle  pétition 
des  détenus,  réduite  à  quatre  hommes  et  un  capo- 
ral; elle  fut  ensuite  supprimée,  le  8  novembre,  et 
remplacée  par  la  garde  du  concierge,  attendu,  dit 
le  conseil,  «  qu'il  n'y  a  plus  qu'un  petit  nombre  de 


—  379  — 

reclus,  la  plupart  sans  ressources.  »  La  maison  de 
réclusion  se  vidait  donc  de  plus  en  plus,  mais  on  n'a 
pas  retrouvé  la  date  précise  de  sa  fermeture  (1). 

La  captivité  de  Gastellier  durait  déjà  depuis  huit 
mois  entiers,  lorsqu'il  adressa,  le  16  thermidor  an  II 
(4  août  1794),  son  mémoire  «  aux  citoyens  compo- 
sant la  Société  révolutionnaire  de  la  commune  de 
Sens.  » 


Ignorant  les  chefs  d'accusation  dirigés  contre  lui  (2) 
il  y  répond  tout  d'abord  par  Texposé  de  sa  con- 
duite à  Montargis,  à  TAssemblée  législative  et  enfin 
à  Sens;  il  proleste  ensuite  contre  les  diverses  incul- 
pations dont  il  est  Tobjet  et  particulièrement  contre 
celles  que  devaient  contenir  des  lettres  envoyées  de 
Montargis  parles  successeurs  de  Manuel  (3);  il  leur 
oppose  le  certificat  du  Comité  de  sûreté  générale 
de  la  Convention,  remis  à  la  municipalité  de 
Montargis  et  déclarant  qu'il  n'est  nullement  com- 


(1)  Voir  :  le  Cardinal  de  Loménie.  par  J.  Pehrin  (pièces  justificatives). 
2  {.e  n>st  que  le  4  fructidor  an  II  que  les  motifs  de  son  incarcération  lui 
funnt  communiqués. 

Si  Manuel  avait  été  arrêté  à  Montargis  1*^  20  août  et  guillotiné  à  Paris  au 
mois  de  novembre  1?J3. 


—  280  — 

promis  par  les  papiers  de  la  liste  civile,  et  montre, 
par  cet  exemple,  le  cas  que  Ton  doit  faire  des  autres 
dénonciations  et  de  toutes  les  calomnies  de  Manuel, 
qui,  dès  1790,  s'était  promis  de  le  perdre  et  qui 
n'avait  cessé  de  le  persécuter  avant,  pendant  et 
après  la  législature.  Par  sa  conduite,  dès  1790,  vis-à- 
vis  le  ci-devant  d'Orléans,  il  a  fait  voir  qu'il  l'avait 
bien  jugé  en  le  soupçonnant  de  c  ne  vouloir  ren- 
verser le  trône  que  pour  s'asseoir  sur  ses  débris,  » 
et  il  a  donné  une  preuve  non  douteuse  de  son  ex- 
trême délicatesse  en  refusant,  à  deux  reprises,  une 
somme  annuelle  de  600  livres,  qui  était  moins  un 
bienfait  qu'un  salaire  pour  soins  donnés  aux  em- 
ployés du  prince  d'Orléans. 

Quoiqu'il  n'ait  pas  encore  reçu  communication 
des  motifs  de  son  arrestation,  il  sait  que  son  plus 
grand  grief,  aux  yeux  des  représentants  du  peuple 
Maure  et  Garnier,  est  d'avoir  volé  pour  la  Fayette. 
car  le  premier  le  lui  a  dit,  et  l'autre  a  publié  qu'il  * 
fallait  incarcérer  tous  les  fayetlistes.  Si,  en  elTel, 
avec  la  majorité  de  l'Assemblée,  il  a  voté  en  fa- 
veur de  la  Fayette,  qu'il  considérait  comme  un 
honnête  homme,  c'est  qu'il  croyait  qu'on  voulait 
désorganiser  rarmée  <(  en  décrétant  d'accusation  le 
général.  »  Il  a  pu  commettre  une  erreur,  du  moins 
il  n'a  été  influencé  par  aucun  esprit  de  parti,  lui  qui 
n'a  jamais  mis  les  pieds  aux  Feuillants;  il  était  de 
bonne  foi  et  il  a  agi  selon  sa  conscience,  ce  dont  on 
ne  saurait  rincriniiner,  <i  surtout  à  présent  que  la 
liberté  d'opinion  vient  d'être  consacrée  de  nouveau 
par  les  représentants  du  peuple.  » 


—  281  — 

II  met,  enfin,  ses  ennemis  au  défi  de  déposer 
contre  lui  un  seul  fait  décelant  Tombre  d*une  intri- 
gue contre  la  Révolution;  il  affirme,  au  contraire, 
s'clre  toujours  conduit  en  vrai  républicain  et  en 
vrai  patriote,  et  avoir  fait  tout  le  bien  dont  il  était 
capable  en  secourant  ses  semblables,  en  partageant 
leurs  peines  et  en  adoucissant  leurs  maux. 

Après  ces  huit  mois  de  réclusion,  qui  ont  été 
huit  mois  de  larmes  pour  sa  famille,  Gastellier  ne 
sollicite  pas  la  grâce  qui  n  est  faite  que  pour  les 
coupables,  il  demande  la  justice,  car  il  préférerait 
mille  fois  la  mort  à  Tignominie.  Il  adresse  ce  mé- 
moire pour  dissiper  les  nuages  qui  auraient  pu  al- 
térer Festime  de  ses  concitoyens,  à  laquelle  il  atta- 
che le  plus  grand  prix,  et  pour  recouvrer  une  liberté 
qui  n'aurait  jamais  dû  lui  être  ravie  et  que  ses  juges 
vont  lui  restituer. 

Ce  mémoire,  daté  du  16  thermidor,  a  été  écrit  ou 
du  moins  envoyé  quelques  jours  après  la  mort  de 
Robespierre,  il  a,  suivant  toute  probabiHté,  été  pro- 
voqué par  l'espoir  que  cet  important  événement  fit 
renaître  de  toutes  parts  chez  les  prisonniers.  Quanta 
la  brochure  elle-même,  quoiqu'elle  soit  sans  lieu  ni 
date,  en  la  comparant  avec  celle  de  l'épidémie  de 
Cerisiers,  on  reconnait  qu'elle  sort  de  la  même  im- 
primerie, de  chez  V^e  Tarbé  et  fils,  à  Sens;  toute- 
fois la  vignette  ci-dessus  qui  orne  la  première  page 
pourrait  faire  naître  un  doute  à  cet  égard,  car  Mon- 
ceaux (La  Révolution  dans  le  département  de 
l'Yonne)  la  considère  comme  la  marque  de  Four- 
nier  et  Baillif,  d'Auxerre,  ou  d'Œrtel  et  Alexandre, 


—  284  — 

déralistes?  Si  Manuel,  qui  avait  voté  lappel  au 
peuple,  en  était  plus  honnête  homme  et  meilleur 
patriote  ? 

Il  compte  enfin  que  Ton  avisera  aux  moyens  les 
plus  prompts  de  manifester  son  innocence  et  de  le 
soustraire  à  la  vengeance  de  ces  haines  personnelles 
dictées  et  par  Tintérêl  et  par  la  basse  jalousie  dont 
il  est  depuis  longtemps  victime. 

La  liberté  ne  dut  cependant  pas  lui  être  restiliiét 
aussitôt,  car,  ainsi  qu'il  le  rappelle  lui-même,  il 
resta  incarcéré  dix  mois,  c'est-à-dire  depuis  le  mois 
de  décembre  jusqu'à  celui  de  septembre,  et  il  esl 
possible  qu'il  fut  au  nombre  des  trente-sept  parti- 
culiers encore  détenus  dont  parle  Tarrélédu  28  fruc- 
tidor. En  tout  cas,  il  ne  devait  pas  encore  être  li- 
béré le  4  fructidor  (23  août),  date  à  laquelle  il  apprit 
enfin  les  chefs  d'accusation  dirigés  contre  lui,  et  où 
il  écrivit  le  postscriptum  suivant  que  Ton  trouve  sur 
certains  exemplaires  (1)  de  son  adresse  aux  citoyens 
composans  la  Société  révolutionnaire  de  Sens  : 

«  4  fructidor. 

a  Les  prétendus  griefs  de  mon  arrestation  m'ont 
été  communiqués  hier,  3  fructidor. 

<r  Ses  relations  et  liaisons  douteuses  et  suspectes: 
soupçonné  d'avoir  voté  contre  le  peuple  et  pour 
la  Fayette,  quand  il  était  député  à  l'Assemblée  légis- 
lative. 

c(  Les  relations  et  liaisons  d'un  médecin  douleu- 


(1)  Il  se  liouvo  sur  r<*xcinplnlrc'  de  M.  Nnvnrro;  vv\\i\  du  docteur  Mor<  ai 
donne  un  aulrt-  postscriptum  parlant  du  Moniteur  du  15  Ihermidor. 


i 


—  285  — 

ses  et  suspectes  !  Le  procès-verbal  de  la  levée  des 
scellés  et  ma  correspondance  depuis  huit  mois  de 
détention  ont-ils  présenté  quelque  chose  de  sus- 
pect ? 

*  Avoir  voté  contre  le  peuple  et  pour  la  Fayette. . .  » 

Gaslellier  répond  en  quelques  mots  à  cette  accu- 
sation dont  il  s'est  déjà  justifié,  comme  on  Ta  vu 
précédemment. 

Si,  malgré  ces  indications,  on  ne  retrouve  pas  la 
date  exacte  de  son  élargissement,  on  constate  du 
moins  que  son  nom,  qui  ne  figurait  plus  sur  VAl- 
manach  Tarbé  de  179i,  reparaît  sur  celui  de  1795, 
imprimé  à  la  fin  de  Tannée  précédente  ;  on  remar- 
que, en  outre  que,  quoique  docteur  en  médecine,  il 
est  désigné  comme  officier  de  santé,  car  ce  titre  était 
aloi-s  donné  uniformément  à  tous  les  médecins  et 
chirurgiens. 

Même  en  prison,  Gaslellier  ne  pouvait  pas  rester 
iiiactif  :  en  outre  des  écrits  dont  il  a  déjà  été  ques- 
tion, il  composa  une  dissertation,  dont  l'impression 
fut  retardée  et  qui  fut  publiée,  en  Tan  IV,  sous  ce 
titre  :  Que  penser  enfin  du  supplice  de  la  guillotine  (1)9 
C'était  bien  là  une  question  d'actualité  qui  devait 
d'autant  plus  intéresser  les  esprits,  que  deux  opi- 
nions contraires  s'étaient  élevées  ;  pour  les  uns,  tels 
que  Sœnimering  et  le  docteur  Sue  (le  père  d'Eugène 
Sue),  la  guillotine  était  a:  l'instrument  de  la  plus  ex- 
trême douleur  ;  »  pour  les  autres,  tels  que  Wéde- 


(1>  In-8*  de  20  pages.  Collection  Navarre.  —  Bibliothèque  nationale,  T  b 
11,  7.  —  D'  Moreau. 


à 


—  288  — 

saltendreà  Dioiiler  sur  1  échafaud.  Ses  méditatioiiv 
devaient  lui  îns|>irer  un  nouveau  courage  poui 
conlempler  la  mort  sans  frayeur,  car,  en  pensan! 
au  dernier  supplice,  il  n'avait  à  redouter  ni  le  dès- 
honneur  du  coupable,  ni  les  souffrances  des  der 
niers  moments.  Son  travail  Taida  aussi  à  supportei 
avec  plus  de  j-esîgnation  ses  longs  mois  de  captivité 
sans  doute  il  regrette  la  liberté  qu'il  aime  profon- 
dément, il  e*^t  privé  de  ne  pas  donner  ses  soiiiî 
aux  malades,  il  songe  avec  peine  aux  larmes  el  i 
la  détresse  de  sa  famille,  il  se  préoccupe  même  de 
conserver  rcslîme  de  ses  concitoyens,  mais  il  ne 
fait  entendre  aucune  plainte  sur  ses  souffrances  oi 
sur  ses  privations  personnelles. 

FIN  DL:  SKJOIR  mi  (lASTELLIER  A  SENS 

Après  avoir  enfin  recouvré  sa  liberté,  Gastellici 
reprît  ses  occupations  médicales;  sa  nomination 
comme  médecin  des  hospices  de  Sens  dut  lui  causeï 
un  réel  phtisir;  son  besoin  d'activité,  son  dévoue- 
nictii  pour  les  malades,  son  désir  même  de  TestinK 
publique  se  trouviiienl  é|>alement  satisfaits. 

(Iclle  nomination  est  consignée  dans  le  procès 
verbal  suivant  de  la  di  libération  du  16  ventôst 
an  111  (*i  mars  1795),  réor<^anisant  le  service  médita 
de  1  liùpilaK  à  la  suite  des  décès  de  deux  de  se; 
métiecins,  Pierre  Villcrs  (20  août  1794)  et  Jacques 
Louis  Ducasso  (12  janvier  1795)  :  «  Le  bureau 
après  avoir  mûrement  léflécbi  sur  cette  pétitior 
(adressée  par  le  eiloyeri  commissaire  des  guerres 


—  289  — 

du  déparlement),  est  d  avis  que  le  comité  de  santé  est 
de  toute  utilité,  que  deux  médecins,  qui  aUerneront, 
cl  deux  chirurgiens,  qui  seront  toujours  en  activité 
de  service,  suffisent  pour  faire  le  service  des  mala- 
des ;  en  conséquence,  le  bureau  désigne  à  Tadminis- 
tration  pour  médecins  les  citoyens  Gastellier  et 
Chauvos,  avec  un  traitement  pour  les  deux,  et  pour 
chirurgien  le  citoyen  Soûlas  (1),  en  chef,  et  le  ci- 
toyen Âublet  (2)  pour  adjoint,  au  traitement  des- 
quels l'administration  est  invitée  de  pourvoir,  à  la- 
quelle le  présent  arrêté  sera  envoyé. 
d  Richard,  Chapelain,  Cave,  Sullerot,  Perrin.  i> 
Ainsi  les  docteurs  Gastellier  et  Chauvot-Beau- 
chéne,  qui  tous  deux  étaient.  Tancée  précédente, 
dans  la  maison  de  détention,  étaient  nommés  à 
rhôpilal,  quoique  n'habitant  Sens  que  depuis  peu 
de  temps  ;  leurs  connaissances  médicales  justifiaient 


v1)  Soûlas  Alexandre,  reçu  chirurgien  le  25  février  1765,  logeait  faubourg 
Saint-Antoine  et  à  l'hôpital  dont  il  fut  chirurgien,  depuis  1765  jusqu'en 
1812;  il  est  décédé  à  Sens,  le  3  mars  1819,  à  l'âge  de  quatre-vingt-trois  ans. 

(2)  Aublet  Edme-René,  né  à  St>peaux,  reçu  chirurgien  à  Sens,  le  5  décembre 
1769,  premier  chirurgien  du  Roy,  en  la  communauté  des  maîtres  chirur- 
giens de  Sens,  le  10  janvier  1784,  en  remplacement  de  Dalmières,  décédé  à 
Sens,  le  3  prairial  an  IX  (22  mai  1801),  à  Vage  de  soixante-deux  ans. 

Un  de  ses  fils,  Louis-Alexandre-Auguste,  né  le  4  juin  1776,  lui  succéda 
comme  second  officier  de  santé  des  hospices  de  Sens.  Un  autre  fils,  Con- 
stantin-François, né  le  12  mai  1772,  fut  chef  de  bureau  de  la  sous-préfecture 
de  Joigny.  C'est  probablement  encore  d'un  de  ses  fils  qu'il  est  question  dans 
la  note  suivante,  publiée  par  les  Affiches  de  Sens  du  19  janvier  1794  : 

«  La  société  républicaine  et  révolutionnaire,  après  avoir  entendu  un 
éloge  du  citoyen  Aublet,  mort  pour  la  défense  de  la  République,  arrête 
qu'une  députation  portera  une  couronne  civique  à  son  père.  »  Aublet 
s  était,  en  eflTel,  de  son  propre  mouvement,  offert  de  remplacer  un  jeune 
manouvrier  de  Soucy,  qui  seul  pourvoyait  à  la  subsistimce  de  sa  famille, 
et  dont  les  deux  frères  étaient  déjà  aux  frontières. 

19 


i  ^ ,  l: 


tl 


—  200  — 

bien  ce  choix,  car  le  premier,  ancien  associé  de  la 
Société  royale  de  médecine,  devait,  par  la  suite, 
faire  partie  de  cette  Société  comme  membre  rési- 
dent, et  que  le  second  fut  l'un  des  premiers  mem- 
bres de  l'Académie  de  médecine,  fondée  en  1820. 

Quant  à  Soûlas,  qui,  depuis  trente  ans,  était  chi- 
rurgien de  l'hôpital,  il  fil,  en  outre,  partie  de  Tadmi- 
nistration  municipale  :  élu  le  troisième  comme  no- 
table le  20  février  1790,  il  fut  nommé  membre  du 
bureau  de  charité,  le  19  janvier  1794  ;  officier  muni- 
cipal dans  le  conseil  général  de  la  commune,  le 
9  juin  de  la  même  année;  membre  du  bureau  des 
ateliers  et  secours,  le  30  messidor  an  II;  notable 
delà  municipalité,  le 30  nivôse  an  III;  membre  de 
l'administration  municipale  du  canton  de  Sens,  le 
20  brumaire  an  IV  (11  novembre  1795),  etc. 

En  continuant  à  compulser  les  procès-verbaux  de 
l'hôpital,  on  constate  que,  le  12  germinal  an  IV 
(1er  août  1796),  le  bureau  des  hospices  décide  qu'il 
n'y  aura  désormais  qu'un  seul  médecin  et  nomme 
le  citoyen  Gastellier,  demeurant  en  cette  commune. 
Le  docteur  Chauvot-Beauchéne  n'avait  donc   fait 
qu'un  court  séjour  à  l'hôpital  de  Sens,  et,  quoiqu'il 
fût  encore  indiqué  sur  YAlmanach  de  1797  comme 
habitant  la  Grande-Rue,  il  retourna  bientôt  à  Paris, 
où  il  fut  médecin  de  l'Ecole  normale,  médecin  du 
Corps   législatif  (1810)  avec   logement  au    Palais- 
Bourbon,  et  enfin  médecin  consultant  de  Louis  XVIII 
(février  1815). 

Le  nom  de  Gastellier  figure  une  dernière  fois  sur 
le  registre  du  bureau  des  hospices,  le  procès-ver- 


i,» 


—  291  — 

bal  de  la  séance  du  11  brumaire  an  V  (1^^  novem- 
1796)  mentionnant  que  son  traitement  est  fixé  à 
300  francs.  On  peut,  d'un  autre  côté,  se  faire  une 
idée  du  nombre  des  malades  traités  à  Thôpital,  en 
voyant  que  l'an  IV  le  nombre  des  décès  y  a  été  de 
quatre-vingt-treize,  tandis  qu'il  était  de  trois  cent 
soixante-cinq  pour  la  ville. 

Entre  temps,  Gastellier  avait  fait  imprimer  chez 
V»e  Tarbé  et  fils,  VHistoire  de  Vépidémie  de  Cerisiers, 
dont  la  publication  fut  annoncée  par  les  Affiches 
de  Sens,  du  20  vendémiare  an  IV  (12  octobre  1795). 
Quelqùesjours  auparavant,  le  8  vendémiaire  (30  sep- 
tembre), le  président  de  Tadministration,  Béranger- 
Svidy,  lui  écrivait  pour  le  remercier  des  exemplai- 
res qu'il  lui  avait  adressés  (1). 

Si  Gastellier  reçoit  des  félicitations,  de  son  côté 
il  rend  justice  à  qui  de  droit;  il  n'oublie  donc  pas 
le  concours  dévoué  et  intelligent  que  lui  a  prêté, 
lors  de  l'épidémie  de  Cerisiers,  le  docteur  Louis- 
François-Jean-Baptiste  Tonnelier,  de  Saint-Floren- 
tin ;  il  rappelle  cette  collabaration  dans  une  lettre 
publiée  par  les  Affiches  de  Sens  du  1er  novembre 


(1)  Lettre  du  8  vendémiaire  an  IV: 

«  Citoyen,  en  écrivant  l'histoire  de  l'épidémie  qui  a  régné  h  Cerisiers, 
Theil.  Vaumort,  etc.,  vous  avez  ajouté  un  bienfait  à  celui  que  vous  devait 
lliumanitc.  Par  là,  vous  avez  acquis  un  double  droit  à  l'estime  et  à  la  recon- 
naissance publiques. 

c  Nous  vous  exprimons,  avec  notre  satisfaction,  les  sentiments  que  nous 
partageons  avec  tous  nos  concitoyens,  et  nous  vous  remercions  particuliè- 
rement des  exemplaires  de  cet  ouvrage  que  vous  nous  avez  adressées. 

•  Le  Président  de  l'administration, 
«  Bérangcr  Svidy.  » 
(Sotice  chronologique  de  mes  ouvrage?.) 


*f(i 


—  2Î>2  — 

l7\Cï  (10  hitiinaire  an  III),  et  fait  lï'logc  de  mn 
jeune  confrère  dont  o  les  premiers  pas  dans  lîi  car- 
rière si  (épineuse  el  si  délicalc  de  Tari  de  guérir 
fk^cèk'iit  la  prohilé,  t'honiuHelé,  les  Iimiierei^»  un 
esprit  d'oliîiervatioJi  ci  Ijeauronp  ile  niadestic.  * 

Il  lail  aussi,  suivant  sa  propre  expression,  loul  le 
bien  dont  il  est  capable  en  secuuranl  ses  sembla- 
bies  et  il  nliésile  pas  à  engager  des  discussions 
scientilkjues  pour  dcTendre  des  imineeiits  injuste- 
ment accuses;  de  même  qu'en  1777,  il  avait  rédigé 
trois  consultations  niédieo-léyalcs  en  laveur  de  la 
veuve  Blancbard,  sage-femme  de  rHôlel-DitHi  de 
Rouen,  qu'il  painint  à  faire  accpntler,  de  niC*me  il 
ictlige  un  mémoire  en  faveur  d'un  nommé  Grégoire 
et  de  ses  enfants  (des  environs  de  Sens)  qui  élaienl 
accusés  d  boniicide  et  qui  furent  acquittés  par  le 
jury  d  Auxerre,  le  20  prairial  an  IV  (8  juin  1796)  (1). 

Le  27  frimaire  an  V  (17  décembre  171Mî),  il  a  la 
douleur  de  perdre  sa  sœur,  IClisidjetli  (iastellier, 
qifil  avait  recueillie  chez  lui  à  cause  de  ses  inlir- 
mités.  Cesl  sans  doute  pour  régler  sess  affaires  de 
famille  qu'il  fait  annoncer,  par  \vs  Affiches  de  Sem 
du  10  venlosc  an  V  (28  février  1797),  (jne  sa  niîiîsoa 
de  Monlargis  est  à  louer  ou  à  vendre,  à  perpétuité 


{!)  Eiitrall  dp  k  i^Uri*  du  trUoycn  Uatïn  à  GiinU'IUrr  t 

«  Vi>lr<i  LtHisullrttloii  sur  ït*^fUuiit  prot'4>î-vit?rljjiii\  d*oinTrlnrcd(ïa*clrtvr«. 
n-digi'^  tï'unv  iiuihiiTe  !il  coiUradielûire  pni  Ir  chirurgiinx  ik  Sons.ii  pro- 
duit U*  plus  grniul  l'tïvi  ;  die  a  été  iiuiir  Lrt  lU'euM'i  iv  innycrii  iv  ptu^  imUMinl 
fiull»  iijfnt  intipltiyr  pimicliihUr  kiir  U^mint^in^r,  ou  uu  iiiulns  [Kiur  prou- 
ver  iiUK  riiojtilvidr  ii*iivtiU  \ni&  élé  \ii\m\iuuv  dv  li>Uf  |jarL  f.VxeifUrtii't*  de 
la  répntiilinti  donl  i]%  jmtïnmAvni  tivnni  crotte  ncrmtalitin  ifoil  vi^uv  ïnirt 
jUK^r  lUi  Jicrvicr  ïî«r  vou»  uvrt,  reinlu  à  eux  «l  à  lil  société.*.  • 


im 


—  293  — 

ou  à  vie  (s^adresser  au  citoyen  Delon,  notaire  à 
Ferrières). 

Vers  la  même  époque,  25  pluviôse  an  V  (15  fé- 
vrier 1797),  son  nom  figure  parmi  ceux  des  trente- 
huit  candidats  pour  la  députation  qui  s'étaient  fait 
inscrire  au  greffe  de  leur  commune.  Le  déparlc- 
ment  de  l'Yonne,  qui  comptait  316716  habitants, 
avait,  en  effet,  à  nommer  deux  députés  au  conseil 
des  Cinq-Cents,  et  les  Affiches  de  Sens  du  10  floréal 
(29  avril)  mentionnent  l'élection  de  Leclerc  Malhe- 
ras,  président  du  tribunal  criminel  du  déparlement, 
et  de  Charles  Tarbé,  de  Sens,  ex-législateur. 

A  partir  de  ce  moment,  on  ne  trouve  plus  trace 
du  séjour  de  Gastellier  à  Sens,  et  quoique  le  regis- 
tre des  procès- verbaux  des  hospices  ne  relate  pas  la 
nomination  de  son  successeur,  on  est  porté  a 
croire  que  c'est  vers  cette  époque  qu'il  quitta  la 
ville  pour  retourner  à  Montargis. 

GASTELLIER  A  MONTARGIS  ET  A  PARIS 

Dans  sa  troisième  et  dernière  adresse  à  ses  conci- 
toyens, écrite  à  Sens,  le  3  octobre  1792,  Gastellier 
disait  :  a  Si  j'étais  coupable  enfin,  je  n'insisterais 
pas  pour  rentrer  au  milieu  de  vous,  où  je  suis  sur 
de  reconquérir  votre  estime  et  votre  confiance  que 
je  n'ai  jamais  déméritées  un  instant.  Quelque  chose 
que  mes  ennemis  disent  et  fassent,  je  suis  décidé  à 
revenir  à  Montargis,  où  je  ne  rentrerai  que  lors- 
que la  vérité  vous  aura  frappés  tous  et  que  vous 
serez  convaincus  que  je  n'ai  point  dévié  de  la  ligne 


—  294  — 

de  l'honneur  et  du  vrai  patriotisme.  J'attendrai 
avec'patience,  parce  que  je  nie  persuade  que  tous 
mes  amis  et  tous  les  citoyens  vertueux  viendront  à 
mon  secours,  pour  éclairer  ceux  que  l'on  a  pris  à 
lâche  d'égarer  parmi  vous.  Rien  au  monde  ne  me 
tiéloumera  de  l'exécution  de  ce  projet,  mes  enne- 
mis dussent-ils  me  sacrifier  à  leur  haine,  i 

Knfm,  après  cinq  ans  d'absence,  il  put  revenir  à 
Montargis  sans  craindre  ses  ennemis;  il  ne  retourne 
pas  dans  son  ancienne  habitation  de  la  rue  du  Bon- 
(hiillaume,  et  il  loge  dans  un  modeste  appartement 
de  la  rue  du  Loing,  tout  à  côté  de  la  maison  où 
st'journa  le  Pape  Pie  VII,  lorsqu'il  se  rendit  à  Fon- 
Laincbleau,  en  1801. 

]1  exerce  encore  la  médecine  et  continue  à  s  oc- 
cuper particulièrement  des  épidémies  et  des  épizoo- 
lies;  c'est  ainsi  que,  le  18  prairial  et  les  16  et 
18  messidor  an  IX  (1801),  il  remet  au  sous-préfel 
ses  rapports  sur  deux  épizooties,  dont  l'une  béni- 
gne et  l'autre  maligne  et  des  plus  meurtrières,  sé- 
vissant dans  plusieurs  communes  de  l'arrondissc- 
iiunt  de  Montargis. 

En  1809,  il  est  membre  correspondant  de  la 
Société  académique,  à  Montargis;  en  1811,  il  est 
€  membre  résidant  de  la  Société  de  la  Faculté  de 
l'aris,  »  ainsi  que  le  dit  le  journal  de  Corvisart  en 
annonçant  son  traité  :  des  Maladies  des  femmes  en 
vdtiches  (l)\  en  parlant  du  même  ouvrage,  M.  Sal- 
ines écrivait  :  a  C'est  à  M.  Gastellier,  l'un  de  ces 

1 1)  Voir  In  Chronique  métUcalc.  du  30  mars  1902, 


» 


—  295  — 

habiles  observateurs,  Tun  des  praticiens  les  plus 
distingués  de  la  capitale  que  la  médecine  est  rede- 
vable de  l'excellent  ouvrage  que  nous  annonçons.^ 

Gastellîer  met  à  profit  les  dernières  années  de  sa 
longue  existence,  en  publiant  de  nouveaux  ou- 
vrages, notamment  sur  la  rage  (1814),  sur  des  con- 
troverses médicales  (1817  et  1818),  sur  la  variole  et 
la  vaccine  (1819).  La  maladie  vint  cependant  Tinter- 
rompre,  mais  non  pas  l'arrêter  dans  ses  travaux; 
au  mois  d'août  1816,  il  fut  atteint  d'une  fluxion 
calarrhale  foudroyante  qui  le  frappa  de  cécité  pen- 
dant cinq  semaines,  et  à  la  suite  de  laquelle  il  per- 
dit Toeil  droit. 

Ce  savant  et  vieux  praticien  qui  avait  été  décoré 
de  Tordre  de  Saint-Michel,  en  1817,  meurt  octogé- 
naire le  20  novembre  1821  (1). 

D^  René  MOREAU, 
Médecin  en  chef  des  Hospices  de  Sens. 


i\  D'après  le  docteur  Dechambrc,  il  hnbitait  rue  de  Coudé,  mais  plu- 
sieurs de  ses  ouvrages  donueut  sou  adresse  rue  du  Four-Sainl-Cieruiaiu. 
nl7. 


Il 


â/' 


ŒUVRES    DU   DOCTEUR  GASTELLIKK 


OUVRAGES  DE  MÉDECINE  OU  DE  SCIENCES 

LlîUtoire  d'une  épidémie  calarrhale  qui  allaqoa  les  en- 
fants da  plus  bas  âge  dans  la  commane  de  Saint- Maurice- 
sur-Fessar,  à  la  fln  de  1770.  (Cette  maladie  était  ce  qu  on 
appelle  aujourdliui  le  croap.)  1771. 

PrincipcM  de  médecine,  traduits  de  Home,  médecin  anglais. 
Montargis,  1772,  in-8«. 

IJHintoire  d'un  enfant  monstrueux,  par  laquelle  il  est 
démontré  que  Tenfant  peut  se  mouvoir  dans  le  sein  de  sa 
mère  sans  le  secours  du  cordon  ombilical.  —  Journal  de 
Médecine,  1773,  lome  XXXIX. 

Avis  â  men  concitoyens,  ou  Essai  sur  ta  fièvre  mitiaire,  suivi 
de  plusieurs  observations  intéressantes  sur  la  même  mala- 
die, par  M.  Gastellier,  médecin  à  Montargis.  Paris,  1773. 
Se  trouve  à  Paris,  chez  Didot  le  jeûne,  quai  des  Augustins, 
in-8<>  de  40  4-  360  pages.  (Collection  Navarre,  Bibliothèque 
nationale,  Td  56-15.) 

Traité  sur  la  fièvre  miliaire  épidémique,  par  M.  Gastellier, 
docteur  en  médecine,  associé  et  correspondant  de  plusieurs 
académies  et  sociétés  littéraires,  conseiller  du  Roi  et  de 
S.  A.  S.  Monseigneur  le  Duc  d'Orléans,  Maire  perpétuel  de 
la  ville  de  Montargis,  médecin  ordinaire  de  Monseigneur  le 
Duc  d'Orléans,  des  hôpitaux  et  des  prisons  de  cette  ville, 
nommé  par  le  gouvernement  pour  les  maladies  épidémi- 
qucs.  —  Nouvelle  édition,  augmentée  d'obser\'ations  et  de 
reflexions  sur  la  maladie  du  Haut- Languedoc  (ouvrage 
dédié  à  M.  Lemoinc).  A  Paris,  chez  P.  Fr.  Didot  le  jeune, 
libraire  de  la  Faculté  de  médecine,  quai  des  Augustiiis.  — 
1784. 


—  297  — 

Avec  approbation  et  privilège  du  Roi.  In-S»  de  40  +  401 
pages.  (Bibliothèque  de  Sens.) 

Plusieurs  observations  en  faveur  de  l* inoculation,  et  quel- 
ques-unes contre  la  section  de  la  symphise  du  pubis,  insérées 
dans  la  Gazette  sanitaire,  1775. 

Mémoire  sur  la  fièvre  exanthématiqae.  1776. 

Observation  sur  la  végétation  d'une  espèce  de  corne  de 
bélier  qui  avait  pris  naissance  à  la  partie  inférieure  du  tem- 
poral gauche  d'une  femme  octogénaire.  Dans  les  mémoires 
de  la  Société  royale  de  médecine,  année  1776. 

Trois  Consultations  médico-légales,  en  faveur  de  la  sage- 
femme  de  THôtel-Dieu  de  Rouen  (Vc  Blanchard).  1777. 

Traité  de  la  fièvre  miliaire  des  femmes  en  couches,  par 
M.  Gastellier,  docteur  en  médecine,  avocat  au  Parlement, 
médecin  de  S.  A.  S.  Monseigneur  le  Duc  d'Orléans,  employé 
des  maladies  épidémiques  et  épizootiques,  médecin  de 
THôtel-Dieu,  de  l'Hôpital  général  et  des  prisons  de  la  ville 
de  Monlargis,  membre  de  la  Société  royale  de  médecine  de 
Paris  et  de  celle  d'agriculture  d'Orléans.  A  Montargis,  chez 
Xoél  Gilles,  Ubraire,  Porle-aux-Moines.  1779. 

Dédié  à  M.  Séguier,  premier  avocat-général  au  Parlement 
de  Paris,  l'un  des  Quarante  de  l'Académie  Française.  Ou- 
vrage couronné  par  la  Faculté  de  Médecine  de  Paris,  dans 
la  séance  publique  tenue  le  5  novembre  1778.  In-4o  de 
36+39+177  pages.  (Bibliothèque  de  Sens,  Bibliothèque  de 
Montargis,  Collection  Navarre,  Bibliothèque  nationale^  Td 
56-17.) 

Réponse  à  la  critique  d'un  anonyme,  Montargis.  1779. 

Mémoire  sur  la  topographie  médicale  et  sur  l'histoire  na- 
turelle du  Gàtinais,  couronné  par  la  Société  royale  de  mé- 
decine, et  inséré  dans  le  recueil  de  celte  Société.  1779. 

(En  1776,  Gastellier  avait  été  chargé  par  Turgot  de  faire 
un  rapport  sur  l'état  agricole  et  commercial  du  GAtinais  ; 
et  avait  reçu  de  Turgot  une  lettre  de  félicitation  pour  ce 
rapport.) 

Mémoire  sur  les  maladies  chroniques  auxquelles  les  bestiaux 


i 


—  208  — 


de  îmttfs  esprte*  ioni  Muieh  dam  te  Gétinniê,  couronné  |i»r  I 
Sriri^'tf  n» ville  de  mêticcîiit%  et  iniiéré  dan»  le  rrrueil  i 
celle  Soclél6,  année  1780 

Hémmte  âut  Vntmi^se  des  eaux  minéraleM  de  Ferném,  t 
Chùttuii-Landmi  et  des  ErhnrlU  i{mr  Vnicfrmitrhe,  j>r 
Jolgti>  I,  couronna  par  ïu  SociDlé  royale  de  médecine,  lî^ij 

Méniùire  tonte nant  une  série  d'abseriHithnâ  mêtéréfihgiquei 
et  un  précis  des  épidèndeit  qui  oui  régné  pendant  douze  aH 
dans  te  Gâtinais^  couronné  pnr  la  H<ïciété  royal*?  de  mêtle 
citie,  et  inséré  dans  ses  mémoires  de  Tiinnée  I7H:î. 

Amtus  pttijskns.  Annus  médteus,  deux  mémoires  conraa 
né»  pur  ÏR  Snriété  royale  de  raédeeîiic^  et  inîtéréa  dan*  i 
recueil  de  17«:î 

Des  spéeifîques  en  médecine,  par  M.  Ga&teUier,  docteufl 
niédei!iiie.    avacat  au    P;irlenïe«t*    iwéderin   ordinaire 
S.  A.  li,  Motisci^fneur  la  Duc  d  Orléans,  Claire  de  la  ville  i 
MonlurgU,  médecin  den  hûpïtaux  et  prmans  de  cette  vill 
employi^'  pour  le»  maladie?^  éptdéndqiies  et  épizooliqiîcs  i 
de  la  pro%Jncc,  a§!>ocié  réf^nicolc  de  la  Société  royale 
médecine,  ans^ocié  correspondant  de  TAcadémie  deii  %cU 
ces»  arts  et  bellc?^  leltres  de  Dijon,  associé  non  résidant  ( 
la  Société  royale  d  agricidlurc  d Orléans,  elc.  A  Paris,  cbd 
Didot,  imprimeur  de  Momdeur  et  libraire,  quai  de»*  Angu 
lins,  tlKl  Avec  ajîprïdialion  et  privilège,  A  Montargis, 
ri  m  prime  rie  CL  Lequatre, 

Dédié  à  M  Franklin,  ministre  plénipotentiaire  des  Klali 
Unis  h  la  cour  de  France. 

Ouvrage  reconuu  digne  de  Tapprotintinn  de  la  Soelè 
royale  de  médecine,  et  d  t tre  imprimi^  avec  son  priviléi^ 
In-8'  de  7  et  Ifil  pages,  i Bibliothèque  de  Sens,  BildiothétiQ 
lie  MontargÎH,  CoUecliou  Navarre,  Blldiothéque  nalionall 
Te  7405  ) 

ItinttHre  d'une  épidèmir  du  tjvnvedvH  tnthonhrmstspittntk 
ftes  fdu$  tjrnvvs  et  des  pinn  amtatfiensi's^  mémoire  ctnjronfl 
par  la  Sociélé  royale  de  médecine,  1785.  Oiicans,  178".  ln-4 

yîèmoite  ^://r  t'épidétnie  qui  n  régné  en  J7H't,  dana  ht  nul 


—  299  — 

légation  de  Monlargis.  Ouvrage  qui  a  remporté  un  des  pre- 
miers prix  de  la  Société  royale  de  médecine  de  Paris,  le 
29  août  1786,  par  M.  Gastellier.  A  Orléans,  1789.  In-8o  de 
68  pages  et  1  tableau.  (Collection  Navarre,  Bibliothèque 
nationale,  Td  52-18.) 

Sur  la  Santé,  note  conseillant  remploi  du  verjus  pour 
combattre  les  effets  de  la  grande  chaleur,  insérée  dans  les 
Affiches  de  Sens,  10  juillet  1794.  Demi-colonne. 

Histoire  de  Vépidémie  qui  a  régné  à  CerizierSy  Theil  et  Vau- 
mort,  précédée  d'observations  sur  la  topographie  de  cha- 
cune de  ces  communes,  et  sur  une  source  nouvelle  qui  a 
jailli  à  Cerisiers,  le  3  mars  1793,  par  René-Georges  Gastel- 
lier, médecin  de  l'hospice  civil  et  militaire  de  Sens,  membre 
de  la  Société  philosophique  de  Philadelphie,  et  par  Louis- 
François-Jean-Baptiste  Tonnelier,  médecin  à  Saint-Floren- 
tin. Sens,  V®  Tarbé  et  fils,  imprimeurs  du  district,  Tan  III. 
In-8o  de  8  et  91  pages.  (Collection  Navarre,  D>'  Moreau. 
Bibliothèque  nationale,  Td  52-70.) 

Qae  penser  enfin  du  supplice  de  la  guilloltine  f  Nouvel  exa- 
men de  cette  question,  par  René-Georges  Gastellier,  médecin 
de  rhospice  de  Sens,  membre  de  la  Société  philosophique 
de  Philadelphie.  A  Sens,  3  frimaire  an  IV«.  A  Paris,  chez 
les  marchands  de  nouveautés.  Tan  IVc  de  la  République. 
In-8»  de  20  pages.  (Collection  Navarre,  Bibliothèque  natio- 
nale, Tb  11-7,  D«-  Moreau.) 

Histoires  de  deux  épizooties  dont  Vune  bénigne  et  Vautre 
maligne  et  des  plus  meurtrières,  dans  plusieurs  communes  de 
l'arrondissement  de  Monlargis,  an  IX.  Insérées  dans  le  cin- 
quième volume  des  n  émoires  de  la  Société  médicale,  an  XI, 
page  359. 

Dissertation  prouvant  •  qu'il  n* existe  pas  de  fièvre  puerpé- 
rale sui  generis,  »  accueillie  par  la  Société  de  l'école  de 
médecine,  en  1803. 

Traité  sur  les  maladies  des  femmes  en  couches,  par  M.  Gas- 
tellier, membre  résidant  de  la  Société  de  la  Faculté  de 
Paris.  Paris,  1811.  In-8".  Ouvrage  annoncé  par  le  journal  de 


-j 


4 


—  »X)  — 

Conrisarl,  août  1812.  ^Bibliothèque  nationale.  Te  126  Ti 

ObMenmtion»  iur  la  rage,  par  R.-G.  GastelHer,  extraites  do 
Journat  de  médecine,  chirurgie,  pharmacie,  etc.,  août  18U 
Imprîmene  de  M««  V'^'^  Migneret,  nie  da  Dragon.  In-8'  de 
tapages,  t Bibliothèque  de  Montargis.) 

Lettre  de  R.-G.  GastelHer  à  M.  le  docteur  Fournier,  In-8'  de 
23  pages   (Bibliothèque  de  Montargis.) 

Précin  historique  d'une  fluxion  catarrhale  foudroyante.  7/11 
m'a  frappé  de  la  cécité  la  plus  cruelle  pendant  cinq  semaines. 
et  à  la  su  Ile  de  laquelle  j*ai  perdu  Toeil  droit.  Ce  précis  est 
Intérè  dans  le  Bulletin  de  la  Société  de  médecine.  1816 

Notice  chronologique  de  mes  ouvrages.  Paris,  1816.  In-4»  de 
32  pagCH  De  rimprimcric  Renaudière,  rue  des  Prouvai 
rcft,  ïi"  IG.  (On  trouvera  dans  cette  notice  quelques  ouvra 
gen  ne  (]}4urant  pas  dans  cette  liste.;  (Bibliothèque  dcMon- 
largjïi.  HJhtiothèque  nationale,  Ln  27-8314.) 

Controiwrses  médicales,  par  R.-G.  GastelHer,  30  juin  1817 
In -8"  dt'  1(12  page^.  Imprimerie  de  Migneret,  rue  du  Dra- 
gon^ n«  20.  (Bibliothèque  de  Montargis,  Bibliothèque  natio- 
nale, Te  126-33. 

SiUtr  (h's  conlroverses  médicales,  par  R.-G  Gaslcllier 
J*iins,  1'^  avril  1818.  In^**.  A  Paris,  chez  Croullebois,  libraire 
rue  des  Muthurins,  «*»  17  et  chez  l'Auteur,  rue  du  Four,  f.  SC 
n'  17.  fHilïliothèque  de  Montargis  > 

(Hmiiuitions  et  réflexions  relatives  à  Vorganisation  actiiclk 
de  ht  médecine.  Paris,  sans  date.  In-8"  de  32  pages. 

ICxposr  fîdéle  de  petites  véroles  survenues  après  les  vacci- 
nât ionn,  suivi  d'observations  pratiques  sur  la  petite  vérole 
nntiitTHo,  sur  la  petite  vérole  artificielle  et  sur  la  vaccine, 
aiijsi  (jiK'  quelques  propositions  tendantes  au  perfeclion- 
ncïitent  i  L  h  ramélioration  de  la  vaccine.  1819.  Imprimerie 
de  la  Henaudière.  In-8"  de  119  pages.  A  Paris,  chez  Croule- 
btfis,  lihiîiirc,  et  chez  l'auteur,  rue  da  Four-Saint-Germain, 
IV*  17.  'Ilibliothèque  (le  Montargis,    Bibliothèque    nati  nnle 


—  301 


l« 


ECRITS  POLITIQUES  ET  DIVERS 

Mon  premier  mot  à  MM.  les  Députés  du  tiers-état  du  bail- 
liage deMontargis,  par  Gastellier  (sans  lieu).  ïiî-8«  de  7  pa- 
ges. (Bibliothèque  d'Auxerre.) 

Adresse  à  mes  concitoyens.  Paris,  1792.  In-8o.  (Bibliothè- 
que nationale,  Ln  27-8312.) 

Observations  et  réflexions  relatives  aux  circonstances  ac- 
tuelles... le  15  mars  1792,  l'an  IV  de  la  Liberté.  Paris,  impri- 
merie nationale,  in-8o.  (Bibliothèque  nationale.  Le  33-3  U. 

Opinion sur  l'envoi  aux  quatre-vingt-trois  départements, 

delà  lettre  de  M.  Rolland  au  roi.  (16  juin  1792.)  Paris,  im- 
primerie de  Dupont,  in -8».  (Bibliothèque  nationale.  Le 
34-204.) 

Opinion  de  /?.  G.  Gastellier,  ex-maire  de  la  ville  de  Mon- 
largiSj  député  du  département  du  Loiret,  sur  la  suspension 
de  M.  le  Maire  de  Paris,  13  juillet.  Fan  IV  de  la  liberté  (1792) 
(sans  lieu).  In-8'  de  8  pages.  (Bibliothèque  d'Auxerre,  re- 
cueil Tarbé,  Bibliothèque  nationale,  Le  34-109.) 

Troisième  et  dernière  adresse  à  mes  concitoyens,  par  Gas- 
tellier. Sens,  3  octobre  1792  (l'an  I^rde  la  République). Veuve 
Tarbé  et  fils,  imprimeurs  du  district,  1792.  In-8'»  de  8  pages. 
Bibliothèque  d'Auxerre,  recueil  Tarbé.) 

Lettre  du  citoyen  Gasiellier,  médecin,  ancien  maire  de 
Montargis,  ex-député  de  l'Assemblée  législative,  à  MM.  les 
Commissaires  de  la  Convention  nationale  dans  le  déparlement 
de  l'Yonne,  séans  à  Sens,  datée  de  Nemours,  le  U  octobre, 
lan  hr  de  la  République,  et  suivie  de  la  réponse  des  com- 
missaires de  la  Convention  nationale  J.  S.  Rovère  et  Claude 
Fauchet.  Affiches  de  Sens,  n«  du  25  octobre  1792.  (Bibliothè- 
que de  Sens,  Bibliothèque  d'Auxerre.) 

Lettre  du  citoyen  Gastellier  au  rédacteur  des  Affiches  de 
Sens,  datée  du  9  novembre  l'an  V'^  de  la  République  fran- 
çaise, et  reproduisant  une  Lettre  de  Jard-Pauviller,  an- 
cien député    à   l'Assemblée  législative   et  membre  de  la 


sd    k^ 


—  302  — 

Convenlion  nationale.  Affiches  de  Sens^  n°  du  10  novembre 
1702-  (Bibliolhc^quede  Sens,  Bibliothèque  d'Auxerre.) 

Bené-Gcûrjjes  Gastellier,  officier  de  santé,  à  Sens.  Aax 
Citotfem  composans  la  Société  révolutionnaire  de  ladite  com- 
mune. Sens,  16  thermidor,  Tan  II  de  la  Republique  une  et 
indivisible^  avec  pièces  justificatives.  Vignette  de  Timpri- 
nierie  Tarbé  In-8^  de  31  pages.  (Collection  Navarre,  doc- 
teur Moreau,  Bibliothèque  d'Auxerre.) 

Aux  président  et  membres  composant  la  Société  révolulion- 
naire  de  Sens,  par  Gastellier.  24  thermidor,  an  II,  Sens, 
Tarbé.  In-4'>  de  3  pages.  (Bibliothèque  d'Auxerre.) 

A  mes  concitoyens.  Exposé  de  ma  conduite  active  commt 
homme  politique.  Paris,  1817.  Imprimerie  de  Migneret,  ru( 
du  Dnigon,  Ta nbourg  Saint  Germain,  n®  20.  Iii-4o  de  20  pa 
gcs.  (Hibllothèque  de  Montargis,  Bibliothèque  nationale 
Ln  27-8313.) 


UN  PONTIFICAL  SENONAIS 


DE  LA 


BIBLIOTHÈQUE  ROYALE  DE  BELGIQUE 


Le  manuscrit  9215  de  la  Bibliothèque  royale  de 
Belgique  est  un  pontifical,  c'est-à-dire  un  livre  li- 
turgique contenant  les  formules  et  textes  relatifs 
aux  sacrements  et  bénédictions  conférés  par  Tévê- 
que.  II  est  qualifié  sénonais  dans  le  catalogue  des 
manuscrits  de  cette  bibliothèque  par  le  R.  Père 
van  den  Gheyn  (1).  Le  savant  conservateur  des 
manuscrits  de  Bruxelles  fonde  cette  attribution  sur 
deux  passages  du  texte,  l'un,  au  fol.  88  :  «  Vis  pro- 
jmonem  consuetam  a  tuis  predecessoribus  et  ce- 
kris  ecclesie  Senonensis  suffraganeis?  t>  Tautre,  au 
fol.  94  :  «  Vie  Senonensi  ecclesie  et  mihi  meisque 
mccessoribus  subjectionem  ?  d  Ce  sont  là  les  ques- 
tions que  posait  à  Tévéque  élu  Tarchevêque  consé- 
cralcur,  et  auxquelles  le  sufTragant  répondait  par 
un  serment  de  fidélité  à  l'Eglise  de  Sens,  serment 
appelé  profession  (2). 


\ 


tll 


<1  Catalogue  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  royale  de  Belgique,  t.  1" 

.'  Voir  ahbé  CiiAnTRAinE,  Carlulaire  du  Chapitre  de  Sens,  p.  xi  et  suiv., 
ft  p  175  et  suiv. 


fil 


^*.-".^ 

XV"  siùclt\  et  même  lett 
lont  encadrées  de  tiget 
>is  poiiiLes,  feuilles  dei 


—  304  —  1 

Le  manuscril  dont  il  s'agit  |>rnvient  de  rnitcî 
bihlioHieqiie  des  ducs  de  BoiirgDniio.  La  heaui 
son  oniiMiRiilation  Ta  rendu  ct^lèbre.    L'écrit 
qui  semble  avoir  été  tracéi*  d  une  même  maio 
lïout  à  Taulie,  accuse  le  xr  siùcle,  et  même  le 
de  ce  siècle.  Les  pages  son 
nies  de  ces  feuilles  à  Iroi 
ou  de  vigne  stylisées,  qu  on  voit  apparaître  dai 
marges  des  manuscrits  au  xiv*'  siècle,  mêlées 
des  Heurs  à  pétales;  les  couleurs  sonl  le  rou| 
bleu  et  Tor,  Les  lettres  majuscules,  au  eoniiUi 
ment  des  ch;i  pitres  et  des  i>u  ni  graphes,  sonl 
Uines  d\>r  encadrées  de  viokl  ut  de  bleu.  Qui 
unes  sonl  ornées,  en  leur  milieu,  de  |)ej n turcs  rî 
sentant   lévéque   dans   rexeicice  de  ses  div( 
fonctions.  Outre  ces  petites  scènes,  il  y  a  deu 
bleaux  plus  grands.  L'unoccu|)ela  moitié  supérî 
du  premier  fiuillet  et  reprèseule  Tévéque  bénis 
le  peuple  du  haut  de  ramlioji    Le  préhil,  in 
crosse,  bénissant,  tourné  veis  un  livre  que  luij 
se  nie  un  clerc,  est  sur  une  soriede  fribuneitnM||; 
par  trois  colonnes;  derriéiu    lui,   deux  clena» 
chape;  sous  la  tribune,  un  roi  ut  (|ualie  autres  | 
sonnages  agunouillés   reprèsunk^nt   fe   peuple, 
fond  du  lableau  est  formé  [>ar  des  losanges  al 
nativenienlbleu  et  or.  Au-dessous  du  tableau  c» 
în  en  cent  les  formules  de  hiiiéilictifuis  ponlific; 
pour  tout  le  cours  de  Tanuée, 

Au  folio  12!)  se  trouve  Tau  tic  grande  ])einlure, 
présenlanl  la  crucifixion  et  précédant  le  canon  d^ 
messe.  Cette  peinture  est  tiés  remarquable.  Je: 


f 


L 


m 

< 

o 
z 

(0 

< 

o 


\ 


n 


4m 


m^  • 


il 
•1 


HLm||^ 


—  305  — 

est  prêt  à  rendre  le  dernier  soupir.  Au  pied  de  la 
croix,  le  disciple  bien-aimé,  Jean,  se  rejette  en  ar- 
rière dans  un  mouvement  de  terreur  et  de  désola- 
tion. La  Vierge,  agenouillée,  lève  les  mains  au-dessus 
delà  tète.  Madeleine,  également  agenouillée,  vue  de 
dos,  écarte  les  mains  en  signe  de  douleur  et  tourne 
la  tête  vers  la  Vierge.  A  Tarrière-plan,  Marie  Sa- 
lomé,  également  à  genoux.  Comme  pendant  et 
même  en  contraste  à  ce  groupe  désolé  et  émou- 
vant, un  groupe  de  trois  hommes  debout,  dans  une 
pose  calme  :  Tun,  à  l'air  décidé,  portant  une  massue 
et  dans  lequel  on  pourrait  voirie  centurion,  puis  un 
soldat  et,  derrière,  un  personnage  indéterminé  figu- 
rant peut-être  les  pharisiens. 

Cette  peinture  a  été  reproduite  au  trait  en  tête  du 
tome  III  du  Catalogue  de  la  bibliothèque  royale  des 
ducs  de  Bourgogne,  paru  en  1842.  C'est  sûrement 
l'œuvre  d'un  maître  flamand.  Alfred  Michiels  Ta 
longuement  décrite  dans  la  seconde  édition  de 
{Histoire  de  la  peinture  flamande  (1).  Il  Ta  attribuée 
ï  Roger  van  der  Weyden  ou  Roger  de  la  Pâture, 
longtemps  connu  sous  le  nom  de  Roger  de  Bruges, 
'lève  de  Jean  van  Eyck,  né  à  Tournai  vers  1 100  et 
Tîort  en  1464.  a  Le  talent  de  Roger  van  der  Weyden 
ic  trahit,  dit  Michiels,  par  des  signes  manifestes... 
3n  y  reconnaît,  à  la  première  vue,  la  manière  du 
3eintre  fameux,  ses  Immenses  draperies,  ses  gestes 
nolents,  ses  expressions  et  ses  poses  dramatiques, 
;on  habile  façon  de  reproduire  la  campagne,  d  Et 


«1.  2-  édil  (1866),  l.  Uî,  p.  81  et  suiv. 


20 


—  306  — 

le  môme  auteur  ajoute  :  a:  Si  Ton  n'attribuait  pas 
hanlimeiit  cette  miniature  à  Van  der  Weyden,  il 
faudrait  renoncer  pour  toujours  au  travail  d'induc- 
tion qui  baptise  les  tableaux  d'après  le  style  des 
maîtres.  Non  seulement  le  C.hrist  a  la  longueur  cl 
la  maigreur  que  lui  donnait  habituellement  Roger 
van  der  Weyden,  mais  sa  laide  figure,  osseuse  cl 
trapue,  ses  cheveux  incultes,  tombant  éparpillés  sur 
la  droilCj  sa  bouche  tordue  par  la  douleur,  se  re- 
trouvent exactement  aussi  bien  que  les  propor- 
tions insolites  du  corps,  dans  le  rétable  des  seplsa- 
cremenls.  y> 

Mais  les  caractères  que  Michiels  signale  comme 
propres  à  Roger  van  der  Weyden  ne  se  relrouvenl- 
î!s  pas  dans  Tœuvre  d'autres  peintres  flamands  dn 
même  temps?  Pour  ce  qui  regarde  le  rapproche- 
ment avec  le  triptyque  des  sept  sacrements,  esl-il 
même  nussi  justifié  et  probant  que  l'affirme  notre 
auteur?  Le  centre  de  ce  triptyque  est  occupé  par 
une  triicifixion,  où  la  disposition  et  le  costume 
même  îles  personnages  diff^èrent  complètement  de 
la  disposition  et  du  costume  de  ces  mêmes  person- 
nages dans  la  crucifixion  de  notre  manuscrit.  Sui 
h*  triptyque,  les  seuls  assistants  sont  la  Vierge 
Jean,  Marie-Salomé  çt  Marie-Madeleine.  Au  liei 
d'être  groupés  à  droite,  ils  font  cercle  autour  de  1î 
croix.  Jean  soutient  la  Vierge  qui  s'affaisse.  Le 
gestes  sont  calmes  au  lieu  d'être  violents. 

Assurément,  les  historiens  de  Tart,  nos  contem 
poiains,  affirmeraient,  avec  moins  d'énergie,  l'ai 
Irilïution  de  notre  peinture  à  Roger  van  derWey 


'_  307  — 

den,  si  même  ils  ne  refusaient  pas  d'y  reconiiaifre 
la  même  main  qui  a  peint  le  triptyque  des  sept  sa- 
crements. Sans  doute  ils  s'absliendraictit  de  tneltre 
aucun  nom  sous  noire  miniature. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  tableau  du  folio  1  et  celui 
du  folio  129  du  Pontifical  de  Bruxelles  sont  certai- 
nement de  deux  peintres  différents. 

On  reconnaît  pareillement  deux  mains  dans  les 
petites  scènes  tracées  à  Tintérieur  des  lettrines. 
Elles  représentent  :  Tévêque  procédant  à  la  dédi- 
cace d'une  église  (fol.  29  v«),  la  consécration  d'un 
autel  (fol.  53  v^),  la  réconciliation  <i'une  église 
(fol.  67,  vo),  la  tonsuration  d'un  clerc  (fol.  74,  v»), 
l'ordination  d'un  acolyte  (fol.  75,  v«),  la  consécra- 
tion d'un  évêque  (fol.  87),  la  bénédiction  d'un  abbé 
de  moines  (fol.  94),  la  bénédiction  d'un  Lil)bé  de 
chanoines  (fol.  97  v^),  la  bénédiction  d'une*  abbesse 
(fol.  99),  la  vêture  de  religieuses  (fol.  1(KI,  v*'),  le  cou- 
ronnement d'un  roi  (fol.  109),  et  celui  d'une  reine 
(fol.  115  yo),  Timposition  des  cendres  bénites 
(fol.  121),  la  prédication  (fol.  125),  la  consécration 
du  saint-chrême  (fol.  127),  la  célébration  de  la 
messe  (fol.  128,)  l'administration  du  baptême 
(fol.  139,  yo),  la  bénédiction  des  rameaux  (fol,  137), 
l'administration  d'un  infirme  (fol.  151)  (1). 

Ces  petites  miniatures  sont  l'œuvre  tl  au  moins 
deux  artistes  :  le  premier  a  tracé  celles  des  feuillets 
29  et  à  100  yo;  le  second,  celles  des  feuillets  109  à 


(1)  Celle  lisle  de  miniatures  a  élé  donnée  par  le  R.  P.  \nn  dcn dicyn 
op.  cit.,  et  nous  la  lui  avons  empruntée  à  partir  du  fol.  121. 


'y\ 


—  3Û8  — 

151.  En  outre,  celles  du  premier  groupe  sont  de 
même  style,  et  probablement  de  la  même  main 
que  la  grande  peinture  initiale.  Les  miniatures  du 
second  groupe  commençant  au  folio  109  avec  le 
couronnement  royal  ont  été  exécutées,  sinon  par 
Farliste  à  qui  Ion  doit  la  crucifixion  du  folio  121), 
au  moins  par  un  artiste  de  la  même  école. 

Le  premier  groupe  de  peintures  est  Toeuvre  d'un 
artiste  d'un  talent  médiocre  et  travaillant  dans  le 
style  du  xiv'  siècle  ;  le  second  groupe  est  d'un  style 
plus  nouveau,  ayant  les  caractères  propres  à  Tart 
du  milieu  du  xv*'  siècle,  peut-être  même  de  la  se- 
conde moitié  de  ce  siècle,  et  si  nous  pouvons 
croire  que  deux  enlumineurs  ont  travaillé  à  décorer 
la  dernière  moitié  du  manuscrit,  c'est  que  les  pein- 
tures y  sont  de  valeur  inégale. 

Michiels  avait  été  frappé,  —  et  il  ne  pouvait  pas 
ne  pas  l'être,  —  de  la  différence  de  style  entre  les 
miniatures  de  la  première  et  celles  de  la  seconde 
partie  du  volume.  11  en  avait  conclu  que  le  volume 
avait  été  fait  en  deux  fois,  que  la  première  partie 
en   avait  été  et  écrite  et  enluminée  »  pendant    le 
xivc  siècle,  et  la  seconde  au  siècle  suivant;    sans 
prendre  garde  que  l'écriture  était  la  même  du  com- 
mencement à  la  lîn,  et  qu'à  supposer  qu'elle  ne  fût 
pas  d'une  seule  main,  elle  avait,  dès  les  premières 
pages,  les  caractères  propres  à  l'écriture  du  x\^  siè- 
cle. Il  faut  en  conclure  que  ce  manuscrit  n'a  été 
écrit  qu'au  xv^  siècle,  et  que  la  décoration   a   été 
confiée  à  deux  ou  trois  peintres,  le  premier  appar- 
tenant à  une  école  attachée  aux  anciennes  traditions 


—  309  — 

ou  copiant  un  modifie  ancien  dont  il  conservait  le 
caractère  ;  le  second  ou  les  deux  autres,  plus  indé- 
pendanls  dan;*  leur  conception,  et  appartenant  à  la 
nouvelle  école. 

Il  nous  a  paru  que  ce  I^oîitifical  qui,  directement 
ou  indirectement,  se  ratlacheà  TEglise  de  Sens  de- 
vait être  signalé  à  Tattention  de  nos  confrères  de  la 
Socîélé  archéologique. 

Maiiugk  Prou. 


CIMETIÈRE   CAROLINGIEN 


A  L'ABBAYE 


DE  SAINTE-COLOMBE-LEZ-SENS 


Kii  creusant  un  vaste  puisard,  à  Tabbaye  de 
Sainle-(.<)Iombe,  au  milieu  de  la  cour  de  la  ferme, 
les  ouvriers  ont  mis  à  jour  cinq  sarcophages  en 
pierre  oolithique  blanche,  originaire  des  coteaux 
de  la  baille  vallée  de  l'Yonne  et  telle  qu'on  en  ex- 
ploite il  Oavant,  à  Coulanges  ou  à  Mailly-la-Ville 
Aussitôt  qu'ils  ont  été  prévenus  par  l'architecte, 
M.  Ricliardot,  MM.  l'abbé  Chartraire,  Moreau, 
Sépol  et  Perrin  se  sont  transportés  à  Sainte-(.o- 
lomhL\  Mais  déjà  les  couvercles,  formés  d'une  dalle 
plate,  avaient  été  brisés,  et  les  terrassiers  rejetaient 
sur  le  sol  les  ossements  noircis  par  les  infiltrations 
prolontjoes  des  eaux  de  la  ferme,  qui  s'étaient  ac- 
cumulées dans  les  cercueils,  présentant  une  saisis- 
sanle  image  de  «  ce  je  ne  sais  quoi  qui  n'a  de  nom 
en  aucune  langue,  d  Aucun  objet  ou  débris  ne  fui 
trouvé,  ce  qui  n'est  pas  surprenant  en  de  telles 
conditions. 


—  3H  — 


Les  cercueils  étaient  tous  de  même  forme,  plus 
larges  à  la  tête  qu'aux  pieds;  ils  étaient  oriculés  à 
Test  avec  une  légère  déviation  vers  le  nord  et  avaient 
été  disposés,  sans  alignement  précis,  à  une  profon- 
deur de  2ni80  au-dessous  du  sol  actuel  de  la  cour, 
soit  2  mètres  environ  au-dessous  du  sol  normal,  la 
cour  ayant  été  exhaussée  pour  parer  aux  inonda- 
lions. 

Un  sixième  squelette  était  inhumé  dans  le  sol 
même,  à  côté  du  cercueil  B  et  à  la  même  proTon- 
deur;  avec  la  terre  qui  occupait  le  fond  de  la  lusse, 
Ton  ramena  deux  petits  fragments  d'une  poterie 
rouge,  vernie  et  fine,  assez  semblable,  mais  posté- 
rieure, aux  poteries  gallo-romaines. 

Quatre  des  sarcophages  ne  présentant  aucune 
sculpture,  on  prit  le  parti  de  les  abandonner  au 
fermier.  Mais  le  cinquième  fut  remonté  avec  soin 
et  porté  au  musée  avec  la  permission  du  proprié- 
taire de  la  ferme,  M.  le  docteur  Perronne. 

Ce  cercueil,  marqué  de  la  lettre  A,  au  plnn  qu'a 
bien  voulu  dresser,  pour  nous,  M.  Bauban,  entre- 
preneur, renfermait  un  squelette  de  haute  taille, 
parfaitement  conservé  et  qui  le  remplissait  exacte- 
ment, l^s  ossements,  fortement  teintés  par  les  in- 
nitrations  des  fumiers,  étaient  en  place,  saut  le  crâne 
qui  avait  été  déplacé  et  retourné  par  le  mouvement 
des  eaux  pendant  les  crues  séculaires  de  TYonne. 
Les  bras  était  étendus  le  long  du  corps. 

Le  cercueil  avait  les  dimensions  suivantes  : 

Longueur  extérieure     .     .     .      2'n()5. 

Largeur  extérieure,  à  la  tête  .       ()'»'62. 


^  I  ' 


4' 


J 


—  312  — 

Largeur  extérieure,  aux  pieds      ()"»37. 

Hauteur  extérieure,  à  la  tête.      0'"4G. 

Hauteur  extérieure,  aux  pieds      0'n40  seulement. 

Epaisseur  des  parois 0"»06. 

Epaisseur  de  la  dalle  supérieure.     .      0"»07. 

Par  suite  de  la  négligence  des  ouvriers,  nous 
navons  que  le  fragment  postérieur  de  celte  dalle; 
il  offre,  en  relief,  une  arête  médiane  qui  parait  être 
le  bas  d'une  croix. 

La  tête  du  cercueil  n'a  aucun  ornement;  le  bout 
opposé  porte,  au  contraire,  une  large  croix  pattée, 
gravée  à  la  pointe  du  pic,  et  cernée  d'un  trait  en 
bordure.  Les  deux  faces  latérales  sont  couvertes  de 
petits  sillons  ornementaux  en  arêtes  de  poisson, 
rormant  un  rectangle  qui  se  trouve  limité  par  un 
trait  d'encadrement  et  une  bordure  de  hachures  diri- 
gées en  sens  inverse.  Aux  deux  bouts  du  rectangle, 
la  bordure  a  été  doublée  au  moyen  de  contreha- 
chures.  Le  tout  a  été  exécuté  sommairement,  à 
main  levée;  certains  traits,  gravés  de  travers,  ont 
clé  redressés  au  moyen  d'une  seconde  entaille. 

Tous  ces  détails  nous  autorisent  à  penser  que  ces 
sépultures  datent  de  l'époque  carolingienne,  du 
vin*'  au  xi*"  siècle  (1).  On  sait  que  l'abbaye  de  Sainte- 
Colombe  fut  fondée,  en  620,  parle  roi  Clotaîre  IL 
augmentée  par  Dagoberl,  administrée  par  saint  Eloi, 
mais  que  le  premier  abbé  régulier  ne  fut  élu  que 
vers  la  fin  du  vn*'  siècle  (2). 

La  cour  de  la  ferme  de  Sainte-Colombe  est  située 

(1)  Cf.  liuUetin  de  la  S<tc.  des  antiquaires,  1870,  p.  Kl. 

\2)  Voir  //i5/.  i\e  l'ahhaye  de  Sainte-Colombe,  par  l'ablM*  Brullée. 


g 


■À 


^ 


Bergeries 


flç 


ce 


o 

3 
> 
2 
O 
n» 


Ferme  de  S?  Colombe 


Echelle  de  OTOOnp'^M*: 


M. 


fchelle  de  0TO5  p5>I'.' 


E  P 


t*. 


'J       I 


y 


^ 


—  313  — 

en  dehors  de  Tenceinte  de  Tancienne  église  abba- 
tiale et  de  son  cloître;  elle  était,  dès  le  moyen  âge, 
consacrée  aux  services  ruraux  deTabbaye.  On  peut 
conclure  de  là  que  le  cimetière  que  nous  venons 
de  découvrir  remonte  à  une  époque  plus  reculée  et 
qu'il  était  consacré,  non  aux  moines  ordinairement 
inhumés  dans  le  cloître,  mais  aux  serviteurs,  aux 
bienfaiteurs  des  moines,  ou  aux  chrétiens  désireux 
de  reposer  aux  pieds  de  la  vierge  martyre.  Le  pape 
Adrien  IV,  en  confirmant  par  une  bulle  les  privilèges 
de  l'abbaye,  avait  eu  grand  soin  de  rappeler  celui- 
là  :  a  Nous  accordons  aussi,  disait-il,  liberté  de  sé- 
pulture en  ce  même  lieu,  et  voulons  que  personne 
ne  s  oppose  à  la  dévotion  et  à  la  dernière  volonté 
de  ceux  qui  auront  résolu  de  s'y  faire  inhumer.  » 
IJ  convient  de  rapprocher  de  celle  découverte 
celle  quiaété  faite  en  1869.  (Bullelin  de  la  Soc.  arch,, 
t.  X,  p.  358elsuiv.) 

J.  Perrin. 


—  :îi*î  — 

des  Vaûlessurbabî^eeH  et  par  le  t'ône  U'clioulenie 
ceitlral.  Anne  clc  torrhcs  de  papier,  puis  dimc  bo 
gîe,  je  me  Iralnttt  à  plal  veiiîre  le  Urn^  de  la  par 
el  massLuai  que.  nulle  part,  n'a |)punvissait  îiihui 
trace  du  Innail  de  rhninine,  rareeau  de  la  voù 
des  culs-de-sac  s'élant  foniie  naturel leiiienl  par 
dêlachcnienl  régulier  de  morceaux  de  niarue,  hh 
clivés  el  porlaiil  la  Irace  mû  de  radicelles  de  véj 
taux,  soil  triniilhations  ari^ileUHeîi. 

Dans  ces  conditions,  la  eonctusiou  slnipose, 
n'y  a  pas  de  sou  1er  rai  u,  mais  une  simple  dîada 
de  la  craie»  ayant  produit  des  érusicms  inUrnes, 
la  manière  des  hctoires  ou  aliimes*  si  frêquer 
dons  la  vallée  de  la  Vanne. 

Les  eaux  pluviales,  rapidement  absorbées  p 
les  lerres  arables  de  !  étroit  (ilnteau  de  la  CJiapcll 
Saint-Ciermaîn,  se  sord  infiltrées  datis  la  [joche  ; 
gileuse  fonnantdtVme  au-dessus  de  ma  tête,  (^onir 
elles  étaient  chargées  de  Tacide  carbonique  de  la 
elles  ont  attaqué  constamntenl,  au  cours  des  s 
des,  la  eraie  marneuse  et  leiulre  du  snns-suL  Eli 
en  ont  [jeu  à  peu  dissous  les  parois,  et  les  emprui 
suceessirs  de  earbonales  de  ebaux  qu'elles  y  c 
faits  ont  Inn  par  praliciuer,  dans  les  zones  dé^ayi 
gées,  les  gi^otles  (|ue  nous  voyons  el  qui  se  pruj 
genl  sans  dotde  en  s'aluiissant  au  delà  des  eulsn 
four  que  nous  apercevons.  Sui'  lui  point,  la  voi 
de  craie  a  cédé,  pioduisant  Tentonnoir  d'etTond 
înent  par  où  nous  scmimes  descendu  ;  et  où  de  no 
breux  trous,  analogues  à  des  teiTÎers,  attestent  le  t 
vail  persévérant  el  corrosif  des  eaux  supérieures 


—  317  — 

Ainsi  s'explique  rexislence  de  la  fontaine  Saint- 
(ierniain,  qui  sort,  sur  le  flanc  du  coteau,  à  30  ou 
40  mètres  plus  bas,  et  à  300  mètres  environ  du 
point  de  notre  diaclase.  Elle  parait  à  une  profon- 
deur de  7  à  8  mètres  et  ne  tarit  presque  jamais.  De 
nos  jours,  elle  rafraîchit  les  moissonneurs  altérés; 
autrefois,  elle  guérissait  les  fiévreux  par  l'invocation 
du  saint  évêque  d'Auxerre,  qui,  bénissant  ses 
eaux,  lors  de  son  passage  dans  nos  contrées,  dut 
y  détruire  les  supersititions  païennes  dont  les  vieux 
Celtes  entouraient  les  fontaines  et  les  sources. 
Celle-ci  ne  s'écoule  pas;  avant  d'avoir  été  recouverte 
d'une  voûte  de  maçonnerie,  à  laquelle  on  accède 
par  un  escalier  de  grès,  elle  devait  occuper  le  fond 
d'un  entonnoir  d'efi^ondrement,  analogue  au  nôtre, 
maison  passait  le  niveau  piézométrique  de  la  nappe 
d'eau  que  retenaient  les  cavitcis  supérieures  de  la 
craie  marneuse  et  que  supportait  la  couche  de  craie 
blanche  compacte  et  peu  perméable  qui  succède  à 
la  marne.  Le  niveau  de  la  fontaine  Saint-Germain, 
en  vertu  de  la  théorie  des  vases  communiquants, 
monte  ou  descend  suivant  que  la  petite  nappe  sou- 
terraine qui  Talimente  est  plus  ou  moins  abon- 
dante. 

La  Société  archéologique  n'a  aucune  fouille  à 
opérer  sur  ce  point,  mais  la  découverte  qui  lui  a  été 
signalée  lui  aura  permis  de  faire  une  constatation 
très  intéressante  sur  l'origine  d'une  fontaine  que  sa 
situation  très  élevée  a  toujours  rendue  mystérieuse 
aux  anciens  habitants  de  la  contrée. 

Quant    à    la    tradition    relative  au  passage   de 


^ 


—  318  — 

saint  Germain  d'Auxerre  dans  cette  contrée,  elle 
est  très  vraisemblable,  encore  qu'elle  ne  soit  pas 
rapportée  dans  sa  vie  écrite  par  Constance.  Saint 
(lermain  a  fait  deux  voyages  en  Anglelerre  :  le  pre- 
mier, en  429,  le  second,  en  446;  mais  le  biographe 
nv  donne  aucune  indication  sur  son  itinéraire.  On 
peut  supposer  que  le  saint  a  suivi  la  voie  romaine 
qui  va  de  Sens  à  Condate  (Montereau)  et  de  là  à 
SIelun  et  Paris.  C'est  dans  le  premier  de  ses  voyages 
qu'il  a  consacré  sainte  Geneviève  alors  enfant. 

La  chapelle  Saint- Germain,  située  sur  la  mon- 
tagne, non  loin  de  la  fontaine  de  ce  nom,  existait 
à  Tétat  d'église  dès  Tannée  1197  :  Ecclesia  sancli 
Gennani,  cum  capellà  super  Orosam  quœ  est  desancto 
Laurentio.  (Quantin,  Cart.  de  i Yonne,  t.  II,  p.  484.) 
Elle  devint  peu  à  peu  déserte,  par  suite  de  l'aban- 
don du  village  par  les  habitants,  qui  descendirent 
dans  la  vallée  et  se  groupèrent  autour  de  la  cha 
pelle  Saint-Laurent.  (Voy.  Quesvers,  Pouillé  du  dio- 
cèse de  Sens,  t.  I*%  p.  300.  Tarbé,  Almanach  de  Sens, 
17H9,  pp.  47  et  48.  BulL  de  la  Soc.  archéoL  de  Sens, 

t.  Il,  p.  22.) 

Joseph  Perrin. 

Février  1906. 


LISTE  DES  MEMBRES 

l>E      LA.    SOCIÉTÉ     ARCHÉOLOGIQUE     DE     SENS 
AU  31   DÉGElklBRE  i906 


MEMBRES  D'HONNEUR 

Mo>{SEiGNEUR  l'Archevêque  de  Sens. 
Monseigneur  Dizien,  évêque  d'Amiens. 
MM.   LE  Préfet  de  l'Yonne. 

LE  Maire  de  Sens. 

Héron  de  Villefosse,  membre  de  l'Institut. 

LE  COMTE  DE  Lasteyrie,  membre  de  l'Institut. 

LE  DUC  DE  Clermont-Tonnerre,  à  Ancy-le-Franc. 

MEMBRES  HONORAIRES 

MM.   Prudhomme,  docteur  en  droit,  juge  à  Lille. 
Paulin  Blondel  (l'abbé  ,  doyen  du  Chapitre. 
Raymond  Lorne  >{t,  docteur  en  médecine. 
Théophile  Mémain  (l'abbé),  chanoine  de  la  Métropole. 

MEMBRES  DU  BUREAU 

MM.  Joseph  Perrin,  président. 

Chartraire  (l'abbé),  vice-président. 
Barreau,  secrétaire. 
Dappoigny,  pro-secrétaire. 
Paul  Roy,  archiviste. 
Thorin,  vice-archiviste. 
Marquiand,  trésorier. 


iëm 


mn 

IM02 


1894 


1KÎÏ5 


1890 


1«97 


—  320  — 

MM  ^^"^^^»*«ES  TmiLAfHi 

DLciioiiN  l»iiul,  imprimeur 
l>iiiuux  Joseph,  (>  *î,  S  (i.,  a  vocal 
Ki,Kv  Louis,  setîlpteur. 
BEAtrKiL JN  licornes,  îivocat. 

crtlafrc(k-  lArclievt^ché. 
PAtiKiiji,  iitdu&trtcL 
Pguk  Hiïcnnc,  greffier  en  chef  du  M 
Bauillon  (1  ablKi,  vicaire  gênérul, 

de  rArcliûvêchi*. 

ToLi>\%  Il  A.,  professeur  de  musiqw 

HoY  Pnul,  |*ropriélaîre, 

OtiM.KT  (lublKM,  doycu  ile  Saîul-Ma 

Hbnahu  Henri  phanuacien. 

Blvigsikh  Pnnl,  *fr  {> .  .j,^  chef  de  ha 

Houssi-Luî  Léon,  a  A,  architeele 

NixoT,  phnrmacien 

Deciiamtmik  Louis,  iiotnire, 

LAiita^NA  Lucien,  docleur  en  médccî 

Mahqi^jaku  Jules,  natairc. 

CotoviUKT  Henri,  eemimi^saire  priî^c 

Chosikh  Paul,  industrieL 

riF:jiAnn  Paul,  n vocal,  doeieur  en  dr 

Abuat  ïllppolyte,  proprielairc, 

I>Ji;.STOMHJ£s  Paul,  avocaL 

Baiu;v,  pharmacien, 

Solumasx  Paul,  professeur  ao 

nu  Thayni^l  Oclave,  proprii'taîre 

Chandksieh  Fi^iix,  propHéJaire. 

Fa  un  fi:,  dorlcur  en  métiecine, 

Rov  Maurice,  O  I  ,  con^iCiilcr  référcn 

eî>mptès. 
(kioLLOT  (ralibéi,  prèlre  sacristain 
Doi  îïLOT  Lucien,  notaire. 
CÔTE  (lalihtn,  chanoine  honoraire,  a 


—  321  — 
M>f. 

1901  Lehmann,  graveur  imprimeur. 

—  Caillet  Casimir,  *R*  O.,  médecin  principal  de  Tarmée, 

en  retraite 

—  Caron  Benjamin,  pharmacien. 

1903  Thorix  (médaillé  militaire),  ancien  commis  greffier 

près  le  tribunal  civil. 

—  Venot  Henri,  agent  d'assurances. 

—  Dappoigny,  architecte. 

—  Lac  AILLE  Alfred,  propriétaire. 

—  MoREAU  René,  docteur  en  médecine. 

—  Bailly-Salin,  docteur  en  médecine. 

—  Belot,  industriel. 

1904  Heurtefeu  Théodore,  professeur  au  lycée. 

—  SiMONNET,  notaire  à  Egriselles-le-Bocage. 

—  de  Cussac,  inspecteur  des  eaux  et  forêts. 

—  Gexty,  directeur  de  la  Banque  de  France. 

—  Barraux,  conducteur  des  ponts  et  chaussées. 

—  Baudry,  industriel. 

—  Morel  Auguste,  industriel. 

—  Virally,  pharmacien. 

—  Laboise  Louis  (l'abbé),  curé  de  Saint-Savinien. 

—  Prou  Maurice,  ^.  professeur  à  TEcole  des  chartes. 

1905  Corberon  Paul  (l'abbé),  aumônier  de  la  Providence. 

—  Heure  Paul,  0  1.,  bibliothécaire  de  la  ville. 

1906  PoiGET,  professeur  de  philosophie  au  Lycée. 

—  SÉPOT  René,  agent  principal  d'assurances. 

MEMBRES  LIBRES 
MM. 

1871  Hatton  Eugène,  *  O.,  21,  rue  Monsieur,  à  Paris. 
1878  DE  Flamare,  archiviste  du  département  de  la  Nièvre. 

1891  PopoT  Henri,  dessinateur  à  Paris. 

1892  LouziER  Sainte-Anne,  ^,  architecte  du  gouvernement, 

à  Paris. 

—  Martin  Léon,  conimissaire-priseur  à  Grenoble. 

1893  Chéreau  Louis,  Q  A.,  conseiller  général,  à  Serbonnes, 

21 


_  322 

MM. 

1993  Petit    le  docteur),  it, 
PoDt-sar-Toaiie. 

—  DoNDENNE  chanoine,  doyen  de  Toncj  iToww). 

—  Mabtin  Charles,  aToné  à  Paris- 

1894  RocuN,  docteur  en  médecme,  à  Parisw 

—  Deugand  Georges,  avocat  à  la  Coor  d*appely  à  Pvn. 

—  Malrot  Louis.  4ft  »&  O.,  a  À.,  chef  de  batailk»  en 

retraite,  25,  rue  des  Ecoles,  Pteis. 

—  ViLLETARD  (Fabbé),  à  Sligny,  près  Tonnerre  (Yœoe). 

—  Bocvyer  Edgard,  à  Tours  (Indre-et-Loire). 

~    BoNNEAC  dabt^é»,  curé  doyen  de  Chablis  (Yonne). 

—  Chandenier  Louis,  entrepreneur  à  Joigny. 

1805  LioRET  Georges,  conseiller  général,  à  Moret  (Scioe-et- 
Marne). 

—  HoRSON  (chanoine),  doyen  de  ViIleneuye4ur-Yoiuie. 

1896  Deunotte  (chanoine),  supérieur  du  Séoiinaire  de  Joi- 

gny- 

—  Baillet,  agrégé  des  lettres,  à  Orléans. 

1897  Gaultry  Ferdinand,  à  Paris. 

—  LocvRiER  Maurice,  propriétaire  à  Saint-Sérolin. 

1898  Bertrand  de  Broussillon,  propriétaire,  au  Mans* 
1808  Feus  Georges,  sous-directeur  des  contributions  ^^ 

rcctes,  à  Montdidier  (Somme). 
lîKM)  Vignot  Charles,  propriétaire,  à  Paris. 
-     Pkknot  Paul  t l'abbé),  à  Paris. 

HoLiJN  Kdouard,  capitaine  d'ariillerie,  au  Mans. 

—  Lacihanck  Joseph,  chef  d'escadron  d'artillerie,  àD^**^*' 

1001  PoHKi:,  O  A.,  îirchivisle  de  l'Yonne. 

Tahhk  dkVacxclaihs  (M"«' Jenny),  au  château  deNa»^^^' 
près  Sens. 

1002  CiiAHTON  Jules,  ^  O.,  ingénieur  en  chef  honoraire  d^ 

chendnsde  fer  du  Midi,  rue  de  Sfax,  1,  à  Paris. 
HaciOt  d'abbé»,  curé  de  Champigny-sur- Yonne. 
lOO^J  Fliciii-:  Louis,  avocat  -h  la  (-our  d'appel,  1,  rue  de  l'W 
versité,  Paris. 
-    Tknaillk  d'Kstais,  avocat  à  Paris. 


—  323  — 
MM. 

3  MuLON  Henri,  notaire  honoraire. 

DiJOLS  Charles,  propriétaire  à  Chanipigny-sur-Yonnc. 
EspÉRANDiEU,  capitaine,  correspondant  de  l'Institut, 
route  de  Claniart,  59,  à  Vanves  (Seine). 

4  JoBiN  (Fabbé),  chanoine  titulaire,  à  Gigny  (Yonne). 
6  Chanvix  Constantin,  propriétaire,  à  Chablis. 

16  LiBERT  Léon,  au  château  de  Paron  (Yonne). 

-  Lasnier  ^,  ancien  receveur  des  finances,  à  Corbeil. 

-  DU  Mesnil  (baron),  au    château   du  Champ-du-Guet, 

près  Villeneuve-sur-Yonne. 

-  Fliche  Augustin,  à  Paris. 

-  Ramain  Georges,  docteur  es  lettres,  professeur  agrégé 

à  l'Université  de  Lyon. 

MEMBRES  CORRESPONDANTS 

M.  DE  Beaitv'illé,  à  Montdidier  (Somme). 

de  Belleval  (le  marquis),  ancien  sous-préfet. 

Besse  (dom),  directeur  de  la  Revue  Mabillon,  à  Chevc- 

togne  (Belgique). 
Cramail  Alfred,  rue  d'Alger,  5,  à  Paris. 
Defer  (l'abbé),  à  Traynel  (Aube). 

Desciiamps  F!mile (l'abbé),  chanoine  honoraire,  ù  Paris, 
DiDiOT  (l'abbé  1,  bibliothécaire  à  Verdun  (Meuse). 
DicAS,  conservateur  du  musée  de  Besançon  (Doul)s^. 
DupRÉ,  notaire  à  Montcreau. 
Drot,  ancien  attaché  aux  archives  de  l'Yonne. 
Gandelet,  à  Verdun. 

Genevoix  François,  docteur  en  médecine,  à  Paris. 
GiHAUD  (l'abbé),  chanoine  honoraire  de  la  Métropole, 

curé  d'Etaules (Yonne). 
GouRKAiGNE,  aucicu  professeur. 
HouLHEKT   Constant,  docteur   es  sciences,  professeur 

au  lycée  de  Rennes  illle-et-Vilaino. 
Lefort  Lucien   ^,  architecte  du   département  de   la 

Seine-Inférieure,  à  Rouen. 


—  324  — 
MM.  Maurice,  àBcllières,  près  Pau  (Basses-Pyrénées). 

MiRON  DE  l'EsPINAY. 

MoNTANDONAmédéc,  à  Paris. 

Matignon  Camille,  agrégé  et  docteur  es  sciences, pro- 
fesseur adjoint  à  la  Faculté  des  sciences  de  Paris. 

MoREAU  Albert,  directeur  de  la  succursale  de  la  Ban- 
que de  France,  à  Verdun  (Meuse). 

Pelicier,  archiviste  à  Châlons-sur-Marne. 

PÉROT,  rue  Sainte-Catherine,  42,  à  Moulins  (Allier). 

Pinçon  (chanoine),  archiprétre  d*Auxerre. 

PissiER  (l'abbé),  curé  de  St-Père-sous-Vézelay  (Yonne). 

PouLUN,  O  ï»  préfet  honoraire  des  études  à  l'Ecole 
normale  des  instituteurs  de  la  Seine,  à  Paris. 

RÉGNIER  Edmond  (l'abbé),  curé  de  Villefranche-Saint- 
Phal. 

DE  Septenville,  BU  châtcau  de  Lignères  (Somme). 

SoREL,  président  du  tribunal  civil  à  Compiègne  (Oise). 

Tavoillot,  instituteur. 

TiROT  (Fabbé),  aumônier  de  Thospice  de  Ton  nerre. 


SOCIÉTÉS  CORRESPONDANTES 


I.  SOCIÉTÉS  FRANÇAISES 

Abbeville.  —  Société  d'émulation. 

Alger.  —  Société  historique  algérienne. 

Amiens.  —  Société  des  antiquaires  de  la  Picardie. 

—  Société  linnéenne  du  nord  de  la  France. 
Angers.  —  Société  d'agriculture,  sciences  et  arts. 
Angoulême.  —  Société  archéologique  et  historique  de  la 

Charente. 
Arras.  —  Académie. 
AuTUN.  —  Société  éduenne. 
AuxERUE.  —  Société  des  sciences  historiques  et  naturelles 

de  l'Yonne. 
AvALLON.  —  Société  d'études. 

Bar-le-Duc. — Société  des  lettres,  sciences  et  arts  de  la  Meuse. 
Bayeux. — Société  d*agriculture,sciences,arts  et  belles-lettres. 
Beaune.  —  Société  d'histoire  et  d'archéologie. 
Beauvais.  —  Société  académique  d'archéologie,  sciences  et 

arts  du  département  de  l'Oise. 
Belfort.  —  Société  belfortaise  d'émulation. 
Béziers.  —  Société  archéologique,  scientiGque  et  littéraire. 
Blois.  —  Société  des  sciences  et  lettres  du  département  de 

Loir-et-Cher. 
Bordeaux.  —  Société  archéologique  de  la  Gironde. 
Boulogne-sur-Mer.  —  Société  académique. 
Bourges.  —  Société  des  antiquaires  du  Centre. 

—  Société  historique,  littéraire  et  artistique  du 

Cher. 
Brest.  —  Société  académique. 
Caen.  —  Société  française  d'archéologie. 


—  326  — 

Cannes.  —  Société  des  sciences  naturelles,  historiques,  des 
lettres,  des  beaux-arts  de  Cannes  et  de  Tarrondis- 
sement  de  Grasse. 

Chalons-sur-Marne.  —  Société  d'agriculture,  commerce, 
sciences  et  arts  du  département  de  la  Marne. 

Chalon-sur-Saône.  •  -  Société  d  histoire  et  d'archéologie. 

Chartres.  —  Société  archéologique  d'Eure-et-Loir. 

Château-Thierry.  —  Société  historique  et  archéologique. 

Chateaudun.  --  Société  dunoise. 

Chaumont.  —  Société  archéologique. 

Cherbourg.  —  Société  académique. 

CoMPiÈGNE.  —  Société  historique. 

CoRBEiL.  —  Société  historique  et  archéologique. 

CoNSTANTiNE.  —  Société  archéologiquc  de  la  province  de 
Constantine. 

Dijon.  —  Société  bourguignonne  d'histoire  et  de  géographie 
de  la  Côte-d'Or. 
—  Commission  des  antiquités  de  la  Côte-d'Or. 

Douai.  —  Société  d'agriculture,  sciences  et  arts  du  dépar- 
tement du  Nord. 

DuNKERQUE.  —  Société  dunkerquoise  pour  l'encouragement 
des  sciences,  des  lettres  et  des  arts. 

Epinal.  —  Société  d'émulation  des  Vosges. 

Fontainebleau.  —  Société  historique  et  archéologique  du 
Gâtinais. 

Gap.  —  Société  d'études  des  Hautes-Alpes. 

Grenoble.  —  Société  dauphinoise  d'ethnologie  et  d'anlliro- 
pologie. 

GuÉRET.  —  Société  des  sciences  naturelles  et  archéologiques. 

Le  Havre.  —  Société  havraise  d'études. 

Langres.  —  Société  archéologique  et  historique. 

Lille.  —  Commission  historique  du  département  du  Nord. 

Limoges.—  Société  archéologique  et  historique  du  Limousin. 

Lyon.  —  Société  littéraire. 

Le  Mans.—  Société  d'agriculture,sciences  et  arts  de  la  Sarlhe. 

Le  Mans.  —  Société  historique  et  archéologique  du  Maine. 


—  327  — 

Marseille.  —  Société  de  statistique. 

Meaux.  —  Société  littéraire  et  historique  de  la  Brie. 

Mblun.  —  Société  d'archéologie,  sciences  et  arts  du  dépar- 
tement de  Seine-et-Marne. 

Montpellier.  —  Société  archéologique. 

MouuNS.  —  Société  d'émulation  de  l'Allier. 

Nancy.  —  Société  d'archéologie  lorraine  et  du  musée  histo- 
rique. 

Nevers.  —  Société  nivernaise  des  lettres,  sciences  et  arts. 

Nice.  —  Société  des  lettres,  sciences  et  arts  des  Alpes-Mari- 
times. 

Nîmes.  —  Académie  du  Gard. 

Niort.  —  Société  de  statistique,  sciences,  lettres  et  arts  du 
département  des  Deux-Sévres. 

NoYON.  —  Société  archéologique. 

Orléans.  —  Société  archéologique  de  l'Orléanais. 

Paris.  —  Société  des  antiquaires  de  France. 

—  Société  des  études  historiques. 

—  Société  française  de  numismatique. 
Perpignan.  —  Société  agricole,  scientifique  et  littéraire  des 

Pyrénées-Orientales. 
Poitiers.  —  Société  des  antiquaires  de  l'Ouest. 
Provins.  —  Société  d'histoire  et  d'archéologie. 
Rambouillet.  —  Société  archéologique. 
Reims.  —  Académie  de  Reims. 
Rennes..  —  Société  archéologique  d'Illc-et- Vilaine. 
Rouen.  —  Académie  des  sciences  et  belles-lettres  de  la 

Seine-Inférieure. 

—  Commission  des  antiquités  de  la  Seine-Inférieure. 
Rochechouart.  —  Sociétés  des  amis  des  sciences  et  arts. 
La  Rochelle. —  Académie  des  belles -lettres,  sciences  et 

arts. 
Saint-Dizier.  —  Société  des  sciences,  lettres  et  arts. 
SaiNT-EnENNE.  —  Société  d'agriculture,  industrie,  sciences, 

arts  et  belles-lettres  du  département  de  la  Loire. 
Saint-Omer.  —  Société  des  antiquaires  de  la  Morinie. 


—  328  — 

Saint-Qûentin.  —  Société  académique. 
Senlis.  —  Comité  archéologique. 

SoissoNS.—  Société  archéologique,  historique  et  scientifique. 
Toulon.  —  Académie  du  Var. 

Toulouse.  —  Académie  des  sciences,  inscriptions  et  belles- 
lettres. 

—  Société  archéologique  du  midi  de  la  France. 
Tours.  —  Société  archéologique  de  la  Touraine, 

—  Société  (J'agriculture,  arts  et  belles  lettres  du  dé- 

partement d*Indrc-et-Loire. 
Troyes.  —  Société  académique  de  l'Aube. 
Valence.  —  Société  d'archéologie  et  de  statistique  de   la 

Drôme. 

—  Société  d'histoire  ecclésiastique  et  religieuse. 
Verdun.  —  Société  philoniatique. 

Versailles.  —  Société  des  sciences  morales,  des  lettres  cl 

des  arts  de  Seinc-et-Oisc. 
Vitry-lk-F'rançois.  —  Société  des  sciences  et  arts. 

II.  SOCIÉTÉS  ÉTRANGÈRES 

Râle.  —  Société  archéologique. 

Rruxelles.  —  Société  de  numismatique  belge. 

Chevetogne( Belgique).  —  Revue  Mabillon, 

Chicago.  —  Académie  des  sciences. 

Christiania.  —  Académie  royale  frédéricienne  de  Nor- 
wège. 

Gand.  —  Comité  central  de  publication  des  inscriptions 
funéraires  et  monumentales  de  la  Flandre  orientale. 

Genève.  —  Société  d'histoire  et  d'archéologie. 

Kninu.  —  Société  archéologique  de  Kninu  (Dalmatie). 

Neufchatel.  —  Société  neufchAlcloise  de  géographie. 

Saint-Pétersbourg.  —  Commission  impériale  archéolo- 
gique. 

Stockolm.  —  Académie  royale  des  belles-lettres  et  des  an- 
tiquités. 

Trêves.  —  Commission  des  musées  de  Trêves. 

Washington.  —  Smithsonia  Institution. 


TABLE   DES   MATIÈRES 

DU  TOME  XXII 


Procés-vcrbaux  des  séances  tenues  en  1905 i  à  xlvii 

La  sépulture  du  Dauphin  et  de  la  Dauphine  dans  la  Cathédrale 

de  Sens,  par  M.  Tabbé  Chartraire 1 

Le  Docteur  Gastellier,  par  M.  le  docteur  René  Moreau.      .  249 

Uu  Pontifical  sénonais  de  la  bibliothèque  royale  de  Belgique, 

par  M.  Maurice  Prou 303 

Un  Cimetière  carolingien  à  l'abbaye  de  Sainte-Colombe-lez- 

Sens,  par  M.  Joseph  Pcrrin 310 

Une  Caverne  à  la  Chapelle  Saint-Germain,  près  de  la  Chapelle^ 

sur-Oreuse,  par  M.  Joseph  Perrin 314 


PLANCHES 

Pi.  Pages 

I.  Le  Dauphin,  portrait  par  Fredou 1 

II.  Médaillon  du  Dauphin  et  de  ses  (ils 16 

III.  Allégorie  sur  la  mort  d a  Dauphin 24 

IV.  Pompe  funèbre  de  Marie-Thérèse  d'Espagne  A  Notre- 

Dame  de  Paris 33 

V.  La  Dauphine,  pastel  de  La  Tour 40 

VI.  Le  Mausolée  (ensemble) 48 

VII.  La  Dauphine,  portrait  par^Fredou 53 

VIII.  Mort  du  Dauphin  et  de  la  Dauphine,  médaillons  desti- 

nés à  la  porte  Dauphine 60 

IX.  Allégorie  sur  la  mort  de  la  Dauphine G5 

X.  Le  Mausolée,  (détails) 81 

XI.  Le  Mausolée,  (détails)    .      * 96 

XII.  Le  Dauphin  et  la  Dauphine,  camée  de  Jacques  Guay.  113 

XIII.  Le  Chœur  de  la  Métropole  de  Sens 144 

XIV.  Portrait  du  docteur  Gastellier 249 

XV.  Le  Calvaire.  Miniature  du  pontifical  sénonais  de  Bruxelles  303 


h 

b 


BULLETIN 


DE    LA 


SOCIÉTÉ    ARCHÉOLOGIQUE 

DE  SENS 


BULLETIN 


DE   LA 


r l_ 


SOCIETE  ARCHEOLOGIQUE 
DE    SENS 


TOME  XXIII 


ANNEE  1908 


SENS 

DUCHRMIN,  IMPRIMEUH-ÉDITEUR 

1908 


INSCRIPTIONS  ROMAINES 

TROUVÉES  A  SENS  EN  1735  ET  1736 

correspondance  entre 

l'abbé  jean-basile-pasghal  fenel,  chanoine  de  sens 

ET  l'abbé  JEAN  LEBEUF,  CHANOINE  d'aUXERRE 


On  connait  déjà  quelques  détails  de  la  corres- 
pondance échangée,  à  la  fin  de  Tannée  1735  et  dans 
les  premiers  mois  de  1736,  entre  le  chanoine  Pas- 
chal  Fenel  et  le  célèbre  archéologue  auxerrois  Le- 
beuf,  à  Toccasion  de  la  découverte  de  plusieurs 
inscriptions  antiques  trouvées  dans  les  murailles 
romaines  de  Sens. 

Déjà  au  congrès  archéologique  de  France,  tenu 
à  Sens,  en  1847,  M«  Lallier,  président  de  la  Société 
archéologique,  avait  cité  quelques  passages  de  ces 
lettres  dans  son  rapport  intitulé  :  Détails  sur  les 
inscriptions  gallo-romaines  de  Sens. 

Plus  tard,  les  éditeurs  des  «  Lettres  de  l'abbé 
Lebeuf  »,  MM.  Quantin  et  Chérest,  publièrent  des 
extraits  des  lettres  de  Fenel  formant  la  réplique  à 
celles  du  chanoine  d'Auxerre.  Mais,  comme  on  en 
peut  juger  en  comparant  leur  texte  avec  celui  que 

1 


—  2  — 

nous  reproduisons,  ces  extraits  sont  d*une  brièvelc 
icgrcltable  et  un  grand  nombre  de  détails,  précieux 
pour  rhistoire  sénonaise,  ont  été  omis. 

C'est  donc  avec  raison  que  M.  Gustave  Julliol 
avait  projeté  de  publier  en  appendice  de  son  grand 
ouviîige  :  Inscriptions  et  Monuments  du  musée  gallo- 
romain  de  Sens  (1),  le  texte  intégral  de  cette  corres- 
pondance, copié  par  lui  sur  les  lettres  originales 
faisant  partie  de  la  collection  de  M.  Louis  de  Fon- 
taine, conseiller  général  de  TYonne. 

On  le  sait,  la  mort  prématurée  de  M.  Gustave 
Jiilliot  ne  lui  a  pas  permis  de  mettre  la  dernière 
main  à  son  étude  sur  le  musée  gallo-romain.  Le 
manuscrit  qu'il  avait  préparé  pour  l'appendice  n'a 
été  retrouvé  qu'après  Tachèvement  de  cette  publi- 
cation, au  nombre  des  papiers  offerts  à  la  Société 
archéologique  par  la  famille  de  M.  Julliot. 

La  Société  archéologique  n'a  pas  cru  pouvoir 
mieux  faire  que  de  publier  dans  son  Bulletin  cette 
étude  de  son  ancien  président. 

(Il  Voir,  pages  9  et  112,  des  renvois  a  cette  publicaUon  projetée. 


fcL 


—  3  — 

L'ABBÉ  FENEL  A  L'ABBÉ  LE  BEUF 

A  Sens,  ce  vendredi  21  octobre  1735. 
c  Monsieur, 
<  Je  répons  un  peu  tard  à  la  lettre  que  vous  m'avés  fait 
l'honneur  de  m'écrire  le  7  du  courant,  ce  sont  les  embarras 
de  la  vendange  qui  sont  cause  de  ce  retardement.  Je  com- 
mence par  vous  annoncer  la  découverte  de  deux  inscrip- 
tions véritablement  antiques  et  romaines  dans  cette  ville, 
après  quoy  je  répondray  à  la  vôtre  et  à  celle  qui  y  etoit 
incluse  et  sur  laquelle  vous  daignés  me  consulter  quoy  que 
vous  soyés  plus  en  état  que  moy  d'y  satisfaire  pleinement. 
Cette  découverte  fut  faite  le  29  septembre  dernier,  mais 
comme  elle  a  été  accompagnée  et  suivie  de  quelques  cir- 
constances singulières,  je  ne  me  contenteray  pas  de  vous 
envoyer  ces  inscriptions  toutes  nues  avec  l'explicatiop  que 
j'y  donne,  je  vous  feray  l'histoire  de  cette  découverte  et  de 
ce  qui   y  a  donné  lieu,  et  je  feray  sur  le  tout  quelques 
réflexions,  si  vous  le  trouvé  bon. 

Il  y  avait  depuis  plus  d'un  siècle,  vis  à  vis  la  porte 
Commune  de  Sens  (anciennement  dite  de  St-Pregts  parce 
qu'elle  mène  au  faubourg  de  ce  nom)  (1)  une  grosse  masse 
de  terre,  dont  on  avoit,  selon  toutes  les  apparences,  voulu 
faire  une  demi-lune  pour  couvrir  et  défendre  cette  porte  ; 
mais  elle  etoit  demeurée  imparfaite  et  n'etoit  revêtue  que 
d  un  côté  ;  il  y  avoit  au  dessous  un  large  et  profond  fossé 
dans  lequel  un  petit  bras  de  la  rivière  de  Vanne  (2)  prenoit 
son  cours,  et  le  grand  chemin  (3)  tournoit  autour  de  ce  fossé 

(t)  CeUe  porte  fut  démolie  en  1772  et  remplacée  en  1777  par  un  arc  triom- 
phal qui  reçut,  en  souvenir  du  Dauphin,  flls  de  Louis  XV,  le  nom  de 
Porte  Dauphine.  En  1871  on  donna  à  cet  arc  le  nom  de  Porte  d'Alsace  et 
on  le  jeta  par  terre  en  1883. 

(2)  Une  dérivation  du  ru  de  Mondereau,  faite  au-dessous  de  Tabbaye 
de  Saint-Jean,  ai^ourd'hui  THâtel-Dieu. 

(3)  La  route  de  Paris  à  Lyon  qui  suivait,  dans  la  traversée  de  Sens,  le 
faubourg  Saint-Didier,  la  rue  de  l'Ecrivain,  le  bord  du  fossé,  et  le  faubourg 
Saint-Pregts.  L'ancienne  poste  aux  lettres  se  trouvait  dans  la  rue  de  l'E- 


_  4  — 

pour  aller  gagner  la  grande  rue  du  fauxbourg.  Cela  rendoit 
ce  chemin  non  seulement  très  tortueux,  et  par  conséquent 
désagréable,  mais  encore  dangereux,  car  on  avoit  Texemplc 
de  plusieurs  voyageurs  qui,  dans  des  temps  de  brouillard 
ou  d'obscurité,  et  croyants  que  le  chemin  alloit  tout  droit. 
étoient  tombés  dans  le  fossé,  qui  n'étoit  revêtu  d'aucun 
parapet.  Tous  ces  inconvénients,  joints  a  la  parfaite  inuti- 
lité de  cette  masse  de  terre  informe,  ont  déterminé  le  corps 
municipal  à  faire  détruire  cet  ouvrage,  après  avoir  eu  les 
permissions  nécessaires,  et  à  combler  le  fossé  en  cet  endroit 
pour  faire  une  grande  esplanade  dont  on  pourra  faire 
cnsuitte  une  Ires  grande  et  belle  place  ou  marché  (li. 
ou  du  moins  un  lieu  de  promenade  en  y  plantant  des  arbres 
A  l'égard  de  l'écoulement  de  l'eau,  on  a  pratiqué  un  aqueduc 
ou  canal  le  long  des  murs  de  la  ville,  sous  terre  ;  et  ainsi 
l'eau  aura  son  cours  sans  incommoder  le  public. 

En  démolissant  cette  demi-lune,  on  a  trouvé  plusieurs 
vestiges  de  la  précipitation  avec  laquelle  cet  ouvrage 
avoit  été  construit;  cet  endroit  avoit  été  autrefois  la 
place  où  étoit  situé  en  partie  un  Hôtel -Dieu,  fondé  par 
un  seigneur  nommé  Garnier  du  Pré  (2).  Cet  hôpital  ou 
Hôtel  Dieu,  qui  touchoit  au  mur  de  la  ville,  avoit  été 
démoli  quand  on  lit  les  fossés  de  la  ville,  dans  le  temps  de 
de  la  prison  du  roi  Jean  (3),  et  il  n'en  étoit  resté  qu  une 

crlvnin  ù  Tangle  de  la  rue  de  TEpéc.  maison  encore  habitée  il  y  a  quelqun 
années  par  Mlle  Lequcux,  descendante  de  l'un  des  anciens  directeurs  df 
la  poste  à  Sens. 

(1)  Depuis  peu  de  temps,  on  y  a  installé  le  marché  au  fourrage. 

(2;  Cette  maison-Dieu,  fondée  au  commencement  du  xiii*  siècle,  fut  dé- 
molie en  1358,  lors  de  la  réfection  des  fossés  de  la  ville.  La  poterne  qu'on 
voit  encore  dans  le  mur  de  ville  à  Test  de  la  porte  Dauphine,  porUit  )r 
nom  de  Poterne  de  Garnier-des-Prés  Garnerius  a  Pratis  que  l'abbé  Fenel 
appelle  du  Pré.  Je  ne  connais  pas  les  raisons  qui  ont  conduit  M.  Albert 
Hédiard  {Bulletin  de  la  SocitHé  archéologique  de  Sens,  t.  VI).  à  placer  coKe 
maison-Dieu  en  face  de  la  poterne.  Peut-être  les  dépendances  s'éten- 
dalcnt-elles  de  la  Poterne  à  la  porte  de  Saint-Pregts. 

(3)  Taveau,  dans  son  Cartulaire  sénonais,  chap.  23,  dit  que  les  fosses  do 
la  ville  de  Sens  furent  commencés  en  1308,  et  cependant  chap.  4  il  analyse 


—  5  — 

chapelle  et  quelques  autres  édifices  qui  étoient  situés  sur 
le  bord  du  fossé.  Mais  cette  chapelle  fut  aussy  détruite 
lorsqu'on  fit  la  demi-lune  en  question,  en  1590,  comme  il 
parut  parTlnscriptionqueje  vais  rapporter,  qui  fut  trouvée 
peinte  en  caractères  noirs  dans  le  fond  d'un  reste  d'arcade 
de  cette  chapelle,  le  7  septembre  dernier  ;  il  n'est  pas  néces- 
saire de  vous  avertir  que  ce  n'est  pas  là  une  de  ces  inscrip- 
tions romaines  dont  je  vous  ay  parlé  cy  dessus,  mais  je  n'ay 
pas  cru  devoir  omettre  cette  particularité  que  l'arcade  de 
la  porte  de  cette  chapelle,  ou  de  quelque  édifice  prochain, 
éloit  encore  toute  entière  sous  terre  dans  Tinterieur  de  la 
demi-lune,  ainsy  que  quelques  restes  de  bâtiment,  ce  qui 
montre  que  cet  ouvrage  avoit  été  fait  avec  bien  de  la  promp- 
titude et  qu'on  n'avoit  démoli  que  ce  qui  se  pouvoit  ôter 
facilement.  Voicy  l'inscription  qui  etoit  peinte  figurée  exac- 
tement : 

H.  PRO  l'an  mil  V  C  IIII  XX.  X 

CUREUR  CE  LIEU  A  ÉTÉ  DÉMOLY 

PENDANT  LES  GUERRES  CIVILES 

MEUES    ENTRE  MESSIEURS   LES   PRINCES 

CATOLIQUES  ET  LES  ÉRÉTIQUES. 

Cela  nous  apprend  que  cette  demi-lune  avoit  été  faite 
dans  le  fort  de  la  ligue,  pour  laquelle  tenoit  alors  la  ville  de 
Sens,  et  peu  après  la  mort  funeste  de  l'infortuné  Henri  III. 

Vous  m'allés  demander  où  sontces  inscriptions  romaines, 
et  vous  m'allés  reprocher  que  je  m'écarte  bien  de  mon  sujet, 
mais  ne  vous  impatientés  pas,  sil  vous  plait,  cecy  nous  y 
mené  insensiblement.  Cette  première  trouvaille  (que  je  fus 
voir,  ainsy  que  tout  le  reste  des  habitants  de  cette  ville), 
me  fit  naître  la  pensée  que  peut-estre,  dans  le  reste  de  cette 
démolition  ou  des  ouvrages  qu'on  devoit  faire  pour  l'aque- 
duc, on  pourroit  trouver  quelque  antiquité.  Cela  fit  que  je 

une  charte  de  Charles  V,  fils  aîné  du  roi  et  régent  en  France,  datée  du  3 
septembre  1358  accordant  des  concessions  aux  habitants  de  Sens  en  con- 
ùdération  de  ce  qu'ils  avoyent  faict  faire  de  nouvel,  d  leurs  despens,  les 
foassez  de  ladicte  aille. 


—  6  — 

recommanday  à  quelques  uns  de  mes  amis,  qui  alloient  tous 
les  jours  voir  ces  travaux,  de  veiller  si  on  ne  trouveroil 
rien  ;  mon  attente  ne  fut  pas  trompée,  on  vint  me  dire  le 
29  septembre  qu'en  ôtant  la  terre,  qui  estoit  le  long  du  mur 
de  la  ville,  à  vingt  pas  à  gauche  de  la  porte  Commune,  pour 
y  bâtir  des  latrines  publiques,  on  avoit  trouvé  deux  inscrip* 
tions  antiques  en  lettres  capitales  romaines.  J'y  courus, 
comme  vous  pouvez  bien  penser,  et  je  trouvay  les  deux 
inscriptions  suivantes  sur  deux  pierres,  un  peu  audessous 
du  niveau  du  chemin  public,  encastrées  et  faisant  partie  du 
mur  de  la  ville,  elles  a  voient  étés  couvertes  jusqu'à  ce  mo- 
ment par  la  terre  qui  venoit  en  talus  depuis  le  fond  du  fossé 
le  long  du  mur  jusqu'à  3  ou  4  pieds  en  dessus  des  assises 
de  pierre  où  etoient  ces  inscriptions;  voilà  pourquoy  elles 
ont  étés  si  longtems  ignorées  et  en  même  temps  si  bien  con- 
servées. Voicy  la  première  : 

s.  VESTAB  M 

Il  s'agit  d'abord  de  constater  la  véritable  lecture  de  ces 
lettres  :  la  pénultième  est  constamment  mal  formée  par  le 
bas,  la  pierre  ayant  été  mangée  ou  usée  en  cet  endroit,  et 
je  crus  d'abord  que  c'étoit  une  F;  mais  le  sentiment  le  plus 
général  fut  que  c'étoit  une  E.  Les  lettres  ont  4  pouces  de 
long,  rv  4  pouces  aussy  de  large.  Il  y  a  constamment  un 
point  triangulaire  très  bien  formé  entre  l'S  et  l'V.  On  a  dis- 
puté s'il  y  en  avoit  un  aussy  entre  les  autres  lettres,  et  Ton 
y  voit  à  la  vérité  quelques  inégalités;  mais  elles  ne  sont  pas 
à  la  place  où  elles  dcvroient  estre  pour  faire  des  points,  et 
s'il  y  en  a  eu  quelqu'un,  ce  ne  peut  estre  qu'entre  l'E  et  TM 
de  la  fln  ;  mais  il  n'en  paroit  plus  rien  aujourd'huy,  s'il  y  en 
a  jamais  eu,  la  pierre  étant  plus  maltraitée  en  cet  endroit 
qu'ailleurs.  Les  jambes  extérieures  de  l'M  sont  inclinées  en 
dehors  par  en  bas.  L'inscription  est  de  même  longueur  que 
la  pierre  et  a  3* pieds  4  pouces  ou  environ.  On  voit  très  bien  j 
que  la  pierre  a  été  polie  exprès  pour  mettre  cette  ligne, 
car  au  dessus  il  y  a  une  saillie  qui  est  en  quelques  endroits 
de  5  à  6  lignes  d'épaisseur,  laquelle  saillie  est  de  la  même 


pierre  et  est  brute  et  à  peu  près  comme  on  fait  les  bossages 
dans  certains  bâtiments  a  qui  on  veut  donner  un  air  cham- 
pêtre (1).  Toutes  ces  remarques  trouveront  leur  place  dans 
la  suite. 

Quand  à  Tinterprétation  et  au  cas  que  nos  citoyens  fai- 
soient  de  cette  antique,  je  trouvoi  qu'on  la  méprisoit  fort. 
Grand  nombre  de  personnes,  qui  regardoient  les  travaux 
de  la  demi-lune,  ne  savoient  seulement  pas  qu'on  avoit 
trouvé  une  inscription  à  20  pas  de  là.  Il  fallut  que  je  les  en 
avertis.  On  se  transporta  sur  la  place  et  j'entendis  qu'on  y 
donnait  l'explication  suivante,  en  prenant  toutes  les  lettres 
pour  initiales  : 

Super  Vrbem  Erit  Spes  Tua,  Attamen  Erit  Mors. 

J'eus  beau  faire  et  beau  dire,  on  répéta  avec  emphase 
cette  belle  explication  et  à  peine  vouloit-on  m'écouter  quand 
je  vis  qu'il  falloit  trouver  tout  autre  chose.  Je  vous  ay  déjà 
dit  que  je  crus  que  la  pénultième  lettre  étoit  une  F,  en  sorte 
que  j*expliquay  d'abord  l'inscription  en  la  façon  suivante  : 

Solutum  Votum  EST  A  Filio  Mœrente. 

Cette  explication  ne  valoit  rien,  et  je  n'en  etois  pas  bien 
content  moy-même,  mais  je  ne  pouvois  pas  mieux  trouver 
dans  la  prévention  où  j'étois  que  la  pénultième  lettre  étoit 
une  F.  De  plus  le  point  triangulaire  entre  S  et  V  n'étoit  pas 
encore  décrassé.  Ce  qui  me  faisoit  peine  est  que  cette  expli- 
cation supposoit  une  fin  d'épitaphe,  et  qu'il  n'y  avoit  néant- 
moins  rien  d'écrit  dans  la  partie  supérieure  de  la  pierre. 
D'ailleurs  je  voyois  que  tout  le  monde  lisoit  une  E.  Enfin 
je  ne  trouvois  pas  beaucoup  d'exemples  que  le  mot  EST 
fût  écrit  tout  au  long  dans  ces  sortes  d'inscriptions,  et  sur- 
tout dans  celle-cy  qui  est  si  courte. 

Je  me  retiray  donc  chez  moy  pour  écrire  ce  que  je  venois 

(Ij  Cette  sailiie  n*est  autre  chose  que  les  restes  mutilés  d'une  corniche 
que  nous  avons  trouvée  intacte  sur  deux  pierres  appartenant  à  la  grande 
inscription  dont  fait  partie  la  pierre  qui  occupe  l'abbé  Fenel. 


—  8  — 

de  voir;  et  en  chemin,  je  trouvay  tout  d'un  conp  la  vraye 
explication  qne  Toicy  : 

Sacrum  VEST.E  Matri  (1) 

Je  vis  bien  qu'il  fallait  lire  E  à  la  pénultième.  C'étoit  1  in- 
scription d*un  temple  dédié  à  la  déesse  Yesta.  Je  n*ay  pas 
besoin  de  vous  dire  qu*il  y  avoit  deux  Vesta,  et  qull  y  en  a 
une  qui  est  appelée  Mater  dans  plusieurs  inscriptions  anti- 
ques. Je  vous  prie  de  me  dispenser  d  entrer  dans  la  généa- 
logie et  rhistoire  de  madame  Vesta;  cela  ne  feroît  que  yods 
ennuyer  et  moy  aussy  (2).  On  pourrait  expliquer  TM  par 
Magnm, 

J'écrivis  sur  le  champ  ma  nouvelle  explication,  et  je  l'en- 
voyai à  celuy  qui  m'avoit  donné  avis  de  cette  découverte 
afin  qu'il  en  donnât  le  vray  sens  à  tous  ceulx  qui  luy  en 
parleroient  ;  on  fit  diverses  objections  contre  mon  explica- 
tion, on  dit  que  toutes  les  lettres  étoient  initiales,  et  que  si 
elles  ne  Tétoient  pas,  il  falloit  lire  : 

Sacra  VESTAE  Mœnia. 

Je  laisay  dire  les  fantasques,  et  pour  me  diveriir,  je  fis 
encore  courir  une  autre  explication  que  je  savois  bien  n'es- 
tre  pas  bonne  ;  mais  je  voulois  voir  l'effet  qu'elle  feroil  et 
je  supposois  toutes  les  lettres  initiales  : 

Senonum  Vrbs  Est  Sub  Tutela  Âpollinis  Et  Mercurii. 

En  vérité,  elle  auroit  fait  fortune  sans  le  point  triangulaire 

Mais  il  faut  continuer  l'histoire  de  ma  découverte.  Je  fis 

savoir  à  Mgr  l'Archevêque  (3)  qu'on  avoit  trouvé  des  inscrip- 

(i)  Par  celte  Intcrprétntion  le  futur  ncadi^micien  Fenel  s'npprochaitdf  la 
vérité  :  tnnis  il  n'était  pas  encore  dans  le  vrai,  comme  il  en  était  comnincQ. 
Il  a  eu  tort  de  lier  les  lettres  A  et  E  qui  sont  distinctes.  En  acceptant  rettr 
lecture,  M.  Leblanc,  dans  ses  Rechercha  historiques  sur  Auxerre,  1. 1,  p.  83. 
fait  de  la  pierre  le  piédestal  d'une  statue  de  Vesta. 

(2)  Certains  auteurs  admettent  l'existence  de  deux  Vesta  :  l'une  femmr 
de  Cœlus,  père  de  Saturne:  l'autre  fl lie  du  même  Coelus  et  deTrllusr/ 
femme  de  Saturne.  Cette  dernière  serait  conlondue  avcc  Cybéle. 

(3)  Monseigneur  Languet  de  Gergy,  ancien  cvéque  de  Soissons,  promu 
archevêque  de  Sens  en  1730. 


ions  antiques.  Il  fut  les  voir  le  lendemain  après  diner,  et  il 
roulut  que  j'eus  l'honneur  de  raccompagner.  On  commen- 
;oit  à  couvrir  de  mortier  celle  que  je  viens  de  vous  mar- 
quer. Une  heure  plus  tard,  notre  pauvre  inscription  rentroit 
ians  le  néant,  dont  elle  venoit  de  sortir.  A  la  prière  de  notre 
prélat,  on  ola  le  mortier,  on  lava  la  pierre  et  Ton  constata 
sa  lecture  ;  tout  le  monde  lut  une  E  à  la  fin,  et  il  demeure 
pour  certain  que  le  S(acrum)  VESTÀEM  (atrl)  étoit  la  seule 
vraye  et  légitime  explication.  (1)  L'on  conjectura  même  que  la 
partie  brute  de  la  pierre  étoit  un  bossage  afTecté  à  l'ordre 
rustique  ou  toscan  qui  décorait  ce  temple  de  Vesta. 

Mais  ce  ne  fut  pas  tout  ;  notre  prélat  demanda  aux  ouvriers 
si  Ton  ne  pourroit  pas  tellement  arranger  le  nouvel  édifîce 
qu'on  alloit  faire,  que  l'inscription  pût  toujours  paroitre. 
Les  ouvriers  déclarèrent  que  cela  étoit  impossible.  Sur  quoy 
le  maire  de  la  ville  proposa  de  faire  oter  cette  pierre  des 
murailles  et  d'en  remettre  d'autres  à  la  place.  Cela  fut  jugé, 
non  seulement  possible,  mais  très  facile.  On  ota  donc  la 
pierre.  Nouvelle  découverte  !  Il  se  trouva  qu'elle  étoit  taillée 
en  corniche  saillante  de  8  pouces  au  moins  dans  la  partie 
intérieure  du  mur  (2)  et  l'on  apperçut  dans  cette  extraction 
que  toutes  les  pierres  voisines  étoient  chargées  de  quelques 
ornements  d'architecture,  pareillement  dans  l'intérieur  du 
mur.  Et  comme  une  chose  en  amené  une  autre,  nous  apprî- 
mes par  le  témoignage  de  plusieurs  personnes  dignes  de 
foy  que  tous  ceux  qui  avoient  eu  occasion,  à  cause  des  ré- 
parations de  leurs  maisons,  de  faire  visiter  l'intérieur  de  ces 
murailles  de  la  ville,  avoient  trouvé  dans  toute  l'enceinte 
que  les  grosses  pierres  qui  font  partie  de  leur  masse  (sur- 
tout dans  les  fondations  et  aux  cotés  des  anciennes  portes) 
étaient  toutes  generallement  chargées  de  moulures,  de  corni- 
ches, de  fragments  de  pilastres  ou  de  colonnes,  ou  d'autres 


(1)  Rappelons  ici  le  vrai  sens  de  cette  inscription  aujourd  hui  com- 
plétée :  In  honorem...  deab  SANTisfs.  Vestab  MjAncus  Magimus  etc. 

(2>  Nous  avons  parlé  de  cette  corniche  dans  une  noie  précédente,  elle 
faisait  le  tour  du  monument. 


—  10  — 

ornements  d^architecture,  en  sorte  qu'il  est  clair  comme  le 
jour  que  toutes  ces  grosses  pierres  sont  des  débris  d'on  an- 
cien ediflce  très  superbe,  dont  toutes  les  parties  ont  été 
retournées  ou  renversées  de  dehors  en  dedans  (1),  parce 
que  sans  doute  que  les  constructeurs  de  ces  murailles  vou- 
loient  épargner  la  dépense  de  faire  tailler  ces  pierres  de 
nouveau,  et  que  ces  corniches  et  autres  ornements  occu- 
poient  toujours  quelque  place  dans  le  massif  du  mur,  et 
que  c'étoit  autant  de  matériaux  mis  en  place  (2). 

On  avoit  outre  cela  une  autre  raison  de  retourner  toutes 
ces  pierres,  on  vouloit  éteindre  et  abolir  entièrement  le 
souvenir  de  ces  anciens  ediflces,  tous  consacrés  à  Tidolatrie 
payenne,  et  c'est  pour  cela  que  les  inscriptions,  les  bas-re- 
liefs et  les  statues  etoient  toujours  mis  dans  Tinterieur  des 
murailles,  afin  qu'on  ne  pût  plus  les  voir.  Et  si  celle  d'au- 
jourd'hui a  été  mise  en  dehors,  vous  voyés  que  c'etoit  dans 
un  endroit  où  elle  étoit  couverte  de  terre,  et  parce  qu'il  fal- 
loit  mettre  nécessairement  la  corniche  en  dedans  du  mur  (3 

De  discours  en  discours,  on  en  vint  à  apprendre  que  Tod 
avoit  trouvé,  depuis  quelques  années,  un  bas-relief  repré- 
sentant une  déesse  payenne  dans  un  vieux  mur  que 
M.  Lhermite  de  Champbertrand,  lieutenant  général  de  Sens, 


(1)  Cette  opinion  de  Fencl  se  serait  modifiée  s'il  eût  vécu  jusqu'à  notir 
temps.  Les  pierres  taillées,  provenant  des  soubossements  des  murnilU^ 
romaines  de  Sens,  oppartiennent  A  des  édifices  bien  distincts  les  uns  di-s 
autres,  et  à  des  tombeaux.  Il  suffît,  pour  s'en  convaincre,  de  parcourir  k 
musée  lapidaire.  Dans  ces  murs  on  n'a  rencontré  que  fort  peu  et  peut-être 
pas  de  pierres  employées  comme  matériaux  neufs. 

(2)  Un  certain  nombre  de  corniches  sont  restées  intactes;  mais  beau- 
coup d'autres  ont  été  sapées  pour  établir  le  niveau  des  ossises  dans  h 
construction  ou  pour  d'autres  raisons. 

(3;  Nous  ne  partageons  pas  l'opinion  de  Fenel  qui  attribue  aux  rbrr- 
tiens  la  construction  des  murailles  romaines.  Nous  pensons  avec  M.  II. 
Schuermans  que  ces  murs  de  la  fin  du  iir  siècle  ont  été  bâtis  par  les  Ro- 
mains encore  payons.  Dans  les  fondations  de  ces  murailles  qui.  poureui, 
i^tjltnl  ffs  Mtnctœ,  ils  cachaient,  pour  en  empêcher  la  profanation,  les  lU- 
brh  tl<ï  leur»  temples  res  aacrœ  et  des  tombeaux  de  leurs  ancêtres  res  rxli- 


k 


—  H  — 

avait  fait  démolir,  pour  faire  une  serre  d'orangers.  (1)  L'on 
Gt  chercher  cette  pierre,  qu'on  eut  beaucoup  de  peine  à 
tirer  de  dessous  des  décombres,  où  elle  etoit  comme  ense- 
velie. On  la  tira  enfin  après  un  travail  opiniatre.Cest  un  bas- 
relief  qui  représente  une  femme  depuis  la  ceinture  en  haut  ; 
elle  élève  le  bras  droit  (qui  est  nû)  vers  sa  teste,  en  sorte 
que  la  partie  supérieure  du  bras  est  parallèle  à  Tborison. 
L  extrémité  du  bras  avec  la  main  manquent  totalement,  et 
Ton  ne  peut  dire  si  elle  y  tenoit  quelque  chose.  La  teste  est 
tournée  du  coté  droit  et  paroist  regarder  un  peu  en  bas  ;  le 
corps  paroit  aussy  tourné  un  peu  du  côté  droit  ;  mais  la 
figure  est  si  maltraitée  qu'on  n'en  peut  rien  dire  de  plus.  Ce 
qu'il  y  a  de  sûr,  e^t  qu'il  y  a  dans  V Antiquité  du  P.  de  Mont- 
faucon  plusieurs  figures  qui  ont  rapport  à  l'attitude  de 
celle-cy,  surtout  une  Cybèle  ;  que  le  goust  de  dessein  n'en 
paroit  pas  méprisable,  autant  qu'on  en  peut  juger  par  ce 
qui  en  reste  de  plus  entier,  qui  est  Tepaule  et  le  haut  du 
bras  droit  ;  que  la  iigure  est  incontestablement  antique  et 
payenne,  comme  les  circonstances  du  lieu  où  elle  a  été 
trouvée  et  de  toute  son  attitude  le  font  voir  évidemment  ;  et 
qu'enfm  il  y  a,  dans  l'A/i/içuiVé  expliquée  et  encore  plus  dans 
la  Relligion  des  Gaulois  du  P.  Martiii,  plusieurs  figures  qui 
méritoient  moins  que  celle-cy  d*estre  données  au  public. 
Si  les  auteurs  de  ces  livres  eussent  eu  connaissance  de  tout 
ce  que  je  vous  mande  aujourd'huy,  je  ne  doute  pas  qu'ils 
en  eussent  fait  un  article  plus  curieux  que  je  ne  le  puis 
faire  (2). 

Toutes  ces  découvertes,  faites  coup  sur  coup,  me  donnè- 
rent l'idée  d*examiner  les  murs  de  la  ville  plus  attentive- 


il)  M.  de  Champbertrand  prit*  pour  en  faire  une  orangerie,  la  grande 
ove  voûtée  qu'avait  fait  construire  Gamier  des  Prés,  et  pour  la  mettre  en 
communication  avec  la  partie  de  ses  jardins  qui  étaient  dans  le  fossé  de 
la  ville,  il  perça  le  mur  de  ville  et  y  lit  une  porte  qui  existe  encore  sous 
la  maison  de  M.  Ovide  Roy. 

<2i  Voir  (5e  que  nous  avons  ÛH  concernant  le  fragment  de  bas-relief  si- 
gnale par  lesavaut  abbé  à  propos  du  groupe  de  Diane  et  Endymion. 


iM 


elles  o'enMn 
a*  j  |ii6iiit  jpniB:. 

C'est  priiKipai]eiisBtfai< 
(|B'a  fint  (iliwi  PU 
rm  doatj/t 
eopent  le  btm  da  mar  dv 
iHfinfgnt  beaneiHip  pins  faB 
tAotaox  (foss  eotèa 
res  p«)rtefit  desi 
ft  été  aofrelhu  «émm  F 
ne  Miit  ^es  polies, 
tontes  de  ees  groasta 
noire  sor  les  pierres 
le  mortier,  alln  ipi'II  j 
on  ▼ient  à  co/aaidÊttr  ecs 
parer  a^ec  la  Caee  unie  et  pefi 
portes  de  la  ▼ille,  oo  j  %6d  mmt 
qoeUfoes  endrotto  do  mur  où  Fob  b'i 
pierres.  v>it  qa'on  n'en  ait  pas  en 
Ufut.  VMt  que  I  ftn  n  en  ait  voulu  mettre  qa'aax  eodroîts^ 
\ft  miir;ïillrr  f.u/ii  pius  en  danger  d'être  attaquée:  mv^f 
fTft'i^  fine.  tou%  les  fondements  en  sont  faits. 

Atf-df<;<vijs  fU'.  ces  pierres,  on  trouve  un  mur  construit^ 
\9Httf'%  pîerrcH  quarrées  rangées  par  assises  égales  «Tti^l 
m;irii^'rr;  trrs  régulière,  cl  ces  petites  pierres  sont  înleiroi»' 
piff's  en  troJH  endroits  par  trois  rangs  de  briqae  dont  oo 
voit  les  vestiges  dans  tout  le  pourtour  des  murs,  surtout^ 
I  endroit  des  tours.  Quand  je  dis  que  cette  construction  de* 
iiiiirs  est   iiniriirme,   il  faut  entendre  cela  avec  plusleoi^ 
lestrirtions  et  niiidifirnlions  ;  on  en  voit  assex  pour  jugei 


<li  f.«*«i  ifili'4  MU'**  pur  liiMii'  Fcncl  sur  l<*  p;in'mrnt  extôrieur  drsMV 
>|ii  II  «•liiflInH  M'iiiblnil  rire  (lii«-s  ti  un  nivnU-nioiit  fait  npr(>s  la  coostnM 

thill  fin  IIHII. 


—  13  — 

que  les  mars  ont  étés  faits  d'abord  de  cette  sorte,  mais  la 
nécessité  de  les  reparer,  le  changement  arrivé  depuis  l'ar- 
tillerie à  la  manière  de  fortifier  les  places  et  la  nécessité  de 
terrasser  les  murs,  tout  cela  a  dû  nécessairement  apporter 
bien  des  changements  à  la  première  construction.  En  effet, 
il  y  a  des  endroits  où  l'on  voit  que  le  mur  a  été  recrepi 
par  dessus  son  ancienne  masse  dont  on  voit  encore  les 
cordons  de  brique  au  travers  des  fentes  du  crépis  ;  dans 
d'autres  on  voit  un  mur  raccommodé  à  la  hâte  et  dans  le- 
quel on  n*apperçoit  plus  ces  assises  égales  des  petites  pier- 
res quarrees  ;  en  d'autres  on  voit  que  le  mur  a  été  crevé  et 
refait  très  irrégulièrement  ;  mais  enfin  il  en  reste  toujours 
assés  pour  voir  que  le  premier  édifice  de  ces  murailles  étoit 
composé  lo  de  ces  grosses  pierres  retournées  dont  je  vous 
ay  tant  parlé,  2"  de  petites  pierres  quarrees  posées  par  as- 
sises égales  et  de  trois  cordons  de  brique  posées  entre  les 
pierre  quarrees  et  qui  regnoient  tout  autour  de  la  ville.  Il 
faut  encore  observer  que  les  fossés  de  la  ville  n'ont  étés  faits 
que  du  temps  de  la  prison  du  roi  Jean  et  qu'avant  cela  les 
murs  etoicnt  absolument  sans  fossés  (1);  cela  se  peut  prou- 
ver par  une  infinité  de  documents,  et  Ton  conserve  ici  le 
livre  des  dépenses  journalières  qu'occasionna  l'exécution 
de  ces  fossés.  A  l'égard  des  portes,  leurs  massifs  sont  de 
pierres  qui  ont  été  certainement  taillées  exprès  pour  leur 
construction.  Cela  est  très  certain  (2). 

Il  faut  maintenant  raisonner  sur  tout  cela  et  resserrer 
nos  remarques,  pour  faire  un  corps  précis  qui  puisse  nous 


:1)  Fenel  est  ici  dans  Terreur  :  les  fossés  ont  été  creusés  de  nouvel,  et 
non  pour  la  première  fois  en  1358.  Voir  Notice  sur  l'Aqueduc  romain  de 
Sens,  par  MM.  Julliot  et  Belgrand.  Paris  Dunod,  1875. 

(2)  Ijcs  portes  dont  parle  Fenel  étaient  bien  moins  anciennes  que  les 
murs,  et  leur  âge  explique  la  différence  dans  la  taille  des  pierres  signalée 
par  Fenel.  De  son  temps  on  pouvait  encore  voir  trois  arcs  romains  faits 
de  claveaux  alternativement  en  pierre  et  en  brique.  Nous  avons  vu  dis- 
pîiraitrc  le  dernier  au  sud  de  la  porte  Formau.  II  est  regrettable  que  le 
savant  abbé  n'ait  pas  consigné  dans  sa  correspondance  les  remarques 
qu'il  n'a  pas  manqué  de  faire  à  leur  sujet. 


—  14  — 

apprendre  quelquechose.  Les  murs  de  la  ville  de  Sens  sont 
partout  pleins  de  pierres  qui  sont  des  débris  d'anciens  édi- 
fices :  donc  ces  murs  sont  postérieurs  au  tenis  des  RomaiDs 
et  bâtis  depuis  la  chute  de  Tldolatrie  (1).  Ces  murs,  dans 
leur  construction,  etoient  faits  uniformément  :  donc  l'en- 
ceinte présente  de  la  ville  de  Sens,  que  bornent  ces  mars. 
est  encore  postérieure  au  tems  des  Romains.  On  ne  peut 
m'objecter  que  l'on  n'a  fait  que  réparer  les  anciens  murs  et 
l'ancienne  enceinte,  car  si  cela  étoit,  on  ne  verroit  pas  toute 
cette  uniformité  que  j*ay  fait  remarquer  plus  haut.  De  plus 
il  n'y  a  aucune  apparence  qu'une  ville  qui  étoit  assez  forte 
du  temps  de  Julien  pour  que  cet  empereur  s'y  enfermât  et 
y  soutint  un  siège  de  la  part  des  Allemands,  qui  ravageoient 
alors  toutes  les  Gaules,  fût  destituée  de  fossés,  comme  Ven- 
ceinte  moderne  de  Sens  en  a  été  privée  jusqu'au  roy  Jean. 
Il  faut  donc  bien  que  l'enceinte  de  l'ancien  Sens,  û'Agendi- 
cum  du  temps  des  Romains,  ait  été  totalement  différente  de 
l'enceinte  de  Sens  moderne.  Savoir  présentement  où  étoit 
donc  anciennement  Agendicum^  et  si  l'on  n'a  fait  que  restrain- 
dre  l'étendue  de  ses  murs  trop  vastes,  ou  si  sa  position 
étoit  entièrement  diverse  de  la  ville  d'aprésent,  c'est  ce 
qu'il  n'est  pas  facile  de  décider  (2)  ;  pour  raoy,  je  croirois 


(1)  Les  inscriptions  les  plus  modernes  qu'on  ail  trouvé  dans  les  mur^ 
ne  dépassent  pas  les  premières  années  du  troisième  siècle  :  En  3S6,  le  césar 
Julien  trouvait,  dans  les  murs  de  Sens  construits  et  ayant  déjà  besoin  de 
réparations,  une  place  forte  qui  lui  permit  de  soutenir  pendant  un  moi^ 
le  siège  des  barbares.  On  doit  donc  considérer  les  murs  que  décrit  Ffn«l 
cl  dont  11  no  restera  bientôt  plus  que  le  souvenir,  comme  remontant  ù  b 
fin  du  troisième  siècle. 

(2)  Nous  croyons  que  la  ville,  bÂtie  par  les  romains,  avoit  englobé  r.t- 
gendicum  de  César,  et  que,  défendue  par  des  constructions  militaires  éle- 
vées au  confluent  de  la  Vanne  et  de  l'Yonne,  aujourd'hui  connues  sous  î« 
nom  de  Motte  du  Ciar,  elle  était  restée  et  resta  ville  ouverte  Jusqu'à  U 
catastrophe  de  la  fin  du  m*  siècle  qui  obligea  les  Romains  Sénonais  a  v 
construire  avec  les  débris  de  leurs  anciens  monuments  une  enceinte  for- 
tifiée. Autour  de  ces  murs,  ils  creusèrent  des  fossés  et  les  remplirent  9Sft 
l'eau  fournie  par  leur  aqueduc  (conduit  de  Saint-Philbcrt).  et  plus  tard 
par  une  dérivation  de  la  Vanne  prise  à  MAlay  (le  ru  de  Mondereau.) 


—  lo- 
que Agendicum  s'éteodoit  le  long  de  Teau  depuis  la  Motte 
du  Siarre  /l)  jusqu'à  l'endroit  où  sont  aujourd'hui  les  Ca- 
pucins (2),  en  sorte  que  sa  figure  etoit  celle  d'un  cercle 
coupé  par  la  moitié,  le  quay  depuis  la  Motte  jusques  aux 
Capucins  en  faisoit  le  diamètre,  et  la  figure  circulaire  des 
anciens  murs  alloit  jusqu'à  l'endroit  où  est  aujourd'hui  la 
cathédrale  (3).  Dans  la  décadence  de  l'empire  romain,  on 
trouva  apparemment  que  cette  situation  de  la  ville  la  ren- 
doit  d'une  difficille  garde  et  facile  à  surprendre,  à  cause  de 
trop  grande  étendue  de  ses  murs,  et  de  l'extrême  lon- 
gueur de  son  quay  que  les  débordements  de  la  rivière 
d'Yonne  pouvoient  d'ailleurs  facilement  endommager.  On 

I^  ville  nouvelle  reçut  alors  le  nom  de  Senones  que  nous  trouvons  pour 
la  première  fois  comme  nom  de  ville  dans  Ammien  Marcellin  et  le  nom 
d'Agendicum  se  conserva  dans  un  quartier  de  la  ville  dont  les  habitants 
s'appelaient  uikani  agiedicenaes.  Apres  avoir  été  capitale,  Agendicum 
n'ctattplus  qu'un  uicat,  un  quartier  de  la  nouvelle  ville:  vicus agiedieensia, 
révélé  par  rinscription  romaine  concernant  C.  Amatius  Paferninus 
trouvée  en  1829  à  Sens,  non  loin  de  l'emplacement  de  Tancienne  église 
de  Saint-Léon,  à  l'entrée  du  foubourg  qui  traversait  plus  loin  le  oiem 
vipus.  (Voir  iige/id^cumparM.G.  Julliot,  Bulletin  de  la  Société  archéologique 
dt Sentit  XV.) 

(1)  L.n  motte  du  Siarre  ou  du  Ciar  est  située  au  sud-ouest  de  la  ville  ac- 
tuelle, près  du  confluent,  et  à  Tépoque  romaine  au  confluent  même  de  la 
Vanne  et  de  l'Yonne,  à  plus  d'un  kilomètre  de  l'enceinte  romaine  de  Sens, 
dans  une  plaine  appelée  de  Champbertrand.  On  y  a  trouvé  les  substruc- 
lions  d'un  édiflce  important  entouré  d'une  enceinte  de  murs  construits 
comme  ceux  de  la  ville,  avec  cette  dlflerence  que  les  fondations,  au  lieu 
d  être  en  grosses  pierres  de  taille  provenant  d'anciens  édifices,  étaient  en 
moellons  noyés  dans  un  mortier  fait  de  chaux  blanche  et  de  briques  pi- 
lécs  ;  les  revêtements  de  ces  murs  étaient  en  petit  appareil. 

(2)  Le  couvent  des  Capucins  était  situé  au  nord-ouest  de  la  ville  au  delà 
du  Clos-le-Rog  et  à  peu  de  distance  de  la  rivière  d'Yonne. 

(3)  En  admettant  ce  périmètre  semi- circulaire.  Fenel  exclut  l'amphi- 
théâtre (les  arènes)  et  la  naumachie  (le  clos  de  Bellenave)  de  V Agendicum, 
qui  a  précédé  la  ville  forUfiée  appelée  Senones  par  Ammien  Marcellin  et 
défendue,  en  3S5,  par  le  césar  Julien.  11  admet  Texistence  d'une  enceinte 
de  murs,  dont  on  n'a  retrouvé  aucunes  traces.  En  cela,  il  se  conforme  au 
texte  de  la  légende  :  In  diebus  pritcls..,  intitulée  :  Natalia  ou.  Passio  sancto- 
rum  uiartyram  Saviniani  et  Potentiani.  On  Ut,  en  efl'et,  dans  cette  légende 
les  deux  passages  suivants  : 


» 


—  16  — 

prit  donc  le  parti  de  séparer  cette  ville  totalement  de  la  ri- 
vière, et  de  renfermer  son  enceinte  entre  les  deux  bras  de 
la  rivière  de  Vanne  qui  luy  dévoient  tenir  lieu  de  fossés 
naturels,  et  par  cette  raison,  il  fallut  allonger  la  ville  à  Test, 
la  rendre  très  étroite  du  sud  au  nord  ;  et  luy  donner  une 
forme  à  peu  près  ovale,  qui  est  précisément  Tetat  où  elle 

1*  Cujus  urbis  per  menia,  maximis  in  ÈlHcibua  exarando  tcutpsU  (Sapinia- 
nu»)  aacra  erucU  aignaeula  que  uaque  in  hodiernum  apparent  dlem,  per  mo- 
rorum  ejusdem  civitati»  edificia  : 

<  Sur  les  plus  grandes  pierres  des  murailles  de  la  ville,  Savinien  gra\-a  m 
creux  des  signes  sacres  de  la  croix  qui  se  voient  encore  oi^ourdliui  $ar 
l*édiflce  des  murs  de  ceUe  ville.  »  (Traduction  littérale.) 

2*  Infra  muros  eju»dem  eiuitatis  duo»  ecctesias  conaeerauii  :  unam  in  ho- 
nore Dei  genitrici»  Marie  et  perpétue  Virginia,  altérant  in  honore  prothomer- 
tiris  Stephani ..  apposuit  et  in  veneratione  aaneti  Johannia  Baptiate  tertiam. 

Ce  second  passage  qui  concerne  la  fondation  de  trois  église»  contiguè^ 
dédiées  A  la  sainte  Vierge,  Â  saint  Etienne  et  à  saint  Jean-Baptiste,  contient 
la  préposition  infra  employée  tantôt  dans  le  sens  intra,  dana  Vintérieurdt. 
tantôt  dans  le  sens  de  au'deaaoua.  Les  traducteurs  modernes,  excepir 
M.  Tabbé  A.-C.  Hénault,  ont  admis  le  premier  sens  qui  s'accorde avecla 
position  de  la  cothédrale  au  milieu  de  Tcnceinte  du  m*  siècle;  mois  il  e«t 
probable  que  Fenel  a  admis  le  second  sens  :  au  pied  dea  /iiurai/ies.  A  pro- 
pos de  l'église  fondée  dans  la  cité  des  Camutes,  la  légende  emploie  W 
mêmes  termes,  et  M.  l'abbé  Hénault  conserve  encore  ici  le  même  sens  a 
infra.  M.  le  chanoine  Mémain  a  varié  dans  la  traduction  de  ces  deux  pav 
sages.  (L'Apoatolai  de  aaint  Savinien»  p.  97  et  p.  101.) 

Si  l'existence  d'une  forte  enceinte  de  murailles  antérieure  A  celle  quon 
voyait  encore  debout,  nu  commencement  du  xix*  siècle,  était  démonlref. 
les  objections  soulevées  par  la  présence  des  croix  gravées  sur  les  murs  dr 
cette  encninte  par  saint  Savinien  tomberaient  d'elles-mêmes;  mais  com- 
ment admettre  qu'il  ne  reste  absolument  rien  de  cette  grande  muraille 
senti-  circulaire  dont  Fenel  suppose  l'existence. 

La  légende  seule  en  parle,  mais  dans  des  termes  qui  nous  font  pen- 
ser qu'il  est  question  des  murs  dans  lesquels  Julien  soutint  un  siège  d'un 
mois  contre  les  Allemands.  Elle  nous  dit  que  le  bienheureux  Savinien,  in- 
defessun  urbis  Senonum  firma  peragrat  menia,  et  ejua  aptritalibua  machiim. 
aggreditnr  prosternere  propugnacula.  Amniien  Marcellin  (Liv.  XVI,  S  cl  lU 
emploie  l'expression  apud  Senonaa  pour  dire  à  Sens  qu'il  qualifie  de  oppi- 
dum opportunum,  pince  favorable  pour  la  défense,  en  parlant  des  prépa- 
ratifs du  siège  que  va  soutenir  Julien.  Il  ajoute  (Uv.  XIV.  4)  :  Clausaurh* 
murorumque  intuta  parte  fïrmata,  ipae  (Julianua)  eum  armatia  die  nocta- 
que  inier  propugnacula  viaebatur  et  pinnaa. 


—  17  — 

est  depuis  plusieurs  siècles  (1).  Vous  savés  d'ailleurs  qu'il 
n'y  a  pas  bien  longtemps  il  y  avoit  un  gros  bras  de  la  Vanne 
qui  cntouroit  la  ville  du  coté  du  nord  (2);  cela  posé  il  aura 
fallu  faire  de  nouveaux  murs;  on  les  aura  tous  fails  en 
même  tems  à  peu  près  sur  le  même  dessein,  on  y  aura  em- 
ployé tous  les  débris  des  anciens  temples  des  payens  qu'on 
aura  pu  recouvrer  et  on  en  aura  retourné  les  pierres  et  ca- 
ché les  inscriptions,  enfin  on  aura  fait  la  ville  de  Sens  telle 
qu'elle  étoit  avant  Tartillerie  et  le  roy  Jean,  petite,  ovale, 
deffendue  par  les  bras  de  la  Vanne  et  non  par  des  fossés, 
et  entièrement  séparée  par  un  chemin  de  la  rivière 
d'Yonne. 

Voilà  mes  conjectures  que  je  pourrois  appuyer  de  plu- 
sieurs remarques  et  entre  autres  de  cclle-cy  :  que  la  Motte 
du  Siarrc  a  dû  eslre  la  citadelle  de  quelque  ville  à  cause  de 
la  triple  enceinte  de  murailles  qu'on  peut  prouver  y  avoir 
été  autrefois  (3)  ;  je  pourrois  encore  vous  dire  que  Ton  a 
trouvé  des  pavés  de  mosaïques  vers  les  tanneries  en  dehors 
delà  ville  au  sud  (4)  et  plusieurs  autres  choses  semblables, 
mais  cette  lettre  est  déjà  si  longue  et  j'ay  encore  tant  de 
choses  à  vous  dire,  qu'il  me  faut  absolument  restraindrc  et 
vous  parler  à  présent  de  la  seconde  inscription  trouvée 
dans  le  voisinage  de  la  première. 

(1)  Cette  transformation  de  la  ville  eut  lieu  sous  Constance  Chlore. 

f  2)  Voir  :  le  Ru  de  Mondereau  et  notes  explicatives  (Bulletins  de  la  Société 
archéol.  de  Sens,  1877,  t.  XI,  p.  184  à  204,  et  1885,  t.  XIII,  p.  2.  —  Notice  sut 
Faqueduc  romain  de  Sens,  par  MM.  G.  Julliot  et  Belgrakd.  Paris,  Dunod, 
1873.) 

(3)  Cette  triple  muraille  n'existait  que  du  côté  oriental;  on  a  trouvé 
pour  le  rc^ste  les  fondations  d'un  second  mur  en  quelques  endroits  seule* 
ment.  (Congrès  archéologique  de  France,  séances  tenues  à  Sens  en  1847.) 

(i:  Outre  les  mosaïques  trouvées  rue  des  Tanneries,  rue  Général- 
Dubois,  rue  de  la  Blanchisserie  et  dans  la  Putemussc,  au  sud  et  en  dehors 
(le  la  ville,  il  en  a  été  trouvé  d'autres  dans  Tenceinte  de  la  ville,  non  loin 
de  la  porte  Formau,  au  pied  du  mur  d'enceinte  près  de  la  prison,  et  au 
nord-ouest  et  eu  dehors  de  la  ville,  prés  du  Clos-le-Roy  (Bulletin  de  la  Soc. 
arch.  de  Sens,  t.  X,  p.  226  et  suivantes),  et  récemment  au  nord,  dans  le 
faubourg  Suint-Didier. 

2 


k 


i 


r 


—  18  — 

Elle  ne  consisle  qu'en  trois  lettres  qui  sont  plus  longues 
que  celles  de  l'autre  inscription  et  ont  cinq  pouces,  ni:iLs 
inoins  profondement  gravées  ;  elles  sont  vers  le  haut  d  une 
très  grosse  pierre  et  ne  consistent  qu'en  cecy  SRI(1}.  Il  y 
a  ensuite  une  certaine  trace  sur  la  droite  qui  ne  paroit  pas 
avoir  jamais  été  le  vestige  d'aucune  lettre;  d'ailleurs  cette 
trace  est  assez  éloignée  des  trois  lettres  susdiltes  ;  je  le» 
explique  Sacrum  Reginae  lunoni.  D'autres  ont  voulu  que  ce 
fut  Senalus  Romani  lussu  ou  Imperio;  mais  ce  n'est  pas  la 
le  style  des  inscriptions  anciennes. 

Voilà  en  quoy  consiste  notre  découverte,  je  vous  en  fais, 
monsieur,  un  détail  le  plus  circonstancié  que  je  puis,  per- 
suadé qu'on  ne  peut  donner  trop  d'éclaircissements  à  la 
postérité  sur  ces  sortes  de  choses,  et  qu'il  vaut  inieu!; 
pécher  par  trop  de  prolixité  que  par  une  trop  grande  briè- 
veté. Vous  pouvés  faire  tel  usage  de  celle  lettre  que  vous 
jugerés  à  propos.  Je  ne  crois  pas  qu'elle  mérite  d'eltre  mise 
dans  le  Mercure  (2)  étant  trop  longue  et  écrite  trop  encou- 
rant, mais  je  vous  prie  et  vous  exhorte  à  faire  mettre  dan^ 
le  Mercure  la  substance  de  cette  lettre  pour  instruire  nos 
neveux  des  antiquités  de  leur  ville,  et  ne  pas  laisser  périr 
la  mémoire  de  cette  découverte,  quelque  peu  considérable 
qu'elle  soit  d'ailleurs  ;  mais  elle  le  sera  toujours  pour  la  ville 
de  Sens,  dans  laquelle  il  n'y  a  aucune  antiquité  romaine, 
soit  que  l'on  n'y  en  ait  jamais  trouvé  (ce  que  j'ai  bien  de  la 
peine  à  croire),  soit  que  l'ignorance  et  la  négligence  de 
ceux  qui  les  auront  trouvées  en  ait  fait  absolument  perdre 
la  mémoire.  Ce  qui  me  fait  incliner  à  la  dernière  partie  de 
cette  alternative  est  l'exemple  même  de  ce  qui  vient  de  se 
passer  sur  ce  sujet.  Sans  Monseigneur  l'Archevesque,  in- 
scription en  question  alloit  estre  à  jamais  ensevelie  dans  le 
nuvriïL'r,  el  ce  prélat  n'en  auroit  jamais  eu  de  connoissancc. 
si  je  ne  l'en  eus  fait  avertir.   La  circonstance  d'un  prélat 

(tj  t>ltc  Inscription  est  perdue  aujourd'hui. 

i2}  \Jnh\iv  !iî  Beuf,  que  Fenel  avait  laissé  libre  d'user  de  sa  lellrr  corninf 

iï  1  riilfinlniit,  n'en  a  publié  qu'une  partie  dans  le  Mercure,  de  1733.  p.  2J?1 


—  19  — 

sç«avant  et  de  bon 'goût  ne  se  rencontre  pas  toujours^  et 
quand  elle  se  rencontre roit,  il  ne  se  trouve  pas  toujours  des 
gcnts  avides  d'antiquité  et  qui  en  fassent  recherche. 

Je  ne  prétens  pas  me  faire  un  mérite  de  cela,  mais  je  veux 
vous  faire  sentir  que  l'on  a  dû  perdre  des  millions  d'anti- 
quités par  des  voyes  semblables  à  celles  qui  nous  ont  pensé 
faire  perdre  celle-cy.  Elle  est  maintenant  en  sûreté;  MM.  du 
corps  municipal  en  ont  fait  présent  à  Monseigneur  TÂrche- 
vesque  et  lui  ont  donné  par  là  une  marque  de  leur  recon- 
noissancc  pour  la  libéralité  qu'il  a  faite  en  faveur  des  tra- 
vaux publics  de  la  porte  Commune  (1).  (Le  prélat  Ta  depuis 
laissé  mettre  en  œuvre.) 

Je  fînis  cet  article  en  vous  priant  (au  cas  que  vous  jugiez 
à  propos  de  faire  parler  de  cecy  dans  le  Mercure),  de  faire 
les  changements  que  vous  jugerés  convenables,  au  stile  et 
à  l'ordre  de  cette  lettre,  en  un  mot  d'en  disposer  comme 
de  votre  bien  (2).  Cela  ne  peut  estre  en  meilleures  mains. 
Pour  mon  nom,  je  croy  qu'il  ne  faut  pas  le  supprimer;  je  ne 
dis  pas  cecy  par  vanité,  mais  c'est  que  ces  sortes  de  décou- 
vertes tirent  leur  authenticité  en  partie  des  circonstances, 
du  temps  et  du  nom  de  ceux  qui  les  ont  faites.  Vous  savez 
qu  on  a  fait  des  suppositions  en  cette  matière  aussi  bien 
qu'en  beaucoup  d'autres.  Le  sieur  Millet,  curé  d'Autrive  qui 
a  supposé  deux  inscriptions  dans  le  journal  de  Verdun  (3), 


(1)  M*  Languct  fit  placer  cette  inscription  dans  le  mur  de  In  ssicristie  de 
In  catliédrale  qui  donne  dans  le  jardin  de  son  palais.  Elle  s'y  trouve  en- 
core cachée  par  une  treille.  Fenel  ayant  ajoute  à  sa  lettre  la  note  sui- 
vante :  «  Ce  prëlat  l'a  depuis  laissé  mettre  en  œuvre,  »  on  la  croyait  perdue 
depuis  longtemps,  lorsqu'elle  fut  retrouvée,  en  mars  1879,  par  M.  l'abbé 
Dizien  (ai^ourd'hui  évéque  d'Amiens),  dans  le  mur  de  la  sacristie  de  la  ca- 
tliédnile.  —  Depuis  la  rédaction  decette  note,  l'Inscription  retrouvée  à  Varche- 
vhhé  a  été  transportée  au  musée,  et,  par  les  soins  de  M.  Julliot,  a  repris  sa 
place  dans  la  reconstitution  de  la  grande  inscription  qui  couronnait  le  /iionii- 
nient  de  Magilius.  (Note  de  l'Ed.) 

(2.  C'est  ce  que  ùt  l'abbé  le  Beuf.  Voir  le  Mercure  de  décembre  1735, 
p.  2572. 

'3  L'inscripUon  romaine  d  Hauterive,  h  laquelle  M.  Tnrbé  a  consacré, 
clans  VAlmanach  de  Sens,  pour  l'année  ISl.'),  un  article  qu  il  a  reproduit 


—  20  — 

en  est  une  bonne  preuve.  Il  faut  dohc  faire  connailrc 
au  public  en  quel  temps,  par  qui  et  h  quelle  occasion  ces 
sortes  de  découvertes  ont  étés  faites,  et  c*est  pour  cela  que 
je  croy  que  mon  nom  ne  doit  pas  estre  supprimé,  et  j}  ay 
d'ailleurs  joint  toutes  les  circonstances  dont  je  me  suis  sou- 
venu... 

A  regard  des  inscriptions,  je  vous  prie  que  par  voire 
moyen  le  public  en  ait  quelque  connoissance  ;  retranciiés, 
changés,  ajoutés  au  canevas  informe  que  je  vous  envoya 
et  soyez  persuadé  du  respect  avec  lequel  j'ay  llionneur 
d'être,  monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  ser 

viteur. 

Fenel. 

RÉPONSE  DE    L  ABBÉ  LE   BEUF  A  L'ABBÉ  FENEL  1 

A  Paris,  ce  31  octobre  1735. 
Je  ne  scaurais  vous  exprimer  assez  la  joye  que  j'ayeucD 
recevant  des  nouvelles  que  vous  m'avez  apprises  de  la 
découverte  de  voê  inscriptions.  Je  me  suis  mis  aussitôt  à 
faire  un  précis  de  votre  lettre,  et  je  l'ai  porté  le  lendemain 
à  M.  de  la  Roque,  auteur  du  Mercure,  croyant  que  cela 
pouroit  entrer  dans  le  Mercure  d'octobre,  et  paroître  cliez 
vous  à  la  Saint-Martin,  mais  il  m'a  assuré  qu'il  éloit  trop  lard 
et  que  ce  seroit  pour  le  mois  d'après  (2).  Ces  sortes  de  nou 
velles  d'antiquitez  luy  font  un  très  grand  plaisir.  J'ay  parlé 
au  P.  de  Montfaucon  de  votre  explication  ;  de  lui  même  il  ne 
m'en  avoit  pas  donné  d'autres.  Ainsi  c'est  Sacrum  Xeslx 

dans  un  volume  intitulé  :  Recherches  sur  le  déparlement  de  V Yonne,  Sens, 
Th.  Jculain,  1848,  p.  471  à  483.,  est  une  des  deux  inscriptions  auxquell» 
l'abbé  Fenel  fait  allusion.  Les  faussaires  n'étaient  pas  rares  à  cette  épo- 
que, et  respécc,  bien  que  devenue  moins  commune,  n'en  est  ixialheureu 
sèment  pas  perdue. 

(1)  CoUationnée  à  l'original  dans  la  collection  de  Fontaine. 

(2)  Ijï  précis  annoncé  par  l'abbé  le  Beuf  à  l'abbé  Fenel  fut  effectivement 
Irtsrrr  nu  W^rciire  de  décembre  1735.  Le  Beuf  approuve  les  appréciations 
tlc5  Ftjnrl  :  miUs  11  supprime  les  détails  si  intéressants  pour  l'histoire  de 
Se  m. 


—  21  — 

MalrL  Gruter  rapporte  une  grande  inscription  où  Vesta  est 
aussi  dite  mère.  Le  mot  matri  y  est  en  entier... 

Je  ne  me  suis  attaché  qu'à  parler  de  cette  inscription  et 
des  découvertes  qu'on  fait  chez  vous  de  restes  d'architec- 
ture. Je  remets  à  une  autre  fois,  à  parler  de  la  seconde  où 
il  y  a  S.  R.  I.  Vous  ne  m'expliques  pas  assez,  en  effet,  ce 
que  c'est  que  cette  pierre,  ny  s'il  y  a  un  point  après  chaque 
lettre,  et  si  ces  trois  lettres  tiennent  tout  le  travers  ou  le 
milieu  d'une  pierre,  et  si  cette  pierre  est  ouvragée.  Vous 
avez  aussi  oublié,  monsieur,  de  marquer  de  quelle  carrière 
on  croit  que  sont  les  pierres  de  vos  restes  d'édifices  ro- 
mains (1).  Cela  n'est  pas  inutile  à  savoir.  Le  P.  de  Montfau- 
con,  ayant  regardé  dans  son  répertoire,  a  cru  que  S.  R.  L 
vouloit  dire  Sacrum  Reginae  lunoni.  Il  n'y  a  rien  dans  Gru- 
ter de  semblable.  Des  quinze  inscriptions  qu'il  apporte,  où 
Junon  est  qualifiée  reine,  il  n'y  en  a  qu'une  ou  regina  soit 
devant  ;  c'est  toujours  après  Junon  que  le  titre  de  reine  se 
trouve.  Je  verrai  Sertorius,  etc.  On  est  ici  à  la  source. 

J'espère  qu'à  la  fin  vous  découvrirez  où  estoit  l'ancien 
Sens  payen,  et  même  aussi  A gendicum.  Il  faudroit  persuader 
à  Monseigneur  votre  Evêque,  d'acheter  les  dissertations  du 
P.  Chamillard,  jésuite,  de  1711.  Il  y  en  a  une  où  vous  verriez 
comme  il  raisonne  sur  le  quartier  des  chrétiens  de  Fréjus 
et  d'Autun...  Ces  dissertations  in-4°,  fort  minces,  coûtent 
cent  sols... 

EXTRAIT  D'UNE  LETTRE  DE  L'ABBÉ  LE  BEUF 
A  L'ABBÉ  FENEL(2) 

Paris,  14  décembre  1735. 
Monsieur, 

J'ay  pensé  ces  jours-cy  que  vous  seriez  sans  doute  bien 

surpris  de  ne  pas  voir  votre  inscription  publiée  dans  le  Mer- 

(1)  La  question  posée  par  le  Beuf  à  Fenel  n*est  pas  facile  à  résoudre  II 
n«>  s'agit  pas  d'une  carrière  unique,  comme  il  semble  le  supposer.  Presque 
toutes  les  pierres  tirées  des  fondations  des  murs  de  Sens  sont  des  pierres 
calcaires;  mais  le  grain  et  la  dureté  varient  beaucoup. 
(2)  Collationné  sur  l'original  de  la  collection  de  Fontaine. 


99    

cure  ;  ce  n*cst  pas  ma  faute,  mais  celle  de  M.  le  chcvnlier 

de  la  Roque  qui  a  oublié  de  la  mettre  dans  le  portefeuille  du 

mois  de  novembre.  Etant  inforriié  de  cela,  j'ay  été  chez  luy 

et  Tay  fait  mettre  en  ma  présence  dans  celuy  de  décembre 

f  Ainsi  comptez  que  vous  la  verrez  imprimée  pour  vos  étré- 

I  nés  (1).  M.  de  la  Roque  Tainé,  qui  a  cbangé  quelques  pcliU 

I  mots  à  votre  style  et  au  mien,  a  jugé  à  propos  d'ajouter  aa 

I  haut  de  mon  mémoire,  venu  de  vous,  une  observation  sur 

des  inscriptions  de  la  ville  d'Arles,  etc. 

EXTRAIT   D  UNE   LETTRE    DE    L'ABBÉ    FENEL 
,  A  L'ABBÉ  LE  BEUF  (2) 

I  15  et  25  décembre  1735. 

I  Monsieur, 

î  Je  suis  bien  aise  que  le  P.  de  Montfaucon  ait  explique  ces 

inscriptions  de  la  même  manière  que  j'avois  trouvée  préfé- 
rable entre  plusieurs  autres  ;  je  savois  bien  que  d'onlinaire 
quand  on  donnolt  le  titre  de  Reine  à  madame  Junon,  on  le 
mettoit  après  ;  mais  il  me  suffît  qu'il  y  ait  un  seul   exemple 

^  du  contraire,  surtout  dans  un  pays  où  l'on  n*estoit  pas  sur 

le  pied  d  cstre  fort  puriste  en  latin,  témoin  le  posierunt  de 
l'inscription  de  Paris  du  temps  de  Tibère;  ainsy  nos  ancê- 
tres sénonnis  ont  bien  pu  ne  pas  garder  exactement  le  ccrt- 
monial  ù  l'égnrd  des  titres  et  qualité  de  la  dame  Junon.  Us 
trouvoicnt  sans  doute  qu'il  luy  importait  fort  peu  que  le  nom 
de  reine  fût  devant  ou  derrière,  comme  le  pcnsoit  Dora  Pas- 
cal Zapata,  dans  la  comédie.  Sur  la  question  qu'on  luy  faisoit 
s'il  falloit  mettre  Dom  Zapata  Pascal  ou  Dom  Pascal  ZapaLi 
il  répondit  nettement  : 

Il   ne  m'importe  guère 
Que  Pascal  soit  devant  ou  Poscal  soit  derrière. 

Du  surplus,  dès  que  le  P.  Montfaucon  (qui  a  certaincmcot 
lu  une  infinité  d'inscriptions)  a  expliqué  celle  - cy  comme 

(1)  Voir  dans  le  Mercnrr  de  décembre  1735,  p.  2572,  la  conimunîmlion 
faite  par  l'obi>é  le  Beuf. 

(2)  Collationné  sur  l'original  dans  la  collection  de  Fontaine. 


—  23  — 

loy,  il  y  a  apparence  qu'il  seroit  difiicillc  d'en  donner  une 
litre  solution  qui  fût  probable.  Je  dis  solution,  parce  que 
;  regarde  ces  sortes  de  choses  comme  des  espèces  d'énig- 
les  savantes. 

Je  me  suis  transporté  encore  une  fois  sur  le  lieu,  je 
'y  ai  point  remarqué  de  points  après  chaque  lettre,  Fin- 
cription  est  au  milieu  et  dans  la  partie  supérieure  de  la 
ierre  qui  est  un  gros  bloc  de  pierre  d'Arcueil  (1),  comme 
a  déclaré  un  habile  maçon  qui  a  vu  les  pierres  des  deux 
iscriptions,  les  a  examiné  de  près  et  a  tenu  dans  ses  mains 
es  fragments  que  j'en  ai  arraché  et  que  je  conserve  ; 
cantmoins  les  deux  pierres  ne  sont  pas  tout  à  fait  de  même 
ouleur,  Tune  est  un  peu  plus  jaune  que  l'autre,  c'est  celle 
ù  est  SRI,  mais  l'on  attribue  cela  à  la  différence  des  bancs 
;e  celte  carrière.  Sur  quoy  voyés  le  Dictionnaire  de  corn- 
wercc,  qui  en  contient  un  article  curieux,  et  ce  que  vous  y 
erres  de  remarquable  est  que,  dans  cette  carrière,  il  y  a 
oujours  une  portion  de  la  carrière  qui  est  presque  toute 
composée  de  petites  coqgilles  rondes,  qui  font  corps  avec  la 
)ierre. 

On  appelle  cela  le  banc  Coquillart^  ou  le  Coquillarl  tout 
amplement.  On  dit  même  qu'en  général  on  trouve  de  ces 
coquilles  dans  toutes  les  autres  parties  de  cette  même  car- 
ière,  quoy  qu'en  bien  moindre  quantité.  Il  ne  faut  pas  vous 
lissiniuler  que  le  même  maçon  m*a  dit  avoir  vu  des  pierres 
venues  d'une  carrière  qui  est  maintenant  presque  abandon- 
lée,  proche  Pont-sur-Yonne,  dans  un  lieu   nommé  Saint- 


il)  \jc  maçon  qui  indique,  pour  origine  de  la  pierre  portant  IMnscription 
S.  VKSTAE  M,  la  carrière  d'Arcucil,  «t  qui  la  compare  à  certaines  pierres 
extraites  d'une  carrière  située  non  loin  de  Saint-Gilles,  proche  Pont-sur- 
Vonnc.  ne  méritait  i>as  grande  créance  ;  la  pierre  d'Arcneil  est  du  calcaire 
UTtiairc,  dite  Télagc  Parisien,  »  tandis  qu'à  Saint-Gilles,  près  de  Pont-sur- 
Yonne,  on  ne  trouve  que  la  craie  de  l'étage  Sénonien  ou  peut-être  un  cal- 
rnirc  tertiaire  lacustre,  comme  on  en  exploite  aujourd'hui  près  de  Cham* 
pigny. 

\a  pierre  encore  appelée  de  Saint-Gilles,  par  les  ouvriers  sénonais,  se 
trouve  dans  TOise.  non  loin  de  Saint-Leu 


—  24  — 

Gilles,  lesquelles,  étant  prises  dans  la  meilleure  veine. 
avoient  bien  du  rapport  avec  la  pierre  d'Arcueil,  et  ne  luy 
cédoient  pas  ou  peu.  J'ajoute  encore  que  cette  carrière  de 
pierre  d'Arcueil  est  fort  étendue,  puisqu'on  comprend  sous 
ce  nom  toutes  les  pierres  presque  qui  se  tirent  de  terre  aux 
environs  de  Paris,  excepté  la  pierre  à  plûtre.  J'examinerai 
encore  la  pierre  qui  est  à  Tarchevesché  pour  voir  si  elle  a 
des  coquillages  renfermés.  Au  surplus  cela  pouvoit  venir 
d'autant  plus  aisément  de  Saint -Gilles  qu*on  dit  que  les 
pierres  de  la  cathédrale  en  viennent  en  grande  partie.  Tout 
cela  mériteroit  d'être  examiné  avec  des  gens  fort  connois 
seurs,  mais  les  ouvriers  ordinaires  n'en  savent  pas  assez 
pour  tout  cela. 

Avant  que  de  quitter  cet  article,  je  dis  en  deux  mots  que 
l'inscription  S  R  I  est  à  deux  pouces  de  distance  du  haut  de 
la  pierre  et  à  sept  à  8  pouces  du  bas  ;  que  l'S  est  mal  formée 
dans  le  haut  ;  ce  maçon,  dont  je  vous  ai  parlé,  a  voulu  par- 
faire cette  S  que  les  injures  du  temps  et  l'ancienneté  onl 
maltraité,  mais  ce  qu'il  y  a  fait  est  aussi  différent  du  ciseau 
de  la  lettre  antique  que  le  jour  l'est  de  la  nuit.  Cette  pierre 
a  été  jugée  trop  peu  importante  pour  être  transportée,  et  elle 
restera  dans  le  mur  et  sera  cachée  par  des  latrines  qu  on 
va  faire  à  cet  endroit.  L'autre  pierre  est  toujours  dans  la 
deuxième  cour  de  l'archevesché.  Monseigneur  l'Archeves- 
quc  n'a  pas  déterminé  ce  qu'il  en  vouloit  faire  (1). 

L'ABBÉ  LE  BEUF  AUX  RÉDACTEURS  DU  MERCURE 

Décembre  1735,  p.  2572 

Je  viens,  MM. ,  de  recevoir  une  lettre  de  Sens  dans  laquelle 
on  m'annonce  la  découverte  qu'on  y  a  faite  sur  la  fin  du 
mois  de  septembre  dernier  de  deux  inscriptions  véritable- 
ment antiques,  en  démolissant  une  demi-lune  qui  avait  été 
construite  proche  la  porte  du  faubourgS'-Pregts,  durant  les 
guerres  civiles,  après  la  mort  d'Henri  III.  Ce  travail  ayant 

(1)  Il  est  Ici  question  du  bloc  portant  rinscription  S  VESTAE  M. 


—  25  — 

exigé  qu*on  enlcvAt  beaucoup  de  terre  qui  couvrait  le  bas 
clcsmursde  la  ville,  il  parut  d^abord  sur  une  pierre  qui  fai- 
sait partie  de  ces  murs  une  inscription  fort  simple,  mais 
néanmoins  considérable  dans  sa  brièveté,  puisque  les  lettres 
romaines  qui  la  composent  sont  de  quatre  pouces  de  hau- 
^  leur.  On  y  a  lu  :  S.  VESTAE  M. 

Il  y  a  un  gros  point  triangulaire  après  la  1«*«  lettre  et  il  n'y 
en  a  point  après  aucune  des  autres. 

Malgré  cette  circonstance  nécessaire  à  remarquer,  quel- 
ques curieux  du  pays  se  sont  imaginé,  sur  les  principes  du 
père  Hardoin,  de  mistérieuses  sentences,  composées  d'au- 
tant de  mots  qu'il  y  a  de  lettres  dans  cette  inscription,  sup- 
posant que  la  lettre  S  signifîe  la  ville  de  Sens.  Le  savant  de 
cette  ville,  qui  me  fait  part  de  cette  découverte,  en  donne 
une  explication  qui  me  parait  mieux  fondée  et  plus  dans  le 
style  des  inscriptions  romaines  ;  il  croit  avec  raison  que 
c'est  la  faute  du  graveur  ou  un  effet  de  la  vétusté  du  monu- 
ment s'il  ne  parait  pas  de  point  après  VESTAE,  immédiate- 
ment avant  la  lettre  M,  de  même  qu'il  y  en  a  un  avant  ce 
premier  mot,  Tusage  de  certains  siècles  ayant  été  de  mettre 
après  chaque  mot  un  point  formé  en  petit  triangle,  ainsi 
que  j'en  ai  vu  en  différentes  villes.  Ce  savant  a  cru  pouvoir 
supposer  ce  point  et  qu'il  était  peut-être  marqué  moins  pro- 
fondément que  le  premier.    Le  nom  de  la  déesse  Vesta  se 
Irouve  par  ce  moyen  entre  deux  lettres  initiales,  ce  qui  l'a 
déterminé  à  expliquer  la  lettre  S  par  le  mot  sacrum  et  la 
leUreM  par  le  mot  ma/n.  C'est  donc  selon  lui  un  monument 
consacré  à  la  déesse  Vesta  mère  :  SACRUM.  VESTAE  MATRI. 
Le  même  curieux  me  marque  que  Tinscription  est  de  même 
longueur  que  la  pierre  qui  a  3  pieds  4  pouces  en  ce  sens.  Il 
I     ajoute  qu'on  voit  clairement  que  celte  pierre  a  été  polie 
f     exprès  pour  mettre  une  seule  ligne  car,  dit-il,  il  y  a  une 
saillie  qui  est  en  quelques  endroits  de  5  ù  0  lignes  d'épais- 
seur, laquelle  saillie  est  toute  brute. 

On  commençait  déjà  à  recouvrir  celle  pierre  pour  conti- 
nuer l'ouvrage,  lorsque  M'"  rarchevêquc,  averti  de  cette  de- 


—  26  — 

couverte  dans  une  ville  où  les  inscriptions  sont  rares,  se 
transporta  sur  le  lieu.  Le  prélat  aurait  souhaité  que  l'in- 
scription fût  restée  en  état  d'être  vue  par  les  connaisseurs, 
mais  comme  cela  ne  pouvait  pas  s'accommoder  avec  la  con- 
tinuation de  Touvrage,  M.  le  maire  de  la  ville  proposa 
de  faire  ôter  cette  pierre  du  corps  des  murailles  et  d'en  re- 
mettre d'autres  en  place.  Ce  qui  fut  résolu  ;  mais  après  avoir 
détachée  la  pierre  de  cet  endroit,  il  se  trouva  qu*elle  était 
taillée  en  corniche  saillante  de  8  pouces  au  moins  dans  U 
partie  intérieure  du  mur  et  on  aperçut  même  dans  cette 
opération  que  toutes  les  pierres  voisines  étaient  chargées  de 
quelques  ornements  d'architecture. 

Plusieurs  citoyens,  anciens  et  dignes  de  foi,  déclarèrent 
à  cette  occasion  que  ceux  qui  avaient  fait  visiter  Tintérieur 
des  murailles  de  Sens,  auprès  desquelles  leurs  maisons 
étaient  assises,  avaient  trouvé  dans  toute  l'enceinte  que  les 
grosses  pierres  qui  font  partie  de  la  masse  (surtout  dans  les 
fondations  et  aux  côtés  des  anciennes  portes)  étaient  toutes 
généralement  chargées  de  moulures,  de  corniches,  de  frag- 
ments de  colonnes,  de  pilastres  et  d'autres  pièces  et  orne- 
ments d'architecture.  Ils  ajoutèrent  que,  dans  un  vieux  mur 
que  M.  le  lieutenant-général  avait  fait  démolir  pour  faire 
une  serre  d'orangers,  il  s'était  trouvé  sous  les  décombres 
un  basrclief  qui  représente  une  femme  depuis  la  ceinture 
en  haut,  à  peu  près  dans  l'attitude  d'une  Cybèle  qui  est  gra- 
vée dans  le  grand  recueil  du  P  de  Monfaucon. 

Je  ne  saurais  vous  entretenir  de  la  seconde  inscription 
que  jen'aye  eu  sur  ce  sujet  une  plus  ample  explication  avec 
M.  l'abbé  Fcncl,  chanoine  de  l'Eglise  métropolitaine,  le 
même  qui  m'a  écrit  de  Sens  ;  c'est  à  lui  que  celte  ville  a 
l'obligation  de  ce  que  le  monument  dont  je  viens  de  parler 
est  tiré  de  l'obscurité  et  de  ce  qu'il  sera  mis  en  place  d'être 
vu  tandis  qu'il  y  en  a  peut-être  un  grand  nombre  qui  sont 
restes  cachés  dans  Tintérieur  des  murs  de  la  ville  et  qui  y 
resteront  toujours.  Il  m'apprend  que  messieurs  du  corps 
municipal  ont  fait  présent  de  cette  pierre  à  M.  rarchevcque 


—  27  — 

^l  qu'ils  lui  ont  donné  par  là  une  marque  de  leur  recon- 
laissance  pour  la  libéralité  que  ce  prélat  a  faite  en  faveur 
les  travaux  publics.  Ces  sortes  d'inscriptions,  au  reste,  qui 
narquent  Tantiquité  des  villes  ne  devraient  jamais  sortir  de 
relies  où  elles  ont  été  découvertes  ;  et  lorsque  des  particu- 
liers chez  qui  on  les  trouve  veulent  les  vendre  ou  les  don- 
ner à  des  étrangers,  comme  cela  arrive  souvent,  il  est  du 
devoir  des  officiers  municipaux  d'empêcher  ces  aliénations 
?t  de  faire  placer  ces  monuments  dans  les  hôtels  de  villes 
3U  en  quelqu'autre  endroit  aussi  sûr. 

M.  Fenel  m*a  fait  part  des  réflexions  qu'il  a  faites  depuis 
ces  découvertes  sur  l'antiquité  des  murs  de  Sens.  Je  suis 
persuadé,  comme  lui,  qu'ils  n'ont  point  été  construits  du 
temps  du  paganisme,  mais  seulement  depuis  que  le  chris- 
tianisme fut  bien  établi  et  qu'on  eut  détruit  les  temples  des 
idoles.  Ce  fut  alors,  dit-il,  qu'à  Sens  comme  ailleurs  on  em- 
ploya à  la  construction  des  murs  de  la  cité  chrétienne  les 
débris  de  ces  temples,  ce  qui  fait  que  quand  on  peut  fouil- 
ler dans  ces  murs,  on  y  trouve  toutes  ces  pièces  confondues 
et  mises  indiflëremment  dans  les  fondations.  J'ai  vu  les 
preuves  de  cela  en  beaucoup  d'autres  villes  du  royaume... 

//  parle  ensuite  d'une  inscription  trouvée  à  Arles. 

EXTRAIT    D'UNE    LETTRE    DE    L'ABBÉ    P.    FENEL 
A    L'ABBÉ    LE  BEUF    (1) 

Sens,  14  janvier  1736. 
Monsieur, 

...  Mais  voicy  bien  autre  chose,  monsieur,  cecy  nous  tou- 
che de  près  :  on  a  donné  des  combats  de  gladiateurs  à  Sens 
autrefois,  et  nous  n'en  savions  rien;  il  y  a  eu  des  prêtres 
d'Auguste  à  Sens  et  nous  l'ignorions  ;  il  y  avoit  encore 
(selon  toutes  les  apparences),  bien  d'autres  choses  plus 
belles  que  celles-là,  que  nous  ne  savons  pas,  ny  ne  saurons 

•1)  CoUationné  sur  rorigimil  dans  la  collection  de  Fontaine  Or.  I  PP»  212 
à'iU),  le  Beuf  a  analysé  celte  lettre  dans  le  Mercure  de  France  de  février 
1736,  p.  2M. 


f 


—  28  — 

jamais,  mais  nos  petits -neveux  en  sauront  peut-être  quel- 
que chose,  pourvu  qu*on  renverse  la  ville  de  fond  en  comble 
pour  en  retourner  toutes  les  pierres,  c'est  le  seul  moyen 
que  je  sache  pour  faire  Thistoire  ancienne  de  cette  ville, 
mais  ce  moyen  est  an  peu  tragique.  Nos  ancêtres,  gens  ma 
gnanimes,  qui  songeoient  plus  à  bien  faire  qu*a  bien  écrire 
ou  à  bien  parler,  n*ont  pas  voulu  confler  leurs  hauts  faits  à 
des  chifons  de  parchemin,  de  linge  (il  y  avoitdes  !ibrilintei\ 
ou  tels  autres  brimborions  caduques  et  périssables  ;  ils  écri- 
voient  leurs  hauts  faits  sur  la  pierre  la  plus  dure.  Malheu- 
reusement pour  eux,  il  est  venu  un  déluge  de  Gots  et  de 
Vandales  qui  a  eu  la  malice,  ne  pouvant  détruire  ces  beaux 
monuments,  de  les  renverser  sens  dessus  dessous  ou  de  les 
couvrir  de  terre  pour  en  cacher  et  ensevelir  à  jamais  les 
moindres  traces.  Mais  ne  badinons  point,  il  ne  s'agit  de  rien 
moins  que  de  cinq  inscriptions  antiques  trouvées  nouvelle- 
ment dans  nos  murs,  dont  une  seule  est  entière  sur  deux 
blocs  de  pierre  séparés,  dont  Tun  a  le  commencement  et 
l'autre  la  fln  de  ladite  inscription.  Les  quatre  autres  sont 
frustes  ou  tronquées,  et  il  n'en  reste  que  des  extrémités 
Tout  cela  a  été  trouvé  à  très  peu  de  distance  des  premières 
et  dans  le  même  pan  de  muraille.  Jugés  de  ce  que  doit  rece- 
ler le  reste  de  nos  murs 

Vous  trouverez  cy -joint  un  papier  (1)  où  est  la  figure  de 
ces  inscriptions  la  plus  exacte  que  j'aye  pu  faire,  avec  Tex- 
plication  des  deux  premières  selon  ma  petite  capacité  ;  pour 
les  trois  dernières,  je  n'oserois  y  toucher,  il  ne  faut  pas 
moins  que  des  Montfancons  pour  les  expliquer,  je  leur  laisse 
ce  soin.  Je  compte,  monsieur,  que  vous  ferés  mettre  ces 
inscriptions  dans  le  premier  Mercure,  avec  celle  qui  porte 
SRI,  sur  laquelle  je  vous  ai  fait  tenir  toutes  les  explica 
tions  que  je  suis  capable  de  donner. 

Dans  le  moment,  je  reçois  le  Mercure  I  de  décembre  1735. 
Je  l'ai  ouvert  avec  précipitation  pour  y  voir  votre  lettre. 

(1)  Nous  donnons  (A  In  suite  de  cette  lettre)  la  feuille  volante  indiquée  p-ir 
Paschal  F'enel. 


-  29  — 


mais  quelle  est  ma  surprise  !  Permettes  -  moi  de  vous  dire 
qu'il  ne  falloit  pas  mettre  une  si  grande  distance  entre  PS  et 
rv.  Il  n*y  en  a  pas  plus  qu^entre  les  autres  lettres  et  je  crois 
vous  ravoir  marqué  positivement.  Vous  dites  encore  que  le 
point  est  gros;}e  n'ay  jamais  dit  cela,  il  n'est  pas  trop  gros, 
mais  il  est  triangulaire,  c'est  à  dire  à  trois  pointes  de  la  sorte 
-< ,  voilà  tout  ;  de  plus  vous  me  donnez  la  qualité  de 
scwanl  avec  emphase,  je  ne  vousay  jamais  donné  lieu  de  me 
dire  une  pareille  injure;  cela  est  capable,  dans  certaines 
circonstances,  de  jetter  un  ridicule  outré  sur  un  homme, 
et  de  luy  donner  une  qualiflcation  quelquefois  toute  con- 
traire. Si  vous  m'aviés  consulté,  je  vous  aurois  prié  d'ôter 
ce  titre,  Permettez-moy  de  vous  faire  mes  plaintes  avec 
liberté  ;  on  croira  que  c'est  moy  qui  me  suis  donné  cette 
qualité  ou  que  vous  l'avez  fait  à  ma  prière.  Il  falloit  donc 
du  moins  mettre  votre  nom  ;  en  ce  cas,  la  charge  de  savant  y 
que  vous  érigés  en  ma  faveur  si  liberallement,  eut  été  à  vos 
risques,  périls  et  fortunes.  Que  ce  que  je  vous  dis  là  ne 
vous  fâche  pas,  monsieur,  excusés  le  premier  mouvement 
que  m'a  causé  votre  trop  bonne  volonté  pour  moy.  Je  finis  cet 
article  en  vous  disant  qu'un  nouvel  ouvrier  à  qui  j'ay  montré 
les  fragmens,  que  je  conserve,  des  pierres  sur  lesquelles  sont 
les  premières  inscriptions,  m'a  dit  qu'il  ne  croyait  pas  que 
ce  fût  de  l'Ârcueil,  mais  de  la  pierre  de  tiais  ou  de  lierre.  On 
convient  que  les  dernières  trouvées  sont  de  même  pierre 
que  les  autres,  quelle  que  soit  cette  pierre. 

Feuille  voiante  accompagnant  la  lettiœ 
Inscriptions  trouvées  à  Sens  dans  le  mur  de  la  ville,  à 
côté  gauche  de  la  porte  Commune,  en  entrant  par  le  fau- 
bour  Saint-Pregts,  les  mardy  et  mercredy  4  et  5  janvier  1736 
sur  une  pierre />rem/ére,  sur  une  autre  pierre  que  je  nomme 
seconde. 


tfONORATO 
VG  MVNERA 
VS  HONORIB 


M  AE 

PLA 

RAR 


MILIO  NOBILI 
MINI  AVG  MVNE 
OMNIB  HONORIB 


—  30  — 

La  première  pierre  est  séparée  de  la  seconde  par  une  autre 
qui  est  entre  deux.  C'est  parla  pensée  que  je  les  ay  réunies 
La  première  pierre  porte  la  tin  d'une  Inscription  et  le  com- 
mencement (le  l'autre.  11  y  a  une  bordure  en  haut  et  à  coté, 
comme  vous  le  voyés,  avec  une  espèce  d'ornement  c'est-à- 
dire  à  la  seconde,  la  bordure  n'est  pas  dans  le  bas,  ce  qui 
me  fait  croire  que  la  pierre  a  été  coupée  par  en  bas. 

Sur  une  autre  pierre  très  mal  traitée,  que  je  nomme  troi- 
sième :  

I       s..     EVNCIO....  MAIADSV       | 

Knlre  S  et  E,  place  de  deux  lettres  où  il  ne  paroit  pas  y 
avoir  jamais  rien  eu  d'écrit. 

Entre  0  et  M,  place  de  trois  ou  quatre  lettres  où  1  ne 
paroit  pas  y  avoir  jamais  rien  eu  d'écrit. 

Quatrième  y  sur  le  côté  gauclic  d'une  pierre  : 

NIVCI 

Ces  lettres  sont  plus  grandes  et  mieux  formées  que  celles 
de  toutes  les  inscriptions  précédentes.  La  première  lettre 
est  à  moitié  coupée  par  l'extrémité  de  la  pierre  ;  mais  ce  ne 
peut  être  qu'une  N. 

Cinquième.  Sur  le  côté  gauche  d'une  autre  pierre  : 

II III 
Ces  cinq  I  sont  tous  égaux  et  il  n'y  a  pas  de  barre  dessus 
ny  de  point  entre  deux  (1). 

(Ij  Pnschal  P^cnel  avuit  bien  lu  les  inscriptions  qu'il  oppelle  première 
et  seconde  ;  sur  la  troisième  il  aurait  dû  lire  S.FVNCTO  et  plus  loin 
APVD  SV;  sur  la  quatrième  XIVGI.  Il  avait  bien  lu  d'abord,  comme  le 
constate  un  brouillon  laissé  par  lui.  Nous  ne  savons  pas  pourquoi  il  n'a  pa^ 
donné  tout  ce  qu'il  ovait  lu  sur  cette  dernière  pierre. 

Ce  brouillon  porte: 


RMION 

IVLIA 

MAG 

III  11 

Il  tiuniiUlûlirc: 

MIO 

RMIA 

AK 

IVLIA 

MAG 

TIETI 

--  31  — 
Voicy  comme  je  lis  la  seconde  inscription  : 

Marco,  AEMILIO,  NOBILI, 
FLAMINI,  AVGusti  ;  MVNE  (I) 
RARio;  OMNIBus  HONORIBus 

{\>  Je  sépare  TE  de  TN  qui  sont  joints  dans  l'inscription. 

Je  supplée  à  la  fîn  et  sous-entends  perfuncto  ou  quelque 
autre  mot  semblable. 

Nota  que  ces  trois  lettres  RAR  de  la  troisième  ligne  m'ont 
Fort  exercé,  elles  sont  très  mal  traitées,  surtout  TA  mais  on 
voit  encore  assez  bien  les  deux  RR  ;  quant  à  l'A,  on  en  voit 
très  bien  la  jambe  droite,  et  ayant  suivi  toutes  les  sinuosi- 
tés de  la  pierre  avec  du  crayon  noir,  il  a  été  convenu  par 
tous  les  spectateurs  que  ce  ne  pouvoit  être  qu'un  A. 

Explication  :  A  l'honneur  de  Mardis  Mmiliiis  Nobilis^pres- 
Ire  d'Auguste  qui  a  donné  à  ses  dépens  au  peuple  le  spectacle 
des  gladiateurs  et  qui  a  passé  par  toutes  les  magistratures  de 
la  ville. 

Preuves  de  l'explication  :  Il  n'y  a  pas  de  difficultés  sur 
les  cinq  premiers  mots^  on  voit  par  là  seulement  qu'il  y 
avoit  h  Sens  un  temple  d'Auguste  desservi  par  les  premiers 
magistrats  de  la  ville  et  les  plus  riches  citoyens. 

Manerario,  Munerarius  veut  dire  proprement  celuy  qui 
donne  au  public  à  ses  dépens  le  spectacle  des  gladiateurs. 
Suétone  in  Domitiano  s'en  sert  en  ce  sens,  et  Quintilien  dit 
que  ce  terme  fut  de  l'invention  de  l'empereur  Auguste 
comme  reatus  fut  de  l'invention  de  Messala.  Quintil.  viii,  3. 

Omnibus  honoribus.  Honores  au  pluriel  s'entend  propre- 
ment des  magistratures  et  offices  publics  que  la  république 
ou  le  souverain  conféroit.  Je  supplée  à  la  fin  perfuncto, 
Pe  t-être  étoit-il  dans  le  bas  de  la  pierre. 

L'autre  inscription  est  la  fin  d'une  toute  semblable  à 
celle-cy,  à  la  différence  que  le  munerarius,  s'appeloit  Hono- 
ratus^  ces  inscriptions  avoient  des  formules  invariables. 


^ 


—  :ii  — 

LABBÉ  FENEL  A  L'ABBÉ  LE  BEUF 
A  SenSj  ce  mercredg  au  soir  25  Janvier  Î136. 

Je  me  donne  Thonneur  de  vous  écrire  une  3®  lettre  quoy- 
que  vous  n'aycs  pas  encore  fait  de  réponse  aux  deux  précé 
dentés,  Tune  de  la  fin  de  décembre  et  Tautre  vers  la  roy 
janvier. 

Je  commence  par  vous  envoyer  quelques  nouvelles  ^^ 
marques  sur  Tinscription  trouvée  icy  dernièrement  et  don 
je  vous  ay  envoyé  coppie  et  explication  dans  ma  dernière 
et  ensuitte  je  vous  communiqueray  quelques  reflexions  sur 
votre  dissertation  soissonnaise. 

J'ai  expliqué  ces  mots  de  Tinscription  FLAMINI.  AVG.  par 
ceux ' cy  flamini  Augusti;  il  falloit  dire  au^us/a/i.  C'est  la 
même  chose  pour  le  sens  absolument  parlant,  mais  la  pQ 
reté  de  la  langue  latine  exigeoit  que  Ton  mit  un  adjectif 
après  flamen  :  flamen  dialis,  martialis,  etc.,  en  sorte  quil 
ne  faut  pas  lire  flamini  Augusti f  mais  augustali.  Il  y  a  des 
inscriptions  où  ce  mot  augustali  est  tout  au  long  après  fla- 
mini. 

Il  y  eut  depuis  des  flamines  flavii,  hadrianales,  «liani,  ai^ 
tonini,  etc.,  établis  pour  honorer  les  familles  qui  régnèrent 
successivement  après  l'extinction  de  celle  d'Auguste,  qai 
flnit  dans  les  branches  adoptives  dans  la  personne  de  Né- 
ron, et  c'est  ce  qui  me  fait  faire  une  réflexion  pour  me  con- 
duire au  tems  à  peu  près  auquel  notre  inscription  a  été 
faite. 

Pour  cela  il  sufflt  de  considérer  que  la  flatterie  des  Ro- 
mains et  des  peuples  qui  leur  étoient  soumis  les  portoil  à 
déifier  les  princes  de  la  maison  régnante,  et  que  cela  faisoit 
nécessairement  déchoir  le  culte  de  la  maison  qui  étoit 
éteinte  ;  ainsy  les  prestres  augustaux  (s'il  m'est  permis  de  me 
servir  de  ce  terme)  cédèrent  bientôt  la  place  aux  flaviem 
(c'est-à-dire  à  ceux  qui  honoroient  la  famille  de  Vespasien;, 
ceux  cy  aux  prestres  des  maisons  d'Adrien,  etc  ,  en  sorte 
qu'il  faut  croire  que  notre  inscription  a  été  faite  entre  le 


—  33  — 

temps  qui  s'est  écoulé  depuis  rinstitution  des  augustaux 
sous  Tibère,  jusqu'à  celui  où  les  flaviens  prirent  le  premier 
degré  d'honneur.  Et  ainsi  voilà  notre  inscription  placée  en- 
tre la  première  année  de  libère  et  la  fm  du  règne  de  Ves- 
pasicn,  dans  Tespace  de  64  ou  65  ans. 

Au  reste,  quand  je  dis  que  les  nouveaux  prestres  que  la  flat- 
terie romaine  instituoit  pour  la  maison  dominante  faisoient 
déchoir  les  prestres  de  la  maison  éteinte,  je  ne  dis  pas 
que  cela  les  fît  abolir  tout  à  fait.  Cela  diminuoit  seulement 
leur  éclat.  Il  seroit  curieux  d'examiner  jusqu'à  quel  point 
celte  diminution  alloit,  mais  je  ne  crois  pas  que  l'on  ait  ja- 
mais aboli  tout  à  fait  les  augustaux  tant  que  le  paganisme 
subsista,  parce  qu'Auguste  étoit  regardé  proprement  comme 
le  premier  empereur,  et  celuy  qui  avoit  donné  la  forme  à 
cet  état,  forme  qu'il  garda  a  peu  près  jusques  à  Constantin. 
Jules  César  n'avoit  gouverné  que  sur  le  même  pied  que 
Silla  avoit  fait. 

Au  reste,  il  ne  faut  pas  confondre  avec  les  prestres  augus- 
taux les  cultores  Augusti  quiper  omnes  domos  in  modum  col- 
lc(jiorum  habebantur,  Tacite,  Ann.  Il,  73.  Ce  qu'il  y  a  de  cer- 
tain, c'est  qu'ils  étoient  très  réellement  distingués  et  que 
les  sodales  augustales  institués  à  Rome,  la  première  année 
(le  Tibère,  furent  sorte  ducti  è  primoribus  civitalis  unus  et 
vifjcnti,  à  quoy  on  joignit  les  quatre  princes  de  la  maison 
d'Auguste  qui  vivoient  alors.  Tacite  nous  apprend  encore, 
III  Ann.  64,  la  propre  fonction  des  augustaux  :  Ideo  augus- 
tales adjecti  quia  proprium  ejus  domûs  esset  sacerdotium  pro 
quà  vota  persolverentur.  Et  c'est  là  une  des  plus  fortes  rai- 
sons que  j'aye  pour  croire  que  la  maison  de  cet  empereur 
étoit  éteinte,  les  prestres  de  cette  maison  déchurent  beau- 
coup de  dignité,  puisqu'ils  étoient  le  propre  sacerdoce  de  cette 
maison. 

De  tout  cela  il  résulte  que  les  augustaux  de  Rome  étoient 
les  premiers  de  la  ville,  et  comme  on  imita  ce  sacerdoce 
dans  les  principalles  villes  de  l'empire,  on  prit  sans  doute 
de  même  les  premiers  de  chaque  ville  pour  remplir  ces  pos- 


—  Si- 
tes. Et  ainsi  il  falloit  que  M.  Mmilius  Nobilis  fût  un  homme 
considérable  de  la  ville  û'Agendic  ou  d'Agedinck.  11  falloit 
aussy  qu'il  fût  riche,  car  outre  la  richesse  nécessaire  pour 
soutenir  la  dépense  d'un  spectacle  de  gladiateurs,  on  a  des 
preuves  que  ce  sacerdoce  d'Auguste  étoit  fort  honorable. 
mais  en  même  temps  fort  onéreux.  Voicy  un  passage  d  Epi- 
tecte  dans  Arrien  de  Sermonibus  Epicleti,  L.  XIX  :  t  Quelqu'un 
«  m'a  dit  aujourd'huy  qu'on  luy  vouloit  donner  la  prêtrise 
»  d*Auguste;  je  luy  ay  dit  :  Laissez  cela  !  Car  vous  serés  obligé 
a  de  faire  bien  de  la  dépense  en  vain.  — Oh  mais,  m'a-t-il  dit 
c  les  grefliers  ou  secrétaires  publics  inscriront  mon  noir. 

<  (nous  allons  voir  qu'il  ne  s'agit  h\  que  d'une  inscription 
f  —  Et  quoy  donc,  luy  ay-je  dit,  est-ce  que  vous  irés  dire  a 
c  tous  ceux  qui  liront  ce  nom  que  c'est  vous  dont  il  est  |)arle 
«  là?  Et  quand  vous  le  diriez  à  tous  ceux  qui  le  viendront 
«  lire  de  votre  vivant,  que  ferés-vous  quand  vousseré^ 
«  mort? — Mais  mon  nom  demeurera  au  moins,  a-t-il  dit- 
«  Eh  mettez  le  vous-même  sur  une  pierre,  et  il  demeurera  pa- 
ff  reniement.  Et  quand  cela  seroit  bon  à  quelque  chose,  qai 
c  vous  connoitra  hors  de  Nicopolis  ou  de  la  ville  de  vo 
€  tre  résidence?  —  Oh!  mais  je  porterai  une  couronne  d  or 

<  dans  les  sacrifices  ou  cérémonies.  —  Si  vous  en  êtes  en- 

<  vieux,  prenés  en  une  de  roses  et  vous  promenés  avec,  du 
«  moins  elle  est  plus  agréable  à  voir,  etc.  » 

Vous  voyez  là  quelles  étoicnt  les  prérogatives  de  M'»  les! 
prestres  augustaux,  mais  elles  leur  coutoient  bonne,  et  c  eiit 
ce  que  fait  encore  voir  la  plainte  des  Bretons  contre  le  sa- 
cerdoce de  Glande  établi  dans  la  ville  de  Camalodumm 
Dclecliqiic  sacerdotes  specie  relligionis  omnes  forlunas  effun] 
dehant;ce  n'étoient  donc  pas  des  postes  lucratifs,  mais  blet 
au  contraire.  Je  vous  dirai  à  cette  occasion  que  je  crov  cs« 
tre  en  état  de  bien  prouver  que  chez  les  Romains  le  sacer  j 
doce,  quelque  considérable  qu'il  fût,  n'avoit  aucun  revenu 
attaché,  et  que  les  temples  avoient  seulement  (encore  pd 
tous  les  temples)  quelques  revenus  pour  subvenir  aux  fni^ 
des  sacrifices  et  à  Tachât  des  victimes  etc.  ;  il  y  avoit  aus^} 


—  35  — 

les  frais  des  feslins  sacrés  ;  et  c*etoit  là  à  quoy  alloient  les 
revenus  sacrés,  mais  ils  n  étoient  aucunement  destinés  à  de 
certains  particuliers  pour  en  disposer  pour  leur  subsis- 
tance ;  en  un  mot,  les  places  des  pontifes,  des  augures,  des 
]nindccimvirs,  des  septemuirs,  etc.,  n^étoient  pas  des  béné- 
kes  (pour  me  ser>ir  d'un  terme  qui  soit  intelligible  quoy- 
qu'impropre).  Jay  beaucoup  de  raisons  pour  prouver  cela 
îi  les  croy  sans  réplique,  mais  cela  serait  trop  long,  il  me 
suffît  de  répondre  seulement  icy  à  quelques  passages  par 
)ù  l'on  prouve  que  les  pontifes  avoient  du  bon  uin,  de  splen- 
iides  repas  et  des  chères  admirables;  ouy  c'étaient  des  fran- 
rhes  lippées  seulement  ou  des  repas  publics  et  sacrés  qui 
ai  soient  partie  de  la  relligion  payenne,  qui  se  dévoient  faire 
ivec  cérémonie  et  avec  magniticence,  mais  il  y  avoit  des 
bnds  destines  pour  cela  seul  et  qui  dévoient  même  se  tirer, 
m  certaines  occasions  qui  regardoient  le  public,  du  Ibré- 
ior  de  rÉtat  pour  suivre  les  règles,  sans  quoy  le  repas  sa- 
rré,  les  sacriGces,  tout  eut  été  perdu  et  il  eut  fallu  recom- 
nencer  sur  nouveaux  frais.  J*aurois  aussy  beaucoup  d'au- 
res  observations  à  faire  sur  ce  même  sujet,  sur  les  cbamps 
consacrés  aux  dieux  qui  dévoient  nécessairement  rester  in- 
;i>Ites  (ce  n'étoit  pas  le  mo^^en  de  les  rendre  d*un  bon 
produit  ),  sur  les  forêts  sacrées  où  il  était  deffendu  de  faire 
ntrer  du  fer  sous  de  grandes  peines,  c'étoit  pour  empêcher 
[u  on  ne  les  coupât  etc.  ;  j'en  ferois  aussy  sur  la  garde  et 
entretien  de  certains  temples  qui  étoient  à  la  charge  de 
ertaines  familles  et  pour  raison  de  quoi  Verres  ruina  un 
.'une  mineur,  etc.  Enfin  ce  sentiment  vous  paraîtra  nou- 
eau  et  très  singulier,  mais  je  crois  qu'il  n'en  est  pas  moins 
rny  et  qu'en  général  on  ne  connoît  pas  trop  bien  quelle 
toit  la  relligion  romaine. 

Vous  m'allés  dire,  monsieur,  sans  doute,  que  je  me  con- 
redis  en  ce  que  j'ay  dit  que  certains  temples  avoient  du  re- 
enu  et  que  cependant  certains  sacrifices  et  repas  sacrés 
e  dévoient  faire  aux  frais  de  TÉtat;  cela  se  concilie  en  dis- 
inguant  les  temples  de  VEtal  ou  de  la  république  d'avec  les 


—  3G  — 

temples  des  particuliers.  Il  y  avoit  bien  de  la  difTérenceen 
trc  eux,  mais  cela  suffît  pour  le  présent.  Mod  sentiment  en 
cela  est  nouveau  et  je  crois  en  estre  l'auteur,  mais  quelque 
jour  je  le  prouveray  bien.  Revenons  à  notre  inscription 

Je  veux  maintenant  fixer  encore  plus  précisément  le  temps 
où  elle  a  été  faite  ;  je  vois  que  le  nom  d'jEmilius  est  le  nom 
d'une  des  plus  illustres  familles  de  Home,  croirons  nous 
que  notre  magistrat  d'/le/Mé/mc/r  ait  été  de  cette  noble  fa- 
mille? Non  certes,  c'étoit  un  Gaulois  romanisé  qui  avoit  pris 
un  nom,  mais  il  falloit  que  ce  fut  un  citoyen  romain,  câr 
Claude,  selon  Suétone  :  Peregrinœ  conditionis  homines  i^liiil 
usurpare  /-oma/ia /lo/n/na,  dunUaxat genlilitia.  [In  Claudio  J 
Et  ainsy  Marcus  iEmilius  Nobilis  a  dû  vivre  dans  un  temps 
où  les  principaux  des  villes  gauloises  avoicnt  le  titre  de  ci 
toyens  romains,  ce  qui  semble  estre  arrivé  sous  rerapiit  de 
Claude,  quoy  que  la  chose  ne  laisse  pas  de  souffrir  quelque 
difficulté.  Mais  de  quelque  manière  qu'on  explique  Icspav 
sages  de  Tacite  sur  le  droit  de  cité  accordé  aux  Gaulok 
toujours  peut- on  assurer  que  notre  inscription  ne  pfut 
guéres  estre  avant  l'empire  de  Claude,  ny  après  celuy  de 
Vespasien,  ce  qui  fixe  le  tems  de  cette  inscription  à  25  ou 
30  ans  près.  C'est  beaucoup  faire  dans  une  matière  aussy 
obscure  que  celle-là. 

Je  finis  ce  fatras  de  remarques  informes  en  vous  faisant 
remarquer  que  selon  une  inscription  rapportée  dansJ.Lipsf 
il  y  avoit  de  la  différence  entre  les  flamines  angustales  et  les 
sodales  angustales.  Il  scroit  à  présent  assez  difOcille  de  dire 
quelle  est  celte  différence 

PASCHAL  FENEL  A  LE  BEUF 

A  Sens,  ce  lo*  février  1736 

Monsieur, 

Il  faut  que  vous  soyésextraordinairement  occupé,  puisque 
vous  ne  m'honores  pas  d'aucune  réponse  aux  trois  lettres 
quD  j'ay  vu  l'honneur  de  vous  écrire  depuis  la  fin  dclan- 


—  37  — 

ée  dernière  et  dans  lesquelles  (c'est  la  seconde)  est  une 
^ouvaille  d'inscriptions  romaines.  Vous  avez  dû  voir  dans 
I  première  les  éclaircissements  sur  l'inscription  SRI  que 
ous  paroissiés  désirer  ;  dans  la  troisième  enfin  étoient  des 
éllcxions  nouvelles  sur  les  inscriptions  contenues  dans  ma 
Bconde  lettre.  Voicy  de  quoy  exciter  de  nouveau  votre 
uriosité,  monsieur,  mais  je  désespère  presque  de  pouvoir 
lus  trouver  aucune  chose  qui  puisse  faire  cet  effet,  ou  du 
loins  obtenir  une  réponse  de  vous  ;  mais  quelque  peu  de 
as  que  vous  en  déviés  peut  estre  faire,  voicy  de  quoi  il  s'agit. 

Ce  sont  deux  inscriptions  en  lettres  onciales  toutes  sem- 
labiés  à  Tinscription  de  VESTÂ,  et  au-dessus  desquelles 
ont  des  bossages  ou  portions  de  pierres  Agurées  tout  ex- 
rès  en  façon  rustique  et  champestre  et  débordant  considé- 
ablement  au  dessus  du  plan  uni  où  sont  les  inscriptions. 

La  première  à  gauche  a  cinq  lettres  ainsi  :  ViSQV  (1).  La 
econde  à  droite  et  à  coté  immédiatement  de  Tautre,  mais 
in  demi  pouce  plus  élevée  qu'elle,  a  six  lettres  qui  sont 
3ulcs  égalles  :  OTOPOS  (2)  et  de  même  grandeur  que  les 
lus  petites  lettres  de  Tinscription  gauche.  J'ay  cru  avoir 
einarqué  un  point  placé  exprès  entre  les  lettres  S  et  Q  de 
inscription  de  gauche;  mais  d'autres  ont  jugé  que  c'é- 
3it  un  pur  deffaut  de  la  pierre.  Je  ne  savoîs  d'abord  ce  que 
3ut  cela  vouloit  dire;  enfin  après  avoir  bien  roulé  cela 
ans  mon  esprit,  j'ay  vu  (ou  j'ay  cru  voir)  qu'il  falloit  mèt- 
re à  gauche  l'inscription  qui  est  à  droite  et  lire  tout  de 
uitc  en  distinguant  les  mots  par  des  points  :  OTO  .  FOSVL 
K  QY Remarqués  ce  grand  I  qui  termine  po5«i. 

Tout  cela  a  été  trouvé  dans  le  même  pan  de  muraille  que 
es  autres  inscriptions  trouvées  cy-devant,  mais  plus  bas. 


l'I  Nous  avons  placé  cet  le  pierre  à  la  fin  de  la  premuTC  rangée.  Depuis 
a  découverte  eUe  a  été  mutilée. 

(2)  Cette  pierre  est  la  dixième  de  la  première  rangée.  L'ablié  Fenel  avait 
'U  encore  uo  autre  frïigment  de  la  grande  inscription  comme  l'alteste  le 
itouillon  que  j'ai  sous  les  yeux:c*est  la  pierre  qui  occupe  le  M'ptiemc  rang 
t  ciui  porte  MAGIUV.  Il  avait  lu  MAGIIV. 


—  SS- 
II y  avoit  même  encore  de  la  terre  qui  couvroil  le  bas  de 
ces  dernières  inscriptions.  J'achevay  de  la  faire  ôler,  ce  qui 
me  fit  voir  que  ce  que  j*avais  pris  pour  un  O  étoit  venta- 
tablement  un  A.  Pour  venir  présentement  à  rexplication,  je 
crois  que  ces  deux  inscriptions  (qui  se  réduisent  à  unesont 
la  suite  de  Tinscription  de  VESTA.  Ce  qui  nie  le  persuade 
est  la  similitude  de  la  forme  et  grandeur  des  lettres  et  du 
bossage  qui  est  au  dessus.  Selon  cette  idée,  il  nous  manque 
une  pierre  après  celle  ou  est  le  nom  de  VESTA  et  avant 
celle  où  est  le  nom  OTO  ;  et  il  nous  manque  encore  une 
pierre  et  peut-être  deux  ou  trois  où  est  la  fin  du  nom  des 
consuls  qui  ne  sont  que  commencés  dans  celles  que  nous 
avons.  Ainsi  je  lirois  tout  de  suite  :  Sacrum  VESTAE  Malri 
OTO  POSVl  Sexto  QVinto...  Moi  Oton  fai  posé  ce  temple 
qui  est  consacré  à  la  déesse  Vesta  la  mère,  sous  le  consulat 
de  Sextus  Quinct,  On  n*en  peul  pas  dire  davantage,  car  je 
trouve  que  dans  les  consulats  qui  sont  entre  César  et  Julien 
l'Apostat  il  n'y  a  que  trois  consuls  qui  soient  nommés  de 
noms  qui  commencent  parQVet  qui  soient  en  mêmetemp^^ 
les  premiers  des  deux  consuls,  savoir  un  Quinclins  Mgtr, 
sous  Trajan,  un  autre  d'un  nom  à  peu  près  pareil  sous.Xn- 
tonin  le  Débonnaire,  et  un  Quinctus  longtems  après.  \ou^ 
pouvés  vérifier  cela  sur  les  fastes  dont  on  a  des  éditions  n 
Paris  meilleures  que  celles  que  j'ay,  et  dans  lesquelles  peut 
estre  les  prénoms  seront  marqués  exactement.  Ce  sera  celuy 
de  ces  Mrs  là  qui  aura  eu  le  prénom  Sextus  à  qui  ce  con- 
sulat appartiendra,  et  par  conséquent  le  tems  de  notre  in- 
scription et  du  temple  de  Vesta  bAti  à  Sens.  Je  dis  un  tem- 
ple, car  si  ces  inscriptions  étoient  de  suite,  comme  je  le 
crois,  en  y  joignant  les  autres  qu'on  n'a  pas,  il  faut  que  {in- 
scription en  tout  ait  plus  de  20  à  25  pieds,  et  partant,  cela  n  a 
pu  appartenir  qu'à  un  temple,  et  encore  à  sa  façade  exté- 
rieure, les  temples  des  anciens  étoient  souvent  assez  petits 
Je  ne  vous  envoyé  pas  aujourd'hui  de  remarques  siir 
votre  dissertation.  Il  faut  remettre  cela  à  une  autre  fois,  je 
suis  trop  occupé  aujourd'huy  ;  mais  il  ne  faut  pas  omettre 


—  39  — 

deux  petites  remarques  :  Tune  sur  rinscriplion  où  on  lit 
niuci  qui  est  sûrement  la  fin  d'un  mot.  Je  soupçonne  que 
c'est  la  fin  du  génitif  du  mot  entier  Agenniucum  et  que  ce 
nom  est  le  vray  nom  du  Sens  payen,  et  non  pas  Agendicum 
et  encore  moins  Agetincum.  Gela  vous  paroitra  étrange, 
Yoicy  mes  raisons  : 

Il  n'est  pas  nouveau  de  trouver  des  noms  qui  soient  cor- 
rompus dans  tous  les  manuscripts  et  qu'on  rétablit  dans 
leur  usage,  écriture  et  prononciation,  par  le  moyen  des 
inscriptions  et  des  médailles.  Sans  aller  bien  loin,  on  en  a 
un  exemple  tout  récent  dans  le  nom  d'un  roy  du  Bosphore, 
Cimmericay  qui  se  nommoit  Pœrisades,  en  grec  Pairisades  ; 
ce  nom  est  vicié  dans  tous  les  exemplaires  des  auteurs  qui 
en  ont  parlé  et  M.  de  Boze  l'a  reconnu  par  le  moyen 
d'une  médaille  unique  de  ce  prince  sur  laquelle  il  a  fait  une 
dissertation  très  belle  dans  les  Mémoires  de  l'académie  des 
Belles  lettres,  tome  6«. 

Il  n'est  donc  pas  impossible  que  le  nom  de  Sens  payen  ait 
été  corrompu  de  la  même  manière  ;  mais  l'a-t-il  été  ?  Ouy, 
si  Tinscription  en  question  ne  peut  convenir  qu'à  la  fin  d'un 
mot  qui  soit  le  génitif  de  cet  ancien  nom  ;  mais,  me  dirés- 
vous,  c'est  peter  te  principe  ;  mais  je  vous  diray  moy  qu'il 
n'y  a  pas  beaucoup  de  différence  entre  Agenniucum  et 
Âgendiucumy  car  le  d  se  peut  aisément  manyer  en  n  après 
une  autre  n  et  vice  versa.  Mais,  me  dirés-vous,  que  faites 
vous  de  cet  u  avant  cum  qui  ne  paroit  pas  dans  la  lecture 
des  manuscripts  ?  Je  dis  que  cet  u  a  été  omis  pour  l'eupho- 
nie, ou  bien,  si  vous  voulés,  brevitatis  causa,  et  que  les  copis- 
tes qui  voyoient  que  cette  prononciation  avoit  changé,  au- 
ront écrit  ce  nom  suivant  la  prononciation  nouvelle  dans 
les  copies  qu'ils  auront  fait  des  anciens  manuscripts.  Après 
tout  ce  n'est  qu'une  conjecture,  il  scroit  bon  de  voir  les 
mss.  de  Caesar,  de  Ptolémée,  etc..  Vous  le  pouvés  aisément. 

L'autre  remarque  est  sur  l'inscription  SRI. 

Peut-être  cela  veut-il  dire  :  Senones  Ratuni  lusseruni  ;  ce 
n'est  qu'une  conjecture. 


—  40  — 

En  passant  remarqués,  s'il  vous  plait,  que  Senonenses,  mot 
usité  aujourd'huy,  n'est  pas  latin. 

Les  Romains  disaient  au  singulier  Senotij  cela  est  certain; 
et  quand  ils  voulaient  en  former  un  adjectif,  ils  disaient 
Senoniciis  comme  A.  Gçlle  :  Bellum  Senonicum,  et  notre  pro- 
vince est  appelée  Sé/]on(gue  quelque  part.  Conclues  que  c'est 
avec  une  grande  ignorance  que  ceux  qui  veulent  parler 
latin  et  bon  latin  nomment  un  homme  natif  de  Sens  Scno- 
nicuSf  et  un  homme  qui  n'est  pas  de  Sens,  mais  du  diocèse; 
Senonensis.  Cest  avec  pareille  élégance  qu'on  appelle  un 
Parisien  :  Parisiiws,  ce  qu'on  devrait  dire  Lutetianus,  et  un 
homme  du  diocèse  de  Paris  :  Parisiensis,  qu'on  devroit  dire 
Parisius,  car  les  peuples  de  ce  pays  étoient  nommes  des 
latins  :  Par/5// au  pluriel.  Quelque  autrefois  je  vous  commu- 
niqueray  mes  conjectures  sur  Tétymologie  celtique  du  mot 
Senones  et  Semnones  et  du  grec  Semnos  qui  en  vient  peut- 
être,  c'est  à  dire  que  tous  ces  noms  seroient  dérivés  d'une 
même  racine  de  la  langue  primitive,  dont  les  branches  sont 
répandues  dans  toutes  les  langues  qui  se  formèrent  à  la  dis- 
persion de  Babel  ;  mais  cela  seroit  trop  long  à  déduire, 
outre  qu'il  faut  que  je  fasse  encore  quelques  recherches  sur 
cela. 

Je  suis  à  mon  ordinaire,  monsieur,  ave<:  un  très  profond 
respect,  monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  ser- 
viteur. 

Fenel. 

Ne  vous  étonnés  pas,  s'il  vous  plait,  de  ce  que  VOio  de  no- 
tre inscription  n'ait  pas  d*/i  dans  son  nom.  Peut-estre  n'etoit 
il  pas  de  la  famille  de  l'empereur  trimestre  de  ce  nom  ^ 
Peut-estre  écrivoit-il  son  nom  autrement  ?  Pcut-estrc  est-ce 
aussy  la  faute  du  sculpteur?  De  plus  il  y  a  des  médailles  de 
l'empereur  Oton  sans  h  (1). 

(1)  Cortains  numismates,  par  exemple  Laurent  Pu tn roi  (Venise  17>1S. 
ont  écrit  le  nom  de  cet  empereur  OTTO;  mais  les  mcHlnillcs  portent  tou- 
jours OTIIO.  On  ne  trouve,  dans  Cohen,  aucune  médaille*  où  le  nom  •' 
rempereur  Olhon  ait  un  H  pour  première  lettre. 


—  41  — 

L  ABBÉ    LE   BEUF    A    L'ABBÉ    PASCHAL   FENEL    * 

A  Paris,  ce  6  février  1736. 

[Il  vient  de  parlerde  Monseigneur  Languet,  archevêque  de 

Sens.) 

Nous  parlâmes  d'inscriptions.  Je  lui  montrai  celles  que 
vous  avez  trouvées  au  mois  de  janvier.  Il  n'en  avoit  pas  oui 
parler.  Je  lui  dis  que  je  ferois  placer,  dans  le  Mercure,  la 
plus  considérable  avec  quelques  unes  de  nos  observations. 
La  dessus  il  me  dit  qu'il  avoit  été  bien  surpris  de  ce  qu'étant 
dernièrement  à  la  cour,  c'étoit  le  Roy  lui-même  qui  lui  avoit 
appris  que  le  Mercure  de  décembre  faisoit  mention  de  lug  à 
Foccasion  de  Vinscription  de  Vesta.  Nous  n'entrâmes  pas  dans 
d'autres  détails. 

...  Tout  ce  que  vous  m'avez  mandé  sur  les  différentes  car- 
rières est  très  curieux,  sur  le  banc  coquillart,  etc.  ;  mais  je 
vous  prie  de  faire  une  réflexion  et  de  penser  s'il  étoit  fort 
commode  de  faire  venir  de  Paris  des  pierres  à  Sens  ?  Ne 
seroit-ce  pas  plutôt  des  pays  hauts  que  seroient  venues  les 
pierres  par  le  canal  de  la  rivière.  Vx>us  direz  que  par  la 
même  raison  on  auroit  pu  faire  venir  aussi  par  bateau  des 
démolitions  :  il  n'y  a  rien  d'impossible  la  dedans,  il  est  plus 
commode  aux  voitures  chargées  de  descendre  que  de  re- 
monter. 

Je  pense  toujours  que  votre  ville  de  Sens  romaine  payenne 
a  été  vers  l'embouchure  naturelle  de  la  Vanne  dans  l'Yonne 
et  que  c'est  de  ce  costé  là  qu'étoient  les  monuments  en 
plus  grand  nombre.  Peut-être  est-ce  aussi  pour  la  même 
raison  qu'on  en  trouve  d'avantage  dans  vos  murs  méridio- 
naux de  Sens  chrétien.  Ils  étoient  à  portée^  on  démolit,  on 
désincrusta  votre  tour  de  Ciar  etc.,  comme  on  a  fait  ailleurs. 
On  voit  encore  à  Auxerre  de  ces  anciennes  tours  qui  n'ont 
que  les  os. 

...  Je  dois  porter  aujourd'hui  à  M.  de  la  Roque  le  précis 
que  j'ai  fait  de  vos  remarques  sur  M.  jEmilius.  11  y  en  a  qui 
ne  sont  pas  également  fondées,  je  les  passe  sous  silence. 


—  42  — 

D.  de  Montfaucon  a  un  peu  varié  sur  cette  inscription  que 
je  lui  ai  montré  deux  fois  II  m*a  dit  la  deuxième  Tois  qoe 
l'R  d'après  Muncra  pouvoit  signifier  recepil  ou  recepla.  Il 
me  parut  surpris  du  mot  munerarius.  Je  ne  le  trouve  pas 
dans  les  tables  de  Gruter.  Il  est  dans  du  Gange  qui  ne  cite 
pas  Suétone. 

...  Gomme  j'allois  finir  ma  lettre,  je  viens  de  recevoir 
votre  troisiesme  du  premier  de  ce  mois,  je  n'ay  pu  que  la 
lire  :  une  autre  fois  je  vous  ferai  part  de  mes  réflexions.  En 
attendant,  j*ai  l'honneur  d'être,  avec  un  profond  respeci, 
monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur, 

Le  Bel-f. 

LETTRE  DE  L'ABBÉ  LE  BEUF  A  M.  DE  LA  ROQUE 

Mercure  de  France^  février  1736.  p.  264 

Parmi  le  grand  nombre  d'inscriptions  recueillies  par  Gru- 
ter et  les  autres  antiquaires,  il  n'en  paraissait  aucune  qui 
eut  été  trouvée  dans  la  ville  de  Sens  ou  auprès  de  cette 
ville.  Si  Gruter  indique  quelquefois  une  province  ou  une 
ville  sénonaise  comme  lieu  où  on  a  découvert  certaines  in 
scriptions  qu'il  rapporte,  il  est  visible,  par  le  garant  qu  il 
cite,  qu'il  ne  s'agit  point  de  la  ville  de  Sens  de  nos  Gaules, 
mais  d'une  colonie  sénonaise  établie  en  Italie.  Enfin,  le 
hasard  a  permis  que  ce  qui  était  enfoui  à  Sens  et  caché  au 
bas  des  murs  de  la  ville  se  manisfeste  de  nos  jours.  Outre 
l'inscription  de  la  déesse  Vesta,  qui  a  été  trouvée  au  mois 
d'octobre  dernier,  et  dont  il  est  parlé  dans  le  I<^»"  volume 
du  Mercure  de  décembre,  je  puis  vous  en  citer  plusieurs  au- 
tres qu'on  vient  de  découvrir  dans  ce  présent  mois  de  jan- 
vier. Gomme  les  pierres  qui  sont  chargées  de  ces  inscrip- 
tions sont  mises  en  confusion  dans  le<  fondements  de  ces 
murs,  il  est  difficile  de  rencontrer  dessus  une  véritable  suilc 
de  langage  cl  on  est  réduit  à  regretter  que  la  plupart  n  ont 
pas  été  bien  conservées  pour  nous  apprendre  à  quel  u««iif;e 
elles  avaient  été  employées  d'abord.  Soit  restes  de  lempb 
PU  d'autels,  soit  débris  d'autres  monuments  payens,  soii 


—  43  — 

simples  épitaphes,  tout  a  été  employé  indifréremment  pour 
élever  les  murs  de  Sens  tels  qu'on  les  voit  aujourd  hui.  Je 
dirais  que  c'est  la  rareté  des  carrières  dans  le  pays  qui  en 
est  la  cause,  si  je  ne  savais  que  dans  plusieurs  autres  villes, 
où  la  pierre  est  fort  commune,  les  ruines  des  monuments 
du  paganisme  sont  employées  de  même  dans  les  fondations 
des  murs  de  ces  villes,  qui  paraissent  du  iv^  ou  du  v«  siècle. 
Le  savant  chanoine  de  Sens  (M.  Fencl),  dont  je  vous  ai 
parlé  dans  ma  lettre  précédente,  continue  ses  soins  pour 
ne  pas  perdre  un  seul  fragment  de  ces  précieux  restes.  Et 
il  joint  à  cette  attention  des  recherches  fort  exactes  sur  le 
temps  auquel  ces  inscriptions  pourraient  avoir  été  gravées. 
Les  deux  plus  considérables  des  quatre  qu'il  vient  de  m'en- 
voyer  consistent  en  deux  blocs  de  pierres  sur  les  quels  on 
lit: 


HONORATO  M  AE 

VG   MVNERA  FLA 

VS   HONORIB  HAR 


MILIO   NOBILI 
MINI  AVG  MVNE 
OMNIB  HONORIB. 


La  ligne  perpendiculaire  que  j  ai  tracée  ici  marque  en 
quel  endroit  elles  sont  séparées  Tune  de  l'autre.  Il  est  diffi- 
cile de  dire  quelque  chose  qui  soit  sûr  touchant  la  première 
inscription,  dont  le  commencement  ne  paraît  pas.  La  se- 
conde qualifie  Marcus  iEmilius  de  flamine  ou  prêtre  augus- 
tal,  c'est  ce  qu'elle  a  de  plus  remarquable.  Il  ne  resterait 
qu'à  juger  sur  la  qualité  du  caractère  s'il  faut  attribuer  celte 
inscription  au  siècle  d'Auguste,  car  on  peut  faire  divers  rai- 
sonnements sur  les  prêtres  des  Romains  appelés  Âugus- 
laux  ;  mais  cela  n'offrirait  point  l'époque  de  cette  inscrip- 
tion. Notre  curieux  Sénonais,  s'élant  assuré  qu'il  y  a 
MVNEUAR  dans  celte  inscription,  conjecture  que  M.  Emile 
aurait  été  ainsi  qualifié  de  numerarius  en  reconnaissance 
de  ce  qu'il  avait  donné  au  peuple  à  ses  dépens  le  spectacle 
de  gladiateurs.  Suétone,  dans  Domitien,  s'en  sert  en  ce  sens, 
et  Quintilien  (viii,  3)  dit  que  ce  terme  fut  l'invention  de  l'em^ 
pereur  Auguste,  comme  reatus  fut  l'invention  de  Messala, 


) 

I 


_  44  — 

M.  Fcnel  n'a  pas  oublié  non  plus  de  me  faire  remorquer 
que  dans  Arrien  De  Sermone  Epicieli,  L.  XIX,  il  y  a  un  té- 
moignage formel  que  les  prêtres  augustaux,  en  considéra- 
tion des  dépenses  auxquelles  ils  étaient  engagés,  avaient 
l'honneur  de  voir  graver  leurs  noms  sur  les  pierres.  Voilà 
M.,  le  précis  de  ce  que  m'écrit  ce  savant  et  dont  je  vous 
prie  de  faire  part  au  public,  en  attendant  quelque  chose  de 
plus  important. 

Je  suis  etc.. 

A  Paris,  31  janvier,  1736. 

L'ABBÉ  PASGHAL  FENEL  A  L'ABBÉ  LE  BEUF 

A  Sens,  ce  samedy  17  mars  1736. 
(  Il  demande  à  l'abbé  le  Beuf  de  corriger  les  nombreuses 
fautes  que  contient  l'article  du  Mercure  de  février  louchant 
les  inscriptions  de  Sens  et  de  mettre  un  errata  dans  le  pro- 
chain article  sur  les  autres  inscriptions  sénonaiscs.] 

Si  vous  ne  la  faites  pas  réformer,  on  croira  que  je  n  ay 
pas  su  lire  l'inscription,  quelle  honte  pour  un  homme  que 
vous  traités  de  savant  si  libéralement  !  Cela  rejailliroit  sur 
vous  qui  m'avés  décoré  de  ce  beau  titre,  dont  au  reste,  si] 
vous  plait,  monsieur,  vous  répondrés  en  votre  propre  et 
privé  nom  devant  Dieu  et  les  hommes  (1). 

A  l'égard  de  mes  remarques  sur  les  inscriptions  quejay 
eu  l'honneur  de  vous  envoyer  l'avant  dernière  fois,  mon 
sieur,  vous  me  dites  bien  que  vous  passés  sous  silence  celles 
que  vous  ne  trouvés  pas  également  fondées,  mais  vous 
m'iiuric/.  fait  grand  plaisir  de  me  marquer  les  raisons  que 
vous  avez  de  les  juger  telles,  cela  m'auroit  mis  en  élal  de 
leîi  coiilirmer  par  de  nouvelles  preuves,  ou  bien  de  recon 
noitrc  de  bonne  foy  que  je  me  suis  trompé.  C'est  ce  que 

(l)  Voir*  dnns  la  leltre  tic  Fenel  du  t4  janvier  1736,  le  passage  où  il  «^ 
pLilnl  li  11  voir  reçu  de  le  Reiif  la  qualllô  de  stwant  qu'il  eonsidèrc  cnnmK 
ime  injnrf.  Aujourd'hui  ce  même  lilre  peut  encore  être  mal  accuHlIi  |ar 
ccrioins  ciiercheurs  qui  n'ont  aucune  prétention  à  ce  titre. 


ht 


—  45  — 

je  lie  manque  jamais  de  faire  dès  qu'on  m'éclaire  sufBsam- 
mcnl. 

Je  suis  surpris  des  variations  d'un  aussy  liabilc  homme 
que  le  P.  de  Monlfaucon  dans  ces  matières.  S'il  y  avoit 
mimera  recepit  ou  receplOy  il  n'y  auroil  pas  seulement  de 
construcUon.  Faisons  l'honneur  à  nos  ancêtres  de  croire 
qu  ils  ne  parloient  pas  si  ridiculement.  Le  mot  Munerarius 
n  est  pas  seulement  dans  Quintilien  et  Suétone,  il  est  encore 
dans  Pline  pour  signifîer  un  homme  qui  donne  un  specta- 
cle de  bestes  féroces.  Je  n'ay  pas  vérilié  cette  citation,  mais 
clic  est  de  bon  lieu.  Je  ne  sais  si  c'est  le  naturaliste  ou  son 
neveu.  J'ay  vérifié  qu'il  est  encore  dans  les  lois  romaines 
compilées  par  l'ordre  de  Juslinien,  en  plusieurs  passages,  et 
si«^nir]e  là  celuy  qui  donne  des  spectacles  en  général  à  ses 
dépens,  soit  de  bestes  ou  de  gladiateurs.  Je  suis  surpris 
moy  de  la  surprise  du  P.  de  Montfaucon  qui  ne  connoit  pas 
un  tel  mot,  tandis  qu'un  écolier  comme  moy  l'ay  trouvé  à 
la  première  lecture  de  l'inscription,  sans  le  secours  d'aucun 
livre  parle  seul  souvenir  de  mon  Suétone  que  j  ai  autrefois 
beaucoup  lu  h  la  vérité.  Je  suis  à  mon  tour  surpris  que  ce 
mot  soit  dans  du  Cange,  où,  selon  son  litre,  il  ne  devroit  y 
avoir  que  des  mots  de  la  basse  ou  de  la  mo^^enne  latinité; 
à  moins  qu'on  ne  veuille  faire  commencer  la  moyenne 
latinité  à  Auguste,  ce  qui  n'auroit  pas  sans  doute  l'approba- 
tion publique.  Quoy  qu'il  en  soit,  si  ce  mot  n'est  pas  dans 
Gruter,  notre  inscription  devient  unique  à  cet  égard  et  par 
conséquent  considérable. 

J'ai  songé  depuis  qu'il  ne  faut  peut-estre  pas  suppléer 
aucun  verbe  ù  la  fin  de  cette  inscription  et  que  munerario 
omnibus  honoribus  ne  veut  dire  autre  chose  si  non  que  cet 
homme  a  donné  des  spectacles  dans  toutes  les  magistra  • 
tures  ou  honneurs  par  lesquels  il  a  passé.  En  sorte  que  cela 
voudroit  dire  qu'il  en  a  donné  plusieurs  fois.  Qu'en  pensés- 
vous?  Cela  est  plus  simple. 

Vous  me  faites  espérer  réponse  à  ma  lettre  du  1er  février, 
où  est  l'inscription  otoposvIsq;  je  Tattends  encore.  J'ai 


—  40  — 

trouve*  (Jatis  le  Moréry  d'icy  qu'il  y  a  eu  en  151  de  J.  C.  un 
consul  qui  ;rvoit  pour  prénom  Sextus  et  le  nom  Qu. 

Voicy  une  tlornière  trouvaille,  mais  elle  est  bien  peu  con- 
sidérable; il  ne  faut  pas  cependant  la  perdre,  elle  servira 
peut-eslre  quelque  jour  à  finir  et  à  suppléer  ce  qui  mnn- 
q Liera  n  quelque  autre  qu'on  trouvera  dans  la  suite  :  cesl 
une  pierre  renversée  en  cette  forme  : 


(lAdV IV 


La  lettre  que  je  prends  pour  L  est  assez  mal  formée  1). 

11  y  a  une  espèce  de  quadre  au-dessus,  comme  vous  voycs. 
ce  qui  nuirqde  la  lin  de  Tinscription  dont  le  commencement 
nninque.  Li-s  points  que  j'ai  marqués  sont  à  la  place  des  Ici 
1res  lolaleiueat  effacées  que  je  n'ay  pu  lire,  et  je  remar(|ue 
que  le  caiaetcre  n'a  de  proportion  avec  aucun  des  aulrcs 
Inscripliotjs  déjà  trouvées,  c'est  à  dire  pour  la  hauteur,  cn- 
fonccuîcnt  de  la  [gravure,  etc.,  car  ce  sont  toutes  Icllres 
roiiiaincH.  H  faut  encore  vous  dire  qu'il  y  a  longtemps  que 
celle  pierre  est  découverte,  mais  comme  elle  éloit  pleine  de 
terre  crasse  et  onctueuse,  on  n'a  pu  lire  ce  peu  de  leltres 
que  quand  la  pluye  et  le  soleil  ensuite  ont  contribué  à  la 
netlfîyer 

j'ai  Ihonneur,  Monsieur,  d'estre  avec  un  profond  respect. 

en  nUeiidiiiU  l'honneur  de  votre  réponse  à  celle-cy  et  à  celle 

du  I"  lévrtej-,  Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant 

servi  leur. 

Fenel. 

Je  x'ouH  recommande  très  fort  l'errata  pour  le  Mercure 


(Ij  L'nhbû  l'Viiel  nurnit  dû  lire  lAE  APVDSVO  (anllpénulUrmc  pient 
du  ih'TiJÏvf  rniig}. 

Sur  U's  t|iiiininlc-cinq  pierres  dont  se  compose  ni^ourd'hui  renstmMr 
ilu  irioiiuinriil,  le*  savant  abbé  en  connni»sail  neuf.  I^  fragment  portini 
S  U  {,  pi^rilu  nmUUenant.  parait  avoir  appartenu  A  un  outre  nionumrn! 


-  47  — 

L  ABBÉ  LE  BEUF  A  L'ABBÉ  PASCHAL  FENEL 

19  mars  1736 
Monsieur, 

Quoique  je  ne  manque  pas  icy  d'occupations,  je  ne  diffe- 
reray  pas  cependant  à  répondre  à  l'honneur  de  vos  deux 
dernières  lettres.  Je  commence  par  celle  du  jour  d'avant 
hier  d  autant  plus  que  j'ai  la  teste  actuellement  un  peu  farcie 
d'antiquailles.  11  seroit  aisé  de  redresser  dans  l'errata  la 
citation  de  Serm.  Epicteti  1.  1,  c,  xix.  J'ai  consulté  votre 
lettre  du  l^r  janvier.  11  y  a  L.xix  bien  marqué.  Les  autres 
fnutes  d'impression  sont  peu  de  chose  et  l'on  ne  prend  pas 
garde  de  si  près  que  vous  le  pensés  à  tout  ce  qui  s'imprime 
en  fait  d'inscriptions.  Je  ne  vois  pas  non  plus  que  je  puisse 
(iiire  grand  usage  des  fragments  que  vous  m'avez  commu- 
niqués. Dom  de  Montfaucon  méprise  tout  ce  qui  n'est  pas 
considérable.  M.  de  la  Roque  y  perd  son  latin.  Pour  moy 
j'approuve  fort  vos  conjectures,  mais  je  doute  que  le  mot 
d'OTO  soit  complet.  Ne  seroil-ce  point  la  fin  d'un  mot,  je  ne 
vois  gueres  de  mots  finissant  par  OTO  au  nominatif.  11  peut 
cependant  y  en  avoir.  Ce  peut  être  aussi  la  fin  d'un  ablatif, 
et  cela  u'empécheroit  pas  que  ces  deux  fragments  n'eussent 
du  rapport  avec  le  Sacrum  Vestœ  Matri. 

Il  y  avait  à  Auxerre  beaucoup  d'inscriptions  ainsi  muti- 
lées, mais  on  les  a  négligé.  Ce  que  vous  me  dites  à  l'occasion 
du  bout  de  mot  MVCI  a  quelque  probabilité;  mais  on  n'o- 
seroit  produire  en  public  un  mot  si  sec  et  si  obscur.  Atten- 
dons toujours  la  rencontre  de  quelque  chose  qui  nous  dé- 
couvre ce  qui  est  caché.  Je  ne  trouverois  pas  mauvais  qu'on 
eut  dit  Ageniucum. 

Revenons  à  votre  dernière  lettre 

Je  regarde  votre  trouvaille  de  munerarius  comme 

singulière.  J'ai  parcouru  le  Thésaurus  antiq.  rom.  de  Sallen- 
gre,  au  moins  les  tables,  sans  y  trouver  ce  nom.  11  resteroit 
à  voir  les  additions  faites  à  Gruter,  Spon  et  Fabretti 

Depuis  cecy  écrit,  j'ay  consulté  l'édition  de  Gruter 

de  1707.  Elle  est  plus  ample  que  la  première.  J'y  ai  trouvé 


UN  DRAME  A  LA  HOUSSAYE 

EN  1736 


Après  avoir  traversé  le  village  de  Mâlay-le- 
^'icomle  (aujourd'hui  Mâlay-le-Grand)  et  franchi 
epont  dite  de  la  porte  deNoé,  »  on  aperçoit,  sur  la 
Iroite,  une  colline  aride  et  dénudée,  aux  pentes 
bruptes,  sur  le  sommet  de  laquelle  croissent  seu- 
?nient  de  rares  et  chétifs  genévriers. 

Celte  colline,  dans  le  flanc  de  laquelle  monte  en 
erpentant  un  chemin  crayeux,  s'appelle  «  la  côte  de 
e  Chaumont  t>  (calvus  mous,  calidus  mons),  ainsi 
ommée  à  cause  de  son  aridité  ;  ce  chemin  conduit 
des  bois  d'une  étendue  considérable  qui,  prenant 
aissance  à  moins  de  deux  kilomètres  du  village  de 
[àlay,  s'étendent  sans  interruption  jusqu'aux  en- 
irons  de  Cerisiers,  formant  ainsi  une  vaste  forêt 
une  étendue  de  plus  de  3000  hectares  ;  cette  fo- 
\i  est  coupée  de  petites  vallées  transversales  entiè- 
îment  boisées  qui  en  rendent  l'aspect  des  plus 
ittoresques. 

C'est  au  milieu  de  cette  vaste  étendue  de  bois  que 
élève  l'ancien  castel  ou  manoir  de  la  Houssaye, 

4 


it  #:# 


qui  foimîiit  aiilrefois  un  lierivlcv 
i\\w  de  Sens. 

t'.e  liera  son  Iiisloire,  que  j'es]>^ 
un  jour,  lorsque  j'auiTii  pu  reeucî 
m  eut  s  qui  y  sont  re  la  lits. 

Aujouidluti,  je  viens  vcjus  fï 
<;»|)isode  iliannitique  de  eetîe  lus 
lails  ni'onl  été  révélé**  par  la  co 
j*ai  pu  avoir  des  archives  de  lai 
de  Sens,  arehives  (|nî  doivent  n 
la  dilit^eiiee  de  noire  distingué  cofl 
Iioy>  l'un  iic  nos  anciens  présiden 

Vous  vous  rappelez  sans  nul  i\ 
uoUce  si  înléressantc  insérC^e  au 
HttUeiin  cl  relative  aux  évèneîne 
roulés  ù  Sens  et  ilaus  les  enviro; 
l  épotjue  de  la  Fronde,  M.  Roy  na 
manoir  de  la  Houssayc  avait,  da 
H  janvier  1632,  doniié  Thospila 
voyés  du  Parlement  fiiyasit  de  va 
niaréclial  d'ilocquincourl  qui  cou 
cardinal  Maxarin,  un  corps  de  t( 
portes  de  Sens, 

Environ  {|natrc-vin|îU  ans  apr 
d'une  au  Ire  nature  se  passait  A  la 

Lo  vendredi  *Z\  novend)re  173G, 
res  du  soir,  les  liabitanls  des  ha 
la  Houssaye,  oeetqïés  à  leurs  Ira 
voyaient  sortir  des  bois  et  senfn 
un  honnne  véUi  d  un  paletot  blan 
Irois  chiens  blancs;  cel  homme 


—  51  — 

fusil  et  se  dirigeait  du  côté  de  la  petite  vallée  du 
Val-Saint-Etienne. 

Le  bruit  se  répandait  aussitôt  dans  ces  hameaux 
que  le  seigneur  de  la  Houssaye  venait  d'être  tué 
dans  les  bois  du  Crot-à-Logre  par  une  main  crimi- 
nelle. Quel  était  le  meurtrier?  Ce  ne  pouvait  être 
que  l'homme  que  plusieurs  habitants  avaient  vu 
s'enfuir  aussi  précipitamment. 

A  cette  époque,  la  seigneurie  de  la  Houssaye  ap- 
partenait à  M.  François  Gaillot-Duval  d'Epizy  ou  de 
Pisy,  écuyer-mousquetaire  de  la  première  compa- 
gnie de  la  garde  du  Roy  et  lieutenant  des  chasses 
(le  S.  A.  Mademoiselle  de  Charolais. 

A  proximité  de  la  Houssaye  se  trouvait  une  ferme 
appelée  la  ferme  du  Crot-à-Logre,  qui  appartenait 
à  M.  Louis  Dalençon,  tanneur  à  Sens  (1). 

L'ne  inimitié  profonde  existait  depuis  longtemps 
déjà  entre  les  membres  de  la  famille  Gaillot-Duval 
i'Epîsy  et  ceux  de  la  famille  Dalençon.  Des  alter- 
cations s'étaient  plusieurs  fois  produites  entre  Da- 
ençon  père  ou  Dalençon  fils  et  M.  Gaillot-Duval 
i'Epizy  et  divers  membres  de  sa  famille,  des  pa- 
•oles  injurieuses  avaient  été  prononcées  et  des  me- 
laces  avaient  même  été  faites  de  part  et  d'autre. 
C'est  ainsi  que,  dès  le  mois  d'avril  1735,  Dalen- 
on  père  étant  à  la  chasse  dans  les  bois  du  Crot-à- 
-ogrc  avec  cinq  ou  six  autres  personnes,  avait  ren- 
ontré  M.  Tabbé  d'Epizy,  frère  du  seigneur  de  la 

fl)  Celte  ferme  n'existe  plus  aujourd'hui  ;  il  ne  reste  plus  que  quelques 
ibstructions  des  anciens  bâlinicnts;  toutes  les  terres  ont  été  boisées  et 
nt  partie  du  domaine  de  la  Folie. 


—  52  — 

Honssaye,  qui,  interpellant  Dalcnçon,  lui  lança 
cette  apostrophe  :  a  Pourquoi  chassez- vous  avec 
cinq  ou  six  canailles  comme  ceux  qui  sont  avec 
vous?  I»  A  quoi  Dalençon  père  répondit  :  «  Ce  sonl 
d  honnêtes  gens;  et  vous,  monsieur,  vous  êtes  un 
genlilhonime  de  fromage  mou,  et  je  ne  reconnais 
pas  d'autre  seitîiicnr  que  le  Roy  (1).)) 

Au  mois  daortl  1736,  Dalençon  fils  étant  à  la 
chasse  dans  les  bois  de  la  dame  d'Epizy,  avec  deux 
autres  personnes,  M.  Aublet  fils,  de  Sens,  et  Claude 
Ruinard,  de  ^  Fleuris,  qu'il  avait  emmenés  avec  lui. 
M.  iie  la  Huussaye  lui  demanda,  en  le  tutoyant, 
pourquoi  il  avait  cliassé  dans  ce  bois  et  le  menaça 
de  lui  donner  vin^t-cinq  coups  de  bâton.  M.  de  la 
Houssaye  aurait  poursuivi  Dalençon  qui  s'en  allait 
â  sa  ferniu,  ce  dernier  Taurail  alors  mis  en  joue 
en  lui  disant  ;  <i  Monsieur,  n  avancez  pas  ou  je 
vous  tire.  ï> 

Dalençon  aurait  ensuite  dit  à  ses  compagnons  que 
Si  on  lui  élu  reliait  querelle  à  nouveau  il  se  défen- 
drait (2), 

De  son  côté,  Dalençon  père  avait,  dans  diverses 
circonstances,  manifesté  ses  sentiments  d'animositc 
ou  plus  exacUinent  de  haine,  non  seulement  con 
Ire  le  seigneur  de  la  Houssaye,  mais  encore  contre 
les  membres  de  la  famille  de  ce  dernier  qu'il  Irai- 
lail  tous  de  gueux,  même  en  public  (3). 

0)  néiHiiiiliini  (!*'  M,  Niruliis  Robcr!,  ancien  gartle  de  M.  d'Kpizy  (12  î' 
vHcr  mii. 

iti  ni^posUion  lie  Çlimdc  Ruinnrd  (19  mars  1737). 

r:ii  Di'jïiisîtioH  iW  SWfAiiH  BouUé,  garde  de  Son  Altesse  Révérendl^«>rBf 
MatlnTJolM'Ilx'  de  Si'iisU'  mars  1737). 


—  53  — 

De  plus,  Dalençon  fils  avait,  le  jour  même  du 
meurtre,  montré  un  pistolet  et  avait  dit  que  c'était 
pour  tuer  MM.  d'Epizy  s'ils  l'attaquaient  et  voulaient 
l'insulter  et  lui  prendre  son  fusil.  I£n  outre,  il  avait 
dit,  le  jour  de  la  Saint-Martin  1736,  c'est-à-dire 
douze  jours  avant  l'événement,  qu'il  tirerait 
MM.  d'Epizy  s'ils  venaient  l'attaquer  (1). 

On  peut  juger  par  tous  ces  faits  de  la  nature  des 
rapports  existant  entre  les  familles  d'Epizy  et  Da- 
lençon et  de  la  disposition  d'esprit  dans  laquelle 
se  trouvaient,  vis-à-vis  les  uns  des  autres,  les  mem- 
bres de  ces  deux  familles. 

Ces  rapports  devaient  se  terminer  de  façon  tra- 
gique. 

Le  vendredi  donc,  23  novembre  1736,  Louis  Da- 
lençon fils  partait  de  Sens  pour  se  rendre  à  la  ferme 
du  Crot-à-Logre,  où  il  arrivait  vers  3  heures  du 
soir;  il  y  trouvait  Edme  Nodet,  domestique  de  son 
père,  qui  y  était  depuis  plusieurs  jours. 

Après  s'être  rafraîchi  à  la  ferme,  Dalençon  fils 
prit  un  fusil  et  sortit  dans  le  bois  qui  y  était  con- 
iigu  et  qui  en  dépendait;  il  y  tira  un  lapin  qu'il 
tua  et  rentra  à  la  ferme  ;  quelques  instants  après,  il 
proposa  à  son  domestique  Nodet  de  prendre  un 
fusil,  de  se  rendre  avec  lui  dans  les  bois  et  de  s'y 
mettre  à  l'aff'ût.  Nodet  ayant  accédé  au  désir  de  son 
maître,  les  deux  hommes  se  rendirent  dans  le  bois. 
Eiant  arrivés,  ils  montèrent  chacun  sur  un  arbre. 
Ils  y  étaient  à  peine  installés  que  Dalençon  fils 

il»  Déposition  de  Hélène  Fille (11  décembre  173r»). 


Jifi 


—  54  ~ 

cleniaïula  a  NiKÎet  sil  iravait  rie] 
poiLse  négative,  Da le  11^011  eii|*ageâ 
dre  de  son  arbre  et  à  venir  se  poi 
plus  nqyproehé  de  lui,  ce  qu'il  fil  ( 

A  ce  moment  a|iparul  GailUîUl) 
gneur  de  la  lltmsiiaye,  yccoinpagi 
M.  Lonis  d'Epi/. y  (2),  occupés  à 
de  ces  deux  lionvmes,  montés  chaci 
MM.  d'Kpky  sapproclicriiit,  et  in 
t]ni  était  le  plus  rap[H'uclié  d'eux 
Tordre  de  tlesccndrc  de  son  arlire 
son  fusiL  Dalcnçon  lui  cria  de  n'e 
alors  que  MM.  d'Epizy  se  dirigèrei 
lequel  élail  monté  Dnleiieon  qui 
nouveau  à  Xodel,  lui  dit  :  a  Ne  m 
MM*  d'Kpixy  sonimètent  égalemei 
descendiT  cl  de  reniellre  son  fusil 

Dalen^'on  répondît  qu'il  n'en  fci 
cria  de  ne  poi  ut  avancer  sinon 
Ces  al Icrea lions  diverses  qui,  cert 
éclumgées  a  haute  voix,  avaienl  él 
nue  Jeune  fille  qui  se  Imuvail  da 
proche  le  t^rot-n-Logre  (3).  Mnlg] 
M.  d'K|)isy  de  la  Houssayc  contini 


{i\  DriKïîiUkin  île  Nmî<^t  ijii27rtovéml*ro  Ï7."W.  H 
lïtiriT  lit'  M.  Ijmi-s  l>uM>t  irKpI/y,  du  ly  iiiiir»  17^7, 

ritnli'rlr;  il  rhiil  Agr  fh'  «  îngl  vt  un  in\%.  tl  chl   iiinrf 

ii^liiii'iiL  lit'  Phtfifire,  <M  «"ittrrrt-h^  SitJitli'-lloltiiiilnp,  li 
tir  Sfm,  fruiUi'  iltiJi^titU  Tt  jivrU  t7H2  } 


—  55  — 

vers  l'arbre  où  Dalençon  était  monté,  bien  que  son 
frère  lui  conseillât  de  ne  point  le  faire.  Il  répondit 
à  la  menace  de  Dalençon  que  lui,  Dalençon,  n'a- 
vait qu'un  coup  de  fusil  à  tirer  tandis  qu'eux  en 
avaient  deux;  qu'il  fallait  qu'ils  eussent  sa  vie  ou 
qu'il  eût  Tune  des  leurs.  C'est  à  ce  moment  que 
Dalençon  mettant  en  joue  le  seigneur  de  la  Hous- 
saye  lui  tira  presque  à  bout  portant  un  coup  de  fu- 
sil qui  l'atteignit  à  la  gorge  et  le  renversa  mort  sur 
la  place. 

Dalençon  prit  immédiatement  la  fuite  et  son  com- 
pagnon, Nodet,  qui  venait  de  descendre  de  son 
irbre,  en  fit  autant.  M.  Louis  d'Episy  qui  était  à 
]uelques  pas  en  arrière  se  porta  immédiatement  au 
iecours  de  son  frère,  ce  qui  permit  à  Dalençon  et  à 
S'odct  de  s'enfuir  sans  être  poursuivis. 

Cependant  M.  Louis  d'Episy,  voyant  qu'il  n'y 
ivait  malheureusement  aucun  secours  à  porter  à 
;on  frère,  sortit  du  bois  et  se  rendit  en  toute  hâte 
{ la  ferme  du  Crot-à-Logre  où  Nodet  ne  tarda  pas 
i  arriver  lui-même  ;  à  sa  vue  M.  d'Episy,  le  cou- 
hant  en  joue,  lui  dit  qu'il  fallait  qu'il  lui  cassât 
a  cervelle  (sici  ;  il  se  jeta  sur  lui,  lui  enleva  son 
iisil  et  le  maltraita  durement. 

Le  bruit  de  l'événement  se  répandit  immédiatc- 
lîcnt  aux  alentours  et  les  habitants  des  Fleuris, 
|ui  se  trouvaient  dans  les  champs,  occupés  à  leurs 
ravaux,  accoururent  à  la  demande  de  M.  Louis 
'Episy,  et  après  avoir  sorti  le  corps  de  M.  d'Episy 
e  la  Houssaye  du  bois,  le  chargèrent  sur  une  char- 
ctlc  et  l'emmenèrent  au  château  de  la  Iloussavc. 


—  56  — 

Nodet,  i*cntié  i\  Sens  le  soir  même,  apprit  la  mort 
du  seigneur  de  la  Houssaye  ;  il  Tignorail,  dil-il 
dans  sa  dupoKiliuii,  n'ayant  pu  voir  exactement  ce 
qui  sYlaiE  pat^sé  a  cause  de  la  hauteur  des  arbres 
qui,  à  ctlte  Opaque,  ont  encore  leurs  feuilles  (1). 

Le  lendemain  de  ce  drame  le  lieutenant  crimi- 
nel au  liailHage  et  siège  présidial  de  Sens,  M.  Clau- 
de-François- Cliarles-Benoist  de  Trémont,  êlail 
requis  dès  4  heures  du  matin,  par  M.  le  Pro- 
cureur du  Roy,  de  se  rendre  à  la  Houssaye  à IcfTet 
de  dresser  procès-verbal  des  faits  qui  lui  seraient  ré- 
vélés et  de  nommer  préalablement  le  médecin  el 
Iv  chirurgien  jurés  en  exercice  pour  faire  la  visite 
du  coips  de  M,  d'Episy  de  la  Houssaye  et  en 
faire  rautojiste. 

iiv  inagislral,  assisté  du  procureur  du  roy,  de 
niessiiv  André-Aluin  Guyard  et  de  Louis-Claude 
Pelle,  médecin  et  chirurgien  jurés  en  exercice. j 
désignés  a  cet  eiïet,  se  rendirent  sur  le  champ  à  la 
Houssaye  ;  ces  messieurs,  partis  de  Sens  à  5  heui\'> 
du  malin,  arrivèrent  au  château  sur  les  8  heures. 
ils  Irotivcrcnl  le  corps  de  M.  d'Episy  de  la  Hous- 
saye, que  Ion  avait  étendu  sur  un  lit,  dans  unt 
chambre  basse  du  château.  L'autopsie  en  fut  faite 
pat'  MM.  Alain  Guyard  et  Pelle,  qui  en  dressèrent 
|)rïïcès-vci"bal. 

Une  insti  iicUon  fort  longue  fut  faite  par  les  ma- 
^nslrals  ;  cninniencée  le  vendredi  24  novembre  \TMi 
elle  lie  prit  lin  ciue  le  dimanche  24  mars  17:i7: 
cinquanlc-huil  témoignages  furent  entendus. 

{\\  néposiiitm  dv  XodH  {21  novembre  1736). 


Nous  avons  laissé  Dalençon  fils,  s'enfuyant  à  tou- 
tes jambes  dans  la  direction  du  Val-Saint-Etienne; 
riustruction  nous  apprend  ce  qu'il  est  devenu. 

A  sa  sortie  du  bois  du  Crot-à-Logre,  Dalençon 
s'empressa  de  gagner  un  bois  qui  était  proche.  Y 
étant  arrivé,  il  changea  brusquement  de  route  pour 
prendre  le  chemin  de  Véron  ;  arrivé  dans  la  vallée 
qui,  du  Val,  conduit  à  cette  commune,  il  aperçut 
dans  la  plaine  un  cavalier  qu'il  appela  de  toutes  ses 
forces  en  courant  à  lui  :  «  Monsieur  Henriot  !  i>  criait- 
il.  Le  cavalier  lui  répondit  qu'il  n'avait  que  faire  de 
courir  si  fort,  qu'il  allait  à  lui  ;  ce  cavalier,  dans 
lequel  Dalençon  avait  cru  reconnaître  un  nommé 
Henriot,  boucher  à  Sens,  était  M.  Sébille,  mar- 
chand, à  Sens,  son  parent.  11  lui  apprit  d'abord 
qu  il  venait  de  lui  arriver  un  grave  malheur,  qu'il 
avait  tiré  sur  une  personne  qui  avait  voulu  lui  pren- 
dre son  fusil  ;  il  lui  demanda  ensuite  s'il  voulait 
le  prendre  en  croupe.  Le  cavalier  s'y  refusa,  com- 
me aussi  à  prendre  son  fusil  dont,  lui  dit-il,  il 
n'avait  que  faire.  Dalençon  pria  Sébille  de  ne  point 
parler  de  ce  qu'il  venait  de  lui  dire. 

Par  suite  de  ce  refus,  Dalençon,  obligé  de  poursui- 
vre sa  route  à  pied,  demanda  à  un  paysan,  qui 
travaillait  près  de  là,  de  vouloir  bien  lui  indiquer  le 
chemin  de  Véron,  ce  que  fit  ce  dernier  (1).  Mais 
nous  avons  lieu  de  penser  que  Dalençon  avait 
demandé  ce  renseignement  justement  pour  éviter 


(1)  OépoMtions  de  Gabriel  Mérot,  du  Vul-Siiiiil-Kliennc  (24  novembre 
173»)),  de  Sébille  (27  novembre),  de  Claude  Collas  (28  novembre)  et  de  Ni- 
colas 0)llin  (10  décembre). 


F        f 

^^^^^^^^^^^^^V 

^^^^^H         de  Lriiveiser  lu  linurg  de  Vivron^ 

^                         M 

^^^^^H         arriver  vers  0  heureïi  du  soir  à 

^^^^^H         Servaiii,  vigneron,  chez  lequel 

^^^^^H         longtemps  et  nuqitel  il  raeoiila 

i  ^^^^^H         lioTiHiHs  niais  sans  le  nom  nier  : 

1  ^^^^^H         ta  nvii^re(i). 

^^^^^H            dépendant,  te  sienr  Servais, 

^^^^^H        jour  que  Col  lin  et  Coppîn,  n'a  r 

^^^^^^Ê         ('<-*^  i^i^^  M^^^'  '^'^^i^  venons  de  rap 

I^^^^^^H          au  ron traire  ne  rien  eonnnili^^  ( 

i^^^^^l         dan^  la  plainte  formée  par  le 

.^^^^^H            A  partir  de  ce  niomenl,  nous 

^^H  ^^1 

^^^^^H          Dtdençon,  Nous  n'nvons  pu  s^ivi 

^^^Bi' 

^^^^^H         a  Sens,  mais  il  résulte  des   dé| 

^^^^^^■^ 

^^^T  fui 

'^^^^^H         iémoins  que  DaleiH  ou  père  avait 

^^^^^B         personnes  que  son  Ois  h  était  réi 

^^^^^B             Ot  liomnie   ne  caehait  pas 

^^^^^H          luiine  (]ui  ranimaient  eontre  I 

■"- 

^^^^^H         e  est  ainsi  tpi  au  mois  de  déceml 
^^^^^H         ron  après  révénement),  se  trou¥ 

i 

^^^^^H         du   sieur   He^nni'd,  au  fauliouf 
^^^^^H         Sens,  il  déclaiait  en  présence  d^ 

^^K^ 

^^^^^H         nés  ((ne  quand  ce  serait  hou   lili 
^^^^^H         seigneur  de  lu  Hnussaye,  c'étaj 
^^^^^H         de  perdu,  ({ue,  d  ailleurs,    il  a 
^^^^^H         avant  celte  aetion,  et  que  depnj 

Ih*    ^BKé 

^^^^^^H         davantïi^e  (2). 
b^^^^^^B            Dans    une    autre    eii^constnn( 

^^^^^^H 

—  59  — 

leniandait  comment  allait  raffairc  de  son  fils,  il 
cpondait  que  tout  allait  bien  et  qu'il  aurait  la 
[race  de  son  fils  (1). 

Vn  autre  jour  il  disait  que  son  fils  avait  bien  fait 
le  tuer  le  sieur  d'Episy  et  qu'il  avait  mal  fait  de  ne 
L*s  pas  avoir  tués  tous  les  deux,  surtout  le  second 
rère  du  sieur  d'Episy,  ce  dernier  étant  venu  pour 
Lier  son  fils  dans  sa  ferme  du  Crot-à-Logre  (2). 

Toutes  ces  déclarations  ont  été  faites  en  présence 
le  nombreuses  personnes  et  dans  un  lieu  public. 

A  d'autres  personnes  il  disait  que  M.  d*Episy, 
ui  était  si  méchant,  avait  enfin  trouvé  son  mai- 
re (3)  ;  que  son  fils  aurait  bien  fait  de  tuer  l'autre 
[.  d'Episy,  et  que  si  son  fils  avait  été  un  poltron  il 
elaurait  jarhais  voulu  voir  (4);  que  pour  centécus 

aurait  la  grâce  de  son  fils  et  qu'il  voudrait  pour 
?nt  autres  écus  avoir  tué  Tautre  d'Episy  (5). 

Comme  on  le  voit,  Dalençon  père  ne  cachait  pas 
s  sentiments  qu'il  avait  voués  au  seigneur  de  la 
loussaj'e  et  à  sa  famille  et  approuvait  hautement 
action  commise  par  son  fils. 

Cependant  s'étant  trouvé  sur  le  coche  d'eau 
sec  le  révérend  père  Charles-Augustin  Poitevin, 
rieur  des  Célestins  de  Sens,  Dalençon  père 
Mnble  regretter  l'acte  commis  par  son  fils  que, 
ans   sa   conversation  avec   le   révérend   père,    il 

(  1  >  1)('* position  de  Jean  Senange  du  même  jour. 

2i  Dépositions  de  Marie  Trêbuchct,  de  Nicolas  Marion  et  de  Edme  Mé- 

I  (même  jour). 

i3)  Déposition  de  Jean  Labbé(5  février  1737». 

il)  Déposition  de  Anne  Maillard,  femme  IVtlt  (15  févrirn. 

'it  Dé|)osilion  de  Marie  Ciennetîer  (19  mars  1737i. 


—   fiO  — 

(|iuitili;i  diMîUillieur(l).  Le  cai 
perHoniuijîc  iimait-il  en   quel 
Iaii|(a^c  lie  Diilenvon  ' 

A  celle  époque,  il  fiillait  ho 
tuer  par  le  coche  crcau  le  voy 
la  longueur  tlu  voyage  amenai 
les  voyageurs;  le  iinii  nio 
C[uel(pie  peu  seriiiomie  sou  c 

Malgré  les  prnpon  tcnuH  en  d 
de  personnes  el  le  langage  rap 
sitions  (k\s  témoins  tpii  les  avj 
n'avons  pasconslalé  que  le  s 
qui  aurait  pu  être  considéré, 
coïiiplîce  de  son  lils  loul  au 
ligaleur  du  meurtre,  ait  été  inqi 
dure  n*a  été  suivie  contre  l 
séiunuiise  du  wui''  siècle  a  fl 
constance  d'une  bien  grande 
de  Daleiivou  père. 

PendaiU  que  se  poursuivait 
domiciliaires  avaient  eu  lieu, 
tant  ii  Sens  au  domicile  de 
lequel  demeuiait  son  fils,  qu*ï 
[.ogre,  pour  s'assurer  de  la  p< 
fils,  ('es  visites  et  |ierquisitioi 
!*ésultal. 

Le  8  mm  s  1737,  le  sergent 
de  ville  de  Sens  se  Iraiispor 
Turdonuance,    ^«  im  devant   d 
nucile   de   Louis   Dalençon  pi 


—  61  — 

omicile  que  celui  de  Dalençon  fils,  où  étant  et 
près  avoir  sonné  par  trois  différentes  fois  de  sa 
t)inpette,  a  assigné  à  cri  public  Dalençon  fils  à 
)mparaitre  à  huitaine  par  devant  M.  le  lieutenant 
iniinel  pour  subir  interrogatoire  et  se  mettre  en 
at  es  prisons  royales  de  Sens,  avec  indication  qu'à 
?faut  de  quoi  son  procès  serait  parachevé  par 
mtumace.  i> 

Pareille  formalité  fut  accomplie,  par  ce  même 
ïîcier  de  police,  sur  la  place  publique  de  Saint- 
tienne,  et  au  devant  de  la  principale  porte  du  pa- 
is et  auditoire  royal. 

Dalençon  fils  n'ayant  pas  répondu  à  celte  assi- 
lalion;  une  sentence  du  bailliage  et  siège  présidial 
jScns,  en  date  du  lundi  !••' juillet  1737,  après  avoir 
claré  le  sieur  Dalençon  fils  contumace,  Ta  déclaré 
également  dûment  atteint  et  convaincu  de  l'homi- 
ie  commis  en  la  personne  du  sieur  Gaillot  Duval 

la  Houssaye,  le  23  novembre  1736,  pour  répara- 
)n  de  quoi  le  sieur  Dalençon  a  été  condamné  à 
re  pendu  et  étranglé  jusqu'à  ce  que  mort  s'en 
ive  à  une  potence  qui  serait  à  cet  effet  dressée  en 

place  de  Saint-Etienne  ; 

«  A  déclaré  les  biens  de  Dalençon  acquis  et  con- 
ques au  roy  ou  à  qui  il  appartiendra  ; 
tt  A  ordonné  en  outre  que  la  présente  sentence 
rait  exécutée  par  effigie  en  un  tableau  qui  serait 
cet  effet  attaché  à  la  dite  potence  par  l'exécuteur 

la  haute  justice,  y 

Celte  sentence  fut  mise  à  exécution  le  mardi 
iuillel  1737. 


tll 


Le  roi  Loui^  XV  ayant  au 
accorde  des  leUrcîidc  ffmee  eu 
ce  tieriîier,  qui  HÏHail  eonsUlué 
t73U,  Hiihit  le  inil'iiie  jour  li: 
il  eUiit  tenu  d'api  en  les  oicloii 

(ici  iiilerrof|aloiix\  qui  para: 
jHHir  la  tonne  et  pour  obéir  a 
rordoiinaiice  aloi*s  en  vigueur 
nouveau.  II  Iuh  corrnhara  pliï 
Daleu^on  préteiidil  n'avoir  p; 
de  la  Iluussaye,  mai^  qiril  tel 
bras,  et  le  lira,  sans  ajunler, 
seul  dessein  d'écarter  MM  ilfi 
leur  fureur^  et  que  ce  n'élait 
après  c[u1I  avait  apprin  avec  d 
de  la  HouHHaye  était  mort  de 

Le  sîeur  Dalençon  déclara 
pas  porteur  d'un  pistolet. 

La  lecture  de  cet  inierroi^j 
bien  dcH  réilexionH.  (*ouinie 
avoir  ap|)ris  une  lieure  apr 
M,  d'Episy  de  la  lloussaye  éti 
de  fusil,  puisqu'à  celte  heu 
RoHoy  oii  personne  ne  coniia. 

Lnlhi  les  lettres  de  ^ï'^i^'*-'  e 
par  Dalençon  furent  entérin 
au  coiisentcnient  de  Mme  ve 
lencedu  bailliage  de  Sens  du 

Ainsi  se  termina  cette  atïair 
dant  deux  ans,  pasHtonna  tau 


—  63  - 
LISTE  DES  TÉMOINS 

ENTENDUS   DANS   l'aFFAIRE   d'ÉPISY  -  DALENÇON 


.ouis  DuvAL,  écuyer  lieutenant  dans  le  Régiment  d  Auxer- 
rois  infanterie,  demeurant  à  Sens.  21  ans. 

faurice  Gasseau,  laboureur,  aux  Fleuris.  49  ans. 

'aule  Blrté,  sa  femme.  40  ans. 

ean  Lhyocr£au,  manouvrier,  aux  Fleuris.  47  ans. 

ean  Brust^é,  31  ans.      id.  id. 

larie  Perdriette,  femme  de  Jean  Lhyoureau.  30  ans. 

[nrie  Pouguatte,  femme  de  Michel  !^Iaillet,  laboureur, 
dans  la  ferme  du  Crol-à-Logre.  40  ans. 

labnel  Gaillx)t-Mereau,  fils  de  Gabriel  Mereau,  labou- 
reur aux  Fleuris.  13  ans. 

une  Pereite,  femme  de  Gabriel  Mereau,  laboureur,  au  Val- 
Saint-Etienne,  paroisse  de  Véron.  46  ans. 

icqueline  Gasseac,  fille  de  Marie  Gasseau,  manouvrière 
aux  Fleuris.  16  ans. 

abriel  Mereau,  laboureur,  au  Val-Saint-Etienne.  36  ans. 

dme  NoDET,  natif  de  Fontaine-la -Gaillarde,  domestique 
nu  service  de  Dalençon  père.  28  ans. 

Jinr  SÉBiLXf,  marchand,  demeurant  au  faubourg  Saint- 
Pregts  lez  Sens.  43  ans. 

laudc  Collas,  fils  d'Edme  Collas,  laboureur,  au  Pipotin 
,  sic  \  paroisse  de  Véron.  25  ans. 

icolas  CoLXJN,  vigneron,  à  Rosoy.  62  ans. 

tienne  Colun,  56  ans.  id. 

nloine  C0LI.1N.  buraliste,  â  Rosoy.  46  ans. 

dîne  Mercier,  vigneron,  aux  Fleuris.  47  ans, 

ïanne  Agcexin,  femme  de  Jean  Buisson,  à  la  Martre, 
paroisse  de  Véron.  60  ans. 


—  Gt  — 

Jenn   Koussirr,  hôlelier  de  la  Maia 

:ïû  nus. 
Ednic  Skkvais,  vigneron,  à  Bosoy 
Madekntïc  QuiMi^im,  tjtimestiîfue,  au 
Hélcyne    FitLÉ,   doitieslitjuc  de  la 

du  me  de  la  Hoiissayc,  /m'-re  de  l* 
Il  Huussnye,  VA  ans, 
Jean  LAimê,  laboureur,  i\  Ln  Bautui 

lo-Vicomtc.  3(>  ans 
Edmec  Giyot,  frmine  tte  Jean  Urulé, 

ris.  30  ans- 
Sinianne  (îtiiXEp.vix,  femme  de  Clj 

vrii*rc,  aux  lieu  ris.  2^  au^, 
Il  liberté  Collkt,  veuve  de  Nicolus 

Fleuris.  3Ii  ans. 
Française  Bliiu^té,  HUe  de  Jean  Bu 

Ire,  parome  de  Màtau-U'-Viromte, 
Jacques   LociUAU,  fils  de  Jean  Lou 

Fleuris.  Il  ans. 
Marie  Maillkt,  fdlc  rie  Michel  Maillet 

du  Grot*à-Logi  e,  purohse  liv  Malmj 
(tabrieile    (ïCYut,   femme  de   Jean 

Baume.  19  ans. 
Jean  Bis»sun,  labaureuri  â  la  MarU 

66  ans. 
Kdme  Pillu,  beri^erde  Jean  Bissan, 

12  ans, 
Edme  Lahcher,  taillandier,  dcnrcun 
Edme   SENANtîE,  laboureur^  à  Bois- 

Bordes  de  Dixmnnt,  f>(»  ans, 
Jean  Se:nange,  laboureur^  à  Maurepft 

50  ans. 
Marlin   TMKBLT.B^r,    biboureun  de 

paroisse  de  Oîxnionls.  30  ans. 
LauisHEG.vAHD»  eahareUer,  au  iaubud 
Le  Hévércud  père  Charles- A wgustîn 

maison  des  Célestins  de  Sens.  65 


—  65  — 

icques  Vaudoux,  boucher,  demeurant  à  Sens.  52  ans. 

alentin  Legris,  bourgeois  et  ancien  commissaire  de  la 
Ville  de  Sens,  y  demeurant.  48  ans. 

imon- Joseph  de  Saint-Pierre,  receveur  du  grenier  à  sel  de 
Sens.  43  ans. 

>aQ  Labbé,  manouvrier,  à  Dixmont.  57  ans. 

nne  Maillard,  femme  de  Louis  Petit,  vigneron,  à  Dix- 
mont.  27  ans. 

arie-Louise  Botte,  serv^ante  du  sieur  Violette,  Regrnt- 
lier,  à  Dixmont.  20  ans. 

dme  Mérot,  laboureur,  à  Dixmont.  52  ans. 

icolas  Makion,  laboureur^  à  Vaumorin,  paroisse  de  Vau- 
mort.  46  ans. 

arie  Guillepain,  fille  de  Jean  Guillepain,  laboureur, 
à  Maurepas,  paroisse  des  Bordes  de  Dixmont.  18  ans. 

irie  DuBECQ,  femme  de  Jean  Guillepain^  paroisse  des  Bor- 
des de  Dixmont.  48  ans. 

colas  Robert,  laboureur,  à  la  Grange-au-Doyen  paroisse 
de  Véron.  50  ans. 

\N  Guillepain,  laboureur,  à  Maurepas.  40  ans. 

an  Guillepain,  (fils  de  ce  dernier),  demeurant  à  Màlay, 
chez  Sébastien  Sivanne.  25  ans. 

colas  BouLLÉ,  garde  de  son  Altesse  Sércnissime  Made- 
moiselle de  Sens,  demeurant  à  la  Bernagone  (Saint- Valé- 
rien).  73  ans. 

me  Brechemier,  marchand  de  bois,  demeurant  à  Monta- 
cher.  57  ans. 

lude  RuiNARD,  laboureur,  aux  Fleuris.  31  ans. 

cin  Gennetier,  23  ans.      id. 

rques  Grandin,  marchand,  demeurant  à  Sens.  54  ans. 

m  Gallicier,  laboureur,  à  Maurepas.  28  ans. 


I 


â 


j 


MODE  ÉLECTIF  Dl 


ET 

ECHEVINS    DE 

AU 
XVIIl^  S!ÈCL] 


Quelques  procès- verbaux  d'é 
cl  trécheviiis,  retrouves  paraii 
cien  baitiioge,  nous  apprennent 
comment  on  procédai t,  au 
xviif  siècle,  à  hi  nomination  cl 
paux  de  la  ville  de  Sens, 

Depuis  la  fin  du  xV'  siècle  (L 
de  juin  It/l),  les  maires,  éclu 
receveurs  ètaieul  nommés  poi 
roi  sur  une  liste  de  personne 
habitants  réunis  en  assemblée 
tènie  fut  suivi  pendant  les  xvi*  < 
fut  interrompu  que  pendant  qy 
tenter  Tessai  d*un  expédient  fii 
donner  d  heureux  résultais  ;  ni 
de  la  création  des  otrices  de  nu 
vertu  de  FEdit  du  mois  d*aoùt  ] 

Dès  171  j  (l'Zdit  du  29  janvier) 
remboursés  et  le  svsténic  éle< 


—  67  — 

nière  élection  du  xviii*  siècle  eut  lieu  le  17  septem- 
)re  1717  et  les  fonctions  de  maire  revinrent  à  Au- 
oine  Benoist  d'Âutun,  conseiller  au  présidiRl,  qui 
es  exerça  jusqu'en  décembre  1721.  Il  fut  alors 
«mplacé  par  Jean-Louis  Royer,  bourgeois,  mais  S 

m  Ëdit  d  août  1722  rétablit  les  offices  municipau^t,  ^ 

louvel  essai  encore  plus  précaire  que  le  premier  \^ 

luisque,  moins  de  deux  ans  après,  l'Edit  de  juillet  $^ 

724  rendait  aux  villes  la  liberté  d'élire  leurs  admi-  ^ 

lislrateurs.  Durant  cette  courte  période  de  transi-  ;*^1 

ion,  Jean-Louis  Royer  parait  être  resté  en  foncliaiis^  ^ 

uis  à  partir  d'avril  1724,  Biaise  Baudry,  échevinj  r 

trintérim jusqu'au 28  novembre  delà  même  année;  -  ; 

n  avança  d'un  mois  l'élection  qui,  habituelle-  ;►   * 

lent,  n'avait  lieu  que  le  28  décembre.  Nous  avons  •  • 

t  procès-verbal  de  cette  élection  qui  aboutit  à  la  |^* 

omination  de  Charles-Jacques  Benoist  de  Ville-  l 

lay,  président  en  l'élection,  dont  les  pouvoirs  furent  £  ^ 

nouvelés  en  décembre  1726  et  qui  resta  maire  pen- 
mt  quatre  années  consécutives.  Biaise  Raudry,  H 

archand  et  ancien  échevin,  lui  succéda  en  1729  et  i 

i  fut  également  remplacé  qa*aa  bout  de  quatre 
inées  par  Jean  Fauvelet  de  Châteaumajet,  dont 
ms  possédons  aussi  le  procès-verbal  d'élection  à 
date  du  29  décembre  1732. 

En  rapprochant  les  diverses  indications  données 
r  ces  documents,  nous  pouvons  reconstituerasse^ 
:ilementla  physionomie  d*une  élection  municï- 
le  au  xviir  siècle  ;  les  formalités  obser\'ées  à  cette 
oque  étaient  d*ailleurs  identiques  à  celles  en  usâge 
siècle  précédent,  car  il  existe  à  la  Bibliothèque 


—  68  — 

nationale,  dans  la  collection  de  G 
un  cerlificat  de  Biaise  l*ekk\  1 
datédeSeuHle  10  avril  1717.  paï 
à  la  demande  de  linleiidaut  à 
Paris,  ec  niagislrat  rappelle*  d'i 
personnels  rem  on  ta  ni  à  cinquati 
d'éleelion  des  maires  el  eeliev 
création  den  oflleeîi.  Siiivanl  les 
lies,  Tancienne  tradition  lut  co 
tement  que  possible. 

Stn*  Tordre  de  rîntcndant  d 
Paris,  les  lialïitnnls  et  hoiirgeoi 
faidjourgs  de  Sens  se  rénuîss; 
cloclie  «appelée  la  eonmmne  » 
[salais  royal  ou  bailliage  en  vue 
senlants.  (Télait  t^éiiéralement  l 
de  la  commémora  lion  desi  mu 
consacré  à  Tacct)  m  plissement  di 

Le  président,  lientenant-géi 
suivi  de  son  grellier,  ucconipagn 
cat  du  roi,  du  maire,  des  éehd 
de  ville  el  autres  uirieiers,  api 
tés  à  la  messe  du  Saint-I^2sprit,  ( 
Téglise  Sainl-Hilaire,  tantôt  dai 
Nicolas  du  liailliage,  se  présen 
devant  rassendïlée  des  liabitani 
requérait,  suivatd  l'usage,  le  ii 
procédera  Félection,  puis  Tanij 
prontHivail  uniliscours  <t  lleury 
lequel  il  eNliorlaît  les  citoyens 
personnes  ^  li délies  el  alleciior 


—  69  —  ^ 

roy  et  bien  intentionnées  pour  la  patrie  d  et  termi- 
nait son  allocution  en  requérant  la  réception  du 
serment  général  des  habitants  qui  devaient  jurer  de 
désigner  parmi  les  plus  notables  d'entre  eux  des 
délégués  pour  chaque  quartier  de  la  ville  que  Ton  ^ 

nommait  alors  a  cantons.  »  J 

Après  avoir  reçu  le  serment  général  et  solennel, 
le  lieutenant-général  se  retirait  en  la  chambre  du  c 

conseil  pendant   que    l'assemblée  désignait    pour  > 

chacun  des  cinq  quartiers  de  la  ville  un  président- 
canton  et  cinq  cantons,  c'est-à-dire  en  tout  trente  U 
représentants.  La  ville  se  divisait  alors  en  quartier  *- 
Rond,    quartier    d'Yonne,    quartier   Saint-Hilaire, 
quartier  Donjon  et  quartier  Saint-Benoît.  Les  trente 
représentants  ainsi  désignés  et  auxquels  s'adjoignait 
de  droit  le  corps  de  ville,  cest-à-dire  les  maire,  éche-  , 
vins,  etc.,  formaient  un  petit  collège  de  trente-six  à 
trente-sept  électeurs  qui  devaient,  à  leur  tour,  voter 
pour  des  listes  de  candidats  aux  fonctions  de  maire,                                J^ 
échevins  ou  procureur  :  c'était,  on  le  voit,  le  suf-                                ^ 
frage  à  deux  degrés.                                                                                      . 

Dès  que  le  greffier  du  bailliage  avait  terminé  le  [ 

dépouillement  des  bulletins  pour  l'élection  des 
cantons,  le  lieutenant-général  rentrait  en  séance,  \ 

présidait  à  Tinstallation  des  délégués  qui  allaient 
se  placer  sur  les  deux  côtés  des  bancs  des  avocats, 
le  maire  et  les  échevins  tenant  la  droite,  recevait 
leur  serment  particulier,  et,  en  présence  de  tous  les 
habitants  réunis,  faisait  proclamer  les  noms  des  re- 
présentants des  quartiers  de  la  ville. 

Après   l'accomplissement  de  ces   formalités,  le 


-  70  — 

maire  el  les  éclievina  (léelaraic] 
cil  ni  X,  puis,  diaciin  dans  leur 
caiitoiiH  et  délégués  des  canloii^ 
voten  qui  é  taie  ni  aussitôt  inscr 
pointage  désignée  sous  le  nom 
listes  de  trois  noms  pour  )c  mai 
les  deux  éclicvins  el  de  trois  a 
le  procureur  de  ville,  étaient 
Tordre  du  nombre  de  voix  oh 
verbal  de  l  élection  adressé 
chargé  de  le  présenter  au  Coni 
appelé  â  lixer  son  choix  pan 
phi  s  favorisés. 

I.tur  nomination  Taisait  ens 
délai  généralement  assez  cou 
d*une  lettre  de  eue  h  et  envoyé 
qui  en  dtuinaît  lecture  a  Tau 

Les  nouveaux offieiers  muni 
le  serment  devant  le  lieutenan 
les  faisait  reconnaître  pai^  les  Iii 
même  les  installer  a  Phnlel  de 
changement  de  maire,  il  proc 
et  inventaire  des  archives. 

Le  Chesnoy^ 
Mau 


I. 


1-% 


ï 


K 


10  Avril  1717.  —  Nous  Biaise  t*elée,  conseiller  du  Roy,  J 

Lige  magistrat,  lieutenant  criminel  au  bailliage  et  siège  pré-  ^ 

idial  de  Sens  soussigné,  certifions  à  tous  qu'il  appartiendra  ^ 

[u'il  est  de  notre  connaissance,  que  depuis  plus  de  cinquante  [^ 

ins  que  nous  avons  fréquenté  les  audiances  dud.  bailliage  f^ 

tt  présidial  de  Sens  et  que  nous  y  exerceons  lad.  charge  ^ 

le  lieutenant  criminel,  qu'avant  Féditde  création  des  char-  ^ 

;es  de  maire  et  eschevins  en  liltre  et  qu'ils  étoient  électifs  • 

eur  nomination  se  faisoit  au  Palais  Royal,  par  devant  M.  le 
ieutenant-gai  aud.  bailliage  et,  pour  son  absence,  par 
levant  notre  prédécesseur  et  par  devant  nous  en  qualité  de 
ieutenant  criminel,  séant  dans  le  siège  où  se  tiennent  les 
ludiances  des  causes  dud.  bailliage,  où  le  corps  de  ville  i 

e  trouve   en  nombre  de  six  seulement  faisant  le  premier  s 

:anton,  que  la  ville  est  partagée  en  cinq  quartiers  de  cha-  ^ 

:un  desquels  il  y  a  six  habitanz  députez,  ce  qui  fait,  avec  |^ 

les  six  du  corps  de  ville,  trente-six  élisans  qui  donnent  leurs  ;^ 

^'oix  par  devant  led.  Si*  lieutenant-g"',  lequel  en  dresse  son  ^ 

procès-verbal  des  trois  plus  haut  en  voix  pour  chacune 
espèce  à  remplir,  que  ce  procès-verbal  étoit  aussy  signé  du  ^ 

procureur  du  Roy  qui  assistoit  à  lad.  assemblée  et  étoit 
envoyé  à  M.  le  secrétaire  d'Etat  au  département  duquel  est 
(e  bailliage  de  Sens,  et  sur  ce  raport  le  Roy  choisissoit  de  ^  j 

chaque  espèce  et  envoyoit  sa  lettre  de  cachet  au  bailly  de 
Sens  ou  son  lieutenant-g"i,  de  laquelle  lettre  de  cachet  la 
lecture  se  faisoit  à  l'audiance.  Les  nouveaux  élus  et  nom- 
mez par  le  Roy  y  venoient  prester  le  serment  par  devant  T 
led.  Sr  lieutenant-g«i  tenant  l'audiance  et  ensuitte  alloit  les 
instaler  à  l'hôtel  de  ville  où  il  faisoit  l'inventaire  ou  recolle-  ,  h 


> 


Wf9V%  Ci    pflVlKJ^ 

^çlpoGâqiws  sm  fini  et  place  da 
est  iscio  lA0l  ^«e  te  m^m  tn  tutri 

^  Yéffilafale.  A  Sett,  It  X«  srnl  1717,  S^ 
(BM.  K«l.  O-  de  f^incrr  Vol  43,  ) 


Prweéê-»trb0i  itékrikm  ée  mtdrt  cl  ^ 

m  décembre  1736,^  Cejottrdliui  ringt-hott*^  joia 
tire  1720f  îe&te  de  la  Go miuéino ration  des  saJat 
jotir  ord«^^  el  dccoastumé  pour  lélectton  des  \ 
vlti*  de  lîi  ville  de  Seni,  hearcde  dix  heures  do  i 
va  ni  nous  Jacques^EdmcVezou,  écpyer,  si^  de  la  i 
de  Mojunit,  con^^  du  Bo>%  président  et  lieutenant 
liage  et  siège  présidial  de  Sens,  assisté  de  M«  Ji 
noslre  grefier  ord^»;  estant  au  Palais,  lieu  jur 
après  avnir  assisté  à  la  messe  du  Sainl-Esprit^ 
maire,  esclievin^ï,  procureur  de  ville  et  autres  ol{ 
nicîpiiux  <lc  celte  ville,  célébrée  dans  l  Ej|lise  et  à 
Si-llillaJre,  auquel  lieu  jurîdielîonnal  les  habit^j 
gcoîs  e«>tnnt  â>isemblez  au  son  de  la  cloche  îtppeti 
mime  à  VcITet  de  réleclion  d'un  maire  de  coud 
doux  édicvlns  de  longue  robe  et  d'un  procureur 
lieu  cl  pbu*<*  de  Messieurs  lîcnrHsl  de  Villcmaf 
longue  rnhe,  Fauvelet  de  Chaskou-Majel,  éehe^ 
gue  mbUe,  Fiiuvelet  du  Toc,  ecbevîn  de  cour 


Xlaucler,  procureur  de  ville,  qui  ont  exercé  lesd.  charges 
peudant  deux  années  qui  est  le  temps  ordre;  led.  sr  Benoist, 
suaire,  portant  la  parolle,  a  fait  sa  réquisition  suivant  Tu- 
sage,  à  laquelle  Tancien  avocat  du  Roy  s'estant  joint,  par  un 
<liscours  fleury  et  patétique  par  lequel  il  auroit  exhorté 
lesd.  habitans  et  bourgeois  de  donner  leur  sufrage  pour  la 
oontinuation  desd.  sieur  Benoist  pour  maire  cl  desdits  s>''* 
Kauvelet  de  Chasteau-Majet  et  Fauvelet  du  Toc  pour  éche- 
vins,  en  considération  des  services  qu'ils  ont  rendus  avec 
beaucoup  de  zélé  pendant  leur  exercice,  sans  tirer  ù  consé- 
quence, ou  de  faire  choix  de  personnes  fidellcs  et  alTection- 
nécs  au  service  dii  Roy  et  bien  Intentionnées  pour  la  Pa- 
trie, et  nous  auroit  requis  de  prendre  le  serment  général 
desd.  habitans  et  bourgeois  assemblez  pour  faire  choix  de 
présidents-cantons  et  cantons,  chacun  dans  leur  quartier, 
suivant  Tusage  qui  s'est  toujours  observé. 

De  laquelle  réquisition  nous  avons  fait  acte  et  pris  et  reçu 

le  serment  général  et  solennel  desd.  habitans  assemblez  qui 

ont  juré   et   afOrmé  unaniment  faire  choix   entr'eux   des 

plus  notables  pour  présidents-cantons  et  cantons,  chacun 

dans  leur  quartier,  pour  par  eux  faire  nomination  de  per- 

;     sonnes  capables  et  de  probité,  pour  remplir  les  charges  de 

i     maire,  de  deux  échevins  et  d'un  procureur  de  ville  ;  après 

i     Ittoy,  s'estans  retiré  pour  y  procéder  à  la  manière  accou- 

r    tamée,  pendant  lequel  temps  nous  nous  serions  retiré  en  la 

Chambre  du  Conseil,  et  ayant  esté  averly  qu'ils  y  avoient 

I     satisfait  et  avoir  nommé  un  président-canton  et  cinq  can- 

lons,  chacun  dans  les  cinq  quartiers  de  la  ville,  pour  faire 

lad.  élection  avec  le  corps  de  ville,  suivant  l'usage,  faisant 

trente-six  élizans,  lesquels  ayant  pris  leur  séance  dans  les 

deux  costez  des  bancs  des  avocats,  lesd.  s»""  maire,  échevins, 

estant  à  la  droitte,  nous  avons,  sur  le  mesmc  requis  dud. 

ancien  avocat  du  Roy,  pris  et  reçu  le  serment  particullier 

desd.  élizans  qui  ont  aussi  jure  et  affirme  procéder  en  leur 

honneur  et  conscience  a  lad.  nominalion  et  faire  choix  de 

subjets  capables  pour  remplir  lesd  charges,  ù  lefTelde  quoy 


—  74  — 


nous  avons  fait  faire  lecture  par  noti 
d(r  tous  les  habitant,  des  noms  des  é1 
QUAUTÏEH  RO 
M«  Modeste  Aublet,  ancien  éleu,  pou 

CANTONS 

M*=  Sulpice  Legrîs,  notaire. 
Le  s'^  Jean -Claude  Rayer  de  Chi 
quartier, 
Jac(|ucs  Grandiiî,  lieutenant  dud 
Mstjcnne  Nagent,  niarcliand  apoticai 
Kstîenne  Minoit,  marchand. 

QUAIlTIiîR  D  YOÎ 
M"  Jacqueii  Lasscré,  pour  présïdei^ 

CANTONS 

M^  Edme  Hardy,  procureur. 

M'J  Valeatin  Le  gris,  eommissaire 

M^'  Eslîenne  Ttiierriat* 

M'*  Boutet,  nottaire. 

Lq  s^  Lecompte,  bourgeois. 

quartii:r  s*  hiu 

Monsieur  Cottet,  chanoine  et  cun^r, 

CANTONS 

M^  Claude  Toussaint  Marcelat. 
Le  S'  Biaise  Uaudry. 
Le  sieur  Reau^  médecin. 
M**  Savîniên  Mallxé,  bourgeois 
Ij*  sieur  Beiudrot^  bonrge*îis,  lietil 
QUAIITIER  DON. 
T.e  s>    Heciiir   Tliomason,   bourgs 
quartier,  pour  presidenl-ranton. 

CANTONS 

Pierre  I^eour,  niarchnnd. 
Alexis  (iarceau,  ntarcha nd 
tiaspard  Duperai»  marchand 
Jean  Huard,  uiarehaud. 
Louis  Thomas,  marchand. 


-75- 

QUARTIER  S'- BENOIT  ! 

Monsieur  Couste,  sir»*  de  Villiers-Louis,  pour  président-  î 

canton.  I 

CANTONS  ^ 

Me  de  Guyenne,  conseiller.  m 

M«  Lemot,  avocat.  ; 

Le  sr  Larivière,  marchand.   .  *^ 

Le  S""  Guichard,  marchand,  officier  du  quartier.  *' 

Le  sr  Laisné,  marchand.  ^ 

Après  laquelle  lecture  desd.  présidens  et  cantons  lesd.  s'^  ^ 

maire  et  échevins  auroient  fait  ouverture  de  leur  nomina-  î 

tien  à  haute  voix,  chacun  d'eux  en  particulier,  les  prési-  '^ 

dents-cantons  et  cantons  desd.  cinq  quartiers,  chacun  dans  ji 
leur  rang,  ont  pareillement  donné  leur  voix,  le  tout  faisant 
trente-cinq  élizans  à  cause  de  Fabsence  dud.  Maucler,  pro- 
cureur de  ville,  et  lad.  nomination  achevée  et  les  soufrages 
ayant  esté  calculez,  il  s'est  trouvé  trente-deux  voix  pour  la 

continuation  dud.  s"*  Benoîst  pour  maire  de  longue  robbe  j' 

et  desd.  s»*  Fauvelel  de  Chasteau-Majet  pour  échevin  de  Ion-  Ç 

gûc  robbe  et  Fauvelet  du  Toc  pour  échevin  de  courte  r 

robbe,  en  considération  des  services  qu'ils  ont  rendus  pen-  | 

dant  leur  exercice,  pour  deux  autres  années,  sans  néan-  ^ 

moins  tirer  à  conséquence  à  l'avenir,  et,  où  la  continuation  f 

ne  seroit  pas  agréable  au  Roy,  lesd.  élizans  ont  aussi  fait  ^, 

nomination,  suivant  l'usage,  de  trois  subjets  pour  maire  de  ^ 

courte  robbe,  et  de  six  pour  choisir  deux  échevins  de  Ion-  ^ 

gue  robbe,  et  de  trois  subjets  pour  procureur  de  ville,  et  ; 

s'est  trouvé  que  les  plus  hault  en  voix  sont  :  r 

Pour  maire  de  courte  robbe  :  • 

Les  S"  :  Robert  Blenon,  marchand-bourgeois.  * 

Biaise  Baudry,  aussi  marchand-bourgeois,  antien  juge-  t, 

consul  et  Fun  des  gouverneurs  de  THostel-Dieu.  V 

Et  Hector  Thomason,  bourgeois,  capitaine  du  quartier  ;■ 

Donjon,  ayant  chacun  trente-quatre  voix.  r 
Pour  échevins  de  longue  robbe  : 
M^  Gratien  de  la  Gouardière,  cone^ 


i 


¥: 


^^H                            —     — 

^^^H                    W  GûTsemcnt,  con^^ 

^^^H                   Le  S'  Jodrillfit  esteu. 

^^^^1                     M'  Allnin  UuyanK  iiiédecin. 

^^^H                     M'  Jean-Jacques  Souliiran»  a%'oeiit. 

^^^^H                    M*  JatHjues  Le  riche,  procureur,  ayi 

^^^H                 cinq 

^^^H                     Pour  procureur  de  ville  :          ^ 

^^^^B                    Mnsiinulien  PlcrreL                    ^H 

^^^H                     Ednie  B^>ur^Diri.                         ^^Ê 

^^^^Ê                      Et  Louis  le  Cumte.                      ^1 

^^^H                     Led.  PIcrret  ayant  vini^t^neuf  voii 

^^^H                   et  knl.  (c  Comte  dix-huit. 

^^^H^^^^R  **f  M 

^^^V                     Desquelles  nominations,  nous,  prés 

^^^^^^f  - 

rai  susd.,  nous  avons  fait  acte  et  rè 

^Bàii 

verbal    pour  csirc    incessa  ment    ei 

Sa  Majesté,  pour  estrc  fait  choix  le 

maire  de  courte  robbe  dans  le  nom 

^^^^^r* 

échevins  de  longue  robhe  dans  les  s| 

^^^^H  1 

nualion   dcsd.    s^^   Benoïst,    maire, 

Majet,  el  Fauvclet  du  Toc,  échevins, 

h  Sa  Majes(t\  et  d'un  procureur  île  vî 

^^^^^H 

ont  été  uonniiciî  nu  lieu  ci  pkue  dmi. 

exercé  lad.  charge  pendant  les  deux  i 

Dnnnû  et  Trul  aud.  Sens  au  iiûkis  i^ 

^^^^H" 

de  celte  villcj  les  an  el  jour  susd. 

t  Signé  :)  Vesûu  {!»,  Fabiï 

/Bibl.  de  Sens.  Archmcs  du  hanUa0 

m 

Le  tires  tfv  mmvnuiiim  d'tm  tntdn 

vl  d'un  provurvar  d\ 

De  par  le  Boy, 

Sa  Majesté  s'élant  Tait  représenter 

d»  Jiiciiiîri-liflnjr'  Vpïoii»  liciilPtimit-g**»  ini 

i2>  t'rtniicle  rarinnilc.  prtnuli'rnvuçnt  lUi  Ilot 

tri)  Jeun  AuhU^t  profiler  ïlu  bMintii|;(e> 

—  77  — 

►niciers  municipaux  de  la  ville  de  Sens  convoquée  en  la 
iianière  accoutumée,  le  29  décembre  dernier,  dans  laquelle 
Is  auroicnt  élu  trois  sujets  pour  être  présentés  à  Sa  Majesté 
t  être  par  Elle  nommés,  un  d'eux  à  la  charge  de  maire,  six 
ujcts  pour  y  choisir  deux  échevins,  Tun  de  robe  longue  et 
autre  de  robe  courte,  avec  trois  autres  sujets  pour  en  être 
>areillement  choisi  un  pour  remplir  la  charge  de  procureur 
le  lad.  ville,  à  la  place  de  ceux  dont  le  temps  est  expiré, 
>a  Majesté  a  nommé  le  s«"  Fauvelet  de  Chateaumajet  pour 
naire  de  lad.  ville,  le  s»*  Cormier,  notaire,  pour  échevin  de 
•obbe  longue,  le  s»"  Maucler,  marchand,  pour  échevin  de 
•obbe  courte,  et  pour  procureur  d*icelle  le  s'  Blesnon  le 
eune,  marchand.  Veut  et  ordonne  que,  pendant  le  temps  de 
ieux  années,  i)s  en  fassent  les  fonctions  et  jouissent  èsd. 
:]ualités  des  honneurs,  autorités,  rangs,  séances,  préroga- 
tives et  droits  attribués  à  pareilles  charges.  Fait  à  Marly,  le 
>9  janvier  1733.  (Signé  :  )  LOUIS. 

Phelypeaux. 

[Bibl.  de  Sens.  Archives  du  bailliage. J 


j 


_  80  — 

résidait  souvenl  à  la  Casshie  cl  avi 
lion  par  son  inaringc  avec  Marie 
de  Claude  Poissnnnel,  seigneur  d 
luî  apporta  le  peliUlur  voisin  de 
oiilre,  ptiidanl  ses  loisirs,  pouraa 
uïodesle  revenu,  il  s'oecniiail  d 
lîère  et  passa  avec  le  Heignenrdii  ( 
iTiarchés  de  coupes  de  bois,  nolai 
lenoy  en  Um ,  \m2 et  KîU  1  (2). 

D'ailleurs,  les  relations  du 
sine  avec  le  seî^jneurdu  Cliesnoy 
seulement  de  leur  voisinage  et 
rtciprnijues,  ils  s  étaienl  rtncoiï 
temps  sur  les  champs  de  ha  la 
gloire  militaire  de  Louis  XIV;  lui 
court,  s'était  engagé  dans  un  co] 
cheval  levé  en  1657  par  Frauç 
marquis  de  Chazeron,  et  donné 
de  Lyonne,  comte  de  Servnn;  d 
avait  pris  pari  à  la  fameuse  gui 
aux  sanglants  combats  de  Senef,  l{ 
livrée  par  Coudé  (11  août  Iti/l) 
Alsace  sous  les  ordres  de  Tureiii 


nvéc  Mïirîo  Lngtu%  vçiive  de  Jotm  Ptiicli  ci  tuo 

Htc  dts  ctitisifîaprdu  roî,  grcnetlifr  iiugrt*nier  ù 
1721L  (Mîii.  dAntuîïic  Uiaeiiiunt.) 

il,  Lu  ïWf  dt'  Ui  rt!rren!*t  lHuU  silur  à  ijtu'IiiUf» 
CaSMn^t^iir  lu  purtii^si'^  du  Sniiil-MsirtSiïHhi-Torlf 

(i)  At'Cûrd  du  2  d  tic:  l- m  tire  17lOeuLru  NJuohia  tl 
Moiictjurl,  nu  fii^L^t  d'tm  tiiuioIil'  de  bius  h  Qm 
et  riialntevéc  du  'M  iiovundii  e  17 Ki  conccruiltll 
Ctidiilctioy,  fiilleii  un  ll^i  ul  UUÎ,  Min.  d'Anlolj 
—  (Ch.  du*  Sot) 


—  81  — 

victoire  de  Turkheim  (5  janvier  1675),  aux  sièges 
de  Dinanl,  Huy,  Limbourg,  pendant  les  années  1676 
et  1677  à  la  campagne  du  roi  en  Flandre,  aux  prises 
glorieuses  de  Condé,  Bouchain,  Valenciennes, 
Cambrai,  etc.  Nous  le  trouvons  encore  en  1678,  en 
qualité  d'aide  major,  au  siège  de  Gand  (1)  com- 
mandé par  Louis  XIV  en  personne.  Son  régiment 
ayant  été  réformé  un  an  après  la  paix  de  Nimègue 
(10  août  et  17  septembre  1678),  qui  termina  la 
guerre  de  Hollande,  Guillaume  Moncourt  était 
entré  dans  la  compagnie  des  chevaux-légers  de  la 
garde  du  roi. 

Quant  à  son  voisin,  le  seigneur  du  Chesnoy,  qui 
était  à  cette  époque  Nicolas  de  Machat  de  Pompa- 
dour,  baron  de  la  Coste,  il  avait  servi  dans  le  régi- 
ment d'infanterie  de  Piémont,  s'était  trouvé  au  pas- 
sage du  Rhin  (7  juin  1672),  à  la  prise  d'Utrecht,  dans 
l'expédition  de  Zélande,  sous  les  ordres  du  maré- 
chal de  Luxembourg,  puis  Tannée  suivante  aux 
opérations  du  siège  de  Maëstricht  couvertes  par 
Condé.  Son  régiment  après  avoir  été,  de  novembre 
1673  à  mai  1675,  chargé  de  la  garde  de  Maëstricht, 
s'était  rendu  aux  sièges  d'Huy  et  de  Limbourg  où 
se  trouvait  également  le  corps  de  troupes  de  Guil- 
laume Moncourt,  puis  avait  reçu  Tordre  de  retour- 
ner à  Maëstricht  que  le  prince  d'Orange  se  prépa- 


(1)  Acte  de  ratiflcation  du  21  avril  1678,  passé  devant  un  notaire  de  Gand 
par(iuillaumc  Moncourt,  écuyer,  s' de  Villeroy,  aide-major  au  régiment  de 
Scrvon,  et  annexéà  l'acte  de  vente  du  29  juin  1677  au  Séminaire  d'une  mai- 
son à  Sens,  au  coin  do  la  Grande-Rue  et  de  la  rue  du  Tambour-d'Argrnt. 
(Min.  de  Maximilien  Bollognc,  not.  à  Sens.  Ch.  des  Not.) 

6 


—  82  *« 

rail  a  investir.  A  In  dérense  de 
ciiuiLuiiitc  jours  kous  riiabîlc  ci 
(-alvo  (]  K  le  régiment  de  Piémi 
rieLifie;MMcJiat du  l^ompadour, 
tingiui  |Kirticiiliêrunient  le9ao 
lieeoura^iiuscqul  eut  lieu  sous 
el  réussit  à  ruiner  les  ouvragi 
inenaçaictil  le^  remparts  (2).  Ji 
iiiegue,  le  même  régînienl  coin 
du  roi,  la  garde  de  la  cilé  qu  î| 
due.  Après  de  longs  et  brilian 
capitaine  Maehat  de  Ponipad 
nel  de  Tun  des  deux  régi  ni  ei 
généralité  de  Paris  eréés  pa 
2^>  novembre  108H.  La  croix  de 
SaînULouis  devait  également  r 
rense  conduite* 

Tel  était  le  liasse  de  ces  deu 
à  Tépoque  où  se  place  le  peli 
allons  rapporter,  c'est-ii-dire  < 
chat  de  Pompadour,  parven 
certain  âge  (3)  (né  en  août  1039, 
sa  (iO  année),  commençait  à  pr 
niéritéjson  régiment  de  milice 

ir»  Jt?îin-Fr{mcnlN  fl«?  i^nlvc»,  n&  à  Ikirtch 
iiinnt('rt'  \\\  plit^  hrlUnnto  flims  Îû%  gui'rrf>ih  di 
([Il il  au  ^li^i^f*  fie  Maé^liicltt  k  grntk  do  Ifeiil 
^iiruit'c  cil*  rinnilrp. 

{*!)  (ktzetle  ïff  France,  w  JS2  tlu  tO  iicptctnhr 

CA)  ai  M,  Nul.  Omvi,  tlo  (rUojtIcr.  vol  307. 

(1^  ( Utile  un  lUï  cr*  K'gfmtiil*  conif*ri?nrtit  1S 
l.rK  itiilit'rN  fureiU  sii|i[irïtiiiVr,^  nu  nm\%  U'ih 
Mi  m.  ih'  hi  Gi'nfraliit  t*f  PhH*,  \t.  VA  H  155,  ï 


—  83  — 

Moncourl,  plus  jeune,  à  peine  âgé  de  50  ans,  con- 
servait encore  son  service  actif  dans  la  garde  royale, 
mais  venait  souvent  passer  ses  congés  à  Sens  et  à 
la  Cassine,  ils  avaient  ainsi  de  fréquentes  occa.sions 
de  se  retrouver,  tantôt  pour  s'entretenir  de  leurs 
intérêts  et  de  leurs  glorieuses  campagnes,  tanlôt 
pour  se  livrer  au  plaisir  attrayant  de  la  chasse.  Guil- 
laume Moncourt  allait  apprendre  à  ses  dépens  qu'il 
faut  savoir  quelquefois  modérer  son  ardeur  belli- 
queuse. 

Le  4  novembre  1698  (1),  lendemain  de  la  Saint- 
Hubert,  que  nos  amis  voulaient  continuer  à  fêter 
dignement,  ils  sortaient  à  peine  du  Chesnoy,  avec 
rintention  de  se  rendre  à  Paron  en  chassant,  lors- 
qu'un lièvre  se  levait  devant  eux  et  était  immédiate- 
ment poursuivi  par  les  chiens  du  baron  de  la  Cosle. 
Quelques  instants  après,  on  entendait  un  coup  de 
fusil  dans  la  direction  prise  parTanimal  fugitif. 

Surpris  et  furieux  d'une  telle  audace  et  voulant 
savoir  qui  s'était  permis  de  tirer  ainsi  devant  leurs 
chiens,  ils  convinrent  de  se  séparer  et  de  courir, 
chacun  de  son  côté,  pour  s'en  rendre  compte. 
Guillaume  Moncourt  se  dirigea  vers  le  village  de 
Villeroy  et  parvint  bientôt  au  coin  du  bois  de  Chas- 
tenoy,  près  du  grand  chemin  de  Sens;  là,  aperce- 
vant un  nommé  Jean  Hory  qui  labourait  paisible- 
ment son  champ,  s'avança  de  son  cùté  et  lui  de- 
manda s'il  n'avait  pas  vu  tirer  un  lièvre  poursuivi 
par  des  chiens;  celui  répondit  qu'en  efTct  un  lièvie 


(t)  Ribl.de  Sens.  —Archives  du  Bailliage.  —  Dossiciî^  ih  s  iiflniri'f.  crjiiii' 
ncUes.  ' 


—  8V  ^ 

i 
venait  dïirc  lire  tt  lue  et  denijina  eoninic  Til 

de  cet  expliiit  un  homme  que  ïmi  apeicevaii  en 

dans  le  loin ly in  sur  hi  roule,  prés  de  Vilteroy 

Ce  niénie  jour,  M**  Jean  Tliody  (I),  xénît 
cluinoîue  de  rEylise  (jilludralede  Sens,  était  | 
l^aillardemenl  à  pietl  (sour  allerjusqua  Fuuclu 
terre  du  (Uiaintreniélropolitaîn^  mais  ne  seseii 
pas  très  rassuré  sur  la  fiécurité  des  cheminai,  ;i 
en  soin  de  se  munir  d'un  pelil  fusil  ;  api'esavoirs 
le  grnnd  chetniu  tle  la  Hne-Cliévre,  conduisa 
Villei'oy,  il  venail  de  dépasser  te  bois  de  VMmk 
et  entrait  sur  la  terre  de  Villcroy*  appartt*iiani 
Cliapitre,  lorsque  tau!  à  ecnip  se  présentait  à  \ 
pas  de  lui  nu  snptrbe  lièvre  qni  aecourail  | 
ti'a verser  la  roule,  la  tentation  était  trop  Totie  [ 
le  bon  cliauoine!  raeltiT  en  joue  lanimaL  le  i 
1er  propreuient  et  le  ramasser  fut  rafîaîre  t 
instant  ;  il  poursuivit  ensuite  son  chemin  à  une 
allure  jusqu'à  Yilleroy,  y  déposa  son  jiîbier  r 
une  maison  et  se  dirigeait  sur  Fouehéres,  lors 
Guillannie  Muncourt  paivint  a  le  joîndœ.  Qu^ 
passa4<^il  alors  enti*e  nos  deux  personnages?! 
celle  eanq^agnegéuératemetit  déserte,  aucun  tén 
ne  fut  la  pour  le  rapporter, 

(hiillaunie  Moncourt  prélendit  avoir  abordé  i 
veiiablement  M'- Jean  Thodv  eu  lui  demandant 


cliitiiolu»'  il  Min  nni'lf  iiitUrruH,  (^ItiUiii-  TliilifutU,  Ir  2i'p  sr{>1rttifirt 
tiVtjlpuK  um'  crmauilcî  {^iii<fii|>liiiri>  M  %nUll  filunif^tirH  rt'ijHrtiiinji 
Ht7^  |4(  U\7*Jt^  rnlln,  H|>ri^si  ttvnlr  pt'niMiH  dv  Hniiii''iirl(*r  H  rlVnln'r  Uki 
jii^niliiiiïrt\  a  fui  ol>l